Cour d'appel de Paris, 24 novembre 2020, 2018/23477

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2018/23477
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Numéros d'enregistrement : 002621904-0001
  • Parties : FATBOY THE ORIGINAL BV (Pays-Bas) / MANCUP SARL (exerçant sous la dénomination LIVEDECO)
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Paris, 14 septembre 2018
  • Président : Mme Isabelle DOUILLET
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2020-11-24
Tribunal de grande instance de Paris
2018-09-14

Texte intégral

COUR D'APPEL DE PARIS

ARRÊT

DU 24 novembre 2020 Pôle 5 - Chambre 1 (n°127/2020, 12 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 18/23477 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6U6C Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 septembre 2018 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/06334 Société FATBOY THE ORIGINAL BV Société de droit hollandais Immatriculée au Registre du Commerce des Pays Bas sous le numéro 18067153 Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège Het Zuiderkruis 3 5215 MV's HERTOGENBOSCH-PAYS-BAS Représentée par Me François TEYTAUD de l'AARPI TEYTAUD- SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125 Assistée de Me Myriam M de l'ASSOCIATION COUSIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R159 INTIMÉE SARL MANCUP exerçant sous dénomination LIVEDECO Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de GRENOBLE sous le numéro 501 144 216 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège [...] 38120 SAINT EGREVE Représentée par Me Vanessa PERROT, avocat au barreau de PARIS, toque : D2104 Assistée de Me Emmanuel D, avocat au barreau de GRENOBLE COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 14 octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Isabelle DOUILLET, Présidente Mme Françoise BARUTEL, Conseillère Mme Deborah BOHEE, Conseillère qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile. Greffier, lors des débats : Mme K A ARRET : • Contradictoire • par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. • signé par Isabelle DOUILLET, Présidente et par K A, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire EXPOSÉ DU LITIGE Constituée en 2002 aux Pays-Bas, la société FATBOY THE ORIGINAL est spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation d'objets de décoration et de design. Elle se présente comme bénéficiant, du fait de la qualité de ses produits, d'un important succès commercial en France et dans le monde entier. Ses produits sont commercialisés par l'intermédiaire d'un réseau de revendeurs et au moyen de son site internet www.fatboy.com. Au début de l'année 2016, la société FATBOY THE ORIGINAL s'est rapprochée du designer Marijn O, concepteur d'un modèle de siège gonflable déposé auprès de l'EUIPO le 28 janvier 2015 et enregistré sous le n°002621904-0001 lequel lui a cédé l'ensemble de ses droits de propriété intellectuelle dont ceux conférés par le titre précité, aux termes d'un contrat conclu le 12 mai 2016 inscrit sur les registres de l'EUIPO et confirmé aux termes d'une 'Déclaration de transfert des droits de propriété intellectuelle' en date du 30 mai 2016. Le modèle en cause comporte les représentations suivantes : Ce produit est exploité sous la marque 'LAMZAC' dont la société FATBOY THE ORIGINAL est titulaire, et proposé dans une gamme de différentes couleurs à un prix d'environ 75 euros. La société MANCUP SARL, créée en 2007, exerce l'activité de commerce de meubles au détail sous l'enseigne Livedeco. Elle exploite un site internet marchand accessible à l'adresse www.livedeco.com au moyen duquel elle présente et commercialise ses produits. Estimant que la société MANCUP proposait à la vente des sièges gonflables sous une dénomination AIR 52 constituant la copie du modèle précité, la société FATBOY THE ORIGINAL a fait constater ces faits par un procès-verbal dressé le 8 décembre 2016 et réalisé des impressions d'écrans datées du 29 novembre 2016 sur le site internet www.livedeco.com . Elle a ensuite, le 5 décembre 2016, adressé à la société MANCUP une lettre la mettant en demeure de cesser la commercialisation des produits litigieux ainsi que toute publicité s'y rapportant, tout en proposant un règlement amiable des conséquences des agissements reprochés. A défaut de réponse conforme à ses attentes et sur le constat que les actes de commercialisation des produits se poursuivaient, la société FATBOY THE ORIGINAL a par acte d'huissier délivré le 28 avril 2017, fait assigner la société MANCUP en contrefaçon de dessin et modèle communautaire et en concurrence déloyale pour solliciter des