Tribunal de grande instance de Paris, 14 avril 2016, 2014/15887

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2014/15887
  • Domaine de propriété intellectuelle : MARQUE ; DESSIN ET MODELE
  • Marques : PAPIER TIGRE
  • Classification pour les marques : CL16 ; CL21 ; CL24 ; CL25 ; CL27 ; CL28
  • Numéros d'enregistrement : 3891752
  • Parties : PAPIER TIGRE SARL / BZB SAS

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2018-05-15
Tribunal de grande instance de Paris
2016-04-14

Texte intégral

TRIBUNAL D E GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 14 avril 2016 3ème chambre 1ère section N° RG : 14/15887 DEMANDERESSE S.A.R.L. PAPIER TIGRE [...] 75003 PARIS représentée par Maître Marc SUSINI de la SELARL REINHART M T, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0030 DÉFENDERESSE S.A.S. BZB [...] 59100 ROUBAIX représentée par Maître André BERTRAND de la SELARL ANDRE BERTRAND & ASSOCIES - SOCIETE D AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #L0207 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C. Vice-Présidente Julien RICHAUD. Juge Aurélie JIMENEZ, Juge assistés de Léoncia B. Greffier DEBATS À l'audience du 08 mars 2016, tenue publiquement devant Marie- Christine C et Julien RICHAUD, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 786 du Code de Procédure Civile JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoirement en premier ressort EXPOSÉ DU LITIGE La SARL PAPIER TIGRE, immatriculée le 1er septembre 2011 au RCS de Paris, exerce une activité de conception, distribution, achat et vente de produits matériels et immatériels. Elle explique avoir connu un rapide succès grâce à ses produits de papeterie et avoir diversifié ses activités par le biais de partenariats avec de grandes marques françaises et étrangères pour commercialiser en particulier des vêtements et des broches brodées. La SARL PAPIER TIGRE commercialise ses produits sur le site internet papiertigre.fr et dans sa boutique située [...] dans le 3ème arrondissement de Paris ainsi que dans 205 points de vente répartis dans 25 pays. Elle est titulaire des droits de propriété intellectuelle sur la marque française semi-figurative n° 3891752 enregistrée le 25 janvier 2012 notamment pour les produits de la classe 16 « articles d'imprimerie » et de la classe 25 « vêtements » et « chaussures » : La SAS BZB, immatriculée le 27 mai 2005 au RCS de Lille, commercialise en France des vêtements masculins et féminins dans 45 magasins à l'enseigne « BizzBee ». Invoquant la découverte en mai 2014 de la commercialisation par la SAS BZB de badges reproduisant quasiment à l'identique son logo représentant une tête de tigre stylisée dans son magasin de la rue Rambuteau à Paris, la SARL PAPIER TIGRE a, par courriers des 16 mai et 4 juillet 2014 qu'elle dit être restés sans réponse, mis en demeure la SAS BZB de cesser toute utilisation de ce signe. Soutenant s'être aperçue en septembre 2014 que la SAS BZB, qui avait cessé de vendre les badges, offrait à la vente dans le même magasin des sweats « Sweat Tigre » référencés 609128 sur lesquels était imitée la tête de tigre stylisée constituant sa marque, la SARL PAPIER TIRE a été autorisée par ordonnance du 30 septembre 2014 rendue sur requête par le délégataire du président du tribunal de grande instance de Paris à pratiquer une saisie-contrefaçon dans la boutique de la SAS BZB située [...]. Les opérations de saisie- contrefaçon se sont déroulées le 7 octobre 2014. C'est dans ces circonstances que la SARL PAPIER TIGRE a, par acte d'huissier du 30 octobre 2014, assigné la SARL PAPIER TIGRE devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marque et de droits d'auteur et en concurrence déloyale et parasitaire. Dans ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 1er février 2016 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la SARL PAPIER TIGRE demande au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire et au visa des dispositions des articles 46 du code de procédure civile, L. 713-3 ; L. 111-1 et suivants, L. 112-1, L. 113-5, L. 121-1, L. 122-4, L. 716-14 et L. 331-1-3 du code de la propriété' intellectuelle, 1382 du code civil, de: A TITRE PRINCIPAL : DIRE ET JUGER que la société BZB a commis des actes de contrefaçon de la marque n° 3891752 déposée par la société' Papier Tigre en commercialisant des sweats représentant une tête de tigre imitant ladite marque ; DIRE ET JUGER que la société' BZB a commis des actes de contrefaçon de la marque n° 3891752 déposée par la société' Papier Tigre en commercialisant des badges représentant une tête de tigre reproduisant ou imitant ladite marque ; DIRE ET JUGER que la société' BZB a porté' atteinte aux droits d'auteur de la société' Papier Tigre en commercialisant des sweats représentant une tête de tigre copiant l'œuvre de la societé Papier Tigre ; DIRE ET JUGER que la société' BZB a porté' atteinte aux droits d'auteur de la société' Papier Tigre en commercialisant des badges représentant une tête de tigre copiant l'œuvre de la société' Papier Tigre

