MINUTE N° :
JUGEMENT DU : 17 Janvier 2025
DOSSIER : N° RG 22/05385 - N° Portalis DBX4-W-B7G-ROJJ
NAC : 50B
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOULOUSE
POLE CIVIL - Fil 6
JUGEMENT DU 17 Janvier 2025
PRESIDENT
Madame PUJO-MENJOUET, Juge
Statuant à juge unique conformément aux dispositions des
articles
R 212-9 et 213-7 du Code de l'Organisation judiciaire
GREFFIER lors du prononcé
Madame RIQUOIR, Greffière
DEBATS
à l'audience publique du 08 Novembre 2024, les débats étant clos, le jugement a été mis en délibéré à l'audience du 10 janvier puis prorogé à l'audience de ce jour.
JUGEMENT
Réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe.
Copie revêtue de la formule
exécutoire délivrée
le
à
DEMANDERESSE
Mme [U] [T]
née le 09 Septembre 1978 à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Anaïs TOULOUSE, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant/postulant, vestiaire : 296
DEFENDEURS
Me [G] [V], demeurant [Adresse 1]
défaillant
Mme [E] [D]
née le 19 Avril 1967 à [Localité 5], demeurant [Adresse 3]
défaillant
M. [J] [W]
né le 26 Juin 1973 à [Localité 7], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Vincent BARAY, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat postulant, vestiaire : 47, Me Elodie KASSEM, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire : P158
EXPOSE DU LITIGE
Madame [U] [T] a acquis un
cheval, « Ulysse de RABUTIN » au cours de l'année 2017, au prix de 7 800 euros.
Ayant ensuite souhaité le mettre en vente, elle indique avoir conclu un mandat avec Monsieur [J] [W] en vue de confier la vente à ce dernier, et fixant le prix du
cheval, hors frais ou commission, au montant de 10 000 euros.
Elle explique que Monsieur [J] [W] aurait lui-même chargé Madame [E] [D] de trouver un acquéreur, à la suite de quoi cet acquéreur, Monsieur [N] [C], l'aurait informée avoir payé un prix de 5 000 euros et souhaitait récupérer un certificat d'immatriculation.
Elle a effectué un dépôt de plainte le 21 janvier 2019 auprès de la gendarmerie d'[Localité 6] à l'encontre de Madame [E] [D] pour abus de confiance. Lors de son audition par les enquêteurs, Madame [E] [D] a indiqué avoir confié le
cheval de Madame [U] [T] à Monsieur [S] [I].
Ce dernier, qui a été également auditionné par les enquêteurs, leur a dit avoir vendu le
cheval à Monsieur [N] [C] et avoir récupéré les fonds issus de cette vente après approbation donnée par Madame [E] [D], que Madame [U] [T] indique n'avoir jamais perçus.
Après mises en demeures infructueuses adressées à Madame [E] [D] et Monsieur [J] [W], Madame [U] [T] les a fait assigner devant le Tribunal judiciaire de Toulouse suivant exploits d'huissier des 16 et 23 décembre 2022 afin d'obtenir leur condamnation in solidum, à rembourser le prix de vente de son
cheval, outre le paiement de dommages-intérêts.
Suivant exploit d'huissier du 28 février 2023, elle a fait assigner Maître [G] [V] en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'entreprise individuelle de Madame [E] [D].
Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 18 octobre 2023, Madame [U] [T] demande au tribunal de :
Déclarer Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D] responsables de préjudices subis par Madame [U] [T] et ce en leurs qualités de mandataires en application des articles
1991 et suivants du code civil ;En conséquence :Condamner in solidum Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D], à verser à Madame [U] [T] la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice correspondant au prix de vente non versé ;Condamner in solidum Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D], à verser à Madame [U] [T] la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice correspondant à la perte de chance de vendre son
cheval à un prix supérieur ;Condamner in solidum Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D] à verser à Madame [U] [T] la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral subi ;En tout état de cause :Condamner in solidum Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D] aux entiers dépens ;Condamner in solidum Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D], à verser à Madame [U] [T] la somme de 2 000 euros par application de l'article
700 du code de procédure civile ;Débouter Monsieur [J] [W] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles à l'encontre de Madame [U] [T].
