LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 mai 2009) rendu sur renvoi après cassation (Soc. n° K 06-45. 941), que Mme X... a été engagée par la société Solaris par contrat de travail du 25 février 2002 en qualité de vendeuse, affectée à la boutique d'Orly ; qu'elle a été informée au cours d'un entretien tenu le 17 octobre 2002 de son affectation sur le site de Roissy à compter du 24 octobre 2002 ; qu'après avoir refusé son changement d'affectation, Mme X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Attendu que la société Solaris fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail la liant à Mme X... à ses torts et de la condamner à lui payer diverses sommes à titre d'indemnités compensatrices de préavis et de congés payés afférents, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, de rappel de salaire et des congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges du fond, qui retiennent que l'employeur a fautivement opéré un changement de lieu d'affectation d'un salarié dans un même secteur géographique en raison d'un délai de prévenance trop bref, ne peuvent se borner à constater la situation familiale du salarié et son précédent lieu d'affectation, sans caractériser, par des constatations de fait, en quoi un délai de prévenance plus long que celui mis en oeuvre par l'employeur s'imposait dans les circonstances de l'espèce ; qu'en se bornant à constater que Mme X... travaillait à l'aéroport d'Orly et avait un enfant de 13 mois, sans énoncer la moindre circonstance de fait justifiant que son affectation à l'aéroport de Roissy impliquait un délai de prévenance de plus de sept jours, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et suivants du code du travail ;
2°/ que les juges du fond sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont saisies ; que le défaut de réponse aux conclusions équivaut à leur absence ; que par ses conclusions d'appel, elle faisait expressément valoir pour démontrer que le changement d'affectation avait été décidé dans des conditions régulières, que " Mme X... réside à Paris et se rendait au magasin d'Orly en transports en commun ; d'autre part, le temps de transport entre son domicile et le magasin d'Orly/ le magasin de Roissy est identique ; enfin, ses horaires de travail n'ont pas été modifiés " ; que ces conclusions étaient de nature à justifier qu'en tenant compte de la situation familiale de la salariée, un délai de prévenance de sept jours était suffisant avant son affectation au magasin de Roissy compte tenu du lieu du domicile de la salariée, du temps de transport identique et des horaires inchangés ; qu'en s'abstenant d'y répondre, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, violant ainsi l'article
455 du code de procédure civile ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions dont ils sont saisis ; que par ses conclusions régulièrement déposées devant la cour d'appel, elle contestait expressément les affirmations de Mme X... relatives aux circonstances dans lesquelles son changement d'affectation était intervenu ; qu'ainsi, elle exposait que " devant la cour d'appel, et alors qu'elle ne l'avait pas fait devant le conseil de prud'hommes, Mme X... invoque différents arguments :- elle ne disposerait pas de badge d'accès et méconnaîtrait le lieu exact du magasin,- son affectation serait en réalité des représailles de son employeur pour avoir dénoncé le comportement de M. Y..., pouvant justifier-selon elle-son refus de se rendre à Roissy. Aucun n'est sérieux et ne pourra retenir l'attention de la cour " ; qu'en retenant cependant que les affirmations de Mme X... sont " non réellement déniées par l'employeur " pour en déduire le bien fondé de la thèse de la salariée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions dont elle était saisie, violant ainsi les articles
4 du code de procédure civile et
1134 du code civil ;
Mais attendu que le moyen, sous couvert d'un défaut de base légale, d'un défaut de motif et de dénaturation, revient à remettre en discussion l'appréciation, par la cour d'appel, des éléments de fait dont elle a déduit qu'en imposant à la salariée une mutation d'Orly à Roissy, avec un simple délai de prévenance de sept jours en conséquence de la dénonciation qu'elle avait faite du comportement fautif de son supérieur hiérarchique, l'employeur avait commis un abus dans la mise en oeuvre de la modification des conditions de travail de Mme X... ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Solaris aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et signé par Mme Mazars, conseiller doyen faisant fonction de président et par M. Chollet, conseiller le plus ancien en ayant délibéré conformément à l'article
452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la société Solaris