; en conséquence

, CONDAMNER la société' BZB a' payer a' la société' Papier Tigre la somme de 150.000 euros a' titre de dommages et intérêts ; A TITRE SUBSIDIAIRE : DIRE ET JUGER que la société' BZB a engagé' sa responsabilité pour parasitisme envers la société' Papier Tigre en commercialisant des sweats et des badges représentant une tête de tigre caractéristique des produits de la société' Papier Tigre ; en conséquence, CONDAMNER la société BZB à payer à la société Papier Tigre la somme de 150.000 euros a' titre de dommages et intérêts ; EN TOUT ETAT DE CAUSE : CONDAMNER la société BZB a' payer à la société Papier Tigre la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile CONDAMNER la société BZB aux entiers dépens. En réplique, dans ses dernières écritures notifiées par la voie électronique le 10 décembre 2015 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la SAS BZB demande au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire : de RECEVOIR la société BZB dans l'ensemble de ses arguments, fins et moyens et déclarer ceux-ci bien fondés, vu l'article L 713-3 du code de la propriété intellectuelle : de DIRE ET JUGER que la tête de tigre reproduite sur le modèle de pin's litigieux, ne constitue pas l'imitation illicite de la marque semi-figurative française n°3891752 "Papier Tigre" d'autant plus que celle-ci n'a pas été déposée pour les « broches ». « badges » ou « pin's»: de DIRE ET JUGER que la tête de tigre reproduite sur le modèle de sweat-shirt litigieux, ne constitue pas ['imitation illicite de la marque semi-figurative française n°3891752 "Papier Tigre"; en tout état de cause, de DIRE et JUGER que les têtes de tigre reproduite sur le modèle de pin's litigieux, comme sur le modèle de sweat-shirt litigieux, sont des décorations et non des reproductions effectuées à titre de marque : en conséquence, de DEBOUTER la société Papier Tigre de son action et de l'ensemble de ses demandes formulées au litre de la contrefaçon de sa marque semi-figurative française n°3891752 "Papier Tigre" ; vu l'article L.111-1 et suivant du code de la propriété intellectuelle : de CONSTATER que la société Papier Tigre, qui a la charge de la preuve en la matière n'établit pas en quoi l'élément figuratif de sa marque française n°3891752 "Papier Tigre" serait une création originale susceptible de bénéficier de la protection du droit d'auteur, en conséquence de DIRE ET JUGER qu'à défaut d'originalité, le motif de tête de tigre revendiqué par Papier Tigre ne peut accéder à la protection due en matière de droits d'auteur et par conséquent, la société Papier Tigre sera déclarée irrecevable à agir en contrefaçon de droits d'auteur : de DEBOUTER la société Papier Tigre de son action et de sa demande formulée au titre de la contrefaçon de ses droits d'auteurs sur l'élément figuratif de sa marque française n°3891752 "Papier Tigre" : à titre subsidiaire, de DIRE ET JUGER que le motif figurant sur le sweat-shirt litigieux, se différencie de l'élément figuratif de la marque française n°3891752 "Papier Tigre", dont il ressemble uniquement parce qu'il relève d'un genre commun, l'origami japonais: vu les pièces versées aux débats, vu l'article 1382 du code civil : de CONSTATER que la société Papier Tigre n'invoque aucun acte de parasitisme distinct des actes allégués de contrefaçon de marque ou de droits d'auteur : en conséquence, de DEBOUTER la société Papier Tigre de son action et de sa demande formulée au litre des actes allégués de parasitisme : en tout état de cause, de DIRE ET JUGER que la société Papier Tigre n'établit ni pas l'existence des actes allégués de parasitisme. en conséquence, de DEBOUTER de plus fort la société Papier Tigre de son action et de sa demande formulée au