Vu les procédures suivantes :
I - Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n°2001479 le 26 mai 2020 et le 16 juin 2021, les sociétés Bouygues travaux publics régions France, Pro. Fond et Berthouly travaux publics, représentées par Me Cabanes de la SELARL Cabanes - Cabanes Neveu associés, demandent au tribunal :
1°) de condamner la communauté d'agglomération Nîmes Métropole à leur verser la somme de 572 046,81 euros TTC (138 545, 06 euros au profit de la Bouygues travaux publics régions France, 99 909, 62 euros pour la société Berthouly travaux publics et 333 592, 13 euros pour la société Pro. Fond), assortie des intérêts moratoires au taux contractuel de 8% à compter du 5 août 2019 et de la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, au titre du solde du marché de travaux en litige ;
2°) de condamner la communauté d'agglomération Nîmes Métropole à leur verser la somme de 130 542,29 euros (94 656, 21 euros au profit de la Bouygues travaux publics régions France, 21 134, 80 euros pour la société Berthouly travaux publics et 17 764, 33 euros pour la société Pro. Fond), assortie des intérêts moratoires au taux contractuel de 8%, à compter du 3 mai 2020 ou à défaut de la date d'enregistrement de la requête, ainsi que de la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, au titre des intérêts dus sur la somme réglée le 19 mars 2020 ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Nîmes Métropole la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article
L.761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- tant la commune de Nîmes que la communauté d'agglomération Nîmes Métropole n'ont pas donné suite à leur demande de paiement finale qui, en application du protocole d'accord signé le 5 décembre 2017, leur a été respectivement adressée le 4 juillet 2019 et le 30 septembre 2019 ;
- le protocole d'accord signé le 5 décembre 2017 n'écarte pas l'application des stipulations contractuelles de droit commun ;
- le projet de décompte général signé adressé le 18 décembre 2019 à la communauté d'agglomération Nîmes Métropole est devenu le décompte général et définitif du marché faute pour cette dernière d'avoir notifié le décompte général dans le délai de dix jours en application de l'article 13.4.4. des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux dans sa rédaction issue de l'arrêté du 3 mars 2014 ;
- les articles
45 et suivants du CCAG ne sont pas applicables à la procédure d'élaboration du décompte général dès lors que la résiliation actée dans le protocole d'accord signé le 5 décembre 2017 revêt un caractère amiable et ne correspond à aucune des hypothèses prévues par le CCAG ;
- les dispositions de l'article 47.2.1. du CCAG ne sont pas incompatibles avec celles de l'article 13.4.4., de telle sorte que le projet de décompte final signé du 18 décembre 2019 doit être regardé comme ayant été régulièrement notifié ;
- le décompte de liquidation du 28 janvier 2020 établi par la communauté d'agglomération Nîmes Métropole méconnaît l'article
2044 du code civil dès lors que, en refusant le paiement de la révision des prix et en déduisant de façon injustifiée des pénalités, il est contraire au protocole d'accord signé le 5 décembre 2017 ;
- la somme de 185 446, 81 euros TTC versée au jour de la signature du protocole signé le 5 décembre 2017 doit être versée au groupement ;
- les pénalités de retards retenues par la communauté d'agglomération Nîmes Métropole dans son décompte de résiliation, d'une part, ne comportent pas l'exposé de leurs modalités de calcul et, d'autre part, méconnaissent le protocole signé le 5 décembre 2017.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 mars 2021 et le 24 mars 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté d'agglomération Nîmes Métropole, représentée par Me Levy, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article
L. 761-1 du code justice administrative.
Elle soutient que :
- le décompte général signé, adressé le 18 décembre 2019, n'a pas pu devenir le décompte général et définitif du marché dès lors que la résiliation du marché en litige, par le protocole d'accord signé le 5 décembre 2017, rend uniquement applicable l'article
47 du CCAG selon lequel l'établissement du décompte de liquidation est à l'initiative du seul maître d'ouvrage ;
- seul un mémoire en réclamation adressé par les sociétés requérantes, en application de l'article
50 du CCAG, était de nature à faire courir un délai de règlement des sommes dues au titre du solde du marché ;
- le décompte de liquidation ne méconnaît pas le protocole d'accord signé le 5 décembre 2017 ;
- le montant des pénalités figurant dans le décompte de liquidation est conforme au protocole d'accord signé le 5 décembre 2017.
Par ordonnance du 17 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 juin 2021 à 12 heures.
II - Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n°2002517 le 26 août 2020 et le 16 juin 2021, les sociétés Bouygues travaux publics régions France, Pro. Fond et Berthouly travaux publics, représentées par Me Cabanes de la SELARL Cabanes - Cabanes Neveu associés, demandent au tribunal :
1°) de condamner la communauté d'agglomération Nîmes Métropole à leur verser la somme de 572 046,81 euros TTC (138 545, 06 euros au profit de la Bouygues travaux publics régions France, 99 909, 62 euros pour la société Berthouly travaux publics et 333 592, 13 euros pour la société Pro. Fond), assortie des intérêts moratoires au taux contractuel de 8% à compter du 5 août 2019 et de la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, au titre du solde du marché de travaux en litige ;
2°) de condamner la communauté d'agglomération Nîmes Métropole à leur verser la somme de 130 542,29 euros (94 656, 21 euros au profit de la Bouygues travaux publics régions France, 21 134, 80 euros pour la société Berthouly travaux publics et 17 764, 33 euros pour la société Pro. Fond), assortie des intérêts moratoires au taux contractuel de 8%, à compter du 3 mai 2020 ou à défaut de la date d'enregistrement de la requête, ainsi que de la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, au titre des intérêts dus sur la somme réglée le 19 mars 2020 ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Nîmes Métropole la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article
L.761-1 du code de justice administrative.
Elles soulèvent les mêmes moyens que dans la requête n°2001479.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 mars 2021 et le 24 mars 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté d'agglomération Nîmes Métropole, représentée par Me Levy, conclut au rejet de la requête, par les mêmes moyens que dans la requête n°2001479, et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article
L. 761-1 du code justice administrative.
Par ordonnance du 9 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 mars 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code des marchés publics ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n°2013-269 du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique ;
- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 3 mars 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chaussard,
- les conclusions de Sophie Vosgien, rapporteure publique,
- et les observations de Me Couette pour le groupement d'entreprises.
Le groupement d'entreprises a produit une note en délibéré enregistrée le 22 décembre 2023 dans les deux dossiers.
Considérant ce qui suit
:
1. Par un acte d'engagement du 1er juin 2016 le groupement de commande, constitué de la commune de Nîmes et la communauté d'agglomération Nîmes Métropole, a confié au groupement conjoint d'entreprises, composé des sociétés Bouygues travaux publics régions France (BYTPRF), Pro. Fond et Berthouly travaux publics, dont BYTPRF est le mandataire, un marché public, sous la maîtrise d'œuvre de la société Artelia Villes et Territoires, d'un montant de 15 215 172,59 euros HT ayant pour objet la réalisation de travaux d'aménagements hydrauliques afin d'augmenter la capacité du Cadereau d'Uzès. Face aux difficultés rencontrées dans l'exécution des travaux, la société BYTPRF a, le 26 septembre 2017, saisi le tribunal d'une demande tendant à la désignation d'un médiateur en application des dispositions des articles
L. 213-1 et suivants du code de justice administrative avec pour mission, d'une part, d'entendre les parties sur les différends qui les opposent concernant les conditions d'exécution du marché public de travaux et, d'autre part, de rechercher les conditions d'un accord amiable sur l'ensemble de ces différends. La commune de Nîmes et la communauté d'agglomération Nîmes Métropole ont accepté la médiation. Un médiateur, désigné par le tribunal le 20 octobre 2017, a conduit les pourparlers entre d'une part, la commune ainsi que la communauté d'agglomération Nîmes Métropole et, d'autre part, la société BYTPRF mandatée par ses deux co-traitants. Un protocole d'accord a été signé par les parties le 5 décembre 2017 par lequel elles sont, notamment, convenues de la résiliation amiable du marché au stade d'achèvement de la deuxième phase des travaux au plot n°31, du calendrier ainsi que des modalités de réception des travaux et, enfin, des conditions financières d'établissement du solde du marché. Les travaux ont été réceptionnés le 10 avril 2018. Sur le fondement du protocole d'accord précité, le groupement conjoint d'entreprises a demandé le paiement du solde du marché en adressant un décompte à cet effet, d'une part, à la commune de Nîmes, par courrier du 4 juillet 2019 notifié le même jour et, d'autre part, à la communauté d'agglomération Nîmes Métropole par un courrier du 30 septembre 2019 notifié le 4 octobre 2019. Une copie de ces projets de décompte a également été adressée au maître d'œuvre. En l'absence de réponse, le groupement conjoint d'entreprises a adressé le 12 novembre 2019, sur le fondement de l'article 13.4.4. du