A l'appui de ses demandes et au visa des articles
1991 et suivants du Code civil, Madame [U] [T] fait valoir avoir conclu un contrat de mandat avec Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D] et que l'existence de ce contrat est établie par le procès-verbal de son audition, mais également de celles de Monsieur [J] [W] et de Monsieur [N] [C], qu'elle produit aux débats. En réponse au moyen soulevé par Monsieur [W], selon lequel la preuve du mandat en serait pas rapportée en l'absence de moyen de preuve écrit, Madame [U] [T] soutient avoir été dans l'impossibilité morale de se procurer un écrit, en raison des relations d'affection entre les parties à l'acte que Monsieur [J] [W] reconnaît au cours de son audition. En outre, elle ajoute que cette impossibilité résulte également du fait qu'il est d'usage dans le domaine hippique, de ne pas établir d'écrit. Elle considère que Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D] ont commis une faute dans l'exécution du mandat en ce qu'ils ont réalisé la vente sans obtenir l'accord préalable du propriétaire sur le prix de 5 000 euros et en ne lui versant pas le prix de vente. La demanderesse soutient que ces fautes lui ont causé des préjudices, correspondant au prix de vente du
cheval mais également à une perte de chance de vendre le
cheval à un montant d'au moins 10 000 euros ainsi qu'un préjudice moral.
Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 14 juin 2023, Monsieur [J] [W] demande au tribunal saisi de céans de :
A titre principal, débouter Madame [U] [T] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées à son encontre ;A titre reconventionnel, condamner Madame [U] [T] à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 2 500 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ; A titre subsidiaire :Condamner Madame [E] [D], représentée par Maître [G] [V], liquidateur judiciaire, à le relever indemne et le garantir de toutes condamnations éventuellement prononcées à son encontre ;Ecarter l'exécution provisoire du jugement à intervenir ; A titre plus subsidiaire, ordonner la consignation des sommes dues ou la constitution d'une garantie réelle ou personnelle suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations ;En tout état de cause :Condamner tout succombant à verser à Monsieur [J] [W] la somme de 2 000 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile ; Condamner tout succombant aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, et au visa des articles
9 et
32-1,
514-1 et
514-5 du Code de procédure civile,
1315,
1984,
1985,
1359,
1991 et suivants du Code civil, Monsieur [J] [W] fait valoir que Madame [U] [T] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un mandat conclu entre elle et lui, que cette preuve doit être rapportée par un écrit. Il considère que les éléments de preuve versés au débat par Madame [U] [T], à savoir les procès-verbaux d'audition sont insuffisants. A titre subsidiaire, il soutient que si l'existence d'un mandat le liant à Madame [U] [T] était retenue, il n'est pas démontré qu'il aurait commis une faute. Il précise qu'il n'est pas rapporté que la demanderesse lui aurait donné pour instruction de vendre son
cheval à un prix situé entre 8 000 et 12 000 euros et que les fonds issus de la vente ont été remis à Madame [E] [D], qu'il n'est donc pas responsable de leur non-restitution. En outre, il considère que les préjudices invoqués par Madame [U] [T] sont inexistants, en ce qu'elle n'établit pas que son
cheval a bien été vendu pour le prix de 5 000 euros, qu'elle ne démontre pas non plus que celui-ci devait être vendu au prix de 10 000 euros, ni l'existence d'un préjudice moral. A titre reconventionnel, il sollicite la condamnation de la demanderesse à lui payer la somme de 2 500 euros au motif que l'action en responsabilité qu'elle a intentée à son encontre, ne reposant sur aucun fondement juridique sérieux, est abusive au sens de l'article
32-1 du code de procédure civile. A titre subsidiaire, il sollicite la condamnation de Madame [E] [D] à le relever et garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, au motif que c'est cette dernière et non lui qui a commis les manquements invoqués par Madame [U] [T], à savoir la vente au prix de 5 000 euros sans son accord préalable, et l'absence de remise du prix de vente.