titre des actes allégués de parasitisme. vu les articles L.716-14 et L.331-1-13 du code de la propriété intellectuelle et 1382 du code civil, dans l'hypothèse fort peu probable où le tribunal ferait droit à une des demandes de contrefaçon : concernant le modèle de pin's litigieux, d’ALLOUER 300 euros de dommages et intérêts à la société Papier Tigre en réparation de son entier préjudice résultant de cette contrefaçon : concernant le modèle de sweat-shirt litigieux, d'ALLOUER 4.000 euros de dommages et intérêts à la société Papier Tigre en réparation de son entier préjudice résultant de cette contrefaçon ; vu l'article 700 code de procédure civile, de CONDAMNER la société Papier Tigre à payer 15.000 euros H.T. à la société BZB ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître André B, avocat. L'ordonnance de clôture le 23 février 2016. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile. MOTIFS DU JUGEMENT 1°) Sur la contrefaçon de la marque française semi-figurative n° 3891752 Au soutien de ses prétentions, la SARL PAPIER TIGRE expose que la tête de tigre constituant l'élément figuratif distinctif et principal de la marque n° 3891752 est imitée, les similitudes étant visuelles et conceptuelles, sur les sweats commercialisés par la SAS BZB. Elle ajoute que les produits en cause sont identiques et en déduit l'existence d'un risque de confusion aggravé par le caractère fortement distinctif et la notoriété importante de la marque qui excluent que la tête de tigre soit utilisée par la SAS BZB à titre d'élément purement décoratif. Elle explique en outre que la reprise, avec des différences insignifiantes, de la tête de tigre constituant sa marque sur les badges de la SAS BZB constitue une reproduction et à défaut une imitation de celle-ci et que les badges sont des produits similaires aux vêtements. Elle ajoute que le risque de confusion est d'autant plus grand que la tête de tigre est reprise à l'identique et que, en raison de ses partenariats avec des sociétés tierces notamment en matière de broches brodées, le public pertinent croira en l'existence d'une association. En réplique, la SAS BZB expose qu'aucune contrefaçon ne peut lui être reprochée au titre des badges puisqu'ils ne sont pas visés au dépôt et sont différents des vêtements et que l'élément verbal de la marque, qui est dominant et distinctif, n'est pas repris. Elle explique en outre que le sweat litigieux n'est pas contrefaisant puisqu'il est vendu soit dans des boutiques à l'enseigne BZB soit sur son site internet, que la tête de tigre qui y ligure est différente de l'élément figuratif et est perçue par le public pertinent, non pas comme une marque indiquant l'origine du produit, mais comme une simple décoration et que la SARI. PAPIER TIGRE ne commercialise pas de vêtements et sweatshirts sous sa marque. Conformément à l'article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, l'atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon, qui peut être prouvée par tout moyen en vertu de l'article L 716-7 du même code, engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L 713-2, L 713-3 et L 713-4 du même code. En vertu de l'article 713-2 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, même avec l'adjonction de mots tels que : "formule, façon, système, imitation, genre, méthode", ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l'enregistrement; b) La suppression ou la modification d'une marque régulièrement apposée. Enfin, aux termes de l'article L 713-3 du code de propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public : a) La reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ; b) L'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement. En application du droit interne interprété à la lumière de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres conformément au principe posé par l'arrêt Von Colson et Kamann c. Land Nordhein-Westfalen du 10 avril 1984, le risque de confusion doit faire l'objet d'une appréciation abstraite par référence au dépôt d'une part en considération d'un public pertinent correspondant au consommateur des produits et services concernés normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et d'autre part par comparaison entre le signe litigieux utilisé et la marque protégée par référence à son enregistrement indépendamment de ses conditions d'exploitation mais également par comparaison