CCAG applicable, un projet de décompte final à la communauté d'agglomération Nîmes Métropole et au maître d'œuvre dont ces derniers ont respectivement accusé réception le 13 novembre 2019 et le 15 novembre 2019. Le silence gardé par la communauté d'agglomération Nîmes Métropole a conduit le groupement d'entreprises à lui adresser, par un courrier du 18 décembre 2019 qui lui a été notifié le 19 décembre 2019, un projet de décompte général. Par un courrier du 3 janvier 2020, le groupement conjoint d'entreprises a mis en demeure la communauté d'agglomération Nîmes Métropole et lui a signifié que le projet décompte final du marché était devenu le projet de décompte général et définitif. Par un courrier du 6 février 2020, la communauté d'agglomération Nîmes Métropole a adressé à la société BYTPRF un décompte de liquidation du marché puis a procédé, le 19 mars 2020, au paiement du solde du marché pour un montant de 2 779 791,41 euros TTC. Par les requêtes enregistrées sous les nos 2001479 et 2002517, le groupement conjoint d'entreprises demande au tribunal de condamner la communauté d'agglomération Nîmes Métropole à lui verser la somme, d'une part, de 572 046,81 euros TTC, assortie des intérêts moratoires au taux contractuel de 8% à compter du 5 août 2019 et la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, au titre du solde du marché de travaux en litige et, d'autre part, de 130 542,29 euros, assortie des intérêts moratoires au taux contractuel de 8%, à compter du 3 mai 2020 ou à défaut de la date d'enregistrement de la requête, ainsi que de la capitalisation des intérêts à chaque échéance annuelle, au titre des intérêts dus sur la somme réglée le 19 mars 2020.
Sur la jonction :
2. Les requêtes nos 2001479 et 2002517, présentées pour les sociétés BYTPRF, Pro. Fond et Berthouly travaux publics, concernent le même marché, présentent à juger les mêmes questions, et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même jugement.
Sur la requête n° 2001479 :
En ce qui concerne le cadre du litige :
3. En premier lieu, aux termes de l'article
L. 213-1 du code de justice administrative : " La médiation régie par le présent chapitre s'entend de tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction ". L'article
L. 213-3 du même code précise que " l'accord auquel parviennent les parties ne peut porter atteinte à des droits dont elles n'ont pas la libre disposition ". Aux termes de l'article,
2044 du code civil : " La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit ". Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles des articles
6 et
2052 du code civil ainsi qu'avec celles de l'article
L423-1 du code des relations entre le public et l'administration, qu'à l'issue d'une procédure de médiation l'administration peut légalement conclure avec un ou des particuliers, afin de prévenir ou d'éteindre un litige, un accord de médiation ou un protocole transactionnel.
4. D'une part et au cas particulier, il résulte de l'instruction que les parties au marché de travaux en litige ont conclu, le 5 décembre 2017, un protocole d'accord dont l'examen de l'ensemble des stipulations, lesquelles au demeurant ne contreviennent pas à l'ordre public ni n'accordent de libéralité, fait apparaître que les parties sont convenues, d'une part, de concessions réciproques et, d'autre part, de renvoyer les conditions d'exécution de ce protocole à l'article
2044 du code civil. Par suite, le protocole d'accord signé le 5 décembre 2017 revêt un caractère transactionnel au sens de l'article
2044 du code civil.
5. D'autre part, l'article 3 de l'accord transactionnel prévoit que s'appliquent toutes les dispositions du marché en litige qui ne lui sont pas contraires. Par ailleurs, il résulte de la lecture combinée de ses articles 1, 2 et
6 que si les parties sont convenues, après s'être accordées sur la résiliation amiable du marché, de fixer de manière globale, forfaitaire et définitive le solde du marché elles n'ont pas expressément écarté le CCAG applicable pour y parvenir. Il relève ainsi de l'office du juge de faire application des stipulations du CCAG applicable pour statuer sur les conclusions relatives au solde du marché en litige.
6. En second lieux, aux termes de l'article
L5216-5 du code général des collectivités territoriales : " I. - La communauté d'agglomération exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences suivantes : / () 5° Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations, dans les conditions prévues à l'article
L. 211-7 du code de l'environnement ; ". Aux termes de l'article
L5211-17 du même code : " L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert de compétences, aux communes qui le composent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. / Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu'à leur échéance, sauf accord contraire des parties. La substitution de personne morale aux contrats conclus par les communes n'entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour le cocontractant. La commune qui transfère la compétence informe les cocontractants de cette substitution. ".
