Cour d'appel de Lyon, 3 septembre 2009, 2009/00625

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Lyon
  • Numéro de pourvoi :
    2009/00625
  • Domaine de propriété intellectuelle : BREVET
  • Numéros d'enregistrement : FR0107970 ; FR0107971
  • Parties : M (Jean-Claude) / DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'INPI
  • Décision précédente :INPI, 23 mars 2007
  • Président : Madame MARTIN
Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Lyon
2009-09-03
INPI
2007-03-23

Texte intégral

COUR D'APPEL DE LYON ARRET DU 3 SEPTEMBRE 2009 PREMIERE CHAMBRE CIVILE A R.G : 09/00625 Décision de l'Institut National de la Propriété Industrielle de PARIS du 28 février 2007 DEMANDEUR AU RECOURS : Monsieur Jean Claude M M comparant assisté de Me DE R, avocat au barreau de Lyon au titre de l'aide juridictionnelle provisoire DEFENDEUR AU RECOURS : Monsieur le directeur de l'Institut National de la Propriété Industrielle [...] 75008 PARIS CEDEX 08 représenté par Mme LESAUVAGE, chargée de mission

COMPOSITION DE LA COUR

, lors des débats et du délibéré : Président : Madame MARTIN Conseiller : Madame BIOT Conseiller : Madame AUGE Greffier : Mme JANKOV pendant les débats uniquement A l'audience Mme MARTIN a fait le rapport conformément à l'article 785 du CPC. ARRET : contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; signé par Madame MARTIN, présidente et par Madame JANKOV, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. FAITS PROCEDURE PRETENTIONS DES PARTIES M. Jean-Claude M M a déposé le 18 juin 2001: -le brevet français n° 0107970 ayant pour titre "procédé d'obtention d'un mélange d'un corps gras, mélange de corps gras ainsi obtenu et utilisations d'un tel mélange", brevet délivré le 5 août 2005, -le brevet français n° 0107971 ayant pour titre "procédé d'obtention d'un extrait sec riche en composés tensioactifs", brevet délivré le 3 octobre 2003. Le 6 juin 2006, M. MAPANGOU M a adressé à l'INPI la somme de 270 euros en règlement de la 6° annuité des deux brevets, soit 135 euros pour chacun d'eux. Par décisions du 23 mars 2007, le directeur général de l'INPI a constaté la déchéance des droits attachés aux deux brevets au motif que les redevances prescrites pour le maintien en vigueur des titres n'ont pas été versées en temps utile ou l'ont été à un taux insuffisant. L'INPI a, en effet, considéré qu'au vu de l'arrêté du 2 août 2005 le montant de la redevance annuelle de maintien en vigueur d'un brevet correspondant à la 6 e annuité s'élevait à 150 euros. Bien que M. MAPANGOU M ait indiqué dans son courrier du 6 juin 2006 son changement d'adresse, ces décisions lui ont été adressées à son ancienne adresse. L'INPI a donc notifié une nouvelle fois les deux décisions le 5 mars 2009. Dans l'intervalle, le 30 janvier 2009, M. MAPANGOU M a déclaré former devant la cour d'appel un recours en indemnisation contre le directeur de l'INPI conformément aux dispositions des articles L 411-4 et R 411-21 du code de la propriété intellectuelle en reprochant à celui-ci d'avoir dans l'inobservation de la loi procédé à la publication de la déchéance irrégulière des deux brevets sans aucune notification de la décision de déchéance au breveté, déchéance ayant entraîné de très lourdes conséquences dommageables pour l'inventeur. A l'appui de son recours, M. MAPANGOU M fait valoir que le premier motif invoqué à l'appui de la constatation de déchéance (retard de versement) est inexistant et que le second (règlement insuffisant) est sans fondement. Sur ce dernier point, il expose que le nouveau régime prévu par l'article L 612-20 du code de la propriété intellectuelle a eu pour objet d'élargir le champ de la réduction des redevances en généralisant le dispositif à toutes les personnes physiques, qu'elles soient imposables ou non, peu important que le brevet soit déposé avant ou après le 1er septembre 2005 date d'application de la loi du 26 juillet 2005. Il soutient que cette réduction ne saurait être limitée aux seuls brevets qui bénéficiaient déjà de la réduction avant le 1 er septembre 2005, la généralisation du dispositif ayant pour but d'étendre la réduction à tous les brevets visés par la loi, y compris ceux qui ne bénéficiaient pas de la réduction dans l'ancien régime. Il conclut que son droit à réduction ne peut être contesté, que la somme de 270 euros qu'il a versée était largement supérieure à celle de 224 euros dont il était redevable, que son droit à réduction est opposable à