des services et produits visés dans l'enregistrement et des produits et services commercialisés sous le signe litigieux. Le risque de confusion est en outre analysé globalement : tous les facteurs pertinents, dont la notoriété de la marque et l'importance de sa distinctivité, doivent être pris en considération, l'appréciation globale de la similitude de la marque et du signe litigieux devant être fondée sur l'impression d'ensemble qu'ils produisent au regard de leurs éléments distinctifs et dominants. La marque française semi-figurative n° 3891752 a été enregistrée le 25 janvier 2012 notamment pour les produits de la classe 16 « articles d'imprimerie » et de la classe 25 « vêtements » et « chaussures ». Le public pertinent est constitué par le consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, les produits litigieux, couverts par la marque et opposés à la défenderesse, étant des articles d'imprimeries, des vêtements et des chaussures, soit des produits de consommation courante. La contrefaçon s'appréciant exclusivement par rapport aux produits et services visés à l’enregistrement de la marque, il est indifférent que la SARL PAPIER TIGRE commercialise des produits et services distincts de ceux qui sont couverts par la marque. La marque est composée d*un élément figuratif au-dessus d'un élément verbal « papier tigre ». Le premier est une tête de tigre stylisée inspirée de l'origami et comportant ainsi des traits symbolisant les lignes de pliage. Ces deux éléments, en raison de la stylisation particulière du dessin, de l'association peu courante des mots « papier » et « tigre » et en l'absence de contestation de la distinctivité de la marque, sont tout aussi dominants et distinctifs. Le badge litigieux reprend cette tête de tigre à l'identique, la seule différence résidant dans la présence d'une ligne de pliage centrale supplémentaire. Il ne comporte aucun élément verbal autre que la référence à la SAS BZB par la mention « BZB ». Les signes sont ainsi seulement similaires. Le dépôt ne vise pas les badges de la classe 26 et la SARL PAPIER TIGRE invoque une similarité avec des vêtements. Si elle l'affirme péremptoirement, elle n'explique pas en quoi les produits litigieux sont concurrents ou sont par leur nature, leur mode d'utilisation, leur destination ou leurs voies de commercialisation similaires aux vêtements. Le simple fait, qui n'est pas invoqué, que des pin's puissent être accrochés à un vêtement ne suffit pas à les rendre complémentaires faute de lien étroit les unissant, aucun de ces produits n'étant indispensable ou important pour l'usage de l'autre sur un plan tant fonctionnel qu'esthétique. Elle ne démontre pas non plus que le public pertinent considère comme courant que ces produits soient commercialisés sous la même marque. D'ailleurs, le TUE a jugé dans sa décision Oakley. Inc c. OHMI et Venticinque Ltd du 24 septembre 2008 cité par l'arrêt du TUE CMT Compagnia manifatture tessili Sri c. OHMI et Camomilla SpA du 9 juillet 2015 définissant les critères d'appréciation de la similarité entre produits, que les lunettes, les bijoux, auxquels pourraient être rattachés les pin's, et les montres ne peuvent être considérés comme semblables aux articles d'habillement ou considérés comme complémentaires, la relation entre ces produits étant trop indirecte pour être considérée comme déterminante. Dès lors, les signes étant similaires et les produits en litige différents, aucune contrefaçon ne peut être imputée à la SAS BZB au titre des badges. Le sweat litigieux, produit identique aux vêtements de la classe 25, comporte sur la quasi-totalité de sa face avant une tête de tigre faite de nombreuses lignes et dont seuls les yeux et la truffe sont représentées en noir. Ce dessin diffère nettement de l'élément figuratif de la marque puisque les triangles noirs figurant les rayures du sommet et des côtés du crâne de la bête sont absents, que les lignes sont différentes et n'évoquent aucun pliage en raison de leur nombre, plus important, et de leur position, que les oreilles et les yeux sont de formes différentes, les premières étant des pentagones contre des triangles et les seconds étant beaucoup plus allongés et anguleux, et qu'un menton est représenté. Ainsi, non seulement l'élément verbal n'est pas reproduit mais les dessins sont nettement différents ce qui exclut toute imitation du signe constitution la marque. En conséquence, aucune contrefaçon n'est imputable à la SAS BZB. À titre surabondant, il sera précise que la taille de la tête de tigre et son positionnement sur le sweat font que le public pertinent percevra ce signe, conformément aux habitudes du secteur relatives à l'utilisation de têtes de tigre non contestées par la SARL PAPIER TIGRE, exclusivement comme un élément décoratif qui donne d'ailleurs son nom au produit et non comme une garantie de son origine commerciale. Les demandes de la SARL PAPIER TIGRE au titre de la contrefaçon de sa marque seront intégralement rejetées. 