Tribunal de grande instance de Paris, 30 septembre 2010, 2009/14876

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2009/14876
  • Domaine de propriété intellectuelle : BREVET
  • Numéros d'enregistrement : FR9716522
  • Parties : COGNIS I MASTER FUND LP ; W (Matthew) ; VAN H (Mathijs) ; DE B (Richard) ; OSIRIS TRUSTEES LIMITED ; L (Malcom) / BIOSYNTEC
  • Décision précédente :Tribunal de grande instance de Paris, 6 mai 2010
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Chronologie de l'affaire

Tribunal de grande instance de Paris
2010-09-30
Tribunal de grande instance de Paris
2010-05-06

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARISORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETATrendue le 30 Septembre 2010 3ème chambre 4ème sectionN° RG : 09/14876 DEMANDEURSSociété COGNIS I MASTER FUND LPdomiciliée : chez Maître Francine L[...]75008 PARIS Monsieur Matthew W Monsieur M Monsieur RICHARD DE B Société OSIRIS TRUSTEES LIMITEDdomiciliée : chez Me Francine L JOUBERT[...]75008 PARIS Monsieur Malcom L représentés par Me Francine LE PECHON-JOUBERT-SELAS DE GAULLE FLEURANCE et Associés, avocat au barreau de PARIS,vestiaire K0035 DEFENDERESSESociété BIOSYNTEC16 place Vendôme75001 PARISreprésentée par Me Jean-Didier MEYNARD- SCP BRODU CICUREL MEYNARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0240 MAGISTRAT DE LA MISE EN ETATAgnès MARCADE, Jugeassistée de Katia C, DÉBATSA l'audience du 2 septembre 2010, avis a été donné aux avocats que l'ordonnance serait rendue le 30 Septembre 2010. ORDONNANCERendue par mise à disposition au greffeContradictoirementen premier ressort

FAITS ET PROCÉDURE

La société COGNIS I MASTER FUND LP (ci-après COGNIS) est un véhicule d'investissements et est actionnaire minoritaire de la société BIOSYNTEC qui a une activité d'ingénierie et de conseils dans le domaine de la biotechnologie. La société BIOSYNTEC est titulaire d'un brevet français numéro 9716522 déposé le 24 décembre 1997 et portant sur la création d'un filtre spécifique permettant de réduire les risques associés à la consommation du tabac. Cette invention a fait également l'objet d'une demande de brevet européen désignant la France numéro 1018499, déposée le 23 décembre 1998 et délivrée le 28 août 2002. Pour financer la production et la commercialisation de cette invention, la société COGNIS a fait une avance à la société BIOSYNTEC par contrat en date du 11 novembre 2008 d'un montant de 350.000 €. Des modalités de remboursement étaient prévues à l'article 2 dudit contrat. Le somme empruntée, outre les intérêts, devait être remboursée au 12 juillet 2009. Cette échéance n'ayant pas été respectée, une lettre de mise en demeure a été adressée par la société COGNIS à la société BIOSYNTEC le 28 juillet 2009. Ce courrier est resté sans réponse. La société COGNIS a alors fait procéder le 10 septembre 2009 à la saisie des brevets susvisés en application des dispositions de l'article L 613-21 du Code de la propriété intellectuelle. C'est dans ces conditions que la société COGNIS a fait assigner la société BIOSYNTECH par acte en date du 25 septembre 2009 devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de la voir condamnée à lui payer la somme de 420.000 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 12 juillet 2009, de valider la saisie conservatoire en date du 10 septembre 2009, d'ordonner la mise en vente forcée des brevets français et européen et d'affecter le prix de vente à concurrence du montant de sa créance. Par conclusions du 11 février 2010, Messieurs Matthew W, Mathijs H, Richard de B et la société OSIRIS TRUSTEES, actionnaires de la société défenderesse, qui ont octroyé un prêt à la société BIOSYNTEC sont intervenus volontairement à l'instance. Par conclusions du 2 mars 2010, Monsieur Malcolm L, autre actionnaire de la société BIOSYNTEC et qui a également prêté une somme d'argent à la société BIOSYNTEC est intervenu volontairement à l'instance. Par ordonnance en date du 6 mai 2010, le juge de la mise en état a :- constaté que la société COGNIS, Messieurs Matthew W, Mathijs H, Richard de B, Malcolm L et la société OSIRIS TRUSTEES se désistent de leur incident au titre du paiement de l'annuité du brevet français numéro FR9716522,- rejeté l'exception de nullité de l'assignation en date du 25 septembre 2009 de la société BIOSYNTEC,- dit que le juge de la mise en état n'est pas compétent pour connaître des demandes de la société BIOSYNTEC tendant à voir déclarer fausse la pièce n°5 intitulée « contrat de prêt du 11 novembre 2008 » et à l'écarter des débats et- débouté les parties de leurs demandes formées au titre de leurs frais irrépétibles. Par conclusions du 24 juin 2010, la société BIOSYNTEC sollicite à nouveau du juge de la mise en état l'annulation de l'assignation en date du 25 septembre 2009 et la condamnation de la société COGNIS à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Dans ses conclusions en réponse signifiées le 2 septembre 2010, elle fait valoir que la société COGNIS n'a pas la capacité d'ester en justice car cette société domiciliée aux Iles de grand Cayman n'est pas dotée de la personnalité morale. Elle ajoute que, malgré ses demandes répétées, la société COGNIS n'a pas justifié de sa capacité d'ester en justice estimant au surplus qu'elle n'aurait pu diligenter une procédure judiciaire qu'à travers son General P ainsi qu'il ressort de la loi applicable au Limited Partnership des îles du Grand Cayman. Elle conclut donc à la nullité de l'assignation. A titre subsidiaire, elle sollicite que soit ordonné à la société COGNIS de communiquer un certificat de coutume émanant de l'autorité administrative compétente de Grand Cayman Island attestant de sa capacité d'ester en justice. Par conclusions en réponse à incident en date du 13 août 2010, la société COGNIS, Messieurs Matthew W, Mathijs H, Richard de B, Malcolm L et la société OSIRIS TRUSTEES demandent au juge de la mise en état de rejeter l'ensemble des demandes de la société Biosyntec. Ils sollicitent en outre la condamnation de cette dernière à payer à la société COGNIS la somme de 50.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et dilatoire ainsi qu'à la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Ils estiment que les documents sur lesquels se fonde la société Biosyntec pour contester la capacité d'ester en justice de la société COGNIS ont une origine, une nature, une pertinence et une antériorité sujettes à caution ou sont en contradiction avec la position soutenue par la demanderesse à l'incident. Ils arguent également d'une ordonnance en date du 13 juillet 2010 du Président du Tribunal de commerce de Paris par laquelle celui-ci a reconnu la capacité de la société COGNIS d'ester en justice, capacité qui était contestée par la société Biosyntec. Ils considèrent en outre que la société Biosyntec tente de multiplier les procédures et les arguments pour compliquer le débat et ce pour retarder le remboursement des sommes qu'elle ne conteste pas devoir à Cognis et aux intervenants volontaires à la présente instance. Ils en concluent que la demanderesse à l'incident fait preuve d'un comportement abusif et dilatoire qui cause un préjudice à la société Cognis. L'incident a été plaidé le 2 septembre 2010.