mesures réparatrices et indemnitaires. La société MANCUP a demandé que soient écartées des débats des pièces en anglais et en néerlandais non traduites, et formé une demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive. Par jugement du 14 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Paris a rendu la décision suivante : - ECARTE des débats les pièces 31-1, 31-2, 31-4 dans leur intégralité et 39-1, 39-2 et 39-3 pour leur partie en néerlandais; - DEBOUTE la société FATBOY THE ORIGINAL de ses demandes au titre de la contrefaçon du modèle enregistré sous le n° 002621904- 0001; - DEBOUTE la société FATBOY THE ORIGINAL de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire; - REJETTE la demande reconventionnelle de la société MANCUP formée au titre de la procédure abusive; - CONDAMNE la société FATBOY THE ORIGINAL à verser à la société MANCUP une somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile; - REJETTE les autres demandes; - CONDAMNE la société FATBOY THE ORIGINAL aux dépens; - DIT n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire. La société FATBOY THE ORIGINAL a interjeté appel de ce jugement le 02 novembre 2018. Vu les dernières conclusions signifiées par voie électronique le 18 novembre 2019 par la société FATBOY THE ORIGINAL, appelante, qui demande à la cour de - Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société MANCUP de sa demande reconventionnelle formée au titre de la procédure abusive; Statuant à nouveau, - Dire et juger qu'en fabriquant et/ou faisant fabriquer, en important, en détenant, en offrant en vente et en commercialisant au sein de l'Union Européenne des sièges gonflables dits AIR 52 reproduisant les caractéristiques du modèle communautaire n°002621904-001, la société MANCUP s'est rendue coupable d'actes de contrefaçon de ce modèle au détriment de la société FATBOY THE ORIGINAL dans les termes des articles 10 et 19 du Règlement (CE) n°6/2002 et des articles L. 521-1 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle ; - Dire et juger que la société MANCUP s'est également rendue coupable de concurrence déloyale et parasitaire au sens des dispositions de l'article 1240 du Code Civil ; - Faire interdiction à la société MANCUP en France et dans quelque État de l'Union Européenne que ce soit, de fabriquer ou faire fabriquer, détenir, exporter, offrir en vente et/ou vendre des sièges gonflables contrefaisants, sous la dénomination AIR 52, ou toute autre dénomination, et ce, sous astreinte de 1000 € par jour de retard, ou par produit litigieux dont la fabrication, l'importation, la détention, l'offre en vente, et/ou la vente auront pu être constatées postérieurement à la signification de l'arrêt à intervenir, et préciser que cette astreinte sera provisoire pendant une durée de deux mois à dater de la signification de l'arrêt à intervenir et qu'il sera ensuite statué par la Chambre de la Cour de céans qui aura rendu l'arrêt ; - Ordonner la confiscation et la remise à la société FATBOY THE ORIGINAL, en vue de leur destruction sous contrôle d'huissier de Justice, aux frais de la société MANCUP, de tous les produits contrefaisants détenus par l'intimée au jour de la signification de l'arrêt à intervenir ; - Ordonner le rappel des circuits commerciaux des produits litigieux en France et dans tout autre pays de l'Union Européenne où ils pourraient être distribués, aux frais de la société MANCUP; - Condamner la société MANCUP à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL la somme de 30.000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice moral résultant des faits de contrefaçon commis ; - Condamner la société MANCUP à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL la somme de 20.000 € de dommages et intérêts à titre provisionnel, au titre du préjudice commercial découlant de la contrefaçon, sauf à parfaire ; - Ordonner à la société MANCUP, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, à défaut de communication complète et certifiée par celle-ci, de produire sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, tous documents comptables et commerciaux permettant de déterminer exactement et de manière certifiée le nombre de produits contrefaisants importés, détenus, achetés et/ou offerts en vente et vendus en France et dans toute l'Union Européenne et notamment : - factures d'achats et de ventes complètes, - l'ensemble des bons de commandes, - déclarations d'importation en douane, - documents de connaissement maritime, - État exact et certifié des stocks, - extraits de la comptabilité de la société MANCUP, - extraits du logiciel de gestion des stocks de la société MANCUP, tous ces documents