2°) Sur la contrefaçon de droits d'auteur La SARL PAPIER TIGRE soutient que le dessin du tigre constituant l'élément verbal de sa marque est « une œuvre graphique manifestement originale, comportant des particularités et spécificités reflétant l'effort créatif et la personnalité de son auteur, et ne reproduisant aucune œuvre préexistante ». Elle ajoute que « la forme stylisée du tigre ; sa composition de figures géométriques ; la disposition et l'agencement desdites figures ; l'alternance de formes noires (pleines) et blanches (vides) ; l'épaisseur du trait ; etc. sont autant d'éléments conférant une originalité au dessin et reflétant la personnalité et la sensibilité créative de leurs auteurs ». En réplique, la SAS BZB expose que la SARL PAPIER TIGRE affirme l'originalité de l'œuvre sans expliquer les traits traduisant l'empreinte de la personnalité de l'auteur non identifié et que l'existence de nombreux motifs traditionnels d'origami japonais représentant des têtes de tigres démontre que le motif revendiqué n'est qu'une variante de ces modèles dont elle reprend les mêmes principes sans s'en démarquer suffisamment pour constituer une création originale. En vertu des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir étant irrecevable. Et, conformément à l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. En application de l'article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial. Et, en application de l'article L 112-1 du même code, ce droit appartient à l’auteur de toute œuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination. Dans ce cadre, si la protection d'une œuvre de l'esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale en ce sens qu'elle porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et n'est pas la banale reprise d'un fonds commun non appropriable, il appartient à celui qui se prévaut d'un droit d'auteur dont l'existence est contestée de définir et d'expliciter les contours de l'originalité qu'il allègue, en effet, seul l'auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d'identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole et le principe de la contradiction posé par l'article 16 du code de procédure civile commande que le défendeur puisse connaître précisément les caractéristiques qui fondent l'atteinte qui lui est imputée et apporter la preuve qui lui incombe de l'absence d'originalité. À cet égard, si une combinaison d'éléments connus n'est pas a priori exclue de la protection du droit d'auteur, encore faut-il que la description qui en est faite soit suffisamment précise pour limiter le monopole demandé à une combinaison originale déterminée opposable à tous sans l'étendre à un genre insusceptible d'appropriation. La SARL PAPIER TIGRE livre une description à la fois très générale, et ainsi applicable à toutes les créations s'inspirant du genre dans lequel son dessin s'inscrit, et purement technique qui découle de la stricte observation objective de son dessin, et de ce fait étrangère à la caractérisation de son originalité faute de révéler les choix exprimant un parti pris esthétique et traduisant la personnalité de leur auteur. Rien ne permet de délimiter les contours du droit revendiqué et de comprendre en quoi les différents éléments qu'elle se contente de juxtaposer sans les définir sont le fruit d'un choix arbitraire de l'auteur et non la reprise d'une association banale appartenant au fond commun du dessin de type origami. En conséquence, en l'absence d'originalité de la création qu'elle invoque, les demandes de la SARL PAPIER TIGRE au titre du droit d'auteur sont intégralement irrecevables faute de qualité à agir. 3°) Sur la concurrence déloyale et parasitaire La SARL PAPIER TIGRE indique qu'elle n'a pas à invoquer des faits distincts à ceux fondant son action