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Tribunal administratif de Toulon, 3ème Chambre, 1 décembre 2023, 2200914

Mots clés
service • rapport • rejet • requête • ressort • reconnaissance • remboursement • saisie • pool • réparation • requis

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Toulon
  • Numéro d'affaire :
    2200914
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Rapporteur : Mme Montalieu
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : OTT-RAYNAUD
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête, enregistrée le 4 avril 2022, Mme A B, représentée par Me Ott-Raynaud, demande au tribunal : 1°) d'ordonner avant-dire droit une expertise médicale psychiatrique ; 2°) d'annuler la décision du 22 février 2022 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Hyères a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie ; 3°) d'enjoindre au directeur du centre hospitalier de Hyères de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie et, par conséquent, de la placer rétroactivement en position de maladie imputable au service ; 4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Hyères la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ; - elle est insuffisamment motivée en fait ; le directeur n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ; il s'est estimé lié par l'avis de la commission de réforme ; - elle est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que ne siégeait pas de médecin spécialiste de son affection à la séance de la commission de réforme réunie le 27 janvier 2022 ; le dossier transmis à la commission était incomplet en l'absence de rapport établi par le médecin du travail ; - elle est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que son état anxio-dépressif est en lien direct avec l'accident survenu le 19 décembre 2017 et les dysfonctionnements et incidents graves intervenus par la suite dans le service. Par un mémoire en défense, enregistrés le 2 juin 2022, le centre hospitalier de Hyères conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés. Par une ordonnance du 2 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 octobre 2023. Des pièces complémentaires présentées par le centre hospitalier de Hyères, enregistrées le 9 novembre 2023, n'ont pas été communiquées. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ; - la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; - la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Montalieu, rapporteure, - les conclusions de M. Kiecken, rapporteur public, - et les observations de Me Roure, substituant Me Ott-Raynaud, représentant Mme B, et de Mme C, représentant le centre hospitalier de Hyères.