l'INPI dès lors qu'il avait fait cette demande à l'époque des faits et que cette réduction est devenue de droit pour les brevets de personnes physiques au sens de l'article R 613-63 du code de la propriété intellectuelle. Il fait valoir qu'en s'estimant tenu de déchoir ses deux brevets au moyen de fausses interprétations de la loi sans aucun motif réel et sérieux, tout en fixant de manière arbitraire la date de leur déchéance au 28 février 2007, l'INPI a porté gravement atteinte au droit de propriété de l'inventeur et violé l'article 1 du premier protocole additionnel de la convention européenne des droits de l'homme. Il sollicite la condamnation de l'INPI à lui payer la somme de 6.000.000 euros à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice résultant de la perte de chance de vendre ses brevets ou de les exploiter. Il demande encore la condamnation de l'INPI à lui rembourser la somme de 270 euros encaissée à tort au titre des redevances de maintien en vigueur des brevets au titre de la T annuité alors que la déchéance était déjà décidée et publiée. Il demande 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. L'INPI s'oppose aux prétentions du requérant. Il soutient que l'arrêté en vigueur au mois de juin 2006 était celui du 2 août 2005 applicable le 1 er septembre 2005 et qu'il prévoyait une annuité de 150 euros, que le paiement effectué de 270 euros était donc insuffisant, que M. MAPANGOU M ne répondait pas aux conditions prévues par les textes pour bénéficier d'une réduction de redevances, qu'en effet la nouvelle rédaction de l'article L. 612-20 disposant que la réduction est de droit pour les personnes physiques résulte du décret du 1 cr mars 2007 et n'était pas en vigueur au jour du paiement de la 6 e annuité, soit le 6 juin 2006, que c'est donc de manière parfaitement justifiée que la déchéance des brevets a été constatée. A titre subsidiaire, il formule des observations sur le préjudice invoqué et il précise que la perception de la somme de 270 euros pour le paiement de la 7 e annuité des deux brevets était justifiée par la possibilité qu'un recours en restauration portant sur la décision de constatation de déchéance soit présenté et aboutisse. Il indique qu'un tel recours ne pouvant plus être exercé, il s'engage à procéder au remboursement de cette somme dans les meilleurs délais. Le Procureur Général a visé la procédure en déclarant faire siennes les observations et conclusions du directeur général de l'INPI.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu qu'à l'appui de sa demande de dommages intérêts, M. MAPANGOU M soutient que les décisions de déchéance de ses deux brevets prises par l'INPI le 23 mars 2007 sont abusives et illégales; qu'il convient donc de rechercher si ces deux décisions ont été prises à bon droit ; Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'échéance légale pour le paiement de la 6 e annuité du brevet français n'010791'0 et du brevet français n* 0107971 déposés par M. MAPANGOU M était le 30 juin 2006 ; que le 6 juin 2006 le breveté a adressé à l'INPI un chèque de 270 euros, soit 135 euros par brevet, en paiement des annuités 2006 des deux brevets; qu'il convient de relever que la somme de 135 euros correspondait à la redevance prévue par l'arrêté du 12 décembre 2002 applicable au 2 janvier 2003, ainsi que l'a écrit lui-même M. MAPANGOU M dans sa lettre du 20 mars 2008 ; Attendu, cependant, que l'arrêté du 2 août 2005 relatif aux redevances de procédures perçues par l'INPI, applicable le 1" septembre 2005, avait porté le montant de la redevance pour la 6 e annuité à 150 euros par brevet; que c'est dans ces conditions que l'INPI a constaté la déchéance des brevets susvisés pour paiement insuffisant de la 6 e annuité par décisions publiées au Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle du 27 avril 2007 ; Attendu que pour soutenir que le règlement d'une somme de 270 euros était néanmoins suffisant, le requérant fait valoir qu'il bénéficiait d'un tarif réduit de 112 euros par brevet ; Attendu que l'article L 612-20 du code de la propriété intellectuelle tel que modifié par la loi du 26 juillet 2005 prévoit que : "Le montant des redevances perçues à l'occasion du dépôt, de l'examen et de la délivrance du brevet ainsi que de son maintien en vigueur peut être réduit lorsque le demandeur appartient à l'une des catégories suivantes : -personne physique (..)