Cour d'appel de Toulouse, Chambre 3, 7 décembre 2022, 21/04079

Synthèse

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Texte intégral

07/12/2022

ARRÊT

N° 745/2022 N° RG 21/04079 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OMW7 CBB/CD Décision déférée du 21 Septembre 2021 - Tribunal de Commerce d'ALBI ( ) M. [O] SARL MPB VITRAGES SARL GROUPE JH SAS MY PARE BRISE C/ [E] [T] S.A.R.L. GLAZING SUD INFIRMATION Grosse délivrée le à REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 3ème chambre *** ARRÊT DU SEPT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX *** APPELANTES SARL MPB VITRAGES prise en la personne de son gérant, domicilié ès qualités au dit siège social [Adresse 3] [Adresse 3] Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE Représentée par Me Olivier RICHARD de la SELAS FIDAL, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE SARL GROUPE JH prise en la personne de son gérant, domicilié ès qualités au dit siège social [Adresse 3] [Adresse 3] Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE Représentée par Me Olivier RICHARD de la SELAS FIDAL, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE SAS MY PARE BRISE prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités au dit siège social [Adresse 3] [Adresse 3] Représentée par Me Gilles SOREL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE Représentée par Me Olivier RICHARD de la SELAS FIDAL, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE INTIMÉS Monsieur [E] [T] [Adresse 2] [Adresse 2] Représenté par Me Karine GROS de la SCP MAIGNIAL GROS DELHEURE, avocat au barreau D'ALBI S.A.R.L. GLAZING SUD Prise en la personne de son gérant domicilié audit siège [Adresse 1] [Adresse 1] Représentée par Me Emmanuel GIL de la SCP SCPI BONNECARRERE SERVIERES GIL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Michel MALL de l'AARPI ADDAX AVOCATS, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. BENEIX-BACHER, Présidente, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : C. BENEIX-BACHER, président E.VET, conseiller A. MAFFRE, conseiller Greffier, lors des débats : I. ANGER ARRET : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par M. BUTEL, greffier de chambre FAITS et PROCEDURE Suivant arrêt mixte en date du 14 septembre 2022 auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, la présente cour a': - confirmé l'ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce d'Albi du 21 septembre 2021 sur la compétence du juge des requêtes du tribunal de commerce d'Albi et sur la qualité à agir de la SARL Glazing Sud. Pour le surplus, avant dire droit : - invité les parties à s'expliquer contradictoirement sur le moyen soulevé d'office tiré de l'irrecevabilité de la requête du 7 juin 2021 et donc la rétractation de l'ordonnance du 9 juin 2021 à défaut de caractérisation de circonstances justifiant une dérogation au principe du contradictoire tant dans la requête que dans l'ordonnance, - ordonné la réouverture des débats à l'audience de la cour le 24 octobre 2022 à 09h00 statuant en formation de conseiller rapporteur avec nouvelle clôture des débats au 17 octobre 2022. - réservé les dépens et autres demandes.

MOYENS

et PRETENTIONS des PARTIES Les SARL MPB Vitrages, la SARL Groupe JH et la SAS My Pare Brise dans leurs dernières écritures en date du 20 septembre 2022 demandent à la cour de': - infirmer le jugement rendu le 21 septembre 2021 par le Tribunal de commerce d'Albi en ce qu'il a: *confirmé la compétence de M. le Président pour ordonner les mesures d'instruction in futurum dans ce litige, *dit que l'erreur matérielle a été corrigée, *rejeté l'intégralité des demandes, *confirmé les ordonnances rendues par M. le Président les 09/06/2021 et 30/06/2021, *condamné M. [T], la SARL Groupe JH, la SAS My Pare Brise et la SARL MPB Vitrages in solidum au paiement de : - la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - les entiers dépens de la présente instance, liquidés et taxés à la somme de 125.56 €, outre les dépens de l'affaire enrôlée sous le numéro 2021/001542 et jointe à la présente affaire, taxés et liquidés à la somme de 183.92 €, etoutre le coût de la signification de la présente décision, Statuant a nouveau : - déclarer irrecevable la requête déposée le 7 juin 2021 par la société Glazing Sud au Tribunal de commerce d'Albi

