INPI, 28 août 2012, 12-0916

Mots clés r 712-16, 3° alinéa 2 · imitation · décision après projet · produits · opposition · vêtements · société · propriété intellectuelle · terme · opposante · enregistrement · déchéance · risque · chaussures · cuir · habillement · comparaison

Synthèse

Juridiction : INPI
Numéro affaire : 12-0916
Domaine de propriété intellectuelle : OPPOSITION
Marques : BIOTEEFULL ; MY BIOTIFUL
Classification pour les marques : 25
Numéros d'enregistrement : 3375237 ; 3880629
Parties : ATTITUDE DEVELOPPEMENT / G COLETTE

Texte

28/08/2012 OPP 12-0916 / CBO

DECISION

STATUANT SUR UNE OPPOSITION

****

LE DIRECTEUR GENERAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE ;

Vu le Code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L. 411-4, L. 411-5, L. 712-3 à L. 712-5, L. 712-7, L. 713-2, L. 713-3, R. 411-17, R. 712-13 à R. 712-18, R. 712-21, R. 712-26 et R. 718-2 à R. 718-4 ;

Vu l'arrêté du 31 janvier 1992 relatif aux marques de fabrique, de commerce ou de service ;

Vu l'arrêté du 24 avril 2008 modifié relatif aux redevances de procédures perçues par l'Institut national de la propriété industrielle.

I.-

FAITS ET PROCEDURE



Madame Colette G a déposé, le 9 décembre 2011, la demande d'enregistrement n° 11 3 880 629 portant sur le signe verbal MY BIOT IFUL.

Ce signe est destiné à distinguer notamment les produits suivants : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; Chemises ; vêtements en cuir ou en imitation du cuir ; ceintures (habillement) ; fourrures (vêtements) ; gants (habillement) ; foulards ; cravates ; bonneterie ; chaussettes ; chaussons ; chaussures de plage, de ski ou de sport ; couches en matières textiles ; sous-vêtements ». Le 29 février 2012, les sociétés ATTITUDE DEVELOPPEMENT (société à responsabilité limitée) et ETABLISSEMENTS ROYER (société anonyme) ont formé opposition à l'enregistrement de cette marque.

La marque antérieure invoquée dans cet acte est la marque verbale BIOTEEFULL, déposée le 11 août 2005 et enregistrée sous le numéro 05 3 375 237. Cet enregistrement a été effectué notamment pour les produits suivants : « Vêtements, chaussures, chapellerie, ceintures (habillement) ; chaussettes ; chaussons ; vêtements en cuir ; vêtements en imitation du cuir ; dessous (sous-vêtements) ; foulards ; fourrures (vêtements) ; chemises ; gants d'habillement ; chaussures de plage ; chaussures de sport, de ski ; cravates ; couches en matières textiles ».

L'opposition a été notifiée à la déposante le 8 mars 2012. Cette dernière a présenté des observations en réponse à l’opposition et sollicité la production de preuves d’usage de la marque antérieure. Les opposants ont fourni ces preuves d’exploitation dans le délai imparti.

Le 28 juin 2012, l’Institut a notifié aux parties un projet de décision établi au vu de l’opposition et des observations en réponse.

La déposante a contesté le bien-fondé du projet de décision et la société opposante a présenté des observations en réponse.

II.- ARGUMENTS DES PARTIES

A.- LES OPPOSANTS

Les sociétés ATTITUDE DEVELOPPEMENT et ETABLISSEMENTS ROYER font valoir, à l'appui de leur opposition et dans leurs observations contestant le bien-fondé du projet de décision de l’Institut, les arguments exposés ci-après.

Sur la comparaison des produits

Les produits de la demande d'enregistrement, objets de l’opposition, sont identiques et similaires à certains de ceux de la marque antérieure.

Sur la comparaison des signes

Le signe contesté constitue l'imitation de la marque antérieure.

Suite au projet de décision de l’Institut, la société opposante sollicite la confirmation de celui-ci et entend également répondre aux arguments présentés par la déposante.

