1. |
La première question à examiner est celle de savoir si, en l'espèce, le Parlement a omis de tenir compte de l'article 29, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires, selon lequel «en vue de pourvoir aux vacances d'emploi, l'autorité investie du pouvoir de nomination doit d'abord examiner les possibilités de promotion ou de mutation au sein de l'institution». A cet égard, le requérant allègue que — comme il a été montré dans l'affaire 23-74 (Berthold Küster/Parlement européen, arrêt du 12 mars 1975, Recueil 1975, p. 353) — son aptitude à être promu a été reconnue et qu'il était l'unique candidat promouvable au poste déclaré vacant. En conséquence, il aurait été conforme au statut de le promouvoir sans passer à la phase suivante de la procédure visant à pourvoir ce poste. Un grief analogue a déjà été formulé dans l'affaire 23-74. Nous avons alors soutenu dans nos conclusions qu'il n'était pas possible de parler d'un droit à promotion; le passage à la seconde phase de la procédure de nomination à un poste, prévue à l'article 29, paragraphe 1, b), du statut des fonctionnaires, serait justifié non seulement lorsqu'il n'y a pas de candidats aptes à être promus ou mutés mais encore, lorsqu'il existe d'autres motifs raisonnables. La Cour de justice a alors suivi cette thèse et elle a reconnu notamment que, lorsqu'il y a plusieurs candidats à une promotion, l'autorité investie du pouvoir de nomination peut en conclure que l'ouverture d'un concours interne est conforme à l'intérêt du service. Pareilles considérations nous paraissent également valables dans la présente affaire. A cet égard, un premier élément important est que l'avis de vacance de mars 1974 exigeait des connaissances approfondies de la langue danoise. Le requérant n'a pas pu prouver qu'il les possédait; son acte de candidature indique seulement que, dans son service à la Communauté, il devrait faire usage de toutes les langues officielles, à l'exception du danois. L'autorité investie du pouvoir de nomination pouvait donc en déduire que le requérant ne possédait pas les qualités requises pour le poste déclaré vacant, et par conséquent rie pas envisager une promotion. Certes, du fait que l'avis de vacance mentionné n'avait pas eu de succès, les exigences en matière de connaissances linguistiques ont été réduites lors de l'ouverture du concours interne, dans la mesure où il n'a été alors question que de connaissances souhaitables de la langue danoise, et on pouvait se demander si, par conséquent, la procédure destinée à pourvoir le poste n'aurait pas dû être recommencée, c'est-à-dire s'il n'aurait pas fallu examiner de nouveau, en premier lieu, les possibilités de promotion. Le fait que l'on ait omis de le faire pourra cependant être considéré comme dénué d'importance, parce qu'il pourrait résulter du dossier de candidature que le requérant ne satisfaisait pas non plus à ces exigences restreintes. Au reste, cette impression s'est confirmée après la déclaration du président du jury, entendu comme témoin, selon laquelle le requérant n'avait que des connaissances rudimentaires de la langue danoise, qui n'auraient pas mérité d'être prises en considération au cours de la procédure de concours. Indépendamment du fait que — comme le Parlement l'a déclaré au cours de la procédure —, peu de temps après, c'est-à-dire en janvier, d'autres concurrents auraient été aptes à être promus, on peut donc en conclure, qu'en l'espèce, il existait des motifs raisonnables de ne pas prendre en considération le fait que le requérant était promouvable et qu'il est donc impossible d'apercevoir une violation de l'article 29 du statut des fonctionnaires. |
2. |
Au sujet du second grief, celui de la constitution irrégulière du jury par le secrétaire général du Parlement, qui aurait agi sur la base d'une autorisation datant d'octobre 1971, et selon les allégations du requérant, non publiée, nous serons très brefs. Dans une série d'autres affaires — les affaires 23-74, 77-74 et 80-74 — nous avons déjà recontré ce grief et la conclusion fondée sur lui selon laquelle tous les actes de la procédure de concours qui en découlent seraient nuls. Nous l'avons alors examiné de manière approfondie et nous sommes parvenu à la conclusion qu'il est insoutenable. Nous voudrions y renvoyer et nous y tenir, d'autant plus qu'aucun argument nouveau n'a été invoqué et que l'on peut déduire de l'arrêt de rejet rendu dans l'affaire 23-74, que la Cour de justice ne partage pas le point de vue du requérant. |
3. |
