CJUE, Arrêt de la Cour (cinquième chambre), 11 décembre 1990, C-189/89
Mots clés
Prélèvement supplémentaire sur le lait. · règlement · quantité · référence · producteurs · lait · commercialisation · engagement · reconversion · paragraphe · principal · produits · rapport · légitime · livraisons · confiance
Synthèse
Juridiction : CJUE
Numéro affaire : C-189/89
Date de dépôt : 30 mai 1989
Titre : Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht München - Allemagne.
Rapporteur : Zuleeg
Avocat général : Jacobs
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1990:450
Texte
Avis juridique important
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61989J0189
Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 11 décembre 1990. - Karl Spagl contre Hauptzollamt Rosenheim. - Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht München - Allemagne. - Prélèvement supplémentaire sur le lait. - Affaire C-189/89.
Recueil de jurisprudence 1990 page I-04539
Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
Mots clés
++++
1 . Agriculture - Organisation commune des marchés - Lait et produits laitiers - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Attribution des quantités de référence exemptes du prélèvement - Producteurs ayant suspendu leurs livraisons au titre du régime de primes de non-commercialisation ou de reconversion - Octroi d' une quantité de référence spécifique - Limitation du cercle des bénéficiaires par la fixation a posteriori d' une date limite afférente à l' expiration de la période de non-commercialisation ou de reconversion - Admissibilité - Choix d' une date excluant des producteurs ayant vu expirer leur engagement pendant l' année de référence, mais antérieurement à ladite date - Principe de protection de la confiance légitime - Violation
( Règlements du Conseil n s 1078/77 et 857/84, art . 2 et 3 bis, § 1 )
2 . Agriculture - Organisation commune des marchés - Lait et produits laitiers - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Attribution des quantités de référence exemptes du prélèvement - Producteurs ayant suspendu leurs livraisons au titre du régime de primes de non-commercialisation ou de reconversion - Octroi d' une quantité de référence spécifique - Calcul en fonction du volume des livraisons dans l' année précédant le dépôt de la demande de prime de non-commercialisation ou de reconversion - Taux d' abattement applicable - Choix d' un taux ayant pour effet de pénaliser les producteurs concernés - Principe de protection de la confiance légitime - Violation
( Règlements du Conseil n s 1078/77 et 857/84, art . 2 et 3 bis, § 2 )
Sommaire
1 . L' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement n 857/84, tel que modifié par le règlement n 764/89, est invalide dans la mesure où il exclut de l' attribution d' une quantité de référence spécifique au titre de cette disposition les producteurs dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement n 1078/77, a expiré avant le 31 décembre 1983 ou, le cas échéant, le 30 septembre 1983 .
En effet, si le législateur communautaire pouvait valablement instituer une date limite afférente à la période de non-commercialisation ou de reconversion des intéressés, visant à exclure du bénéfice de l' article 3 bis ceux des producteurs n' ayant pas livré de lait pendant tout ou partie de l' année de référence pour des raisons étrangères à un engagement de non-commercialisation ou de reconversion, le principe de protection de la confiance légitime s' opposait toutefois à ce que cette date fût fixée dans des conditions telles qu' elle exclût également du bénéfice de l' article 3 bis des producteurs dont l' absence de livraisons de lait pendant tout ou partie de l' année de référence était la conséquence de l' exécution d' un engagement pris au titre du règlement n 1078/77 .
2 . L' article 3 bis, paragraphe 2, du règlement n 857/84, tel que modifié par le règlement n 764/89, est invalide dans la mesure où il limite la quantité de référence spécifique, prévue par cet article en faveur des producteurs laitiers qui n' ont pas pu livrer de lait pendant l' année de référence en raison d' un engagement pris au titre du règlement n 1078/77, à 60 % de la quantité de lait livrée ou de la quantité d' équivalent lait vendue par le producteur pendant la période de douze mois de calendrier précédant le dépôt de la demande de prime de non-commercialisation ou de reconversion .