devant être certifiés par l'expert-comptable ou le commissaire aux comptes de la société MANCUP ; - Condamner la société MANCUP à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL la somme de 50.000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice résultant des faits de concurrence déloyale et de parasitisme ; - Ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux ou périodiques, aux frais de la société MANCUP, et au choix de la société FATBOY THE ORIGINAL et ce, à titre de complément de dommages intérêts, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder 3.000€ HT ; - Ordonner la publication du dispositif de l'arrêt à intervenir sur la page d'accueil du site Internet www.livedeco.com, en haut de page, en police de caractères times new roman de taille 13, et ce pour une durée de 3 mois passé un délai de 8 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte définitive de 2.000 € par jour de retard, - Dire et juger que le Conseiller de la Mise en État de la Cour de céans se réservera la liquidation de l'ensemble des astreintes ainsi ordonnées ; - Condamner la société MANCUP à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL la somme de 30.000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ; - Condamner la société MANCUP à rembourser à la société FATBOY THE ORIGINAL tous les frais de constat préalables à l'assignation introductive de la présente instance ; - Condamner la société MANCUP aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Maître François TEYTAUD (AARPI TEYTAUD-SALEH), Avocat postulant, en application de l'article 699 du Code de Procédure Civile. Vu les dernières conclusions signifiées par voie électronique le 08 juin 2020 par la société MANCUP, intimée qui demande à la cour de: - CONFIRMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS en date du 14 septembre 2018 en ce qu'il a : - Écarté des débats les pièces 31-1, 31-2, 31-4 dans leur intégralité et 39-1, 39-2 et 39-3 pour leur partie en néerlandais ; - Débouté la société FATBOY THE ORIGINAL de ses demandes au titre de la contrefaçon du modèle enregistré sous le n° 002621904- 0001 ; - Débouté la société FATBOY THE ORIGINAL de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ; - Condamné la société FATBOY THE ORIGINAL à verser à la société MANCUP une somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; - Condamné la société FATBOY THE ORIGINAL aux dépens ; - REFORMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de PARIS en date du 14 septembre 2018 en ce qu'il a : - Rejeté la demande reconventionnelle de la société MANCUP formée au titre de la procédure abusive ; Y AJOUTANT : - CONSTATER que les pièces adverses n°19, 20, 27, 31, 32, 33 et 39-1 à 39-3 ne sont pas traduites en langue française, ou pas intégralement, de sorte que le principe du contradictoire n'est pas respecté

; En conséquence

, - ECARTER des débats les pièces adverses n°19, 20, 27, 31, 32, 33 et 39-1 à 39-3 ; - DIRE ET JUGER qu'en important, détenant, offrant en vente et commercialisant les sièges gonflables AIR52, la société MANCUP n'a pas commis d'acte de contrefaçon du modèle communautaire n°002621904-001 et du modèle communautaire non enregistré au préjudice de la société FATBOY THE ORIGINAL ; - DIRE ET JUGER que la société MANCUP ne s'est pas rendue coupable de concurrence déloyale et parasitaire ; En tout état de cause, - CONSTATER que la demanderesse ne justifie pas des investissements réalisés de sorte qu'aucun acte de concurrence déloyale et parasitaire ne peut être retenu à l'encontre de la société MANCUP ; En conséquence, - DEBOUTER la société FATBOY THE ORIGINAL de l'intégralité de ses demandes ; - CONDAMNER la société FATBOY THE ORIGINAL à payer à la société MANCUP la somme de 50.000 € pour procédure abusive et injustifiée ; - CONDAMNER la société FATBOY THE ORIGINAL à payer à la société MANCUP la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés par elle en cause d'appel ; - CONDAMNER la société FATBOY THE ORIGINAL à rembourser à la société MANCUP les frais de constat d'huissier engagés par elle ; - CONDAMNER la société FATBOY THE ORIGINAL aux entiers dépens. L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 juin 2020. MOTIFS DE L'ARRÊT En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément envoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées. - Sur la demande de rejet de pièces non traduites : La société MANCUP réitère sa demande consistant à voir retirer des débats les pièces en langue étrangère non traduites. Elle relève également que les pièces 39-1 à 39-3 ne sont traduites que partiellement et demande donc le retrait des pièces adverses n°19, 20, 27, 