Pour un plus ample exposé des moyens soulevés par les parties, il est renvoyé à leurs écritures, en application de l'article
455 du code de procédure civile.
La clôture de la mise en état est intervenue par ordonnance du 22 mars 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoiries du 08 novembre 2024. A L'issue des débats, elle a été mise en délibéré au 10 janvier 2025, prorogé au 17 janvier 2025.
MOTIFS
Sur l'absence d'écrit
Sur l'impossibilité morale de se procurer un écrit
Aux termes de l'article
1359 du Code civil, l'acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant de 1 500 euros doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.
L'article
1360 du Code civil dispose que les règles de preuve consacrées par l'article
1359 du Code civil reçoivent exception notamment en cas d'impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit.
L'article
1984 du Code civil définit le mandat comme l'acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.
L'impossibilité morale d'établir un écrit est admise lorsqu'il existe des liens affectifs entre les parties au moment de la conclusion du contrat.
Lorsque l'impossibilité de se procurer un écrit est établie, le demandeur a la possibilité de prouver l'existence d'un acte juridique par tous moyens.
En l'espèce, et de manière non contestée par Monsieur [J] [W], Madame [U] [T] produit au débat le procès-verbal d'audition de ce dernier aux termes duquel il indique connaître parfaitement Madame [U] [T] qui est la conjointe de son neveu et qu'il aurait « encore mangé avec elle la semaine dernière ».
Cet élément démontre de l'impossibilité d'établir un acte écrit en raison des relations affectives unissant les parties.
Cependant, Madame [U] [T] ne fait pas état de l'impossibilité morale de se procurer un écrit à l'encontre de Madame [E] [D].
Sur l'usage de ne pas établir d'écrit invoqué par Madame [T]
L'article
1360 du Code civil dispose que les règles de preuve consacrées par l'article
1359 du Code civil reçoivent exception notamment s'il est d'usage de ne pas établir d'écrit.
En l'espèce, Madame [U] [T] fait valoir de manière non contestée par Monsieur [J] [W], qu'il est d'usage dans le domaine hippique, de ne pas établir de contrat écrit. Elle produit en ce sens, un arrêt rendu par la Cour d'appel de Caen, par lequel il a été considéré qu'il était d'usage de ne pas établir d'écrit dans le domaine hippique. L'existence de tels usages ressort également des propos tenus par Madame [E] [D] retranscrits sur son procès-verbal d'audition, qui indique ne pas avoir eu de document concernant le
cheval de Madame [U] [T], et que cela « ne se faisait pas forcément entre professionnels ».
Par ailleurs, Monsieur [J] [W] ne conteste pas non plus sa qualité de professionnel de l'équitation, qui ressort notamment du fait qu'il a préalablement vendu le
cheval Ulysse de RABUTIN à Madame [U] [T], et des échanges de celui-ci avec Madame [E] [D] au sujet de la vente d'autres
chevaux.
Au regard de cette qualité, il y a lieu de considérer que l'absence d'écrit établi entre Madame [U] [T] et Monsieur [J] [W] et entre Madame [U] [T] et Madame [E] [D], relève d'un usage professionnel propre au domaine hippique.
Dès lors, en application de l'article
1360 du Code civil, et au surplus du moyen précédent, les modes de preuve versés aux débats par Madame [U] [T] en vue d'établir l'existence d'un mandat, bien que ne constituant pas des écrits sous-seing privé ou authentiques, sont recevables.
Sur l'existence d'un contrat de mandat
Sur l'existence d'un contrat de mandat entre Madame [U] [T] et Monsieur [J] [W]
Il ressort du procès-verbal d'audition de Monsieur [S] [I], que celui-ci dit avoir été approché par Madame [E] [D], en vue de lui confier la vente du
cheval de Madame [U] [T] « pour n'importe quel prix », et que lorsque celui-ci avait trouvé un acquéreur, elle lui a indiqué devoir obtenir l'approbation de Monsieur [J] [W], puis que cette approbation lui avait été donnée.
