Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juillet 2012, 11-14.341, 11-14.342, 11-14.343, 11-14.344, 11-14.345, …

Synthèse

  • Juridiction : Cour de cassation
  • Numéro de pourvoi :
    11-14.341, 11-14.342, 11-14.343, 11-14.344, 11-14.345, 11-14.346, 11-14.347, 11-14.348, 11-14.350, 11-14.352, 11-14.353, 11-14.355, 11-14.356, 11-14.358, 11-14.360, 11-14.364, 11-14.365
  • Dispositif : Cassation
  • Publication : Inédit au recueil Lebon - Inédit au bulletin
  • Décision précédente :Conseil de prud'hommes de Saint-Pierre de La Réunion, 3 novembre 2009
  • Identifiant européen :
    ECLI:FR:CCASS:2012:SO01716
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000026189403
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/6137283bcd580146774301de
  • Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
  • Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan
Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2012-07-11
Conseil de prud'hommes de Saint-Pierre de La Réunion
2009-11-03

Texte intégral

Vu la connexité, joint les pourvois R 11-14.341, S 11-14.342, T 11-14.343, U 11-14.344, V 11-14.345, W 11-14.346, X 11-14.347, Y 11-14.348, A 11-14.350, C 11-14.352, D 11-14.353, F 11-14.355, H 11-14.356, J 11-14.358, M 11-14.360, R 11-14.364 et S 11-14.365 ; Attendu, selon les jugements attaqués, que le 20 juin 2009 a été conclu, au sein de l'unité économique et sociale Vindemia, un accord prévoyant l'attribution aux salariés dont les vêtements de travail sont fournis par l'employeur, de deux barils de lessive par trimestre d'une valeur de 6,95 euros ; que M. X... et 16 autres salariés de la société Sem Sodexmar, exploitant des magasins sous l'enseigne "Jumbo Score", ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le remboursement, pour la période antérieure, des frais d'entretien de leurs vêtements professionnels et le paiement de dommages-intérêts pour rupture d'égalité salariale et pour préjudices moral et financier en faisant valoir qu'antérieurement à l'entrée en vigueur de l'accord, ils ont été exclus de l'avantage précédemment attribué à leurs salariés par certaines entités du groupe Vindemia et consistant en l'octroi d'un baril de lessive par mois pour l'entretien des tenues de travail ;

Sur le second moyen

: Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen

:

Vu

le principe "à travail égal, salaire égal" ; Attendu que ce principe ne s'applique pas lorsque des salariés qui revendiquent le bénéfice d'un droit ou d'un avantage n'appartiennent pas à l'entreprise au sein de laquelle ce droit ou cet avantage est reconnu en vertu d'un accord collectif, d'un usage ou d'un engagement unilatéral de l'employeur ;

Attendu que pour condamner

la société Sem Sodexmar à payer à chacun des salariés une somme à titre de dommages-intérêts pour inégalité de traitement, les jugements énoncent que celle-ci reconnaît qu'au sein du groupe Vendemia, des salariés ont bénéficié de la prise en charge par l'employeur des frais d'entretien des tenues de travail ; que seul le personnel de Jumbo score ne bénéficie pas de cet avantage ;

Qu'en statuant ainsi

, le conseil de prud'hommes a violé le principe susvisé ;

