Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 30 novembre 2020, 18MA04703

Mots clés commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique · réglementation des activités économiques Activités soumises à réglementation Aménagement commercial · commercial

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro affaire : 18MA04703
Type de recours : Excès de pouvoir
Président : M. BOCQUET
Rapporteur : Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public : M. PECCHIOLI
Avocat(s) : LOISEAU

Texte

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 novembre 2018, 14 mars 2019 et 18 septembre 2020, la SAS Cayo et la SAS Berva, représentées par Me C..., demandent à la Cour :

1°)d'annuler l'arrêté pris par le maire de la commune de Nîmes le 6 septembre 2018, délivrant un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'une grande surface de bricolage sous l'enseigne " l'Entrepôt du Bricolage " dans la zone d'aménagement concertée du Mas Vignoles ;

2°)d'annuler les avis favorables à ce projet, rendus par la Commission nationale d'aménagement commercial le 21 juin 2018 et tacitement par la commission départementale d'aménagement commercial ;

3°)de mettre à la charge de la commune de Nîmes une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

-l'intégralité des moyens sont recevables au regard des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme compte-tenu de la date de téléchargement du 1er mémoire en défense ;

-le magasin projeté forme un ensemble commercial avec d'autres surfaces de vente au sens de l'article L. 752-3 du code de commerce et une demande d'autorisation pour l'extension d'un tel ensemble aurait dû être déposée, conformément à l'article L. 752-1 du même code ;

-le dossier n'était pas conforme aux dispositions de l'article R. 752-6 du code de commerce ;

-le projet est identique à celui déjà rejeté au fond par la Commission nationale d'aménagement commercial et méconnaît donc l'article L. 752-21 du code de commerce ;

-les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce ne sont pas respectées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2020, la commune de Nîmes, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens présentés par les requérantes dans leur mémoire enregistré le 14 mars 2019 sont irrecevables en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme ;

- la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 janvier 2019, 17 avril 2019, 1er octobre 2020 et 7 octobre 2020, la SCI Entrepôt Nîmes, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge des requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens relatifs à l'illégalité de la décision en tant qu'elle vaut autorisation de construire sont, en application de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme irrecevables ;

- la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Vu les autres pièces du dossier.

Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre les avis de la Commission nationale d'aménagement commercial et de la commission départementale d'aménagement commercial, dès lors qu'en application des articles L. 425-4 du code de l'urbanisme et L.752-17 du code de commerce, l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial, qui se substitue à celui de la commission départementale d'aménagement commercial, a le caractère d'acte préparatoire à la décision prise par l'autorité administrative sur la demande de permis de construire.

Vu :

-le code de commerce ;

-le code de l'urbanisme ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu en audience publique :

-le rapport de Mme E...,

-les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

-et les observations de Me C..., représentant la SAS Cayo et la SAS Berva, de Me A..., représentant la commune de Nîmes, et de Me B..., représentant la SCI Entrepôt Nîmes.


Considérant ce qui suit

:

1. La SAS Cayo et la SAS Berva exploitent toutes deux un magasin sous l'enseigne " Bricomarché ", respectivement à Caveirac et Milhaud dans le Gard. Elles demandent à la Cour d'annuler l'arrêté pris par le maire de la commune de Nîmes le 6 septembre 2018, délivrant à la SCI Entrepôt Nîmes un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'une grande surface de bricolage sous l'enseigne " l'Entrepôt du Bricolage " dans la zone d'aménagement concertée du Mas Vignoles, à Nîmes.

Sur les conclusions dirigées contre les avis de la commission départementale d'aménagement commercial et de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...) ". Aux termes de l'article L. 752-17 du code de commerce : " I.- Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. / La Commission nationale d'aménagement commercial émet un avis sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L. 752-6 du présent code, qui se substitue à celui de la commission départementale. En l'absence d'avis exprès de la commission nationale dans le délai de quatre mois à compter de sa saisine, l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial est réputé confirmé. / A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées au premier alinéa du présent I est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial, qui se substitue à celui rendu par la commission départementale, a le caractère d'un acte préparatoire à la décision prise par l'autorité administrative sur la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, seule décision susceptible de recours contentieux. Il en va ainsi que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial soit favorable ou qu'il soit défavorable. Dès lors, les conclusions présentées par les requérantes tendant à l'annulation des avis rendus par la Commission nationale d'aménagement commercial et la commission départementale d'aménagement commercial doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur l'arrêté délivrant le permis de construire :

