CIV. 2
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 mars 2016
Rejet
Mme FLISE, président
Arrêt n° 331 F-D
Pourvoi n° R 15-14.587
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [U].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 19 février 2015.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
Statuant sur le pourvoi formé par
M. [I] [U], domicilié [Adresse 2],
contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2014 par la cour d'appel d'Angers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse d'allocations familiales du Maine-et-Loire, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 3 février 2016, où étaient présents : Mme Flise, président, M. Cadiot, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Szirek, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Cadiot, conseiller, les observations de la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat de M. [U], de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse d'allocations familiales du Maine-et-Loire, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen
unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 16 septembre 2014), que M. [U], de nationalité arménienne, entré sur le territoire national avec son épouse et leurs trois enfants et y séjournant, depuis le 9 mars 2010, au bénéfice d'une autorisation provisoire de séjour renouvelée puis d'une carte de séjour temporaire délivrée le 8 mars 2011 en application de l'article L. 311-11, 11°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers, a sollicité, le 2 juin 2010, le versement de prestations familiales par la caisse d'allocations familiales du Maine-et-Loire ; qu'il en a contesté le refus devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que l'intéressé fait grief à
l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'en refusant d'écarter l'application des dispositions des articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale, motifs pris de ce que ces articles revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne méconnaissent l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant, ni ne violent les autres articles des conventions internationales et principes dont se prévaut M. [U], alors pourtant qu'à l'appui de ses conclusions M. [U] faisait valoir qu'il était entré en France en même temps que ses enfants, de sorte que la procédure de regroupement familial ne trouvait pas à s'appliquer, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
2°/ qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de M. [U], faisant valoir que la distinction opérée par les articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale entre les titres de séjour délivrés en application de l'article L. 311-11-11 et L. 313-11-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne reposait sur aucune justification objective ou raisonnable et conduisait à une discrimination entre les enfants fondés sur la maladie des parents, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile ;
Mais attendu
que l'arrêt énonce exactement que, selon les dispositions des articles
L. 512-2 et
D. 512-1 du code de la sécurité sociale, l'étranger qui demande à bénéficier de prestations familiales doit justifier de la régularité de l'admission sur le territoire national ainsi que du séjour de ses enfants par la production de documents énumérés par le second de ces textes, au nombre desquels ne figure pas l'admission au séjour d'un des parents, sur le fondement du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'est pas destinée à accueillir une famille mais à permettre à son bénéficiaire d'accéder personnellement en France à une prise en charge médicale qu'il ne peut recevoir dans son pays d'origine et dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que ces dispositions, qui revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité, dans un État démocratique, d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne méconnaissent l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant, ni ne violent les stipulations des autres conventions internationales et des principes dont se prévaut M. [U] ;
Que de ces énonciations, la cour d'appel, répondant ainsi aux écritures prétendument délaissées, a déduit, à bon droit, que faute de justifier des documents exigés par les articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale, l'intéressé n'était pas éligible au bénéfice des prestations familiales ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui, en ses troisième et quatrième branches, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [U] aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille seize.
MOYEN ANNEXE
au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour M. [U]
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de M. [U] en paiement de prestations familiales au profit de ses trois enfants ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article
L. 512-2, alinéas 2 et 3, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, bénéficient de plein droit des prestations familiales les étrangers, non ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, qui résident régulièrement en France sous réserve que soit remplie pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, une des conditions mentionnées, dont celle d'enfant étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée aux articles L. 313-8, L. 313-11,7°, L. 313-11,10°, ou L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que selon l'article
D. 512-2 du code de la sécurité sociale, la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers dont le bénéficiaire a la charge et au titre desquels il demande des prestations familiales est justifiée par la production d'un des documents mentionnés, dont l'attestation délivrée par l'autorité préfectorale précisant que l'enfant est entré en France au plus tard en même temps que l'un de ses parents admis au séjour sur le fondement de l'article
L. 313-11,7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, d'une part, ces articles revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne méconnaissent l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant, ni ne violent les autres articles des conventions internationales et principes dont se prévaut M. [U] ; que, d'autre part, M. [U] dont le séjour en France est autorisé en raison de son état de santé mais non au regard de la qualité de travailleur migrant ne peut utilement se prévaloir de la convention n°97 de l'OIT du 1er juillet 1949, laquelle ne concerne pas, en outre, les conditions d'accueil des enfants, seules en cause ici ; qu'il n'y a donc pas lieu d'écarter l'application des articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale au présent litige ; que M. [U] bénéficie d'une carte de séjour qui lui a été délivrée en application de l'article
L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais qui ne figure pas parmi celles qui sont mentionnées par les articles
L. 512-2 et D. 512-2 précités ; que par ailleurs, M. [U] ne justifie pas que l'autorité préfectorale lui a délivré une attestation précisant que les enfants sont entrés en France au plus tard en même temps que l'un de leurs parents admis au séjour sur le fondement de l'article
L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les conditions d'octroi des prestations familiales prescrites par les dispositions légales et réglementaires ne sont donc pas remplies ; qu'en conséquence, par voie d'infirmation du jugement, il y a lieu de rejeter sa demande en paiement ;
1°) ALORS QU'en refusant d'écarter l'application des dispositions des articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale, motifs pris de ce que ces articles revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne méconnaissent l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant, ni ne violent les autres articles des conventions internationales et principes dont se prévaut M. [U], alors pourtant qu'à l'appui de ses conclusions M. [U] faisait valoir qu'il était entré en France en même temps que ses enfants, de sorte que la procédure de regroupement familial ne trouvait pas à s'appliquer, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
2°) ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions de M. [U], faisant valoir que la distinction opérée par les articles
L. 512-2 et
D. 512-2 du code de la sécurité sociale entre les titres de séjour délivrés en application de l'article L. 311-11-11 et L. 313-11-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne reposait sur aucune justification objective ou raisonnable et conduisait à une discrimination entre les enfants fondés sur la maladie des parents, la cour d'appel a violé l'article
455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en affirmant que M. [U] ne justifie pas que l'autorité préfectorale lui a délivré une attestation précisant que les enfants sont entrés en France au plus tard en même temps que l'un de leurs parents admis au séjour sur le fondement de l'article
L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de la délivrance de l'attestation préfectorale qui ressortait de l'échange de courriels intervenu entre la préfecture de Maine-et-Loire et les services de la CAF de Maine-et-Loire qu'invoquait expressément M. [U] dans ses écritures et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé l'article
16 du code de procédure civile ;
3°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QU'en ne s'expliquant pas sur l'échange de courriels intervenu entre la préfecture de Maine-et-Loire et les services de la CAF de Maine-et-Loire valant selon M. [U] attestation préfectorale précisant que les enfants sont entrés en France au plus tard en même temps que l'un de leurs parents admis au séjour sur le fondement de l'article
L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la cour d'appel a méconnu l'article
455 du code de procédure civile.