Chronologie de l'affaire
Cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre, section B) 12 juillet 1993
Cour de cassation 11 octobre 1995

Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 11 octobre 1995, 93-19758

Mots clés chose jugee · autorité du pénal · condition · limitation à ce qui a été nécessairement jugé · décision de relaxe au pénal saisi d'une poursuite pour abus de confiance · action au civil portant sur les honoraires d'un agent immobilier

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 93-19758
Dispositif : Rejet
Textes appliqués : Code civil 1351
Décision précédente : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre, section B), 12 juillet 1993
Président : Président : M. LAPLACE conseiller
Rapporteur : M. Buffet
Avocat général : M. Joinet

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre, section B) 12 juillet 1993
Cour de cassation 11 octobre 1995

Texte

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Gérard X..., domicilié château de la Coste, Route touristique de Vernègues, Alleins-en-Provence (Bouches-du-Rhône), en cassation d'un arrêt rendu le 12 juillet 1993 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre, section B), au profit :

1 / de M. Marcel Y..., demeurant ... (Bouches-du-Rhône),

2 / de Mme Geneviève Y..., née Barthélémy, demeurant ... (Bouches-du-Rhône), défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 22 juin 1995, où étaient présents : M. Laplace, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Buffet, conseiller rapporteur, M. Chardon, conseiller, M. Joinet, avocat général, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Buffet, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de M. X..., de Me Choucroy, avocat des époux Y..., les conclusions de M. Joinet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 juillet 1993) et les productions, que M. et Mme Y... ont donné mandat à M. X..., agent immobilier, d'acquérir pour eux un immeuble qui était l'objet d'une saisie immobilière, les parties étant convenues "d'une rémunération fixée en fonction des résultats obtenus par suite du caractère aléatoire de la vente par voie d'adjudication" ;

qu'après que l'immeuble avait été adjugé aux époux Y... au prix de 700 000 francs, M. X... a conservé, pour rémunération, une somme de 150 000 francs sur une somme de 400 000 francs que lui avaient remise les époux Y... ;

que cité pour abus de confiance, M. X... a été relaxé par un tribunal correctionnel ;

que, par un premier jugement, un tribunal de grande instance, saisi par les époux Y... d'une demande de restitution de la somme ainsi conservée, à laquelle M. X... a opposé l'autorité de la chose jugée au pénal, a déclaré recevable la demande et a ordonné la comparution personnelle des parties ;

que, par un second jugement, le Tribunal a fixé à 100 000 francs la commission due à M. X... et a condamné celui-ci à restituer 50 000 francs avec intérêts aux époux Y... ;

Sur le premier moyen

:

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé ces jugements et d'avoir condamné M. X..., d'une part, à payer aux époux Y... des sommes à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et, d'autre part, à une amende civile pour appel abusif, alors que, selon le moyen,"les époux Y... avaient, dans leur plainte des 7 et 18 juin 1985, contesté le montant de la rémunération de M. X... fondée sur un mandat d'agent immobilier du 21 mars 1985, aux termes duquel ils lui avaient remis la somme de 400 000 francs et sur laquelle M. X... retenait 150 000 francs au titre de sa rémunération ;

que M. X... avait, en conséquence, été cité le 4 mars 1987 à comparaître devant le tribunal correctionnel pour avoir détourné ou dissipé, au préjudice des époux Y..., une somme de 150 000 francs qui ne lui avait été remise qu'à titre de mandat, prévention dont il avait été relaxé ;

qu'en écartant néanmoins la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée, au motif que la cause de la demande soumise à la juridiction pénale reposait sur une cause distincte, à savoir un contrat de dépôt et non un mandat, la cour d'appel a dénaturé le mandat du 21 mars 1985, la plainte des 7 et 18 juin 1985 et la citation du 4 mars 1987, violant ainsi l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu que l'autorité de la chose jugée au pénal n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a été nécessairement jugé sur l'action publique, et qu'elle interdit au juge civil, en cas de relaxe, de fonder sa décision sur les faits ayant été l'objet de la poursuite ;

que, par motifs adoptés, non contraires aux siens et qui ne sont pas contestés, l'arrêt retient que le juge civil n'avait pas à juger un abus de confiance, mais le montant des honoraires d'un agent immobilier ;

D'où il suit qu'abstraction faite de motifs qui, surabondants, sont vainement critiqués par le moyen, celui-ci ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen

:

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné M. X... à payer aux époux Y... les sommes de 30 000 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et de 10 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, et de l'avoir condamné à payer au Trésor public une amende civile de 10 000 francs pour appel abusif, alors que, selon le moyen, "d'une part l'appel ne peut être jugé abusif et l'appelant condamné à une amende civile si son appel est partiellement accueilli ;

qu'en l'espèce, M. X... concluait que le montant de la commission devait être fixé à 150 000 francs (concl. p. 4, 1 ; p. 5, 5 ;

p. 6, 6 et 7) ;

qu'en jugeant que la commission due à M. X... par les époux Y... devait être fixée à la somme de 100 000 francs, la cour d'appel a partiellement accueilli les prétentions de l'appelant ;

qu'en le condamnant néanmoins à une amende civile, la cour d'appel a violé l'article 559 du nouveau Code de procédure civile ;

alors que, d'autre part, les sommes allouées au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile recouvrent non seulement les frais irrépétibles, mais encore les peines et tracas du procès ;

qu'en l'espèce, les époux Y... avaient limité leurs demandes sur ce fondement à la somme de 20 000 francs ;

qu'en condamnant néanmoins M. X... à leur payer 10 000 francs pour frais irrépétibles et 30 000 francs pour troubles causés par la nécessité d'agir en justice, soit au total 40 000 francs, la cour d'appel a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile" ;

Mais attendu que l'appel interjeté par M. X... n'a pas été, même partiellement, accueilli ;

Et attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les époux Y... avaient sollicité de la cour d'appel, d'une manière distincte, une somme de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts et une somme de 20 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

D'où il suit que le moyen manque en fait ;

Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que M. Gérard X... sollicite, sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 17 790 francs ;

Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

PAR CES MOTIFS

:

REJETTE le pourvoi ;

Rejette également la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne M. X..., envers les époux Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.

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