En ce qui concerne le moyen tiré de ce que le projet ferait partie d'un ensemble commercial :

4. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de commerce : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : / 1° La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant ; / (...) / 5° L'extension de la surface de vente d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 752-3 du même code : " I. - Sont regardés comme faisant partie d'un même ensemble commercial, qu'ils soient ou non situés dans des bâtiments distincts et qu'une même personne en soit ou non le propriétaire ou l'exploitant, les magasins qui sont réunis sur un même site et qui : / 1° Soit ont été conçus dans le cadre d'une même opération d'aménagement foncier, que celle-ci soit réalisée en une ou en plusieurs tranches ; / 2° Soit bénéficient d'aménagements conçus pour permettre à une même clientèle l'accès des divers établissements ; / (...). ". Aux termes de l'article R. 752-6 de ce code : " La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments suivants : / 1° Informations relatives au projet : / a) Pour les projets de création d'un magasin de commerce de détail : la surface de vente et le secteur d'activité ; / (...) g) Autres renseignements : / - si le projet s'intègre dans un ensemble commercial existant : une liste des magasins de cet ensemble commercial exploités sur plus de 300 mètres carrés de surface de vente, ainsi qu'à titre facultatif, la mention des enseignes de ces magasins ; / (...) / 2° Informations relatives à la zone de chalandise et à l'environnement proche du projet : / a) Une carte ou un plan indiquant les limites de la zone de chalandise, (...) ".

5. Ainsi que l'a relevé la Commission nationale d'aménagement commercial, le magasin projeté s'installe place André Bazile, dans la dernière tranche opérationnelle de la zone d'aménagement concertée du Mas de Vignoles, à proximité immédiate de magasins spécialisés dans l'équipement du foyer, aux enseignes " Fly ", " Cuisine Plus ", " Home Salons ", " Electro Dépôt ", " Captain Oliver " et d'un garde-meubles à l'enseigne " Home Box ". A supposer même que ces entités auraient dû être regardées comme formant, avec le magasin projeté, un ensemble commercial, de telle sorte que le dossier aurait dû être présenté comme tendant à l'extension de la surface de vente dudit ensemble plus qu'à la création d'un magasin, il ressort des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial disposait de la description de l'ensemble des commerces concernés ainsi que de plans complets lui permettant de se prononcer, comme elle l'a fait, en tenant compte de leur présence. Les requérantes ne précisent pas les éléments devant, en application des dispositions de l'article R. 752-6 du code de commerce, accompagner la demande dans l'hypothèse de l'extension d'un ensemble commercial et qui auraient en l'espèce été manquants, alors qu'il n'est pas allégué qu'un des magasins situés sur le site aurait fait l'objet d'une modification ou d'un projet de modification substantielle concomitamment. Contrairement à ce que prétendent les sociétés Cayo et Berva, la zone de chalandise du magasin projeté, déterminée en tenant compte notamment " du pouvoir d'attraction des enseignes existantes à proximité ", n'est pas nécessairement distincte de celle de l'ensemble commercial dans lequel il s'intègrerait, qui n'est constitué que de magasins spécialisés dans l'équipement du foyer. Enfin, les requérantes n'indiquent pas en quoi la compatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale ou son effet sur les flux de transport auraient pu être appréciés différemment, ni ne précisent quels autres critères d'appréciation auraient été faussés. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 751-1, L.752-3 et R. 752-6 du code de commerce doit ainsi être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 752-21 du code de commerce :