En revanche, le troisième grief, qui concerne l'avis du concours interne établi par l'autorité investie du pouvoir de nomination et notamment les critères de cotation qui y sont fixés, nous paraît avoir une plus grande importance. Comme nous le savons, il a été prescrit de ne prendre en considération sur les points attribués pour les connaissances linguistiques seuls ceux qui seraient supérieurs à la valeur 5. En outre, il était prévu d'attribuer de 0 à 40 points pour les titres figurant dans le dossier, c'est-à-dire qu'on leur appliquait le même nombre maximal de points qu'aux résultats de deux épreuves orales. En effet, il était précisé que l'on pourrait attribuer de 0 à 30 points pour une épreuve d'une durée de quinze minutes relative à des sujets concernant les fonctions du poste déclaré vacant et de 0 à 10 points pour une autre épreuve d'une durée de dix minutes portant sur les connaissances linguistiques. A notre avis, il est évident, et ce fait ne nécessite pas d'autres explications, que la prise en considération limitée de points pour les connaissances linguistiques suscite des objections. En réalité, avec cette méthode de cotation, il n'est pas possible d'apprécier correctement les connaissances requises et, en particulier, ses résultats ne permettent pas de discerner exactement les différences dans les connaissances linguistiques. Nous ne voyons pas comment cela peut se justifier dans une procédure de concours. En ce qui concerne la fixation de l'échelle de cotation pour les titres, d'une part, et les épreuves orales, d'autre part, nous rappellerons que, dans les conclusions de l'affaire 23-74, nous avons déjà exprimé des objections quant à l'influence et à l'importance des notes qui ne sont attribuées que sur la base d'un bref entretien. Dans la procédure de concours dont il était alors question, dix critères étaient prévus pour l'examen des titres avec, chaque fois, dix points possibles, mais vingt points au total pour deux autres critères qui faisaient l'objet d'un entretien. Si cette pondération pouvait déjà paraître critiquable, à plus forte raison doit-il en être de même pour celle qui a été fixée pour le concours A/51. En réalité, il ne semble pas souhaitable d'évaluer de la même manière l'influence de critères objectifs, tels que l'ancienneté, l'âge, les diplômes universitaires, les rapports au titre de l'article 43 du statut des fonctionnaires, etc…, qui souvent mettent en jeu des périodes de temps assez longues, et celle des résultats d'un entretien d'un durée totale de vingt-cinq minutes. Celui qui a assisté à des épreuves orales sait à quel point les imprévus — choix des questions et forme des candidats — jouent un rôle. Si l'on attribue à leurs résultats la même importance qu'à des titres acquis au cours de longues années, le danger d'une erreur d'appréciation et même d'une manipulation est considérable. On doit donc parler à ce sujet d'une disproportion frappante et manifeste et critiquer âprement, de ce point de vue, les conditions de l'avis de concours. Toutefois, il serait prématuré d'en conclure que les résultats du concours sont complètement dénués de pertinence et que la décision de nomination qui les a pris pour base devrait être déclarée nulle. Ainsi, en ce qui concerne la cotation critiquable des connaissances linguistiques, un élément important est qu'il n'existe des incertitudes à cet égard que pour un seul des candidats inscrits sur la liste d'aptitude, en raison de l'attribution d'aucun point. Mais comme ce candidat figurait sur la liste d'aptitude tant derrière le fonctionnaire nommé que derrière le requérant, on peut dire qu'une correction de cette liste en éliminant la lacune signalée serait complètement dénuée d'importance pour la décision de nomination attaquée. En ce qui concerne la pondération inhabituelle des documents du concours et des résultats des épreuves orales, il est possible de procéder directement à une correction sur la base des éléments dont nous disposons. Si on tente de le faire en prenant pour base par exemple un rapport de 4 : 1 pour les titres et l'examen oral, il apparaît que la composition de la liste d'aptitude ne serait que légèrement modifiée — un candidat serait éliminé et un autre prendrait sa place — et qu'aucune modification fondamentale n'apparaîtrait dans l'ordre des inscrits. Certes, le fonctionnaire nommé ne serait plus à la seconde place, mais à la troisième, mais il viendrait encore avant le requérant qui, du fait de la modification de la pondération, occuperait la quatrième place. Dans ces conditions, il faut admettre que l'autorité investie du pouvoir de décision aurait difficilement pris une autre décision en vue de pourvoir le poste déclaré vacant, c'est-à-dire que l'on doit admettre que le vice mentionné n'a pas eu d'effet sur la décision attaquée. C'est pourquoi nous estimerions, qu'en dépit de la critique justifiée dont il a été question, il n'y a pas lieu de déclarer que la procédure de concours est illégale dans son ensemble et notamment d'annuler la décision de nomination qui a été prise à sa suite. |
4. |
Au sujet des autres moyens, nous avons eu l'impression — et nous anticipons ainsi sur le résultat de notre examen — qu'ils n'exigent pas de vastes développements.
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5. |
Après un examen approfondi de la matière du procès, il ne reste qu'à constater qu'aucun des motifs allégués par le requérant n'oblige à annuler la décision de nomination attaquée. Le recours doit donc être rejeté comme non fondé et les dépens, réglés conformément à l'article 70 du règlement de procédure. |