• Le bénéfice de la réduction est acquis sur simple déclaration." ; Que l'article R 613-63 dans sa rédaction applicable au jour du règlement de la 6 e annuité dispose que : "La demande de réduction des redevances prévue à l'article L 612-20 est présentée par écrit au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle. Elle est accompagnée d'un avis de non-imposition ou d'une justification équivalente. Il est statué par décision motivée." ; Attendu que le requérant n'établit pas avoir sollicité une réduction de redevances ni même avoir procédé à une déclaration à cette fin; qu'il convient de relever que pour les annuités 2 à 5, M. MAPANGOU M a procédé à des versements de 25 euros, lesquels correspondent au taux plein du montant prévu par l'arrêté alors en vigueur, et montrent bien que celui-ci ne bénéficiait pas de réduction des échéances au titre de ces annuités ; Attendu qu'il résulte de l'article 2 de l'arrêté du 2 août 2005 relatif aux redevances de procédures perçues par l'INPI que la réduction des redevances prévue aux articles L 612-20 et R 613-63 du code de la propriété intellectuelle est fixée à 25% et qu'elle "s'applique aux brevets déposés à compter du 1 er septembre 2005 et à ceux admis au bénéfice d'une réduction avant cette date" ; que les brevets de M. MAPANGOU M ne rentrent dans aucune de ces deux catégories ; Attendu que c'est donc à juste titre que le directeur général de l'INPI a constaté la déchéance des deux brevets au motif que le paiement d'une somme de 270 euros était insuffisant ; Attendu que M. MAPANGOU M invoque en vain les dispositions actuelles de l'article R 613-63 du code de la propriété intellectuelle selon lesquelles "la réduction des redevances prévue à l'article L 612-20 est de droit pour les personnes physiques"; qu'en effet, la mise en oeuvre du nouveau régime de réduction des redevances issu de la modification de l'article L 612-20 procède de l'application du décret du 1er mars 2007, applicable le 4 mars 2007, et n'était pas en vigueur au jour du paiement de la 6 e annuité litigieuse (l'amendement qui a conduit à la modification de l'article L 612-20 tendait à généraliser le principe de la réduction à toutes les personnes physiques mais il n'en demeure pas moins que dans son dernier alinéa l'article L 612-20 tel que résultant de la loi du 26 juillet 2005 précise que "les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en conseil d'état") ; Que M. MAPANGOU M ne peut davantage prétendre bénéficier des nouvelles dispositions de l'article R 613-63 issues du décret du 1 " mars 2007 au motif que la décision de constatation de déchéance a été rendue le 23 mars 2007 dès lors que cette décision se borne à constater une déchéance ayant pris effet à la date de l'échéance non acquittée conformément aux dispositions de l'article L 613-22 du code de la propriété intellectuelle ; Attendu qu'aucune obligation "d'informer le breveté pour qu'il verse le complément" ne s'imposait à 1TNPI; que s'il est vrai que la décision constatant la déchéance a été notifiée à une adresse qui n'était plus celle du breveté et qu'elle ne l'a été régulièrement que le 5 mars 2009 (après d'ailleurs que M. MAPANGOU M en a eu connaissance et a saisi la cour d'appel), cette erreur ne saurait justifier la demande d'indemnisation présentée dès lors, d'une part, que M. MAPANGOU M n'a pas sollicité l'annulation des décisions de déchéance et par là même la possibilité de voir ses brevets restaurés, d'autre part que le requérant n'apporte la preuve d'aucun pourparler ou discussion intervenus au cours de cette période et manifestant une chance sérieuse de déboucher sur un projet de cession ou d'exploitation des brevets, aucun préjudice indemnisable n'étant donc avéré ; Attendu que le recours formé par M. MAPANGOU M ne peut, en conséquence, prospérer et qu'il doit être rejeté ; Attendu qu'il y a lieu de donner acte à l'INPI de ce qu'il s'engage à rembourser à M. MAPANGOU M la somme de 270 euros versée par celui-ci pour le paiement de la 7 e annuité de ses brevets, l'INPI exposant que la perception de cette somme était justifiée par la possibilité qu'un recours en restauration soit présenté et aboutisse, recours qui à ce jour ne peut plus être exercé ;

PAR CES MOTIFS

. LA COUR Rejette le recours formé par M. MAPANGOU M. Donne acte à l'INPI de ce qu'il s'engage à procéder au remboursement de la somme de 270 euros dans les meilleurs délais. Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec accusé de réception à M. MAPANGOU M et au directeur général de l'INPI.