En effet, si le législateur communautaire pouvait valablement affecter la quantité de ces livraisons d' un taux d' abattement visant à assurer que les producteurs liés par un tel engagement ne fussent pas indûment avantagés par rapport à ceux, visés à l' article 2 du règlement n 857/84, ayant continué à livrer du lait pendant l' année de référence, le principe de protection de la confiance légitime s' opposait toutefois à la fixation de ce taux à un niveau tellement élevé, par rapport aux taux applicables à ces derniers, que son application correspondît à une restriction affectant les producteurs concernés de manière spécifique en raison précisément de leur engagement pris au titre du règlement n 1078/77 . Un taux d' abattement de 40 %, excédant de plus du double le total le plus élevé des taux applicables aux producteurs visés à l' article 2 du règlement n 857/84, n' était de ce point de vue pas admissible .
Parties
Dans l' affaire C-189/89,
ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l' article 177 du traité CEE, par le Finanzgericht Muenchen ( République fédérale d' Allemagne ) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre
Karl Spagl
et
Hauptzollamt Rosenheim
une décision à titre préjudiciel sur la validité du règlement ( CEE ) n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, portant règles générales pour l' application du prélèvement visé à l' article 5 quater du règlement ( CEE ) n° 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers ( JO L 90, p . 13 ), tel que modifié par le règlement ( CEE ) n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989 ( JO L 84, p . 2 ),
LA COUR ( cinquième chambre ),
composée de M . J . C . Moitinho de Almeida, président de chambre, M . G . C . Rodríguez Iglesias, Sir Gordon Slynn, MM . F . Grévisse et M . Zuleeg, juges,
avocat général : M . F . G . Jacobs
greffier : M . J . A . Pompe, greffier adjoint
considérant les observations écrites présentées :
- pour M . Spagl, partie demanderesse au principal, par Me U . Numberger, avocat au barreau de Munich,
- pour le gouvernement irlandais, par M . L . J . Dockery, Chief State Solicitor, en qualité d' agent,
- pour le Conseil des Communautés européennes, par M . A . Brautigam, administrateur principal au service juridique du Conseil, en qualité d' agent,
- pour la Commission des Communautés européennes, par MM . D . Booss et K.-D . Borchardt, membres du service juridique, en qualité d' agents,
vu le rapport d' audience,
ayant entendu les observations orales de la partie demanderesse au principal, représentée par M . E . H . Pijnacker Hordijk, du gouvernement irlandais, représenté par MM . H . Whelehan SC et E . Honohan BL, du Conseil et de la Commission, à l' audience du 26 juin 1990,
ayant entendu l' avocat général en ses conclusions présentées à l' audience du 2 octobre 1990,
rend le présent
Arrêt
Motifs de l'arrêt
1 Par ordonnance du 27 avril 1989, parvenue à la Cour le 30 mai suivant, le Finanzgericht Muenchen a posé, en vertu de l' article 177 du traité CEE, deux questions préjudicielles relatives à la validité de l' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, et paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, portant règles générales pour l' application du prélèvement visé à l' article 5 quater du règlement ( CEE ) n° 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers, tel que modifié par le règlement ( CEE ) n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989 ( JO L 84, p . 2 ).
2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d' un litige opposant M . Karl Spagl, exploitant d' une entreprise agricole, au Hauptzollamt Rosenheim ( bureau principal des douanes de Rosenheim ) au sujet d' une quantité de référence au titre du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait .
3 M . Spagl s' est vu octroyer une prime de non-commercialisation au titre du règlement ( CEE ) n° 1078/77 du Conseil, du 17 mai 1977, instituant un régime de primes de non-commercialisation du lait et des produits laitiers et de reconversion de troupeaux bovins à orientation laitière ( JO L 131, p . 1 ). La période de non-commercialisation pour laquelle il a dû s' engager à ne céder ni lait ni produits laitiers provenant de son exploitation est arrivée à expiration le 31 mars 1983 .
4 Par la suite, M . Spagl a demandé aux autorités allemandes compétentes l' attribution d' une quantité de référence, au titre du régime du prélèvement supplémentaire sur le lait, basée sur la quantité de lait qu' il avait produite antérieurement à la période de non-commercialisation . Cette demande a été rejetée au motif que M . Spagl n' avait pas livré de lait en 1983, année de référence retenue par la République fédérale d' Allemagne, et que son cas ne justifiait pas non plus qu' une quantité de référence lui fût attribuée à titre exceptionnel . C' est contre cette décision de rejet que M . Spagl, après avoir formé une opposition infructueuse, a introduit un recours devant le Finanzgericht Muenchen .
