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Tribunal administratif de Nancy, 9 février 2023, 2203626

Mots clés
recours • rejet • requête • subsidiaire • étranger • saisie • reconnaissance • rapport • requis • retrait • soutenir • statut

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Nancy
  • Numéro d'affaire :
    2203626
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Nature : Décision
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: I - Par une requête enregistrée le 14 décembre 2022 sous le n° 2203625, Mme G, représentée par Me Jeandon, demande au tribunal : 1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ; 2°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel la préfète des Vosges a retiré son attestation de demande d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ; 3°) à titre subsidiaire de prononcer la suspension de l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Elle soutient que : - les décisions retirant son attestation de demande d'asile et portant obligation de quitter le territoire français méconnaissent son droit au recours effectif ; - elles sont fondées sur des faits matériellement inexacts dès lors qu'elle peut encore bénéficier d'un hébergement le temps de l'instruction de son recours devant la Cour nationale du droit d'asile ; - elle justifie encourir des risques de traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; - des éléments sérieux justifient la suspension de l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2023, la préfète des Vosges conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme E ne sont pas fondés. Mme E a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 janvier 2023. II - Par une requête enregistrée le 14 décembre 2022 sous le n° 2203626, Mme F, représentée par Me Jeandon, demande au tribunal : 1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ; 2°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel la préfète des Vosges a retiré son attestation de demande d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ; 3°) à titre subsidiaire de prononcer la suspension de l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Elle invoque les mêmes moyens que sa mère dans la requête n° 2203625. Par un mémoire en défense, enregistré le 6 janvier 2023, la préfète des Vosges conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les moyens soulevés par Mme E ne sont pas fondés. Mme E a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 janvier 2023. Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; - la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; - le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ; - le code de justice administrative. Le président du tribunal a désigné Mme Kohler, première conseillère, pour exercer les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme A, - les observations de Me Jeandon, représentant Mmes E, - et les observations de Mme B E. La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience, en application de l'article R. 776-26 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit

: 1. Mmes E, ressortissantes albanaises, sont entrées en France en septembre 2021, afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Leurs demandes ont été rejetées par des décisions du 29 septembre 2022 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) statuant en procédure accélérée sur le fondement du 1° de l'article L. 531-24 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A la suite de ces décisions, par des arrêtés du 24 novembre 2022, la préfète des Vosges a retiré leurs attestations de demande d'asile, leur a fait obligation, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elles pourront, le cas échéant, être reconduites. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, Mmes E, demandent l'annulation de ces arrêtés. Sur les conclusions relatives à l'aide juridictionnelle : 2. Mmes E ont été admises au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du bureau d'aide juridictionnelle du 13 janvier 2023. Par suite il n'y a pas lieu de les admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire. Sur les conclusions à fin d'annulation : 3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : () 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, () ". Par ailleurs l'article L. 542-2 du même code dispose que " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : () d) une décision de rejet dans les cas prévus à l'article L. 531-24 et au 5° de l'article L. 531-27 ; () ". Aux termes de l'article L. 531-24 du même code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue en procédure accélérée dans les cas suivants : 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr au sens de l'article L. 531-25 ; () ". Enfin, en vertu d'une décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides adoptée le 9 octobre 2015, l'Albanie est au nombre des pays d'origine sûrs. 4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un ressortissant étranger issu d'un pays sûr dont la demande d'asile a été instruite et rejetée par l'OFPRA selon la procédure accélérée ne bénéficie pas du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours. Il dispose toutefois de la possibilité de contester la mesure d'éloignement éventuellement prise à son encontre et peut également demander au juge, en application des articles L. 752-5 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la suspension de l'exécution de cette mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ou, si celle-ci est saisie, jusqu'à la date de la lecture en audience publique de sa décision. Dans ces conditions, Mmes E, ressortissantes albanaises dont les demandes d'asile ont été instruites et rejetées selon la procédure accélérée, ne sont pas fondées à soutenir que les mesures d'éloignement, accompagnées d'un retrait des attestations de demandes d'asile, prononcées à leur encontre les privent de leur droit à un recours effectif garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. 5. En deuxième lieu en se bornant à indiquer qu'elles vont introduire un recours devant la CNDA, Mmes E n'établissent pas que la préfète, qui a mentionné que l'hébergement dont elles bénéficiaient ne leur avait été attribué que pour la durée nécessaire à l'instruction de leurs demandes d'asile, s'est fondé sur des faits matériellement inexacts. 6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains dégradants ". 7. Mmes E soutiennent qu'en cas de retour en Albanie, elles seraient exposées à des traitements contraires à ces stipulations, en raison des violences que leur fait subir la famille de leur mari et père, aujourd'hui décédé, du fait de l'orientation sexuelle de Mme F. A l'appui de ces affirmations, elles se réfèrent à leurs propres récits mais ne produisent aucun élément de nature à établir la réalité de ces risques ni l'impossibilité de bénéficier de la protection des autorités albanaises. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté. Sur la demande de suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français : 8. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 752-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont le droit au maintien sur le territoire a pris fin en application des b ou d du 1° de l'article L. 542-2 et qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions prévues à la présente section, demander au tribunal administratif la suspension de l'exécution de cette décision jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci ". Aux termes de l'article L. 752-11 du même code : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné, saisi en application des articles L. 752-6 ou L. 752-7, fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la Cour nationale du droit d'asile ". 9. Il est fait droit à la demande de suspension de la mesure d'éloignement si le juge a un doute sérieux sur le bien-fondé de la décision de rejet opposée par l'OFPRA à la demande de protection, au regard des risques de persécutions alléguées ou des motifs retenus par l'office. 10. Mmes E, à l'appui de leurs demandes de suspension, invoquent leur recours devant la Cour nationale du droit d'asile en contestant les motifs de rejet de leurs demandes d'asile retenus par l'OFPRA et apportent des précisions sur leurs récits et leur situation. Elles peuvent ainsi être regardées comme apportant des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de leurs demandes d'asile, leur maintien sur le territoire durant l'examen de leurs recours par la Cour nationale du droit d'asile. 11. Il résulte de ce qui précède que Mmes E sont seulement fondées à demander la suspension de l'exécution des décisions du 24 novembre 2022 portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu d'admettre Mmes E au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire. Article 2 : L'exécution des décisions portant obligation de quitter le territoire français du 24 novembre 2022 est suspendue jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mmes E est rejeté. Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme G, à Mme F et à la préfète des Vosges. Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2023. La magistrate désignée, J. A La greffière, M. D La République mande et ordonne à la préfète des Vosges en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Nos 2203625, 2203626

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