A l’appui de son argumentation, la société opposante invoque et fournit des décisions de justice et du Directeur général de l’Institut statuant sur des oppositions.

B.- LE TITULAIRE DE LA DEMANDE D'ENREGISTREMENT

Dans ses observations en réponse à l'opposition, Madame Colette G conteste la comparaison des signes. Elle ne présente aucun argument sur la comparaison des produits. Dans ses observations contestant le bien-fondé du projet de décision, la déposante soulève l’irrecevabilité de l’opposition.

En outre, elle fait valoir que les pièces fournies par la société opposante ne permettent pas de justifier l’exploitation de la marque antérieure pour les produits en cause.

Enfin, elle conteste la comparaison des signes, insistant sur leurs différences visuelles, phonétiques et intellectuelles prépondérantes.

A l’appui de son argumentation, elle joint des documents.

III.- DECISION

A – SUR LA RECEVABILITE DE L'OPPOSITION

CONSIDERANT qu'en vertu des dispositions de l'article L 712-4 du code de la propriété intellectuelle, l’opposition, pour être recevable, doit être faite par le propriétaire d'une marque enregistrée ou déposée antérieurement ;

Que l'article R 712-14 du code de la propriété intellectuelle dispose que : "L'opposition... précise : 1° L'identité de l'opposant, ainsi que les indications propres à établir l'existence, la nature, l'origine et la portée de ses droits..." ;

Que selon l’article R.712-15 du code de la propriété intellectuelle, « Est déclarée irrecevable toute opposition ... non conforme aux conditions prévues aux articles R.712-13 et R. 712-14 et à l’arrêté mentionné à l’article R.712-26 ».

CONSIDERANT qu’en l’espèce, la déposante soulève, dans ses observations après projet, l’irrecevabilité de l’opposition, en ce qu’il serait impossible de vérifier l’identité des sociétés opposantes, les informations mentionnées dans l’acte d’opposition, à savoir d’une part, l’adresse de la société « ETABLISSEMENTS ROYER » et d’autre part, l’adresse et la forme juridique de la société « ATTITUDE DEVELOPPEMENT » ne coïncidant nullement avec les recherches menées sur le site internet « infogreffe » à partir respectivement de ces deux dénominations sociales ;

Que toutefois, les changements d’adresse et/ou de forme juridique invoqués par la déposante n’impliquent pas en eux-mêmes un changement de titulaire ;

Qu'en tout état de cause, de tels changements d'adresse ou de forme juridique ne constitueraient pas une transmission ou une modification des droits attachés à la marque et seraient donc opposables aux tiers même en l'absence d'inscription au registre national des marques ;

Qu’ainsi, les sociétés opposantes doivent être considérées comme ayant qualité pour agir et comme ayant respecté les formes et conditions prescrites en matière d’opposition ; que l’opposition est donc recevable. B.- SUR LA PRODUCTION DE PIECES PROPRES A ETABLIR QUE LA DECHEANCE DE LA MARQUE ANTERIEURE POUR DEFAUT D'EXPLOITATION N'EST PAS ENCOURUE

CONSIDERANT que selon l'article L. 714-5 alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle, "Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans" ;

Qu'aux termes de l'article R. 712-17 du code précité, "Le titulaire de la demande d'enregistrement peut, dans ses premières observations en réponse, inviter l'opposant à produire des pièces propres à établir que la déchéance de ses droits pour défaut d'exploitation n'est pas encourue. Ces pièces doivent établir l’exploitation de la marque antérieure, au cours des cinq années précédant la demande de preuves d’usage, pour au moins l’un des produits ou services sur lesquels se fonde l’opposition ou faire état d’un juste motif de non-exploitation . L'institut impartit alors un délai à l'opposant pour produire ces pièces" ;

Qu'en outre, aux termes de l'article R. 712-18-1° du même code, "La procédure d'opposition est clôturée... lorsque l'opposant... n'a fourni dans le délai imparti aucune pièce propre à établir que la déchéance de ses droits n'est pas encourue".