7. Il résulte de ces dispositions, combinées avec celles de l'article 68 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, que la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole est substituée de plein droit, à compter du 1er janvier 2018, à la commune de Nîmes dans l'exécution du marché en litige. Il résulte par ailleurs de l'instruction qu'un avenant au marché en litige, signé par BYTPRF le 23 août 2018 et par la communauté d'agglomération Nîmes Métropole le 29 août 2018, a procédé à cette substitution de plein droit à compter du 1er janvier 2018. La communauté d'agglomération de Nîmes Métropole, qui au surplus a participé à la procédure de médiation et est identifiée comme partie au protocole transactionnel, doit ainsi être regardée comme partie à l'accord transactionnel signé le 5 décembre 2017 et tenue par l'ensemble de ses stipulations.
En ce qui concerne le solde du marché :
S'agissant de la procédure applicable pour établir le décompte général et définitif :
8. D'une part, aux termes de l'article 13.4.2. du CCAG travaux applicable : " Le projet de décompte général est signé par le représentant du pouvoir adjudicateur et devient alors le décompte général. / Le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire le décompte général à la plus tardive des deux dates ci-après : / -trente jours à compter de la réception par le maître d'œuvre de la demande de paiement finale transmise par le titulaire ; / -trente jours à compter de la réception par le représentant du pouvoir adjudicateur de la demande de paiement finale transmise par le titulaire. / Si, lors de l'établissement du décompte général, les valeurs finales des index de référence ne sont pas connues, le représentant du pouvoir adjudicateur notifie au titulaire la révision de prix afférente au solde dans les dix jours qui suivent leur publication. La date de cette notification constitue le point de départ du délai de paiement des sommes restant dues après révision définitive des prix. ". Aux termes de l'article 13.4.4. du CCAG travaux : " Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas au titulaire le décompte général dans les délais stipulés à l'article 13.4.2, le titulaire notifie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d'œuvre, un projet de décompte général signé, composé : / -du projet de décompte final tel que transmis en application de l'article 13.3.1 ; / -du projet d'état du solde hors révision de prix définitive, établi à partir du projet de décompte final et du dernier projet de décompte mensuel, faisant ressortir les éléments définis à l'article 13.2.1 pour les acomptes mensuels ; / -du projet de récapitulation des acomptes mensuels et du solde hors révision de prix définitive. / Dans un délai de dix jours à compter de la réception de ces documents, le représentant du pouvoir adjudicateur notifie le décompte général au titulaire. Le décompte général et définitif est alors établi dans les conditions fixées à l'article 13.4.3. / Si, dans ce délai de dix jours, le représentant du pouvoir adjudicateur n'a pas notifié au titulaire le décompte général, le projet de décompte général transmis par le titulaire devient le décompte général et définitif. Le délai de paiement du solde, hors révisions de prix définitives, court à compter du lendemain de l'expiration de ce délai. / Le décompte général et définitif lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne les montants des révisions de prix et des intérêts moratoires afférents au solde. Le cas échéant, les révisions de prix sont calculées dans les conditions prévues à l'article 13.4.2. ".
9. D'autre part, aux termes de l'article 47.2.1. du CCAG applicable : " En cas de résiliation du marché, une liquidation des comptes est effectuée. Le décompte de liquidation du marché, qui se substitue au décompte général prévu à l'article 13.4.2, est arrêté par décision du représentant du pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire. ". Ce décompte de liquidation, dont le contenu comprend nécessairement les éléments énumérés à l'article 47.2.2., doit être notifié dans les conditions prévues par son article 47.2.3. aux termes duquel : " Le décompte de liquidation est notifié au titulaire par le pouvoir adjudicateur, au plus tard deux mois suivant la date de signature du procès-verbal prévu à l'article 47.1.1. Cependant, lorsque le marché est résilié aux frais et risques du titulaire, le décompte de liquidation du marché résilié ne sera notifié au titulaire qu'après règlement définitif du nouveau marché passé pour l'achèvement des travaux. Dans ce cas, il peut être procédé à une liquidation provisoire du marché, dans le respect de la règlementation en vigueur ".