31, 32, 33 et 39-1 à 39-3. En cause d'appel, la société FATBOY THE ORIGINAL souligne avoir retiré des débats les pièces 31-1, 31-2 et 31-4, et fournit une traduction en langue française pour les pièces 39-1 à 39-3, de sorte qu'il n'y a donc pas lieu d'écarter des débats les pièces ainsi produites, selon elle. L'article 16 du code de procédure civile dispose que 'Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.' L'ordonnance de Villers-Cotterêts impose que les décisions soient prononcées en français mais n'interdit pas la production de pièces en langue étrangère dès lors que le tribunal et les parties les comprennent et peuvent en débattre contradictoirement. En l'espèce, les pièces 31-1, 31-2 et 31-4 versées en première instance et écartées des débats par le tribunal car rédigées en langue néerlandaises n'ont pas été produites en cause d'appel. Néanmoins, il convient de confirmer la décision rendue par le tribunal s'agissant de pièces écrites dans une langue non comprise par les parties en cause et qui n'ont pu faire l'objet d'un débat contradictoire. La société FATBOY THE ORIGINAL a également versé en pièce 19, le recours devant l'EUIPO de la société HIRAMS TRADE contre le modèle invoqué et, en pièce 20, son mémoire en réponse, rédigés en langue anglaise. Ces documents sont longs (31 pages pour l'un et 17 pages pour l'autre) et contiennent des considérations techniques qui ne sont pas aisément compréhensibles et ne permettent pas aux parties d'en débattre contradictoirement, faute d'avoir été préalablement traduites. En conséquence, ces pièces doivent être écartées des débats, et le jugement rendu sur ce point doit être infirmé. La pièce 27, rédigée en langue néerlandaise, est une ordonnance sur requête rendue par le juge des référés du tribunal de première instance de LA HAYE du 18 mai 2017 qui a fait l'objet d'une traduction libre en français, mais la requête jointe n'est pas traduite et doit donc être écartée des débats, la défenderesse, comme la cour, n'étant pas en mesure d'en saisir la portée. Les pièces 31, 32 et 33, soit le recours en nullité de M. Christoph J contre le modèle invoqué, puis la notification par l'EUIPO du retrait de ce recours en nullité et la notification par l'EUIPO de l'enregistrement de la décision du 13 octobre 2017 de la juridiction danoise statuant sur le retrait d'un recours en nullité, sont en langue anglaise mais contiennent des informations brèves et aisément compréhensibles. Les pièces 39-1 à 39-3, relatives aux investissements réalisés par la société FATBOY THE ORIGINAL pour les années 2016 et 2017, comportent des parties rédigées en anglais, en français et en néerlandais. À hauteur de cour, la société FATBOY THE ORIGINAL a fait traduire le tableau synthétisant l'ensemble des dépenses détaillées ensuite et reprises dans les factures, annexées à la suite. Ces pièces ne seront donc retenues que pour la synthèse traduite et les factures françaises et anglaises, (pages 1, 2 43, 44 et 46 de la pièce 39-1, pages 1, 23, 24, 25, 30, 31 de la pièce 39-2, pages 1, 3, 7, 8, 9, 10 et 24 de la pièce 39-3) qui ne posent pas de difficultés de compréhension, l'ensemble des pièces en néerlandais devant être écarté. En conséquence, doivent être écartées des débats les pièces 31-1, 31-2, 31-4, 19 et 20 dans leur intégralité et les pièces 27, 39-1, 39-2 et 39-3 pour leur partie rédigée en langue néerlandaise, le jugement entrepris étant donc confirmé en ce qu'il a écarté les pièces 31-1, 31- 2, 31-4 dans leur intégralité et 39-1 à 39-3 pour leur partie en néerlandais mais infirmé en ce qu'il n'a pas écarté des débats les pièces 19 et 20 intégralement rédigées en anglais et la partie néerlandaise non traduite de la pièce 27. - Sur les actes de contrefaçon : La société FATBOY THE ORIGINAL met en avant le degré élevé de liberté que les concepteurs de sièges de type chaise longue ont dans la création de l'objet. Elle souligne que des différences minimes ne peuvent exclure la contrefaçon lorsque toutes les caractéristiques conférant son impression globale au modèle protégé sont reprises. Elle déduit de la comparaison entre les deux sièges l'existence d'une impression visuelle d'ensemble hautement similaire et la caractérisation des faits de contrefaçon, de sorte qu'elle demande l'infirmation du jugement. Pour la société MANCUP, les caractéristiques de forme du siège gonflable, à savoir un tube replié sur lui-même, relié par une couture centrale suscitant la formation d'une fente et refermé en son extrémité par une sangle, ne doivent pas être prises en compte en raison de leur caractère fonctionnel. Elle relève également qu'en prétendant que chaque modèle