Au cours de son audition, Madame [E] [D] a également indiqué aux enquêteurs que le
cheval Ulysse lui avait été remis par Monsieur [J] [W], qui lui avait dit vouloir les vendre en région parisienne, ou encore que « c'était lui qui gérait ».
Par ailleurs, Madame [U] [T] produit aux débats des correspondances échangées entre Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D] qui font état de ce que le premier a bien donné son approbation sur la vente du
cheval de la demanderesse, au prix de 5 000 euros.
L'ensemble de ces éléments met en évidence que Monsieur [J] [W] a bien transféré le
cheval Ulysse à Madame [E] [D] en vue de sa vente.
Par conséquent, il est établi que puisque Monsieur [J] [W] était en possession du
cheval Ulysse antérieurement à ce transfert, il s'est préalablement vu remettre ledit
cheval par Madame [U] [T] en vue d'en assurer la vente en son nom et pour son compte, ce qui correspond à un mandat au sens de l'article
1984 du Code civil.
Il y a donc lieu de retenir l'existence d'un contrat de mandat conclu entre Madame [U] [T] et Monsieur [J] [W].
Sur l'existence d'un contrat de mandat entre Madame [U] [T] et Madame [E] [D]
Les éléments de preuve produits par Madame [U] [T] permettent de mettre en évidence que Madame [E] [D] a fait procéder à la vente du
cheval Ulysse, en le confiant à son tour à Monsieur [S] [I], et notamment au regard de la pièce 11 versée en procédure faisant état d'échanges de sms entre Madame [E] [D] et Monsieur [J] [A]. En effet dans ces derniers elle indique que « [S] vient de vendre Ulysse », référant explicitement à Monsieur [S] [I] et au
cheval de Madame [U] [T].
Il est également établi que ledit
cheval a été transporté au domicile de Madame [E] [D], mais les procès-verbaux d'audition de Monsieur [J] [W] et de Madame [U] [T] se contredisent quant à la personne qui serait à l'origine de ce transport. A ce titre Madame [E] [D] indique ne pas connaître Madame [U] [T] et avoir reçu le
cheval de cette dernière par l'unique intermédiaire de Monsieur [J] [W]. A l'inverse Monsieur [J] [W] fait valoir que le
cheval a directement été confié à Madame [E] [D], précisant que celle-ci était la seule à être impliquée dans la vente.
Il s'ensuit que ces éléments sont insuffisants à établir qu'un contrat de vente a bien été conclu entre Madame [U] [T] et Madame [E] [D]. Madame [U] [T] n'est donc pas fondée à invoquer de la part de Madame [E] [D], une inexécution contractuelle, en l'absence de tout contrat formellement établi entre elles.
Sur la responsabilité de Monsieur [J] [W]
L'article
1991 du Code civil dispose : « Le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution. Il est tenu de même d'achever la chose commencée au décès du mandant, s'il y a péril en la demeure. »
Aux termes de l'article
1992 du Code civil : « Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion. Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu'à celui qui reçoit un salaire. »
En outre, l'article
1993 du Code civil dispose : « Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant. »
Enfin, en vertu de l'article
1994 du Code civil : « Le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion : 1° quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un ; 2° quand ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne, et que celle dont il a fait choix était notoirement incapable ou insolvable. Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est substituée. »
En l'espèce, les manquements reprochés par Madame [U] [T] à Monsieur [J] [W] consistent à avoir vendu le
cheval Ulysse à un prix n'étant pas compris entre 8 000 et 12 000 euros mais à un montant de 5 000 euros, et à ne pas lui avoir transféré les fonds issus de la vente.