5 Estimant que la décision à rendre dépendait de la validité de la réglementation communautaire en la matière, le Finanzgericht Muenchen a sursis à statuer et a saisi la Cour, en application de l' article 177 du traité CEE, des questions préjudicielles suivantes :
"Le règlement ( CEE ) n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, dans la version du règlement ( CEE ) n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, est-il valide
1 ) dans la mesure où, conformément à son article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, les producteurs dont la période de non-commercialisation, en exécution de l' engagement pris au titre du règlement ( CEE ) n° 1078/77, était venue à expiration avant le 31 décembre 1983 ou avant le 30 septembre 1983, mais qui n' avaient pas encore repris leur production pendant la période de référence retenue, ne reçoivent pas de quantités de référence spécifiques dans le cadre de la réglementation des quotas laitiers,
2 ) et dans la mesure où, si la question 1 appelle une réponse négative, la quantité de référence spécifique prévue à l' article 3 bis, paragraphe 2, n' est égale qu' à 60 % de la quantité de lait ou de la quantité d' équivalent lait qui a servi de base au calcul de la prime de non-commercialisation ou de reconversion?"
6 Pour un plus ample exposé des faits de l' affaire au principal, des dispositions communautaires en cause ainsi que du déroulement de la procédure au principal et des observations présentées à la Cour, il est renvoyé au rapport d' audience . Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour .
Sur la première question
7 La première question vise en substance à savoir si l' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, tel que modifié par le règlement n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, est valide dans la mesure où il exclut de l' attribution d' une quantité de référence spécifique au titre de cette disposition les producteurs dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77 du Conseil, du 17 mai 1977, expire avant le 31 décembre 1983 ou, le cas échéant, avant le 30 septembre 1983 .
8 Il convient de rappeler à titre liminaire que la réglementation communautaire en matière de prélèvement supplémentaire sur le lait ne comportait à l' origine aucune disposition spécifique prévoyant l' attribution d' une quantité de référence aux producteurs qui n' avaient pas, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77, livré de lait pendant l' année de référence retenue par l' État membre concerné . Dans les arrêts du 28 avril 1988, Mulder, point 28 ( 120/86, Rec . p . 2321 ), et von Deetzen, point 17 ( 170/86, Rec . p . 2355 ), la Cour a toutefois déclaré cette réglementation invalide pour violation du principe de la confiance légitime, dans la mesure où elle ne prévoyait pas une telle attribution .
9 Dans les arrêts cités, la Cour a constaté, d' une part, qu' un opérateur ayant librement arrêté sa production pendant un certain temps ne peut pas légitimement s' attendre à pouvoir reprendre la production dans les mêmes conditions que celles qui prévalaient auparavant et à ne pas être soumis à d' éventuelles règles, entre-temps arrêtées, relevant de la politique des marchés ou de la politique des structures ( arrêt Mulder, point 23; arrêt von Deetzen, point 12 ), mais que, d' autre part, un tel opérateur, lorsqu' il a été incité, par un acte de la Communauté, à suspendre la commercialisation pour une période limitée, dans l' intérêt général et contre paiement d' une prime, peut légitimement s' attendre à ne pas être soumis, à la fin de son engagement, à des restrictions qui l' affectent de manière spécifique en raison précisément du fait qu' il a fait usage des possibilités offertes par la réglementation communautaire ( arrêt Mulder, point 24; arrêt von Deetzen, point 13 ).
10 C' est à la suite de ces arrêts que le Conseil a arrêté, le 20 mars 1989, le règlement n° 764/89, précité . Ce règlement a ajouté un nouvel article 3 bis au règlement n° 857/84, disposant en substance que les producteurs qui n' ont pas, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77, livré de lait pendant l' année de référence obtiennent, dans certaines conditions, une quantité de référence spécifique égale à 60 % de la quantité de lait livrée ou à la quantité d' équivalent lait vendue par le producteur pendant les douze mois précédant le mois du dépôt de la demande de la prime de non-commercialisation ou de reconversion . La possibilité de se voir attribuer une quantité de référence spécifique à ce titre est toutefois limitée, conformément au paragraphe 1, premier tiret, de l' article 3 bis, aux producteurs "dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution de l' engagement pris au titre du règlement n° 1078/77, expire après le 31 décembre 1983, ou après le 30 septembre 1983 dans les États membres où la collecte de lait des mois d' avril à septembre est au moins le double de celle des mois d' octobre à mars de l' année suivante ".