en contrefaçon puisque sa demande est subsidiaire et expose que la SAS BZB a tenté de tirer profit de la notoriété et de la réputation qu'elle a acquises en commercialisant des articles reproduisant la tête de tigre qui constitue le principal élément de ralliement de sa clientèle et d'indentification de ses produits. Elle ajoute que cette tête de tigre est, en outre, un dessin original résultant de ses efforts créatifs et qu'elle a réalisé des investissements significatifs pour le concevoir et le faire connaître afin qu'il devienne fondamentalement associé à ses produits dans l'esprit du public. En réplique, la SAS BZB souligne I*identité des faits fondant les demandes en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire et explique que, avec moins trois ans d'activité et un chiffre d'affaires annuel de moins de 500.000 euros il est manifestement impossible de revendiquer une quelconque notoriété, ou des investissements qui auraient pu faire l'objet de parasitisme, la SARL PAPIER TIGRE ne démontrant d'ailleurs ni l'un ni l'autre. En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce. L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des laits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée. Le parasitisme, qui s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution est toutefois indifférente au risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d'un savoir-faire ou d'un travail intellectuel d’autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel. Les parties commercialisent des produits pour partie identiques et s'adressent les concernant à une même clientèle. Elles sont à leur égard en situation de concurrence directe. En imputant à la SAS BZB l'utilisation illicite d'un élément de sa marque traduisant une captation indue de ses investissements, la SARL PAPIER TIGRE invoque effectivement au titre de la concurrence déloyale et parasitaire des faits strictement identiques à ceux fondant sa demande en contrefaçon sans prendre la peine de les caractériser. Or. la SARL PAPIER TIGRE ne peut jouir de plus de droits sur le terrain de la concurrence déloyale et parasitaire qu'elle n'en a en application du droit des marques et l'action fondée sur la responsabilité délictuelle ne peut constituer une protection de repli par rapport à celle, spéciale, offerte par l'action en contrefaçon. En outre, la SARL PAPIER TIGRE n'apporte pas le moindre élément démontrant la réalité des investissements allégués engagés pour concevoir, promouvoir et valoriser spécifiquement la tête de tigre constituant l'élément verbal de sa marque et ne prouve pas que celle-ci constitue à elle seule un signe de ralliement pour sa clientèle alors que toutes les pièces produites, à l'exception d'une photographie d'un pont du canal Saint-Martin à Paris dont la date et les conditions de diffusion sont indéterminables (pièce 2 : une photographie au sein d'une revue de presse), révèlent qu'elle l'utilise systématiquement avec l'élément verbal « papier tigre » qui en revanche est régulièrement employé seul. En conséquence, les demandes de la SARL PAPIER TIGRE au titre de la concurrence déloyale et parasitaire seront intégralement rejetées. 4°) Sur les demandes accessoires Succombant au litige, la SARL PAPIER TIGRE, dont la demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée, sera condamnée à payer à la SAS BZB la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile. Au regard de la nature du litige et de sa solution, l'exécution provisoire n'est pas nécessaire et ne sera pas prononcée conformément à l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et mis à la disposition par le greffe le jour du délibéré, Rejette les demandes de la SARL PAPIER TIGRE au titre de la contrefaçon de sa marque française semi-figurative n° 3891752 : Déclare irrecevable les demandes de la SARL PAPIER TIGRE au titre de la contrefaçon de droits d'auteur ; Rejette les demandes de la SARL PAPIER TIGRE au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ; Condamne la SARL PAPIER TIGRE à payer à la SAS BZB la somme de DIX MILLE euros (10 000 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile : Dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du jugement. Condamne la SARL PAPIER TIGRE à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés directement par Maître André B conformément à l'article 699 du code de procédure civile :