Il est, par les correspondances intervenues entre Monsieur [J] [W] et Madame [E] [D], versées aux débats et dont la réalité n'est pas contestée, que le premier était bien titulaire d'une obligation de procéder à la vente d'Ulysse, laquelle vente a eu lieu en échange d'un prix de 5 000 euros. Ces correspondances sont corroborées par les auditions de Madame [E] [D] mais aussi de Monsieur [S] [I].
En revanche, aucun élément ne permet de mettre en évidence que Madame [U] [T] avait spécifiquement requis de Monsieur [J] [W], que le prix de vente soit compris entre 8 000 et 12 000 euros. En effet aucune pièce n'est produite au débat en ce sens, ni même tout commencement de preuve par écrit. Elle n'est donc pas fondée à invoquer une inexécution contractuelle de Monsieur [J] [W] s'agissant du montant du prix de vente.
S'agissant des fonds issus de la vente, il est constant que Madame [E] [D] les a perçus, ce qui n'est pas contesté en l'espèce. Si aucun élément ne permet non plus d'établir si Monsieur [J] [W] a ou non reçu pouvoir de se substituer une autre personne, il résulte de son obligation de mandataire, que celui-ci est tenu de la restitution du prix de vente auprès du mandant. En outre, il ne saurait être mis à la charge de Madame [U] [T] d'apporter la preuve d'un fait négatif, Monsieur [J] [W] étant donc tenu d'établir être libéré de son obligation. Or, aucun élément qu'il produit aux débats n'est de nature à l'établir.
Par conséquent, il y a lieu de considérer que Monsieur [J] [W] a commis une inexécution contractuelle en ce qu'il n'a pas restitué le prix issu de la vente du
cheval à Madame [U] [T].
Sur les demandes indemnitaires
Sur les dommages-intérêts correspondant au prix de vente
Aux termes de l'article
1231-1 du Code civil : « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. »
En l'espèce, il est constant que le prix de vente du
cheval de Madame [U] [T] s'est élevé au montant de 5 000 euros que l'acquéreur, Monsieur [N] [C], a réglé à Monsieur [S] [I] avant que ce dernier ne remette les fonds à Madame [E] [D]. En effet cela ressort des échanges entre les parties mais également de leurs déclarations dans le cadre de l'enquête pénale. En l'état des éléments versés aux débats, il n'est toutefois pas démontré que ces fonds aient été remis à Madame [U] [T].
Par conséquent, celle-ci est fondée à invoquer un préjudice matériel à hauteur de ce prix de vente, soit 5 000 euros, et solliciter son indemnisation par Monsieur [J] [W].
Sur les dommages-intérêts correspondant à la perte de chance
Madame [U] [T] sollicite l'indemnisation de son préjudice consistant en une perte de chance de ne pas avoir vendu son
cheval à un prix d'au moins 10 000 euros.
Cependant, tel que cela a précédemment été évoqué, celle-ci ne rapporte pas l'existence d'une obligation de Monsieur [J] [W] de vendre ledit
cheval à un tel prix. Par ailleurs, elle n'établit pas non plus l'existence de cette chance, de sorte qu'il est impossible à la juridiction d'évaluer le prix du
cheval à la revente, sans aucune pièce en ce sens.
Dès lors, il y a lieu de considérer que la chance de vendre le
cheval au prix de 10 000 euros est nulle, et qu'en tout état de cause, aucune inexécution contractuelle de Monsieur [J] [W] n'est à l'origine d'une perte de chance. Madame [U] [T] est donc déboutée de cette demande.
Sur le préjudice moral de Madame [U] [T]
Madame [U] [T] sollicite la condamnation de Monsieur [J] [W] à lui payer la somme de 2 000 euros de dommages-intérêts au titre de son préjudice moral. Elle fait valoir que la duperie dont elle a été victime par celui-ci, de même que la répétition des procédures et la dépossession de son
cheval pendant plus de 4 ans ont contribué à ce préjudice.