11 Étant donné que le règlement n° 764/89 a été arrêté en vue de rendre la réglementation en cause conforme aux arrêts Mulder et von Deetzen, précités, il convient d' examiner la validité de l' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, en premier lieu au regard des principes appliqués dans ces arrêts, et notamment au regard du principe de la confiance légitime .
12 La date limite prévue à l' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement n° 857/84, tel que modifié, a pour effet d' exclure de l' attribution d' une quantité de référence spécifique tous les producteurs dont la période de non-commercialisation ou de reconversion a expiré à une date antérieure au 31 décembre 1983 ou, le cas échéant, au 30 septembre 1983 . Dans la catégorie des producteurs ainsi exclus se trouvent donc notamment ceux dont la période de non-commercialisation ou de reconversion est venue à expiration au cours de la période 1981-1983, comprenant les trois années de calendrier susceptibles d' être choisies comme années de référence par les États membres .
13 A cet égard, le législateur communautaire pouvait valablement instituer une date limite afférente à l' expiration de la période de non-commercialisation ou de reconversion des intéressés, visant à exclure du bénéfice de l' article 3 bis ceux des producteurs qui n' ont pas livré de lait pendant tout ou partie de l' année de référence en cause pour des raisons étrangères à un engagement de non-commercialisation ou de reconversion . En revanche, le principe de la confiance légitime, tel qu' interprété par la jurisprudence précitée, s' oppose à ce qu' une date limite de ce genre soit fixée dans des conditions telles qu' elle ait pour effet d' exclure également du bénéfice de l' article 3 bis des producteurs dont l' absence de livraisons de lait pendant tout ou partie de l' année de référence est la conséquence de l' exécution d' un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77 .
14 Ainsi que la Cour l' a déjà relevé dans l' arrêt Mulder, précité ( points 15 et 16 ), la réglementation communautaire en la matière n' assure pas dans tous les cas que les producteurs ainsi exclus de l' attribution d' une quantité de référence représentative au titre de l' article 2 puissent obtenir une quantité de référence spécifique ou supplémentaire au titre d' autres dispositions de cette réglementation, étant donné que l' octroi de telles quantités est subordonné à des conditions spécifiques et ne peut, au surplus, être envisagé que dans la mesure des quantités disponibles à cet effet .
15 Dans ces conditions, il convient de conclure que l' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement n° 857/84, en ce qu' il est susceptible d' exclure du bénéfice de l' article 3 bis des producteurs qui n' ont pas livré de lait pendant tout ou partie de l' année de référence, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77, soumet les producteurs ainsi exclus à des restrictions qui les affectent de manière spécifique en raison précisément de cet engagement . De telles restrictions spécifiques ne sauraient être justifiées par des raisons d' intérêt général, dès lors que cet intérêt pourrait être assuré par des mesures de caractère général . La réglementation en cause porte donc atteinte à la confiance légitime que les opérateurs concernés ont pu avoir dans le caractère limité de leurs engagements contractés antérieurement à l' entrée en vigueur du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait .
16 Il s' ensuit que la disposition litigieuse doit être déclarée invalide pour violation du principe de la confiance légitime .
17 Pour ces raisons, il y a lieu de répondre à la première question que l' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, tel que modifié par le règlement n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, est invalide dans la mesure où il exclut de l' attribution d' une quantité de référence spécifique au titre de cette disposition les producteurs dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement n° 1078/77 du Conseil, du 17 mai 1977, expire avant le 31 décembre 1983 ou, le cas échéant, avant le 30 septembre 1983 .
Sur la seconde question
18 La seconde question vise en substance à savoir si l' article 3 bis, paragraphe 2, du règlement n° 857/84 du Conseil, tel que modifié, est valide dans la mesure où il limite la quantité de référence spécifique prévue par cette disposition à 60 % de la quantité de lait livrée ou de la quantité d' équivalent lait vendue par le producteur pendant la période de douze mois de calendrier précédant le dépôt de la demande de la prime de non-commercialisation ou de reconversion .