Considérant ce qui suit

: 1. Mme B, aide-soignante au sein du centre hospitalier de Hyères depuis juillet 2004 et affectée au sein du " service du pool " depuis janvier 2009, a été placée en congé longue durée à compter du 3 février 2018. Estimant que son état anxio-dépressif était lié au service, elle a demandé au centre hospitalier, le 6 avril 2021, de reconnaître sa pathologie comme maladie professionnelle. Le 27 janvier 2022, après expertise médicale, la commission de réforme a émis un avis défavorable. Par une décision du 22 février 2022, le directeur du centre hospitalier de Hyères a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie. Sur les conclusions aux fins d'annulation : 2. En premier lieu, aux termes de l'article 15 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le secrétariat de la commission informe () le médecin du travail, pour la fonction publique hospitalière, compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission. () Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous. ". Et aux termes de l'article 21 de ce même arrêté : " La commission de réforme donne son avis sur l'imputabilité au service ou à l'un des actes de dévouement prévus aux articles 31 et 36 du décret du 26 décembre 2003 susvisé de l'infirmité pouvant donner droit aux différents avantages énumérés à l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisé et aux articles 41 et 41-1 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée. () ". 3. Il résulte des dispositions précitées que la consultation du médecin du travail est constitutive d'une garantie pour le fonctionnaire demandant le bénéfice des dispositions de l'article 41 de la loi du la loi du 9 janvier 1986. Dans ce cadre, le médecin du travail doit remettre à la commission de réforme un rapport écrit et peut, s'il le demande, obtenir communication du dossier de l'intéressé, présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. 4. En l'espèce, il est constant que la commission de réforme, qui a examiné la situation de la requérante le 27 janvier 2022, n'a pas disposé d'un rapport du médecin du travail. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que Mme B a présenté sa demande de reconnaissance d'une maladie professionnelle en invoquant notamment " des suites répétées anorma[les] d'incidents et dysfonctionnements grave du service dans le temps, en lien direct avec l'accident de service du 19 décembre 2017 ". La garantie pour l'agent étant que la commission soit suffisamment éclairée sur l'organisation et les conditions de travail ainsi que sur ses missions, le centre hospitalier ne saurait se prévaloir de ce que le médecin du travail a exprimé, à trois reprises dont une postérieure à l'avis de la commission, un avis défavorable à la reconnaissance d'une imputabilité au service. Par suite, eu égard aux éléments de contexte professionnel invoqués par Mme B, l'absence de respect des prescriptions précitées a été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à la priver d'une garantie et le moyen tiré du vice de procédure doit être accueilli. 5. En second lieu, l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 21 bis, aujourd'hui codifié à l'article L. 822-20 du code de la fonction publique, aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / (.) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée par un tableau peut être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est directement causée par l'exercice des fonctions. / Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ". L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 a aussi, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions des lois du 11 janvier 1984, du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 régissant respectivement la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que : " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : " à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4°, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée ". 6. Il ressort des pièces du dossier que la date de première constatation médicale du syndrome anxio-dépressif dont souffre Mme B a été fixée au 19 mars 2018 par le certificat médical initial de maladie professionnelle. Par suite, l'intéressée doit être regardée comme entièrement régie par les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017. 7. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986, dans leur rédaction alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : / () ; / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. () ". Aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, () ". 8. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement ou d'une telle maladie, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. 9. En l'espèce, Mme B soutient que le syndrome anxio-dépressif dont elle souffre résulte de l'annonce du rejet de sa candidature à un poste d'aide-soignante dans un autre service, intervenue le 19 décembre 2017 et particulièrement inattendue dès lors que la cadre dudit service lui avait laissé comprendre que sa candidature allait être retenue, ainsi que du comportement des agents du centre hospitalier à la suite de cet évènement. Elle soutient en effet que les agents, et en particulier ses supérieurs hiérarchiques et le médecin du travail, ont manifesté du mépris à son égard et ont ignoré la dégradation de son état de santé survenue à la suite du rejet de sa candidature. Toutefois, ni le certificat établi par son médecin généraliste indiquant seulement qu'elle ne présentait pas d'antécédent de maladie psychique, ni l'attestation d'une personne l'ayant accompagnée à un rendez-vous professionnel à l'hôpital, lequel s'est au demeurant déroulé à une date postérieure à celle du diagnostic de la pathologie, ni aucun autre élément produit par la requérante ne vient au soutien des faits qu'elle allègue. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état anxio-dépressif dont souffre Mme B présenterait un lien direct avec un contexte professionnel de nature à imputer cette pathologie au service au sens et pour l'application des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation qu'aurait commise le directeur du centre hospitalier de Hyères en refusant de reconnaître l'existence d'une maladie professionnelle doit être écarté. 10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner avant-dire droit une expertise ni d'examiner les autres moyens de légalité externe, que la décision du 22 février 2022 ne peut être annulée que pour un seul vice de procédure. Sur les conclusions aux fins d'injonction : 11. Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ". 12. Le présent jugement implique seulement mais nécessairement que le directeur du centre hospitalier de Hyères réexamine, après mise en œuvre d'une procédure régulière, la demande de Mme B, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement. Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier de Hyères une somme de 1 200 euros à verser à Mme B sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La décision du 22 février 2022 est annulée. Article 2 : Il est enjoint au directeur du centre hospitalier de Hyères de réexaminer, après mise en œuvre d'une procédure régulière, la demande de Mme B dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement. Article 3 : Le centre hospitalier de Hyères versera à Mme B une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 5 : Le présent jugement sera notifié à Mme A B et au centre hospitalier de Hyères. Copie en sera adressée au préfet du var. Délibéré après l'audience du 9 novembre 2023, à laquelle siégeaient : M. Harang, président, M. Karbal, conseiller, Mme Montalieu, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2023. La rapporteure, Signé M. MONTALIEU Le président, Signé Ph. HARANG La greffière, Signé A. CAILLEAUX La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière,

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