Vu

l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont condamné la société Sem Sodexmar à payer à chacun des salariés la somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour violation du principe d'égalité de traitement, les jugements rendus le 3 novembre 2009, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Déboute les salariés de leur demande au titre de l'inégalité de traitement ; Condamne les salariés aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Sem Sodexmar ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des jugements partiellement cassés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt. Moyens communs aux pourvois R 11-14.341, S 11-14.342, T 11-14.343, U 11-14.344, V 11-14.345, W 11-14.346, X 11-14.347, Y 11-14.348, A 11-14.350, C 11-14.352, D 11-14.353, F 11-14.355, H 11-14.356, J 11-14.358, M 11-14.360, R 11-14.364 et S 11-14.365, produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Sem Sodexmar. PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF aux jugements attaqués d'avoir dit qu'il y avait discrimination syndicale et condamné la Sodexmar à payer aux salariés demandeurs des sommes à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale et de dommages et intérêts pour préjudice subi ; AUX MOTIFS QU'il n'est pas contesté par l'employeur que les salariés des autres sociétés du groupe bénéficient de ce droit, ni que les salariés de la Sodexmar n'ont pas bénéficié de ce droit durant ces dernières années ; que les salariés ont subi un préjudice financier ; qu'en conséquence, il y a discrimination salariale ; ALORS QUE le principe « à travail égal, salaire égal » ne s'applique qu'aux salariés d'un même employeur et non à des salariés d'entreprises distinctes, quand bien même celles-ci feraient partie d'un même groupe de sociétés ; que dès lors, en jugeant qu'il y avait eu rupture d'égalité salariale entre salariés employés par des entreprises distinctes d'un groupe de sociétés, le Conseil de prud'hommes a méconnu, par fausse application, le principe « à travail égal, salaire égal » et les articles L. 2261-22 et L. 2271-1 du Code du travail. SECOND MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF aux jugements attaqués d'avoir condamné la Sodexmar à payer aux salariés demandeurs des sommes à titre de frais d'entretien des tenues de travail, de dommages et intérêts pour discrimination salariale, de dommages et intérêts pour préjudice subi et d'article 700 du Code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE sur les dommages et intérêts pour discrimination salariale, «l'employeur qui impose plus généralement à ses salariés le port d'une tenue de travail doit supporter les coûts d'entretien de ces vêtements » ; que cette prise en charge est obligatoire dès lors que le port de la tenue est exigé par l'employeur et inhérent à l'emploi, et ce, quelles que soient les raisons justifiant le port du vêtement ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté par l'employeur que les salariés demandeurs n'ont pas bénéficié de ce droit ; que les salariés ont subi un préjudice certain ; qu'en conséquence il y a lieu d'allouer aux demandeurs la somme de 500 € ; que sur les frais d'entretien des vêtements de travail, l'article L. 4122-2 du Code du travail stipule : « Les mesures prises en matière de santé et de sécurité au travail ne doivent entraîner aucune charge financière pour les travailleurs» ; que vu les pièces versées aux débats notamment les frais occasionnés à l'entretien des vêtements de travail, il n'est pas contesté que l'employeur n'a pas payé ceux-ci ; qu'il y a lieu de faire droit aux demandes pour une somme de 360 € ; que sur le préjudice moral, les demandeurs étaient dans obligation d'entretenir les vêtements de travail qu'ils avaient l'obligation de porter et qu'ils ont été dans l'obligation de saisir le Conseil de prud'hommes pour le respect de la législation du travail ; qu'il est donc certain qu'un préjudice leur a été causé, qui sera évalué à la somme de 500 € ; que sur l'article 700, les demandeurs ont été obligés de saisir le Conseil de prud'hommes pour faire légitimer leurs droits ; que les frais exposés sont évalués à 800 € ; ALORS, D'UNE PART, QUE la réparation d'un dommage, qui doit être intégrale, ne peut excéder le montant du préjudice ; qu'en l'espèce, le Conseil de prud'hommes a indemnisé à trois reprises, sous trois chefs différents, le même préjudice correspondant aux frais occasionnés par l'entretien des vêtements de travail à savoir au titre de la discrimination salariale, au titre des frais d'entretien des vêtements de travail et au titre du préjudice moral ; qu'en statuant de la sorte, il a violé l'article 1149 du Code civil ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE le Conseil de prud'hommes a également indemnisé deux fois le préjudice subi par les salariés, lié au fait d'avoir été « obligés » de le saisir pour faire valoir leurs droits, à savoir non seulement au titre au titre de l'article 700 du Code de procédure civile mais également au titre d'un prétendu préjudice moral ; qu'en se prononçant ainsi, il a violé l'article 1149 du Code civil ; ALORS, ENFIN, QUE le fait d'être dans l'obligation d'entretenir ses vêtements de travail et de saisir le Conseil de prud'hommes pour le respect de la législation du travail ne saurait en aucun cas constituer un préjudice moral, qui est un dommage d'ordre psychologique ; qu'en justifiant l'allocation de dommages et intérêts au titre du préjudice moral par des faits qui n'étaient pas de nature à caractériser celui-ci, le Conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1149 du Code civil.