19 L' article 3 bis, paragraphe 2, du règlement n° 857/84 dispose que la quantité de référence spécifique visée au paragraphe 1 de cet article "est égale à 60 % de la quantité de lait livrée ou à la quantité d' équivalent lait vendue par le producteur pendant la période de douze mois de calendrier précédant le mois du dépôt de la demande de la prime de non-commercialisation ou de reconversion, telle que déterminée par l' autorité compétente concernée en vertu de l' article 5, paragraphe 1, sous e ), du règlement ( CEE ) n° 1391/78, modifié en dernier lieu par le règlement ( CEE ) n° 84/83, et pour laquelle le producteur n' a pas perdu le droit à la prime ".
20 Comme pour l' examen de la première question, il convient, en ce qui concerne la seconde, de recourir en premier lieu au principe de la confiance légitime, tel qu' appliqué par les arrêts Mulder et von Deetzen, précités .
21 A cet égard, il y a lieu de souligner, à titre liminaire, que les producteurs visés à l' article 3 bis du règlement n° 857/84, tel que modifié, n' ont pas, contrairement aux producteurs visés à l' article 2 du même règlement, livré de lait pendant l' année de référence retenue par l' État membre en cause . Le législateur communautaire ne pouvait donc pas calculer leurs quantités de référence spécifiques en fonction du volume des livraisons qu' ils avaient effectuées pendant cette année, mais devait recourir, ainsi qu' il l' a fait, à d' autres bases de calcul, tel le volume de leurs livraisons au cours d' une période représentative antérieure à leur période de non-commercialisation ou de reconversion . En procédant de cette manière, il pouvait valablement affecter la quantité de ces livraisons d' un taux d' abattement visant à assurer que la catégorie de producteurs concernés ne soit pas indûment avantagée par rapport aux producteurs ayant continué à livrer du lait pendant l' année de référence .
22 Il convient toutefois de préciser que, lorsqu' un tel taux d' abattement est appliqué, le principe de la confiance légitime s' oppose à ce que ce taux soit fixé à un niveau tellement élevé, par rapport aux taux d' abattement applicables aux producteurs dont les quantités de référence sont fixées conformément à l' article 2 du règlement n° 857/84, que son application revienne à une restriction qui affecte les producteurs concernés de manière spécifique en raison précisément de leur engagement pris au titre du règlement n° 1078/77 .
23 Le taux d' abattement de 40 %, prévu à l' article 3 bis, paragraphe 2, du règlement n° 857/84, ne répond pas à ces exigences . Il résulte, en effet, des renseignements fournis par la Commission à la demande de la Cour que les taux d' abattement applicables aux producteurs dont les quantités de référence sont fixées en fonction des livraisons de lait effectuées pendant l' année de référence varient dans les différents États membres, conformément à l' article 2, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 857/84, selon les catégories de producteurs ou les régions . Il résulte toutefois également de ces renseignements qu' en aucun cas le total des abattements applicables aux producteurs visés à l' article 2, y compris les abattements résultant d' une réduction des quantités globales garanties et de la suspension d' une partie des quantités de référence au cours de la phase d' exécution du régime, n' excède le taux de 17,5 %.
24 Dans ces conditions, l' application aux producteurs relevant de l' article 3 bis d' un taux d' abattement de 40 % qui, loin de correspondre à une valeur représentative des taux applicables aux producteurs visés à l' article 2, excède de plus du double le total le plus élevé de ces taux doit être considérée comme une restriction qui affecte cette première catégorie d' opérateurs de manière spécifique en raison précisément de leur engagement de non-commercialisation ou de reconversion .
25 Le Conseil et la Commission ont objecté que l' on ne saurait comparer le taux d' abattement applicable en vertu de l' article 3 bis, paragraphe 2, aux taux d' abattement applicables aux producteurs ayant continué à livrer du lait pendant l' année de référence . Les quantités de référence de cette dernière catégorie seraient, en effet, calculées en fonction des livraisons effectuées au cours d' une année de calendrier comprise dans la période 1981-1983, c' est-à-dire de chiffres relativement récents, alors que les quantités de référence spécifiques à la première catégorie seraient basées sur le volume des livraisons effectuées antérieurement à l' engagement pris au titre du règlement n° 1078/77, c' est-à-dire des chiffres remontant à de nombreuses années auparavant .