10. Pour les motifs exposés au point 5, afin établir le solde du marché il convient de faire application des stipulations du CCAG travaux, dans leur rédaction issue de l'arrêté du 3 mars 2014, qui distinguent les modalités de détermination des droits et obligations des parties selon que la fin du contrat intervient du fait de l'achèvement des travaux ou, avant cette date, à la suite d'une résiliation. A cet égard, en application des stipulations de l'article
47 du CCAG, qui s'appliquent quel que puisse être le motif de résiliation d'un marché de travaux, y compris la résiliation amiable comme au cas d'espèce, il appartenait à la communauté d'agglomération Nîmes Métropole, en sa qualité de maître d'ouvrage, de notifier le décompte de liquidation du marché au plus tard dans un délai de deux mois à compter de la signature, le 10 avril 2018, du procès-verbal portant réception des travaux, soit le 10 juin 2018. En l'absence de notification du décompte de liquidation dans ce délai, les requérantes étaient donc fondées à notifier à la communauté d'agglomération Nîmes Métropole ainsi qu'à la société Artelia Villes et Territoires, en leur qualité de maître d'ouvrage et de maître d'œuvre, un projet de décompte général. Il résulte de l'instruction que la communauté d'agglomération Nîmes Métropole et la société Artelia Villes et Territoires se sont vu respectivement notifier le projet de décompte général le 19 décembre 2020 et le 20 décembre 2020. A défaut de notification du projet de décompte général et définitif par la communauté d'agglomération Nîmes Métropole dans le délai de dix jours prévu par l'article 13.4.4. du CCAG travaux, soit le 30 décembre 2019, le projet de décompte général notifié par les requérantes est ainsi devenu le décompte général et définitif et lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne les montants des révisions de prix et des intérêts moratoires afférents au solde.
S'agissant de la révision des prix :
11. En premier lieu, il résulte du décompte général et définitif que figure au crédit des requérantes la somme de 154 539, 01 euros au titre de la révision des prix acquise au jour de la signature du protocole transactionnel, conformément à l'article 1 de ce-dernier. Il résulte par ailleurs de l'instruction que le montant cumulé des acomptes mensuels déjà versés, incluant la révision des prix au jour de la signature du protocole transactionnel, est déduit du montant total du décompte pour fixer le solde du marché. Par suite, il y a bien lieu d'inscrire dans le décompte général et définitif la somme de 154 539, 01 euros au crédit des requérantes dès lors qu'il n'est pas contesté qu'elle doit leur rester acquise en vertu du protocole.
12. En second lieu, figure également au crédit du décompte général et définitif la somme de 54 941 euros, non contestée en défense, au titre du solde forfaitaire de 50% sur la révision des prix des travaux d'achèvement du marché, conformément à l'article 1 du protocole transactionnel. Par suite, il y a bien lieu d'inscrire dans le décompte général et définitif la somme de 54 941 euros au crédit des requérantes.
S'agissant du montant du solde du marché :
13. Pour les motifs exposés aux points 10, 11 et 12, il résulte de ce qui précède que, en incluant les montants des révisions des prix, le solde général et définitif du marché revenant au groupement s'élève à la somme de 2 981 642, 50 euros TTC. Montant duquel il convient de déduire la somme de 2 622 981, 07 euros, que les requérantes reconnaissent, dans leurs écritures en défense, avoir reçu le 19 mars 2020 de la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole en règlement du marché en litige. Par suite, il convient de condamner la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole à régler au groupement d'entreprises la somme de 358 661, 43 euros au titre du solde du marché en litige. Rien ne fait obstacle à ce que cette somme soit versée aux sociétés requérantes selon la répartition dont elles demandent l'application du fait de la disparition du groupement intervenue après la résiliation du marché soit, 209 099, 61 euros pour la société Pro. Fond, 86 796, 07 euros pour BYTPRF et 62 795, 75 euros pour la société Berthouly travaux publics.
En ce qui concerne les intérêts moratoires contractuels et la capitalisation des intérêts :
S'agissant des intérêts moratoires et de leur capitalisation sur la somme de
2 622 981, 07 euros :
14. D'une part, dès lors que le marché de travaux en litige a été résilié, les stipulations contractuelles de ce marché ne peuvent plus être appliquées et il convient de faire application du décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique dans sa rédaction applicable à la date de conclusion du marché de travaux dont le I de l'article 8 dispose : " Le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement les plus récentes, en vigueur au premier jour du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de huit points de pourcentage. Les intérêts moratoires courent à compter du jour suivant l'échéance prévue au contrat ou à l'expiration du délai de paiement jusqu'à la date de mise en paiement du principal incluse () ".
15. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique applicable au marché en litige : " Le délai de paiement prévu au premier alinéa de l'article 37 de la loi du 28 janvier 2013 susvisée est fixé à trente jours () ". Aux termes du 2° du I de l'article 2 du même décret : " Pour le paiement du solde des marchés de travaux soumis au code des marchés publics, le délai de paiement court à compter de la date de réception par le maître d'ouvrage du décompte général et définitif établi dans les conditions fixées par le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux ". Aux termes de l'article 7 : " Lorsque les sommes dues au principal ne sont pas mises en paiement (), le créancier a droit () au versement de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement () ". L'article 9 dispose : " Le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement est fixé à 40 euros ".
16. Il résulte de ces dispositions que, le décompte général et définitif du marché ayant été notifié à la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole le 19 décembre 2019, le délai de paiement du solde du marché expirait 18 janvier 2020. La date de paiement du marché en litige étant intervenue le 19 mars 2020, les intérêts dus sur le solde du marché doivent ainsi être calculés sur une période de soixante jours aux taux de 8% (le taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement étant alors de 0%), soit la somme de 34 494 euros à laquelle doit être ajoutée la somme de 40 euros correspondant à l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement. En revanche, il n'y pas lieu d'assortir cette somme de la capitalisation des intérêts dès lors que les intérêts échus ne sont dus, conformément à l'article
1343-2 du code civil, que si la somme sur laquelle ils portent n'a pas été réglée au terme d'une année entière. Par suite, la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole est condamnée à verser aux requérantes la somme de 34 534 euros qu'il convient de répartir entre ces dernières, conformément à la répartition qu'elles demandent dans leurs écritures et qui n'est pas contestée en défense, de la manière suivante : 25 037, 15 euros pour BYTPRF, 5 594, 51 euros pour la société Berthouly travaux publics et 3 902, 34 euros pour la société Pro. Fond.
S'agissant des intérêts moratoires et leur capitalisation sur la somme de
358 661, 43 euros correspondant au solde du marché restant à régler :
17. En premier lieu et pour les motifs exposés au point 16, il convient d'assortir la somme de 358 661, 43 euros, correspondant au solde du marché restant à régler, des intérêts moratoires aux taux de 8% à compter du 19 janvier 2020.
18. En second lieu, en application des dispositions l'article
1343-2 du code civil il y a lieu de faire droit à la demande de la capitalisation à compter du 19 janvier 2021, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
En ce qui concerne les frais liés au litige :
19. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole une somme de 1 000 euros à verser à chacune des sociétés requérantes au titre des frais exposés par chacune d'elles et non compris dans les dépens. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole soient mises à la charge des sociétés requérantes qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.
Sur la requête n°2002517 :
20. Le jugement rendu sur la requête n° 2001479 réglant le litige qui oppose les sociétés Bouygues travaux publics régions France, Pro. Fond et Berthouly travaux publics à la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole, les conclusions présentées dans la requête n° 2002517, qui sont identiques, ont perdu leur objet. Par suite, il n'y a plus lieu d'y statuer.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête enregistrée sous le n° 2002517.
Article 2 : Dans la requête enregistrée sous le n° 2001479, la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole est condamnée à verser la somme de 358 661,43 euros au titre du solde du marché de travaux d'aménagement du cadereau d'Uzès à répartir de la manière suivante : 209 099,61 euros pour la société Pro. Fond, 86 796,07 euros pour la société Bouygues travaux publics régions France et 62 795,75 euros pour la société Berthouly travaux publics. Chacune de ces sommes est assortie des intérêts moratoires aux taux de 8 % à compter du 19 janvier 2020 avec capitalisation des intérêts à compter du 19 janvier 2021 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 3 : La communauté d'agglomération de Nîmes Métropole est condamnée à verser, au titre des intérêts dus sur la somme 2 622 981,07 euros ainsi que de l'indemnité de recouvrement, la somme de 34 534 euros à répartir de la manière suivante : 25 037,15 euros pour la société Bouygues travaux publics régions France, 5 594,51 euros pour la société Berthouly travaux publics et 3 902,34 euros pour la société Pro. Fond
Article 4 : La communauté d'agglomération de Nîmes Métropole versera aux sociétés Bouygues travaux publics régions France, Pro. Fond et Berthouly travaux publics une somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent jugement sera notifié aux sociétés Bouygues travaux publics régions France, Pro. Fond et Berthouly travaux publics ainsi qu'à la communauté d'agglomération de Nîmes Métropole.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Boyer, présidente,
M. Chaussard, premier conseiller,
M. Chevillard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2024.
Le rapporteur,
M. CHAUSSARD
La présidente,
C. BOYER
La greffière,
F. DESMOULIÈRES
La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
Nos 2001479, 2002517