AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Attendu, selon l'arrêt attaqué
(Douai, 30 mars 2006), que, propriétaire d'un groupe d'immeubles, la société d'HLM SLE Habitat - Groupe CMH (la société d'HLM) a constaté des désordres consécutifs à la période de sécheresse de 1989 et 1990, le site ayant fait l'objet d'un arrêté de catastrophe naturelle le 28 mars 1991 ; que la société d'HLM a déclaré ce sinistre à son assureur, la société La Zurich, qui a désigné un expert ; qu'une divergence étant survenue entre l'assureur et la société d'HLM sur les moyens à mettre en oeuvre pour mettre fin aux désordres, le juge des référés a désigné M. X...
Y... en qualité d'expert ;
que sur la base du rapport déposé par ce dernier, un "protocole d'accord" a été signé le 16 janvier 1995 entre la société d'HLM et la société La Zurich ; qu'alléguant l'apparition de nouvelles fissures en décembre 1996, la société d'HLM a obtenu la désignation d'un nouvel expert ; que le 12 mars 1998, un nouvel arrêté de catastrophe naturelle a été pris par le maire de la commune ; que la société d'HLM a assigné la société La Zurich et M. X...
Y... afin d'obtenir l'annulation du "protocole d'accord" et la réparation de son préjudice, après reconnaissance de la responsabilité de l'expert judiciaire ;
Sur le premier moyen
:
Attendu que la société d'HLM fait grief à
l'arrêt de la débouter de sa demande en rescision de la transaction intervenue le 16 janvier 1995 avec son assureur, la société La Zurich, et de la débouter de sa demande en paiement formée contre elle, alors, selon le moyen :
1 / qu'une transaction peut être rescindée lorsqu'il y a erreur dans la personne ou sur l'objet de la contestation ; qu'il y a erreur sur l'objet de la contestation justifiant l'annulation de la transaction si l'erreur porte sur les conséquences du sinistre ou si les travaux effectués pour remédier aux malfaçons se révèlent totalement inefficaces ; que la présence d'hommes de l'art et d'experts n'empêche pas d'invoquer l'erreur sur l'objet de la contestation si les éléments en sont réunis ; que tel est le cas lorsque le maître de l'ouvrage, sans compétence technique, est obligé de se fier, lors d'une transaction, aux affirmations de l'expert judiciaire ; qu'il ressort des constatations successives de l'arrêt attaqué que divers techniciens ont été conduits à se prononcer sur les causes du sinistre et sur les moyens d'y remédier, que leurs avis étaient divergents à cet égard, M. X...
Y..., expert judiciaire, considérant comme M. Z..., expert de la compagnie d'assurances, que les désordres constatés étaient stabilisés, en sorte qu'il n'y avait pas lieu à reprise en sous oeuvre, et ce contrairement au bureau d'études de sols et de fondations GFA et au bureau d'études A... qui préconisaient
une reprise générale du bâtiment par micro-pieux, que les travaux pour remédier aux malfaçons se sont limités à l'obturation des fissures et à la réfection des peintures et des papiers peints, qu'à l'article 1er de la transaction, les parties se sont référées expressément au rapport de l'expert judiciaire, M. X...
Y..., aux termes duquel la reprise en sous oeuvre par micro-pieux, solution préconisée par deux autres experts, ne se justifiait pas et qu'enfin, le nouvel expert judiciaire désigné à la suite de la survenance de nouveaux désordres après la signature du protocole d'accord a préconisé, comme les deux bureaux d'études, la solution de reprise en sous-oeuvre par micro-pieux ; qu'en refusant néanmoins de retenir l'existence d'une erreur sur l'objet de la transaction et d'annuler en conséquence le protocole transactionnel, la cour d'appel a méconnu les conséquences nécessaires de ses propres constatations d'où il résultait que la société d'HLM SLE avait été incontestablement victime d'une erreur sur l'objet de la
transaction, et violé, en conséquence, l'article
2053 du code civil ;
2 / que les contrats d'assurance ouvrent droit à garantie de l'assuré contre tous les effets des catastrophes naturelles sur les biens faisant l'objet de tels contrats ; que sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ; qu'il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que les seules mesures susceptibles de prévenir des dommages ultérieurs, à savoir une reprise générale du bâtiment par micro pieux, n'ont pu être prises en raison de l'erreur d'appréciation de l'expert judiciaire M. X...