; En conséquence

: - rétracter l'ordonnance rendue le 9 juin 2021 par le Président du Tribunal de commerce d'Albi sur requête de la société Glazing Sud ; - rétracter l'ordonnance modificative rendue le 30 juin 2021 par le Président du Tribunal de commerce d'Albi sur requête de la société Glazing Sud ; - ordonner la restitution immédiate de l'intégralité des données et documents dont la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles Beral Calmes a pris possession lors des opérations du 19 juillet 2021 et ayant été communiqués à la Glazing Sud et ce, sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir ; - ordonner la destruction immédiate de l'intégralité des données et documents dont la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles Beral Calmes a pris possession lors des opérations du 19 juillet 2021 et ayant été placés sous séquestre en son étude ; - interdire à la société Glazing Sud de faire état ou usage des éventuels constats d'huissier ou des pièces annexées en exécution de l'ordonnance rétractée et ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir ; - juger que Monsieur le Président restera compétent pour connaître de la liquidation éventuelle des astreintes qu'il aura ordonnées ; - condamner la société Glazing Sud à payer aux sociétés Goupe JH, My Pare Brise et MPB Vitrages la somme de 5.000 € chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; - condamner la société Glazing Sud aux entiers dépens. La Sarl Glazing Sud dans ses dernières écritures en date du 19 septembre 2022 demande à la cour de': - débouter les Appelants de l'ensemble de leurs fins et moyens, - confirmer l'ordonnance entreprise dans toutes ses dispositions, - condamner in solidum les Appelants aux entiers frais et dépens ainsi qu'à une indemnité de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile. M. [T], dans ses dernières écritures en date du 21 septembre 2022 demande à la cour de : - infirmer l'ordonnance de référés du 21 septembre 2021 en ce qu'elle a : *confirmé les ordonnances des 9 et 30 juin 2021, *condamné M. [T], les SARL Groupe JH,SAS My Pare Brise et, la SARL MPB Vitrages in solidum au paiement de : - la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile - les sommes de 125.56€ et 183,92€ au titre des dépens outre le coût de la signification, et statuant à nouveau, à titre principal, - déclarer irrecevable la requête du 7 juin 2021, en conséquence : - rétracter l'ordonnance rendue le 9 juin 2021 et celle du 30.06.2021 par le Président du tribunal de commerce d'Albi sur requête de la SARL Glazing Sud ; - ordonner la restitution immédiate de l'intégralité des données et documents dont la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles-Beral Calmes a pris possession lors des opérations du 19 juillet 2021 et ayant été communiquées à la SARL Glazing Sud et ce, sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir; - ordonner la destruction immédiate de l'intégralité des données et documents dont la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles-Beral Calmes a pris possession lors des opérations du 19 juillet 2021 et ayant été placéessous séquestre en son étude ; - interdire à la SARL Glazing Sud de faire état ou usage des éventuels constats d'huissier ou des pièces annexées en exécution de l'ordonnance rétractée et ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir ; à titre subsidiaire, - juger que les mesures d'instruction in futurum, autorisées par les ordonnances du 9 juin 2021 et du 30 juin 2021 sur requête de la SARL Glazing Sud au domicile de M. [T] ne sont pas circonscrites dans leur objet excédant ainsi les prévisions de l'article 145 du Code de procédure civile et sont disproportionnées à l'objectif de preuve poursuivi, en conséquence : - rétracter l'ordonnance rendue le 9 juin 2021 et celle du 30.06.2021 par le Président du tribunal de commerce d'Albi sur requête de la SARL GlazingSud ; - ordonner la restitution immédiate de l'intégralité des données et documents dont la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles-Beral Calmes a pris possession lors des opérations du 19 juillet 2021 et ayant été communiquées à la SARL Glazing Sud et ce, sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir; - ordonner la destruction immédiate de l'intégralité des données et documents dont la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles-Beral Calmes a pris possession lors des opérations du 19 juillet 2021 et ayant été placées sous séquestre en son étude ; - interdire à la SARL Glazing Sud de faire état ou usage des éventuels constats d'huissier ou des pièces annexées en exécution de l'ordonnance rétractée et ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir ; en toutes hypothèses, - condamner la SARL Glazing Sud à payer à M. [T] la somme de 4500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; - condamner la SARL Glazing Sud aux entiers dépens. MOTIVATION Selon l'article 493 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. La demande de rétractation d'une ordonnance sur requête rendue sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ne tend qu'au rétablissement du principe de la contradiction. Ainsi, les mesures d'instruction prises sur le fondement de l'article 145 ne peuvent être ordonnées sur requête que lorsque les circonstances exigent qu'elles ne le soient pas contradictoirement. En vertu de ces textes le juge doit vérifier au préalable, même d'office, si la requête et l'ordonnance caractérisent des circonstances qui exigent que la mesure sollicitée soit prise à l'insu de la partie à laquelle on entend l'opposer. Si le souci d'efficacité de la mesure sollicitée constitue incontestablement une justification à l'absence de contradiction, encore faut-il que les circonstances justifiant une dérogation au principe de la contradiction soient caractérisées par la requête ou par l'ordonnance rendue sur celle-ci. Et, si la condition n'est pas remplie, la requête doit être déclarée irrecevable. Ainsi, dans le silence de la requête ou de l'ordonnance, le juge ne peut pas rechercher ces circonstances dans les pièces produites au soutien de la requête ou les déduire des circonstances de la cause ni se fonder sur des faits postérieurs à la requête. Et pour vérifier la recevabilité de la requête qui doit contenir des éléments propres au cas d'espèce de nature à justifier une dérogation du principe du contradictoire, le juge doit se placer au jour de la requête ou au jour de l'ordonnance. En l'espèce, tant la requête du 7 juin 2021 que l'ordonnance du 9 juin 2021 comme la requête modificative du 29 juin 2021 et l'ordonnance qui a suivi le 30 juin 2021 ne visent aucune circonstance justifiant la dérogation au principe du contradictoire. Les requêtes principale et modificative sont totalement taisantes sur ce point et l'ordonnance principale vise seulement « l'examen de la requête et les éléments produits ». La SARL Glazing Sud soutient au contraire que la requête contient tous éléments permettant de suspecter des actes de concurrence déloyale par débauchage massif de salariés dont celui de M. [T] tenu par une clause de non concurrence'; et compte tenu des mensonges et dissimulations dont il a fait preuve au profit des sociétés appelantes, attitude avérée par une enquête privée, il apparaissait évident qu'un débat contradictoire lui aurait permis de disposer d'un temps nécessaire pour dissimuler les éléments de preuve recherchés. Il était ainsi caractérisé qu'en cas de recours au contradictoire, la recherche des informations objet de la requête et dont l'intimée ne disposait pas, se serait avérée vaine. Seul un effet de surprise permettait de les obtenir, s'agissant en particulier de la présence chez les appelantes, de fichiers, contrats, devis ou factures comprenant le nom de l'intimée ou de ses clients, auparavant traités par M. [T]. Ce faisant, la SARL Glazing Sud tente par ces explications de justifier a posteriori les circonstances qui l'ont conduite à solliciter de façon non contradictoire des mesures d'instruction. Or, de telles justifications, à la suite de l'arrêt Avant Dire Droit, ne peuvent pallier l'insuffisance de la requête sur ce point. D'autant que le fait pour un ancien salarié d'avoir menti à son ancien employeur sur son embauche chez un concurrent alors qu'il était tenu d'une clause de non concurrence ne suffit pas à lui seul à justifier le recours à une mesure non contradictoire d'investigation chez le dit concurrent et chez le salarié. Et les ordonnances des 9 et 30 juin 2021 ne comblent pas ce défaut de motivation puisqu'elles renvoient à la requête et ses motifs, de sorte que celle-ci n'est pas recevable et les ordonnances doivent être rétractées. En conséquence, l'ordonnance du 21 septembre 2021 sera infirmée. Les SARL MPB Vitrages, la SARL Groupe JH et la SAS My Pare Brise et M. [T] sollicitent tout à la fois la restitution des pièces saisies par l'huissier et leur destruction'; ces demandes étant contradictoires il convient d'ordonner la restitution sous astreinte, les interessés faisant leur affaire personnelle du sort qu'ils entendront donner à ces pièces.