MOTIFS

Sur la validité de l'assignation en date du 25 septembre 2009 La société BIOSYNTEC soutient que la société COGNIS n'a pas de capacité d'ester en justice et se fonde sur plusieurs documents émanant de cabinets juridiques ou d'avocats (Conyers Dill & Pearman, Allen & Overy et Appleby) dont elle déduit qu'un fonds d'investissement constitué sous la forme d'un « exempted limited partnership » n'a pas la personnalité morale et que seul le General P d'un tel fonds d'investissement peut ester en justice au nom et pour le compte de celui-ci. Toutefois, il ressort des éléments versés a débat pas la société COGNIS à savoir : ses statuts intitulés « Limited partnership agreement » du 26 novembre 2003 et notamment de l'article 2 dont il ressort que le General P est le représentant légal du partnership, son certificat d'enregistrement au registre des « exempted limited partner » des Iles Cayman du 25 novembre 2003, que la société COGNIS est régulièrement constituée et immatriculée en tant que « exempted limited partnership » au sens du droit des Iles Cayman. Il apparaît en outre de la consultation établie par le Cabinet Maples sis aux Iles Cayman que selon le droit de cet Etat, toute action en justice formée par ou contre un « exempted limited partnership » des Iles Cayman peut être entamée au nom de ce partnership. Ainsi, à supposer que soit démontrée que d'après la loi des Iles Cayman une « exempted limited partnership » n'a pas de personnalité morale, il apparaît des éléments versés aux débats que selon le droit des Iles Cayman et particulièrement du « Cayman Island Grand Court Rules Order 81, article 12 », qu'elles peuvent néanmoins intenter une action ou y défendre. L'exception de nullité de l'assignation de la société BIOSYNTEC est en conséquence rejetée. Au vu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société BIOSYNTEC tendant à ce que soit ordonné à la société COGNIS de communiquer un certificat de coutume émanant de l'autorité administrative compétente de Grand Cayman Island attestant de sa capacité d'ester en justice. Sur la demande de dommages et intérêts la société COGNIS pour procédure abusive II n'apparaît pas que la société BIOSYNTEC ait abusé de son droit de défense en soulevant à nouveau une exception de nullité de l'assignation qui est de la compétence exclusive du juge de la mise en état, sa mauvaise foi n'étant pas démontrée en l'espèce, la question soulevée tenant à la capacité d'ester en justice de la société COGNIS pouvant légitimement se poser. Il convient toutefois de condamner la société BIOSYNTEC à payer à la société COGNIS, qui a du à nouveau engager des frais pour faire valoir ses droits alors que l'exception de nullité en cause aurait pu être utilement soulevée à l'occasion du précédent incident, une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile qu'il est équitable de fixer à la somme de 5.000 €. Les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en État, statuant par ordonnance remise au greffe du Tribunal de céans, contradictoire et susceptible d'appel dans les conditions prévues à l'article 776 du Code de procédure civile. - Rejetons l'exception de nullité de l'assignation en date du 25 septembre 2009 de la société BIOSYNTEC ; - Rejetons la demande de la société BIOSYNTEC tendant à ce que soit ordonné à la société COGNIS de communiquer un certificat de coutume émanant de l'autorité administrative compétente de Grand Cayman Island attestant de sa capacité d'ester en justice. - Rejetons la demande de dommages et intérêts de la société COGNIS I MASTER FUND LP pour procédure abusive ; - Condamnons la société BIOSYNTEC à payer à la société COGNIS I MASTER FUND LP la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; - Renvoyons les parties à l'audience du juge de la mise en état du 4 novembre 2010 à 14h30 pour dernière conclusions au fond de la société BIOSYNTEC et fixation ; - Réservons les dépens.