CONSIDERANT en l'espèce que, sur l'invitation du titulaire de la demande d'enregistrement contestée à produire de telles pièces, la société opposante a fourni, dans le délai imparti, la copie d’un bon de commande en anglais mais accompagné de sa traduction, daté du 16 mai 2011 portant la marque BIOTEEFULL associée au pictogramme d’un article chaussant ;

Qu’ainsi, ces documents établissent l’usage du terme BIOTEEFULL à titre de marque pour désigner des produits servant de base à l’opposition ;

Qu'il convient de rappeler que, dans le cadre d'une procédure d'opposition, dès lors que des pièces datées sont fournies, qu'elles attestent d'un usage à titre de marque et qu'elles portent sur au moins l’un des produits et/ou services sur lesquels est fondée l’opposition, il n'appartient pas à l'Institut de se substituer aux tribunaux qui ont seuls compétence pour apprécier la portée de l'usage sur le maintien du droit à la marque et prononcer le cas échéant la déchéance de la marque en cause ;

Qu’à cet égard, il importe peu que certains documents ne comportent « ...aucune signature ou aucun cachet ou tout autre moyen attestant de l’authenticité des documents... », dès lors qu’il n’est nullement fait obligation de fournir des pièces comportant toutes une signature ou un cachet ;

Qu’ainsi, le titulaire de la marque antérieure a satisfait à l'obligation qui lui est faite par l'article R 712-17 du code de la propriété intellectuelle ;

Qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de prononcer la clôture de la procédure. C. – AU FOND

Sur la comparaison des produits

CONSIDERANT que l’opposition porte sur les produits suivants : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; Chemises ; vêtements en cuir ou en imitation du cuir ; ceintures (habillement) ; fourrures (vêtements) ; gants (habillement) ; foulards ; cravates ; bonneterie ; chaussettes ; chaussons ; chaussures de plage, de ski ou de sport ; couches en matières textiles ; sous-vêtements » ;

Que la marque antérieure a été enregistrée notamment pour les produits suivants : « Vêtements, chaussures, chapellerie, ceintures (habillement) ; chaussettes ; chaussons ; vêtements en cuir ; vêtements en imitation du cuir ; dessous (sous-vêtements) ; foulards ; fourrures (vêtements) ; chemises ; gants d'habillement ; chaussures de plage ; chaussures de sport, de ski ; cravates ; couches en matières textiles ».

CONSIDERANT que les produits précités de la demande d'enregistrement, objets de l’opposition, apparaissent identiques à ceux invoqués de la marque antérieure, ce qui n’est pas contesté par les parties suite au projet de décision de l’Institut.

Sur la comparaison des signes

CONSIDERANT que la demande d'enregistrement contestée porte sur le signe verbal MY BIOTIFUL ;

Que la marque antérieure porte sur la dénomination BIOTEEFULL.

CONSIDERANT que l’opposante invoque l’imitation de la marque antérieure par le signe contesté.

CONSIDERANT que l’imitation nécessite la démonstration d’un risque de confusion entre les signes, lequel doit être apprécié globalement à partir de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l'impression d'ensemble produite par celles-ci, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants.

CONSIDERANT qu’il résulte d’une comparaison globale et objective des signes que les signes en présence ont en commun un terme visuellement proche et phonétiquement identique BIOTIFUL / BIOTEEFULL ;

Qu’intellectuellement, ces dénominations BIOTIFUL / BIOTEEFULL possèdent la même évocation du terme anglais « beautiful », connu et compris par le consommateur concerné ;

Que les seules différences entre ces dénominations BIOTIFUL et BIOTEEFULL, tenant au sein du signe contesté à la substitution de la lettre I à la séquence EE et de la lettre L à la séquence LL, ne suffisent pas à écarter tout risque de confusion entre elles, contrairement à ce que soutient la déposante, dés lors que ces différences demeurent imperceptibles phonétiquement, qu’elles laissent subsister les séquences dominantes BIOT/FUL et que ces dénominations partagent la même évocation ;