Y... ; qu'en déboutant, néanmoins, la société d'HLM SLE de sa demande de condamnation de la compagnie La Zurich, son assureur à la date de l'arrêté du 28 mars 1991 constatant l'état de catastrophe naturelle, en paiement de tous les effets de ladite catastrophe naturelle au motif inopérant de la survenance du second phénomène de sécheresse, la cour d'appel a méconnu les conséquences nécessaires de ses propres constatations sur l'impossibilité de prendre les seules mesures de nature à prévenir de nouveaux dommages dans l'hypothèse précisément d'une nouvelle période de sécheresse et a violé par refus d'application l'article
L. 125-1 du code des assurances ;
3 / qu'en méconnaissant les exigences de l'article
455 du nouveau code de procédure civile, la cour d'appel s'est abstenue de répondre aux moyens péremptoires soulevés par la société d'HLM SLE dans ses conclusions d'appel et récapitulatives n° 2, pris en premier lieu de ce que "postérieurement à l'expertise de M. X...
Y... (...) des nouvelles fissures ont été découvertes, n'affectant pas nécessairement les mêmes logements (...) ces fissures révélées après coup ne sont pas les mêmes que celles qui ont fait l'objet de la transaction, il n'y a donc pas aggravation d'un désordre, avec erreur sur l'étendue du préjudice, mais nouveau désordre avec erreur sur l'objet de la contestation", pris en deuxième lieu de ce que "conformément à la loi du 13 juin 1992 relative à l'indemnisation des victimes des catastrophes naturelles, cet assureur devait prendre en charge les travaux de remise en état confortant la solidité de l'ouvrage s'ils doivent être engagés pour arrêter une aggravation immédiate et inéluctable des désordres", et pris enfin de ce que "on voit mal en quoi l'erreur de conception d'origine (...) serait de nature à empêcher de contester la transaction pour erreur" et de ce que "en effet la compagnie La Zurich n'a pas contesté sa garantie au motif que l'origine des désordres pourrait être due à une faute imputable aux constructeurs et a donc nécessairement considéré que le phénomène de dessiccation des sols était la cause déterminante du sinistre" ;
Mais attendu
, d'une part, qu'ayant relevé qu'à la suite de l'apparition de désordres sous forme de fissures dans la structure des bâtiments, divers techniciens avaient été amenés à se prononcer sur les causes de ce sinistre et sur les moyens d'y remédier et que leurs avis étaient divergents, que M. X...
Y..., désigné en qualité d'expert judiciaire, avait, dans son rapport, estimé inutile de réaliser des micro-pieux en sous-oeuvre, et que ce rapport avait servi de base à la transaction litigieuse, et d'autre part, qu'ayant retenu, qu'avant de conclure cette transaction avec son assureur, la société d'HLM avait pris soin de s'entourer de plusieurs avis techniques et, notamment, de celui du bureau d'études A... qui, à plusieurs reprises, avait attiré son attention sur les risques de nouveaux phénomènes de tassement dans l'hypothèse de la survenance d'une autre période de sécheresse, la cour d'appel a pu en déduire que la société d'HLM avait accepté en connaissance de cause la proposition d'indemnisation qui lui était faite par la société La Zurich correspondant au seul coût des réparations des fissures constatées lors des premières opérations d'expertise et qu'elle ne pouvait invoquer une erreur sur l'objet de la contestation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen
, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant
retenu que la lecture du rapport d'expertise déposé par M. X...
Y... révélait qu'il avait, conformément à la mission qui lui avait été confiée, entendu les parties, consulté les documents que celles-ci lui avaient remis, visité les lieux, fait mention des différents avis émis par les techniciens consultés par les parties sans se dispenser d'en effectuer une analyse critique, sollicité un examen complémentaire des sols par un bureau d'études géotechnique spécialisé, la cour d'appel a pu en déduire que M. X...
Y... n'avait fait preuve ni de négligence, ni de légèreté dans l'accomplissement de sa mission et que la société d'HLM ne démontrait pas l'existence d'une faute commise par l'expert judiciaire en lien direct de cause à effet avec un préjudice subi par elle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société d'HLM SLE Habitat - Groupe CMH aux dépens ;
Vu l'article
700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société d'HLM SLE Habitat - Groupe CMH à payer la somme de 2 000 euros à la société La Zurich et la somme de 2 000 euros à M. X...
Y... ; rejette la demande de la société d'HLM SLE Habitat - Groupe CMH ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille sept.