Il est établi que Monsieur [J] [W] entretenait une certaine proximité avec Madame [U] [T], de telle sorte qu'il est plausible que celle-ci soit davantage affectée par la procédure qu'elle a dû introduire à son encontre, et ce, après mises en demeures restées infructueuses. Il y a également lieu de prendre en considération la durée de la procédure et l'absence d'accord amiable, outre les éléments pénaux inhérents au dossier.
En conséquence, Monsieur [J] [W] sera condamné à payer à Madame [U] [T], la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Sur les demandes reconventionnelles de Monsieur [J] [W]
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive
L'article
32-1 du Code de procédure civile dispose : « Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés. »
L'exercice du droit d'ester en justice ne peut dégénérer en abus que s'il est caractérisé une attitude révélant que l'instance est en réalité instrumentalisée pour nuire à l'autre partie.
En l'espèce, l'action de Madame [U] [T] étant fondée, ne saurait être considérée comme constituant un abus ou introduite dans l'objectif de nuire à Monsieur [J] [W].
En conséquence, il y a lieu de débouter Monsieur [J] [W] de cette demande.
Sur la demande en garantie
Monsieur [J] [W] sollicite la condamnation de Madame [E] [D] à le relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre. Il fait valoir que c'est elle qui est à l'origine des manquements qui lui sont reprochés par Madame [U] [T].
Toutefois, en l'absence de preuve de l'existence d'un contrat conclu entre Madame [U] [T] et Madame [E] [D], Monsieur [J] [W] n'est pas fondé à se prévaloir des manquements de cette dernière en vue d'obtenir sa condamnation à le relever et garantir de ses propres condamnations.
En conséquence, il y a lieu de débouter Monsieur [J] [W] de cette demande.
Sur les demandes accessoires
Sur les dépens
Aux termes de l'article
696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
En l'espèce, Monsieur [J] [W], partie perdante, sera condamné aux dépens de l'instance.
Sur les frais irrépétibles
L'article
700 du Code de procédure civile dispose que dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante à payer à l'autre partie, la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité, de la situation économique de la partie condamnée.
En l'espèce, il y a lieu de condamner Monsieur [J] [W] à payer à Madame [U] [T] la somme de 2 000 euros sur ce fondement.
Sur l'exécution provisoire
Les articles
514 et
514-1 du Code de procédure civile disposent que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement et que le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire.
Au soutien de sa demande tendant à voir écarter l'exécution provisoire de la présente décision, Monsieur [J] [W] invoque un risque que Madame [U] [T] soit dans l'incapacité de restituer les sommes auxquelles il serait condamné en cas d'infirmation de la décision. Toutefois, celui-ci n'établit pas l'existence d'un tel risque, ni de tout autre élément de nature à rendre l'exécution provisoire incompatible avec la nature de l'affaire.
Par conséquent, il n'y a lieu d'écarter l'exécution provisoire du présent jugement.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement par décision réputée contradictoire rendue en premier ressort et mise à disposition au greffe,
CONDAMNE Monsieur [J] [W] à payer à Madame [U] [T] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice matériel correspondant au prix de vente non restitué ;
DEBOUTE Madame [U] [T] de sa demande tendant à obtenir la condamnation de Monsieur [J] [W] au titre de la perte de chance ;
CONDAMNE Monsieur [J] [W] à payer à Madame [U] [T] la somme de 1 000 euros au titre de son préjudice moral ;
DEBOUTE Madame [U] [T] de sa demande de condamnation in solidum à l'encontre de Madame [E] [D] ;
DEBOUTE Monsieur [J] [W] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
DEBOUTE Monsieur [J] [W] de sa demande visant à relever garantir à l'encontre de Madame [E] [D] représentée par Maître [G] [V], liquidateur judiciaire ;
CONDAMNE Monsieur [J] [W] aux dépens de l'instance ;
CONDAMNE Monsieur [J] [W] à payer à Madame [U] [T] la somme de 2 000 sur le fondement de l'article
700 du code de procédure civile ;
DIT n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la présente décision ;
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La greffière La présidente