26 Cette argumentation ne saurait justifier la différence de taux incriminée . Il ressort, en effet, d' un tableau présenté par la Commission au cours de la procédure que les livraisons de lait, tant au niveau de la Communauté en général qu' au niveau des exploitations individuelles, ont constamment augmenté entre 1977, année de l' entrée en vigueur du règlement n° 1078/77, et 1983, dernière année de calendrier susceptible d' être retenue comme année de référence .
27 Le Conseil et la Commission ont encore objecté qu' il n' était pas possible d' attribuer à la catégorie des producteurs en cause des quantités de référence spécifiques d' un taux supérieur à 60 % des livraisons de lait effectuées antérieurement à la période de non-commercialisation ou de reconversion, sans compromettre la finalité du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait, qui est de maîtriser les excédents structurels sur le marché du lait et des produits laitiers . La Commission a expliqué à cet égard que, d' après ses estimations, il était à prévoir que le volume correspondant aux demandes d' attribution d' une quantité de référence spécifique introduites par les producteurs ayant pris un engagement au titre du règlement n° 1078/77 atteindrait environ 1 million de tonnes de lait . Étant donné que le législateur communautaire a considéré qu' une quantité de lait supplémentaire de 600 000 tonnes était la quantité la plus élevée qui soit encore compatible avec la finalité du régime, il a augmenté la réserve communautaire de cette quantité, tout en maintenant inchangé le niveau des quantités de référence des autres producteurs .
28 Cette argumentation ne saurait pas davantage justifier la réglementation incriminée . En effet, à supposer même qu' une augmentation plus importante de la réserve communautaire n' ait pas pu être envisagée sans mettre en cause l' équilibre du marché laitier, il n' en reste pas moins qu' il aurait suffi de réduire les quantités de référence des autres producteurs proportionnellement d' un montant correspondant, afin de pouvoir attribuer des quantités de référence spécifiques plus importantes aux producteurs ayant pris un engagement au titre du règlement n° 1078/77 .
29 Il s' ensuit que la règle incriminée des 60 % porte atteinte, elle aussi,à la confiance légitime que les producteurs concernés pouvaient placer dans le caractère limité de leurs engagements . La disposition litigieuse doit, dès lors, être déclarée invalide pour violation du principe de la confiance légitime, sans qu' il soit nécessaire d' examiner les autres arguments avancés au cours de la procédure à l' encontre de sa validité .
30 Pour ces raisons, il y a lieu de répondre à la seconde question que l' article 3 bis, paragraphe 2, du règlement n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, tel que modifié par le règlement n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, est invalide dans la mesure où il limite la quantité de référence spécifique prévue par cette disposition à 60 % de la quantité de lait livrée ou de la quantité d' équivalent lait vendue par le producteur pendant la période de douze mois de calendrier précédant le dépôt de la demande de la prime de non-commercialisation ou de reconversion .
Décisions sur les dépenses
Sur les dépens
31 Les frais exposés par le gouvernement irlandais, par le Conseil des Communautés européennes et par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l' objet d' un remboursement . La procédure revêtant, à l' égard des parties au principal, le caractère d' un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens .
Dispositif
Par ces motifs
,
LA COUR ( cinquième chambre ),
statuant sur les questions à elle soumises par le Finanzgericht Muenchen, par ordonnance du 27 avril 1989,
dit pour droit :
1 ) L' article 3 bis, paragraphe 1, premier tiret, du règlement ( CEE ) n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, tel que modifié par le règlement ( CEE ) n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, est invalide dans la mesure où il exclut de l' attribution d' une quantité de référence spécifique au titre de cette disposition les producteurs dont la période de non-commercialisation ou de reconversion, en exécution d' un engagement pris au titre du règlement ( CEE ) n° 1078/77 du Conseil, du 17 mai 1977, expire avant le 31 décembre 1983 ou, le cas échéant, avant le 30 septembre 1983 .
2 ) L' article 3 bis, paragraphe 2, du règlement ( CEE ) n° 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, tel que modifié par le règlement ( CEE ) n° 764/89 du Conseil, du 20 mars 1989, est invalide dans la mesure où il limite la quantité de référence spécifique prévue par cette disposition à 60 % de la quantité de lait livrée ou de la quantité d' équivalent lait vendue par le producteur pendant la période de douze mois de calendrier précédant le dépôt de la demande de la prime de non-commercialisation ou de reconversion .