Cour administrative d'appel de Paris, 10ème Chambre, 31 décembre 2012, 12PA00756

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
  • Numéro d'affaire :
    12PA00756
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Décision précédente :Tribunal administratif de Paris, 6 décembre 2011
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000026980656
  • Rapporteur : Mme Valérie PETIT
  • Rapporteur public :
    M. OUARDES
  • Président : M. LOOTEN
  • Avocat(s) : CHAINTRIER AVOCATS
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Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Paris
2012-12-31
Tribunal administratif de Paris
2011-12-06

Texte intégral

Vu la requête

, enregistrée le 13 février 2012, présentée pour la Sarl Moon Young Hee, dont le siège est 62 rue Charlot à Paris (75003), par la société Chaintrier ; la Sarl Moon Young Hee demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 0916398 du 6 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant au remboursement, assorti du versement d'intérêts moratoires, d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 149 909 euros au titre du troisième trimestre de l'année 2008 ; 2°) de prononcer le remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée, augmenté des intérêts moratoires ; 3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ..................................................................................................................... Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code

général des impôts et le livre des procédures fiscales ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2012 : - le rapport de Mme Petit, rapporteur, - et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ; 1. Considérant que la Sarl Moon Young Hee a pour activité la création et l'organisation de défilés dans le domaine de la mode ; qu'elle a sollicité le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée, d'un montant de 149 909 euros, au titre du troisième trimestre de l'année 2008 ; que l'administration a implicitement rejeté cette réclamation ; que par un jugement du 6 décembre 2011, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la Sarl Moon Young Hee tendant au remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée ; que la société requérante fait appel de ce jugement ; Sur l'application de la loi fiscale : 2. Considérant que pour refuser le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration se fonde, d'une part, sur les résultats d'une vérification de comptabilité effectuée en 2009, portant en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er avril 2005 au 31 mars 2008 et remettant en cause les droits à déduction pour cette période, en faisant valoir que la majeure partie de la somme litigieuse ne peut être regardée comme de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, dès lors que la quasi-totalité du chiffre d'affaires, à l'exception de l'activité de vente exercée dans un " show-room " à Paris, correspondait à des subventions versées à la société requérante par la société Moon Corporate, de droit coréen, qui détient 20 % de son capital ; qu'elle estime que ces subventions, sans lien direct avec des prestations de service individualisables, n'étaient pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, de sorte que la taxe afférente aux dépenses de la requérante ne pouvait être déduite que dans les limites du prorata prévu, jusqu'au 31 décembre 2007, par les dispositions des articles 212 et 219 de l'annexe II au code général des impôts alors en vigueur, puis, à compter du 1er janvier 2008, par les articles 205 et 206 de la même annexe ; que, d'autre part, l'administration soutient que le surplus du crédit de taxe sur la valeur ajoutée en litige, soit 47 391 euros, a déjà été utilisé par la requérante ; 3. Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) IV. La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement (...) " ; qu'il résulte de l'instruction que le contrat conclu entre la société requérante et la société Moon Corporate le 7 novembre 2001, intitulé " accord de coopération commerciale ", prévoit à son article 1er des " prestations de services spécifiques " devant être réalisées par la Sarl Moon Young Hee et correspondant à " l'organisation des défilés deux fois l'an " ; qu'à cette fin, le contrat prévoit qu'elle doit " créer et produire les modèles requis pour le défilé " et " définir la ou les structures nécessaires à la réalisation des points 1 et 2 et les mettre en oeuvre" ; que l'article 2 du contrat prévoit qu'en contrepartie de ces prestations, la société de droit coréen s'engage à rembourser à la requérante la totalité des frais et dépenses engagés, majorés d'une rémunération égale à 5 à 10 %, selon négociation, du montant du remboursement ; que, toutefois, ni ce contrat ni aucun autre document ne précisent les modalités selon lesquelles la société coréenne pourrait, le cas échéant, bénéficier elle-même de ces modèles et défilés, y compris des défilés de mode organisés en Corée ; que, dans ces conditions, l'administration a pu estimer à bon droit que les sommes versées à la requérante par sa société-mère étaient dépourvues de lien direct avec des prestations de service à titre onéreux individualisables qui auraient été accomplies au bénéfice de cette dernière, qu'elles n'avaient pas davantage la nature d'un complément de prix d'une opération imposable et qu'elles devaient dès lors être regardées comme des subventions non soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur le

bénéfice des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : 4. Considérant que la Sarl Moon Young Hee se prévaut, en application des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la position formelle qu'aurait prise l'administration dans une proposition de rectification du 18 novembre 2005, tirant les conséquences d'une précédente vérification de comptabilité, ainsi que dans un courrier du 1er juin 2004 de la direction des services fiscaux de Paris centre, relatif à l'instruction d'une précédente demande de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée, présentée le 31 mai 2003 ; 5. Considérant, que le courrier du 1er juin 2004 mentionné ci-dessus, dépourvu de motivation, se borne à déterminer le montant du remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée afférent à l'exercice clos le 31 mars 2003 ; qu'il ne peut dès lors être regardé, en tout état de cause, comme comportant l'expression d'une position formelle de l'administration sur le principe de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée du chiffre d'affaires réalisé par la société requérante et sur l'application d'un éventuel prorata ; 6. Considérant, en revanche, que dans la proposition de rectifications du 18 novembre 2005, le vérificateur, après avoir analysé le contrat du 7 novembre 2001 conclu entre la requérante et la société Moon Corporate, a estimé que la requérante avait fourni à la société coréenne des prestations de service consistant en la création et la confection de modèles, ainsi qu'en leur présentation publicitaire ; qu'il a également retenu que ces prestations entraient dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, une partie d'entre elles étant toutefois exonérée de cette taxe en application des règles de territorialité prévues à l'article 259 du code général des impôts ; que, dans ces conditions, il a nécessairement estimé que les montants devant être versés à la société requérante par la société coréenne étaient en lien direct avec des prestations de services individualisables réalisées au bénéfice de celle-ci et qu'il existait une relation nécessaire entre le niveau des avantages retirés par le bénéficiaire du service et la contre-valeur qu'il versait au prestataire ; que cette prise de position vaut pour la période en litige pendant laquelle les relations de la société requérante et de la société Moon Corporate étaient régies par le même contrat du 7 novembre 2001 ; que, par suite, la société requérante est fondée à se prévaloir de cette prise de position formelle de l'administration ; 7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, l'administration ne remettant pas en cause les montants de taxe collectée déclarés par la requérante, celle-ci est fondée à soutenir qu'elle bénéficiait d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée égal à 149 909 euros au titre du troisième trimestre de l'année 2008 ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'elle a déjà utilisé, pour partie, ce crédit en reportant la somme de 73 585 euros sur le quatrième trimestre 2008 ; qu'elle est dès lors fondée à demander le remboursement de la différence entre 149 909 euros et 73 585 euros, soit de la somme de 76 324 euros ; qu'en revanche, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires en application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sont irrecevables faute de litige né et actuel avec le comptable public sur ce point ; 8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Sarl Moon Young Hee est seulement fondée à soutenir que, à concurrence de la somme de 76 324 euros, c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à la société requérante de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 76 324 euros sera remboursé à la Sarl Moon Young Hee. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 3 : L'État versera à la Sarl Moon Young Hee la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 4 : Le jugement n° 0916398 du 6 décembre 2011 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt. '' '' '' '' 2 N° 12PA00756