Qu’à cet égard, s’il est vrai comme le relève la déposante, que les séquences TI et TEE de ces dénominations se singularisent par leurs voyelles respectives et le doublement de la lettre E dans la marque antérieure, il n’en demeure pas moins que celles-ci se prononcent de façon identique [ti] ;

Que les signes diffèrent également par la présence de l’élément verbal MY au sein du signe contesté ;

Que toutefois, la prise en compte des éléments distinctifs et dominants de ces signes conduit à tempérer les différences relevées ci-dessus ; Qu’en effet, la dénomination BIOTIFUL, distinctive au regard des produits en présence, constitue l’élément dominant du signe contesté en raison de sa longueur et du fait qu’elle y est précédée du simple adjectif possessif MY, qui s’y rapporte directement et la met ainsi en exergue ;

Qu’à cet égard, si comme le relève la déposante, les termes BIOTIFUL / BIOTEEFULL renvoient pareillement au terme anglais « BEAU » et sont susceptibles d’être perçus comme faisant référence à l’origine biologique des produits et peuvent de ce fait apparaitre comme évocateur des qualités des produits en cause, il n’en demeure pas moins que, pris dans leur ensemble, ils ne constituent cependant pas pour le consommateur français de référence la désignation nécessaire, générique et usuelle de ces produits pas plus qu’ils n’en indiquent précisément une caractéristique ;

Qu’ainsi, les différences visuelles et phonétiques existant entre les signes, tenant à la présence de l’élément MY et relevées par la déposante, ne sont pas de nature à écarter tout risque de confusion entre eux, dès lors qu’elles n’altèrent pas le caractère immédiatement perceptible et dominant du terme BIOTIFUL au sein du signe contesté ;

Que dès lors, le terme BIOTIFUL apparaît apte à retenir à lui seul l’attention du consommateur au sein du signe contesté, contrairement à ce que soutien la déposante.

CONSIDERANT enfin, que sont inopérants les arguments de la déposante visant à faire valoir que la demande d’enregistrement MY BIOTIFUL « ...s’inscrit dans un concept plus large de produits d’origine biologique comprenant une ligne de sacs commercialisée sous la marque « MY BIOTIFUL BAG » n°11 3 880 628 enregistrée le même jour que la marq ue de la demande contestée ... » ;

Qu'en effet, le bien-fondé d'une opposition doit uniquement s'apprécier eu égard aux droits conférés par la marque antérieure invoquée et à l'atteinte susceptible d'être portée à ces droits par l'enregistrement de la demande contestée, indépendamment de circonstances d’exploitation réelles ou supposées des signes, extérieures à la présente procédure ;

Qu’il en va de même des arguments de la déposante selon lesquels la demande d’enregistrement « ...MY BIOTIFUL jouit d’une reconnaissance liée à l’usage de la marque MY BIOTIFUL BAG et de sa visibilité sur internet... ».

CONSIDERANT que le signe contesté MY BIOTIFUL constitue donc l'imitation de la marque antérieure BIOTEEFULL.

CONSIDERANT par conséquent, qu'en raison de l'identité des produits en cause, et de l'imitation de la marque antérieure par le signe contesté, il existe globalement un risque de confusion sur l’origine de ces marques pour le consommateur concerné ;

Qu’ainsi, le signe verbal contesté MY BIOTIFUL ne peut pas être adopté comme marque pour désigner les produits identiques précités, sans porter atteinte aux droits antérieurs de l’opposante sur la marque verbale BIOTEEFULL.

PAR CES MOTIFS



DECIDE

Article 1 er : L'opposition n° 12-0916 est reconnue justifiée, e n ce qu’elle porte sur les produits suivants : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; Chemises ; vêtements en cuir ou en imitation du cuir ; ceintures (habillement) ; fourrures (vêtements) ; gants (habillement) ; foulards ; cravates ; bonneterie ; chaussettes ; chaussons ; chaussures de plage, de ski ou de sport ; couches en matières textiles ; sous-vêtements ».

Article 2 : La demande d'enregistrement n° 11 3 880 629 es t partiellement rejetée, pour les produits précités.

Céline BOISSEAU, Juriste Pour le Directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle

Christine B Chef de Groupe