doit être examiné globalement sans tenir compte des différences de détails, la société FATBOY THE ORIGINAL souhaite interdire à ses concurrents de commercialiser n'importe quel siège gonflable. La société MANCUP liste les différences existant entre son siège et le modèle protégé, soit l'extrémité particulièrement visible de forme carrée, la présence du logo 'AIR 52" et de poches latérales, pour en déduire une impression visuelle globale différente pour un utilisateur averti, de sorte que les faits de contrefaçon ne sont pas établis et demande la confirmation du jugement sur ce point. En vertu de l'article 8 du règlement CE 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires, ' Un dessin ou modèle communautaire ne confère pas de droits sur les caractéristiques de l'apparence d'un produit qui sont exclusivement imposées par sa fonction technique. ' Et selon l'article 10, 'Étendue de la protection - 1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente. 2. Pour apprécier l'étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle.' En vertu de l'article 19§1 du même règlement, le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de cette disposition, on entend en particulier 'la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation ou l'utilisation d'un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins'. Puis, selon l'article L.515-1 du code de la propriété intellectuelle : 'Toute atteinte aux droits définis par l'article 19 du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. ' La comparaison présidant à l'appréciation de l'impression globale suscitée chez l'utilisateur ou l'observateur averti s'opère entre les représentations figurant au dépôt, indépendamment des conditions de commercialisation, et l'apparence du produit commercialisé par la défenderesse. Elle est réalisée en considération de toutes les caractéristiques dominantes prises dans leur combinaison et non isolément à l'exception de celles exclusivement asservies à une fonction technique. L'utilisateur averti est ici celui auquel le produit, soit un matelas gonflable, est destiné. Il peut en être l'utilisateur final mais aussi le vendeur. Le modèle revendiqué par la société FATBOY THE ORIGINAL déposé le 28 janvier 2005 se présente comme une forme tubulaire pliée en deux, formant à une extrémité un côté pointu percé par une fente en son centre, correspondant au côté replié, et offrant à l'autre extrémité un système de fermeture enroulable afin de relier les deux extrémités du tube entre elles, de capturer et conserver l'air pour lui donner son volume, tel qu'il ressort sur la copie du dépôt de modèle notamment en pages 3, 4 et 6, de la pièce 2 de la société FATBOY THE ORIGINAL. Le siège AIR 52 commercialisé par la société MANCUP se présente comme deux formes tubulaires allongées et solidarisées entre elles se terminant à une extrémité par un côté plat, et de l'autre, incorporant un système de fermeture enroulable permettant de relier les deux extrémités des tubes au moyen d'une sangle fermée par un clip tel qu'il ressort du constat d'huissier de justice du 8 décembre 2016, et notamment page 18, dans la pièce 15 de la société FATBOY THE ORIGINAL. Les seules contraintes techniques sont liées à la fonctionnalité du produit, qui, s'agissant d'un matelas gonflable, doit être de contenir assez d'air pour supporter le poids d'un être humain et être suffisamment grand pour qu'il puisse s'y asseoir ou s'y coucher, de sorte que la liberté du créateur est grande. Des différences mineures entre le modèle et le siège contesté sont donc insuffisantes pour produire des impressions globales différentes sur l'utilisateur averti. Dans le modèle revendiqué par la société FATBOY THE ORIGINAL et tel que déposé, les extrémités de chaque élément tubulaire se rejoignent pour former un sommet unique donnant au siège une forme très pointue, mise en évidence sur les représentations 0001.3, 0001.4 et 0001.5 du titre invoqué, à la façon d'un kayak ou d'une ogive. Cette forme très caractéristique est visible sous de multiples angles de vue et pas uniquement vu du dessus du siège, et, ce, même si une personne s'y trouve allongée, contrairement à ce que soutient la société FATBOY THE ORIGINAL. Or, sur le produit AIR 52, les deux tubes latéraux se rejoignent en une partie perpendiculaire plate avec deux sommets donnant à cette partie du siège une forme très carrée, elle aussi visible selon différents angles de vue. Au vu de cette configuration, le matelas AIR 52, à la différence du modèle LAMZAC, semble être un coussin composé de trois côtés. Cette caractéristique, loin d'être insignifiante ou de constituer un élément isolé, comme