6. Aux termes de l'article L. 752-21 du code de commerce : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale. ".

7. Par un avis du 6 juillet 2017, la Commission nationale d'aménagement commercial s'est prononcée défavorablement sur le projet présenté par la pétitionnaire de création d'un magasin de bricolage et de matériaux de construction, à l'enseigne " Entrepôt du bricolage ", de 4 510 m² de surface de vente et de création d'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l'accès en automobile, de 51,89 m² d'emprise au sol. Cet avis était motivé par les circonstances que le projet entrainerait l'imperméabilisation de 78,6% de son assiette foncière, que le parc de stationnement prévu mesurait 5 990 m², que 235 places de stationnement seraient créées, qu'aucune ombrière n'était envisagée, ni aucune exploitation des surfaces de toitures par la pose de panneaux photovoltaïques, que l'architecture du projet ne présentait aucune qualité particulière de sorte que son insertion ne serait pas harmonieuse et enfin qu'il s'implanterait à 600 mètres de la principale zone d'habitation.

8. Le projet ayant fait l'objet de la décision litigieuse, situé sur le même terrain, a le même objet, la surface de vente créée étant portée à 4 520 m² et celle du point permanent de retrait à 62,5 m². A la différence toutefois du précédent projet, des revêtements perméables ont été prévus pour 188 des 235 places du parc de stationnement et 1 220 m² de voirie, l'imperméabilisation du site étant ainsi ramenée à 69,1%. En outre, l'installation de panneaux photovoltaïques sur les toitures a été prévue à hauteur de 3 230 m². Enfin, un habillage du sous-bassement du bâtiment par un parement en pierre a été programmé afin que le magasin s'harmonise avec les autres bâtiments de la zone d'activité.

9. Il résulte de ces éléments, alors même que l'installation d'ombrières n'a pas été décidée, que le terrain d'implantation demeure éloigné de la principale zone d'habitation de la commune, et que la surface dédiée au stationnement n'a en elle-même pas été modifiée, que la nouvelle demande d'autorisation a pris en compte les motivations de l'avis défavorable de la Commission nationale, rendu le 6 juillet 2017. Il ne saurait dès lors être soutenu que les dispositions de l'article L. 752-21 du code de commerce ont été méconnues.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce :

10. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. ". Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

Quant à la compatibilité avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale :

11. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, il ressort des pièces du dossier que le projet est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale Sud-Gard qui attribue à la commune de Nîmes le statut de pôle urbain majeur et privilégie les implantations commerciales en centre-ville ainsi que, comme c'est le cas en l'espèce, dans les zones d'activités existantes. Particulièrement, la circonstance que de nombreux magasins de bricolage seraient déjà implantés au sein de la zone de chalandise n'est pas de nature à rendre le projet, qui porte sur une offre de type entrepôt, dotée d'un espace " drive " et d'une cour extérieure accessible, incompatible avec ce schéma qui vise au développement d'une offre commerciale " originale et nouvelle " afin de maintenir l'attractivité des pôles urbains majeurs.

Quant à l'objectif d'aménagement du territoire :

12. Si le projet est situé en zone périphérique éloignée des secteurs d'habitat, il ne devrait pas, eu égard à la nature du commerce en cause, avoir d'impact négatif sur l'animation de la vie urbaine. Il devrait au contraire, comme mentionné précédemment, permettre le renforcement de l'espace commercial majeur dans lequel il s'insère et dont la zone de chalandise voit sa population croître de façon continue. S'il en résultera une consommation importante d'espace, la zone d'aménagement concertée au sein de laquelle il sera implanté, dont il occupera le dernier emplacement disponible, a vocation à recevoir de tels commerces, est aménagée pour ce faire, et encadrée par deux autoroutes.

13. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, comme l'a relevé la Commission nationale d'aménagement commercial dans son avis du 21 juin 2018, le site d'implantation du projet bénéficie d'une desserte en transports en commun grâce au passage de deux lignes de bus à 170 mètres, l'une circulant au sein de la commune de Nîmes à hauteur de deux rotations par heure. Il ne saurait dès lors être prétendu que celui-ci ne serait pas accessible en transports collectifs.