PAR CES MOTIFS

La cour - Infirme l'ordonnance du président du tribunal de commerce d'Albi en date du 21 septembre 2021 en toutes ses dispositions. Statuant à nouveau': - Déclare irrecevables les requêtes de la SARL Glazing Sud en date des 7 et 29 juin 2021. - Rétracte l'ordonnance rendue par Monsieur le Président du tribunal de commerce d'Albi le 9 juin 2021 modifiée suivant ordonnance du 30 juin 2021 rendues sur requête de la SARL Glazing Sud. - Ordonne à la SARL Glazing Sud de restituer à M. [T] et à la SARL MPB Vitrages, la SARL Groupe JH et la SAS My Pare Brise l'intégralité des données et documents saisis le 19 juillet 2021 en original et les éventuelles copies par la SCP d'huissiers de justice Vialelle Merles Beral Calmes au domicile de M. [T] et aux sièges sociaux des dites sociétés qu'ils s'agissent des pièces qui auraient été remises à la SARL Glazing Sud ou celles séquestrées par l'huissier en son étude, dans les 8 jours de la présente décision à défaut de quoi la SARL Glazing Sud sera tenue à une astreinte de 500 € par jour de retard, l'astreinte courant pendant 3 mois. - Fait interdiction à la société Glazing Sud de faire état ou usage des éventuels constats d'huissier ou des pièces saisies en original ou copie en exécution de l'ordonnance rétractée et ce sous astreinte de 1.000 € par infraction constatée à compter de la décision à intervenir et ce pendant 3 mois. - Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SARL Glazing Sud à verser à la SARL MPB Vitrages, la SARL Groupe JH et la SAS My Pare Brise, ensemble, la somme de 1000€ et à M. [T] la somme de 500€. - Condamne la société Glazing Sud aux entiers dépens de première instance et d'appel. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT M. BUTEL C. BENEIX-BACHER