le soutient la société FATBOY THE ORIGINAL, s'impose au contraire au regard, de sorte que le siège de la société MANCUP produira sur l'utilisateur averti une impression globale différente de celle procurée par le modèle protégé. Pour contester la décision du tribunal, la société FATBOY THE ORIGINAL met en avant une première série de décisions émanant de juridictions européennes ayant statué dans des dossiers de contrefaçons similaires, selon elle, et lui ayant donné raison. Cependant, la cour constate que les modèles en cause ne présentent pas la même configuration que le matelas AIR 52, notamment quant à sa forme carrée, au vu des photographies insérées dans les décisions citées ou dans les conclusions de la société FATBOY THE ORIGINAL. Par ailleurs, l'appelante oppose une décision de l'EUIPO du 26 mars 2018 rendue à l'encontre d'une société italienne PLAN, titulaire d'un modèle dont elle estime qu'il est similaire à l'AIR 52 de la société MANCUP. Néanmoins, cette décision s'inscrit dans un contexte juridique différent puisqu'il s'agit d'un recours en annulation contre un modèle déposé et que la forme carrée d'une des extrémités du produit en cause apparaît nettement moins marquée que pour le matelas AIR 52. Enfin, si la société FATBOY THE ORIGINAL cite une série de décisions émanant de juridictions françaises lui ayant donné raison dans divers contentieux en contrefaçon du modèle LAMZAC, la cour relève que les modèles jugés contrefaisants présentaient une forme tout à fait différente du matelas contesté. En conséquence, il convient de rejeter les demandes en contrefaçon formulées par la société FATBOY THE ORIGINAL et de confirmer le jugement sur ce point. - Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire : La société FATBOY THE ORIGINAL soutient que les similarités existant entre son modèle et le siège AIR 52 et leur présentation identique sur les sites de vente en ligne, démontrent que la société MANCUP a tout fait pour se rapprocher de son modèle créant manifestement un risque de confusion afin d'opérer un détournement de clientèle. De plus, l'appelante souligne que le produit concurrent affiche un prix de 70 € remisé à 49,90 €, alors qu'il n'a jamais été vendu à ce prix initial. Elle en déduit que ce procédé est constitutif de pratique commerciale déloyale et trompeuse au sens du code de la consommation. Enfin, la société FATBOY THE ORIGINAL estime que le comportement de l'intimée vise à se placer dans son sillage, alors qu'elle a réalisé des investissements très importants, les faits de parasitisme étant ainsi constitués. La société MANCUP reprend le raisonnement du tribunal pour souligner que la similarité des présentations est habituelle dans le secteur des chaises longues. Elle estime, dès lors, n'avoir commis aucune faute constitutive de concurrence déloyale. S'agissant du parasitisme, la société MANCUP souligne que la société FATBOY THE ORIGINAL ne démontre pas qu'elle se serait placée dans son sillage. La concurrence déloyale et le parasitisme sont pareillement fondés sur l'article 1240 du code civil mais sont caractérisés par l'application de critères distincts, la concurrence déloyale l'étant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d'autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d'un savoir- faire, d'un travail intellectuel et d'investissements. Ces deux notions doivent être appréciées au regard du principe de la liberté du commerce et de l'industrie qui implique qu'un produit qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit ou par l'existence d'une captation parasitaire, circonstances attentatoires à l'exercice paisible et loyal du commerce. En l'espèce, si la présentation des produits AIR 52 faite par la société MANCUP sur internet, (et notamment en pièces 14 et 15 de la société FATBOY THE ORIGINAL ) est assez similaire à celle de l'appelante, s'agissant de l'organisation des vignettes présentant les articles ou les gammes de couleur, il n'en demeure pas moins, comme l'a justement retenu le tribunal, que ce type d'affichage est habituel pour proposer à la vente divers produits en matière de mobilier ou de décoration, très souvent, déclinés en vignettes du même type et avec la même gamme de couleurs vives. Aucun comportement fautif ne peut en conséquence être reproché à la société MANCUP sur ce point. Puis, si la société FATBOY THE ORIGINAL justifie de l'existence d'investissements pour faire connaître et promouvoir son matelas 'LAMZAC', qui a fait, par ailleurs, l'objet de récompenses en 2016 et 2017, il n'en demeure pas moins qu'au regard des différences relevées entre les deux produits en cause, il n'est pas établi