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant Madame Niamh X...à la Société SOLARIS aux torts de l'employeur et d'AVOIR condamné la Société SOLARIS à verser à Madame X...diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement, de rappel de salaire et de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE les affirmations de Madame X... non réellement déniées par l'employeur, sont confortées par celle du témoin quant aux similitudes dans le déroulement des faits ; que le changement d'affectation de Madame X... a été réalisé dans une certaine précipitation, le nom de celle-ci figurant sur les plannings du site d'ORLY pour la période du 7 octobre 2002 au 31 novembre 2002 ; que sur ces mêmes plannings, sont programmés le départ de Mademoiselle Z... le 7 octobre 2002 et l'embauche de Monsieur C...le 1er novembre 2002 ; que le caractère prévisionnel de ces plannings établis un mois à l'avance, selon les informations fournies par Monsieur Y..., dans une attestation régulièrement versée aux débats, ne vient qu'étayer le caractère précipité du changement d'affectation de Madame X..., le départ de cette dernière n'étant nullement programmé au moment de l'établissement du planning ; que Madame X..., mère d'un enfant de 13 mois, situation personnelle connue de l'employeur, n'a bénéficié que d'un délai de prévenance réduit à 7 jours alors même qu'elle justifie avoir attiré son attention sur les difficultés personnelles générées par cette décision ; que ce délai est manifestement insuffisant au regard de ses obligations familiales impérieuses ; que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ; que l'employeur a mis en oeuvre de façon fautive le changement du lieu d'affectation de Madame X...; qu'un tel manquement est d'une gravité suffisante pour justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
ALORS D'UNE PART QUE les juges du fond qui retiennent que l'employeur a fautivement opéré un changement de lieu d'affectation d'un salarié dans un même secteur géographique en raison d'un délai de prévenance trop bref, ne peuvent se borner à constater la situation de famille du salarié et son précédent lieu d'affectation, sans caractériser par des constatations de fait, en quoi un délai de prévenance plus long que celui mis en oeuvre par l'employeur s'imposait dans les circonstances de l'espèce ; qu'en se bornant à constater que Madame X...travaillait à l'aéroport d'ORLY et avait un enfant de 13 mois, sans énoncer la moindre circonstance de fait justifiant que son affectation à l'aéroport de ROISSY impliquait un délai de prévenance de plus de 7 jours, la Cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et suivants du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont saisies ; que le défaut de réponse aux conclusions équivaut à leur absence ; que par ses conclusions d'appel, la Société SOLARIS faisait expressément valoir pour démontrer que le changement d'affectation avait été décidé dans des conditions régulières, que « Mademoiselle X...réside à Paris et se rendait au magasin d'ORLY en transports en commun ; d'autre part, le temps de transport entre son domicile et le magasin d'ORLY/ le magasin de ROISSY est identique ; enfin ses horaires de travail n'ont pas été modifiés (conclusions SAS SOLARIS page 7) » ; que ces conclusions étaient de nature à justifier qu'en tenant compte de la situation familiale de la salariée, un délai de prévenance de 7 jours était suffisant avant son affectation au magasin de Roissy compte tenu du lieu du domicile de la salariée, du temps de transport identique et des horaires inchangés ; qu'en s'abstenant d'y répondre, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, violant ainsi l'article
455 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions dont ils sont saisis ; que par ses conclusions régulièrement déposées devant la Cour d'appel, la Société SOLARIS contestait expressément les affirmations de Madame X...relatives aux circonstances dans lesquelles son changement d'affectation était intervenu ; qu'ainsi la société SOLARIS exposait que « devant la Cour d'appel, et alors qu'elle ne l'avait pas fait devant le Conseil de Prud'hommes, Mademoiselle X...invoque différents arguments :- elle ne disposerait pas de badge d'accès et méconnaîtrait le lieu exact du magasin,- son affectation serait en réalité des représailles de son employeur pour avoir dénoncé le comportement de Monsieur Y..., pouvant justifier selon elle son refus de se rendre à ROISSY. Aucun n'est sérieux et ne pourra retenir l'attention de la Cour » (conclusions SAS SOLARIS page 7 in fine) ; qu'en retenant cependant que les affirmations de Madame X...sont « non réellement déniées par l'employeur » (arrêt page 6 in fine), pour en déduire le bien fondé de la thèse de la salariée, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions dont elle était saisie par la Société SOLARIS, violant ainsi les articles
4 du Code de procédure civile et
1134 du Code civil.