14. La circonstance que le magasin se situerait au sein d'un ensemble commercial au sens de l'article L. 752-3 du code de commerce n'est pas de nature à établir que l'étude de trafic fournie à l'appui de la demande d'autorisation, qui prend précisément en compte la situation du magasin au sein d'une très importante zone commerciale, ne serait pas pertinente. S'il ressort de cette étude que les conditions de circulation sur la zone sont difficiles le samedi entre 16 et 17h, les requérantes ne critiquent pas les conclusions de celle-ci selon lesquelles, compte-tenu du foisonnement élevé avec le pôle commercial existant, l'installation du magasin litigieux ne devrait pas avoir d'influence déterminante sur le fonctionnement circulatoire.

15. Les requérantes ne sont ainsi pas fondées à soutenir que le projet méconnaitrait l'objectif d'aménagement du territoire.

Quant à l'objectif de développement durable :

16. Ainsi que mentionné précédemment, des revêtements perméables ont été prévus pour 188 des 235 places du parc de stationnement et 1 220 m² de voirie, l'imperméabilisation du site étant ainsi ramenée à 69,1% du terrain d'implantation. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'usage dans le temps de dalles engazonnées conduirait à un tassement leur conférant un caractère imperméable. Les requérantes ne sont dès lors pas fondées à soutenir que l'imperméabilisation des sols serait plus importante que celle retenue par la Commission nationale d'aménagement commercial et insatisfaisante.

17. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu'à la date d'introduction de la demande d'autorisation, la pétitionnaire avait signé une promesse de bail emphytéotique avec une société tierce pour l'installation et l'exploitation de centrales solaires sur les toitures des deux bâtiments, pour une surface totale de 3 230 m², en vue de la vente de l'énergie produite à l'exploitant du réseau national d'électricité. Si la signature de ce bail était soumise à condition suspensive de l'accord des autorités compétentes, il n'en résulte pas que la réalisation de ce projet n'aurait pas été suffisamment certaine pour pouvoir être prise en compte dans l'appréciation de la qualité environnementale de l'opération.

18. Le projet litigieux prévoit la construction de deux bâtiments, l'un consistant en une surface de vente de matériaux de construction de 1 520 m², ni chauffée, ni climatisée, de sorte que l'étude thermique n'a porté que sur l'autre. A supposer même que, comme le relèvent les requérantes, cet espace comporte en réalité un petit local fermé, dédié aux caisses, qui serait lui-même chauffé, il n'en résulterait pas une erreur d'appréciation sur les performances énergétiques du projet dans son ensemble.

19. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que l'insertion paysagère du projet ne serait pas satisfaisante, ni qu'il serait de nature à générer des nuisances au détriment de son environnement proche, notamment agricole. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait l'objectif de développement durable doit être écarté.

Quant à l'objectif de protection des consommateurs :

20. Si le terrain d'assiette du projet se situe en zone d'aléa fort selon le plan de prévention des risques inondation, la surface des premiers planchers a été prévue à la côte des plus hautes eaux majorée de 30 cm conformément aux exigences dudit plan. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la côte prise en compte serait erronée. Par ailleurs, le caractère inondable du parc de stationnement sera signalé et un dispositif anti-emportement des véhicules adapté est également prévu. Si ledit parc sera partiellement réalisé sur remblai, un bassin de compensation sera aménagé en conséquence sous l'un des bâtiments, de sorte qu'aucun nouveau remblai réduisant le volume d'expansion des crues ne sera créé et que le plan de prévention des risques inondation sera à cet égard également respecté. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que ces mesures seraient, au regard du risque en cause, insuffisantes et que le projet méconnaîtrait l'objectif de protection des consommateurs.

21. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté pris par le maire de la commune de Nîmes le 6 septembre 2018 doivent, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nîmes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la SAS Cayo et par la SAS Berva et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de ces dernières, sur le fondement de ces dispositions, la somme globale de 2 000 euros à verser à la commune de Nîmes et la somme globale de 2 000 euros à verser à la SCI Entrepôt Nîmes.

D É C I D E :



Article 1er : La requête de la SAS Cayo et de la SAS Berva est rejetée.

Article 2 : La SAS Cayo et la SAS Berva verseront la somme globale de 2 000 euros à la commune de Nîmes et la somme globale de 2 000 euros à la SCI Entrepôt Nîmes.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à SAS Cayo, à la SAS Berva, à la commune de Nîmes, à la SCI Entrepôt Nîmes et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2020.

N° 18MA04703 2