que le consommateur intéressé par le produit de la société FATBOY THE ORIGINAL soit incité à choisir indifféremment celui de son concurrent. Par ailleurs, la notoriété invoquée par l'appelante n'est étayée par aucune étude, alors que la société intimée démontre que différents types de hamacs gonflables reprenant les caractéristiques du modèle 'LAMZAC' ou celle de son produit AIR 52 sont commercialisés sur de nombreux sites concurrents depuis l'année 2017. Il ne peut donc être reproché à la société MANCUP de commercialiser un produit concurrent mais différent de celui de la société FATBOY THE ORIGINAL. À hauteur d'appel, la société FATBOY THE ORIGINAL soutient que la société MANCUP tromperait les consommateurs en affichant des prix qu'elle présenterait comme faussement promotionnels, dénonçant également une pratique commerciale déloyale. Cependant, force est de constater que la société FATBOY THE ORIGINAL ne verse aucun élément de preuve tendant à démontrer que les rabais affichés par la société MANCUP sur le prix de vente seraient mensongers et destinés à tromper ou à attirer la clientèle. En conséquence, il convient de débouter la société FATBOY THE ORIGINAL de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire et de confirmer le jugement rendu sur ce point. - Sur la demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive : La société MANCUP soutient que la procédure intentée par la société FATBOY THE ORIGINAL est excessive et injustifiée, ce qui génère un préjudice important pour elle, d'autant qu'elle souligne avoir répondu favorablement aux demandes de l'appelante en cessant la commercialisation des produits, en détruisant son stock et en communiquant les pièces comptables en justifiant. Elle demande donc 50.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil. La société MANCUP demande la confirmation du jugement sur ce point en relevant que la procédure engagée est loyale et qu'aucune faute n'a été commise. L'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit qui ne dégénère en abus, pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts, que lorsque la preuve d'une faute est rapportée. En l'espèce, s'il convient de relever que, suite à la mise en demeure adressée par la société FATBOY THE ORIGINAL, la société MANCUP a retiré de la vente les produits en cause et a justifié par un constat d'huissier de justice du 4 mai 2017 avoir détruit les produits qu'elle conservait en stock (pièce 4 de la société MANCUP), il n'en demeure pas moins que, de son côté, la société FATBOY THE ORIGINAL se prévaut de plusieurs décisions rendues par des juridictions européennes relatives à des produits présentant des caractéristiques proches du produit vendu par la société MANCUP et a ainsi pu se méprendre sur l'étendue de ses droits, de sorte qu'il n'est pas établi que la société FATBOY THE ORIGINAL ait agi dans l'unique intention de nuire ou avec une légèreté blâmable. Son action ne peut donc être qualifiée d'abusive et le jugement entrepris est confirmé sur ce point. La demande en ce qu'elle est formée au titre de la procédure d'appel sera également rejetée. - Sur les autres demandes: Il convient d'abord de confirmer les dispositions du jugement de première instance concernant les dépens et les frais irrépétibles. Ensuite, la société FATBOY THE ORIGINAL, partie perdante, sera condamnée aux dépens et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance. Enfin, l'équité et la situation des parties commandent de condamner la société FATBOY THE ORIGINAL à verser à la société MANCUP une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais de constats d'huissier (constats des 4 et 8 mai et 15 décembre 2017, 13 juin 2019 et 19 mars 2020), le jugement étant infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement des frais de constats d'huissier.

PAR CES MOTIFS

. LA COUR, Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, sauf en ce qu'il n'a pas écarté des débats les pièces 19 et 20 et la partie néerlandaise non traduite de la pièce 27 et a rejeté la demande de la société MANCUP concernant le remboursement des frais de constats d'huissier de justice engagés, Statuant à nouveau, Écarte des débats la partie en néerlandais de la pièce 27 et les pièces 19 et 20 non traduites en français, Y ajoutant, Déboute la société MANCUP de sa demande pour procédure abusive, Condamne la société FATBOY THE ORIGINAL au paiement des dépens de l'instance, Condamne la société FATBOY THE ORIGINAL à verser à la société MANCUP une somme de 10.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais des constats d'huissier des 4 et 8 mai et 15 décembre 2017, 13 juin 2019 et 19 mars 2020.