CIV. 2
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 décembre 2017
Rejet non spécialement motivé
M. PIMOULLE, conseiller le plus ancien
non empêché, faisant fonction de président
Décision n° 10807 F
Pourvoi n° H 16-22.909
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société Centre d'affaires de la Pointe Simon (CAPS), société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ la société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS), société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
3°/ à la société Hébergement de la Pointe Simon (SHPS), société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 26 mai 2016 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Aviva assurances, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Risk management, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
3°/ à la société CGPA, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 8 novembre 2017, où étaient présents : M. Pimoulle, conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonction de président, Mme Pic, conseiller référendaire rapporteur, Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Richard, avocat des sociétés Centre d'affaires de la Pointe Simon, Immobilière de la Pointe Simon et Hébergement de la Pointe Simon, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société CGPA, de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Risk management ;
Sur le rapport de Mme Pic, conseiller référendaire, l'avis de M. Girard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article
1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Centre d'affaires de la Pointe Simon, Immobilière de la Pointe Simon et Hébergement de la Pointe Simon aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Risk management la somme globale de 2 000 euros et, in solidum, à payer à la société CGPA la somme globale de 1 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES
à la présente décision.
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour les sociétés Centre d'affaires de la Pointe Simon, Immobilière de la Pointe Simon et Hébergement de la Pointe Simon.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, d'avoir débouté la Société Centre d'Affaires de la Pointe Simon (CAPS), la Société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS) et la Société d'Hébergement de la Pointe Simon (SHPS) de leur demande tendant à voir ordonner une expertise sur le fondement de l'article
145 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE selon l'article 145, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; que l'absence d'instance au fond s'apprécie à la date de saisine du juge ; que le tribunal de grande instance de Paris a été saisi au fond de la demande en paiement de primes par assignation délivrée les 15 et 27 juillet 2015 par la Société Aviva à l'encontre des sociétés maîtres d'ouvrages, de la Société Inso, entreprise générale, de la Société Risk Management et de la Société CGPA ; que le juge des référés du Tribunal de commerce de Nanterre avait alors déjà rendu sa décision, l'assignation en référé délivrée datant de décembre 2014 ; que la demande d'expertise est donc recevable ; que l'expertise doit présenter une utilité et être susceptible d'améliorer la situation probatoire de la partie qui la demande ; qu'en l'espèce, la Société Risk Management reconnaît avoir perçu les primes d'assurances versées par les sociétés demanderesses et ne pas les avoir transférées à la Société Aviva Assurances ; qu'elle se prévaut des dispositions du contrat de courtage et conseil en risk management qui énoncent,
- en son article 9.3 que la société (il s'agit des sociétés maîtres d'ouvrage) s'engage à être responsable conjointement et solidairement du paiement et à payer les primes d'assurances et de réassurances brutes pour des assurances/réassurances demandées par la société ou les autres participants contractuels ainsi que du règlement du tout solde et autres sommes relatives (commission, honoraires, ...) appelés par Risk et dus par la société et/ou les autres participants ;
- et en son article 10.1, qu'en cas de retard de paiement de plus de 90 jours par la société et/ou par tout autre participant contractuel des rimes brutes et/ou commissions et/ou des frais liés à une couverture d'assurance/réassurance relative au projet, l'ensemble des primes, commissions, honoraires liés au programme de couverture d'assurances du projet deviendront immédiatement dus sans avis et/ou notification préalable de Ris, que dans cette hypothèse, Risk est autorisé à retenir et compenser ces encours avec le solde positif que Risk a reçu (ou à recevoir) le cas échéant ou que Risk détient pour le compte de la société et/ou les autres participants contractuels ;
qu'il est fait état du défaut de paiement des primes par la société italienne Inso, entreprise générale de gros oeuvre, désignée comme participant contractuel au contrat ; que les données du litige sont par conséquent connues, de même que le fait que les sociétés maîtres d'ouvrage n'ont été informées que par une lettre d'Aviva du 6 février 2014 de ce que les primes versées étaient retenues à leur détriment par la Société Risk Management depuis octobre 2010 pour le plus ancien montant ; que le litige opposant les parties est d'ordre juridique, les questions posées ayant trait au fondement juridique de la rétention des primes par Risk Management, tant à l'égard des assurées les ayant versées qu'à l'égard de l'assureur qui en attendait le versement ; que l'intérêt probatoire de l'expertise n'est pas démontré ; que l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la demande du Maître de l'Ouvrage tend à recueillir des informations afin de faire la lumière sur les relations existant entre Risk Management et Aviva ; que toutefois, les déclarations faites à la barre ne permettent pas de justifier ce besoin de clarification ; que la demande formulée par le Maître de l'Ouvrage ne fait pas référence à la Société Inso SPA, alors que c'est le rôle de cette dernière dans le litige d'ensemble qui devrait dire clarifié ; qu'en conséquence, nous dirons que le Maître de l'Ouvrage ne justifie pas du motif légitime nécessaire à l'application de l'article 145 du CPC et qu'il sera débouté de sa demande d'expertise ;
1°) ALORS QUE s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire n'y avoir lieu d'ordonner une expertise, que les données du litige opposant les parties étaient connues et que les questions posées avaient trait au seul fondement juridique de la rétention des primes par la Société Risk Management, sans rechercher, comme elle y était invitée, si une telle mesure se justifiait pour établir si les circonstances de fait alléguées par cette dernière constituaient le motif réel des rétentions qu'elle avait opérées, ce que la Société Centre d'Affaires de la Pointe Simon (CAPS), la Société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS) et la Société d'Hébergement de la Pointe Simon (SHPS) contestaient, et afin de déterminer si les sociétés Risk Management et Aviva Assurances avaient commis une faute de nature à engager leur responsabilité, de sorte qu'elles avaient un intérêt légitime au prononcé d'une telle mesure, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
145 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; qu'en disant n'y avoir lieu d'ordonner une expertise, motif pris que l'intérêt probatoire d'une telle mesure n'était pas démontré, après avoir pourtant constaté que le rôle joué par la Société Inso Spa dans le litige d'ensemble devait être clarifié s'agissant des rétentions de primes auxquelles s'était livrée la Société Risk Management, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article
145 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, d'avoir débouté la Société Centre d'Affaires de la Pointe Simon (CAPS), la Société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS) et la Société d'Hébergement de la Pointe Simon (SHPS) de leur demande tendant à voir ordonner, sous astreinte, à la Société Risk Management de reverser à la Société Aviva Assurances le montant des 4e et 5e échéances, outre le montant de l'échéance additionnelle, de primes d'assurance dommage-ouvrage, soit la somme de 2.793.6
29, 34 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article
873 alinéa 2 du Code de procédure civile énonce que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; que le contrat précité disposait dans les clauses 9.1 et 9.2, précédant celles rappelées ci-dessus, que la société transférera les sommes dues pour la couverture d'assurance et/ou réassurance du projet vers le compte primes géré par Risk dans les délais impartis dans les conventions et/ou convenues avec Risk et que Risk transférera les sommes convenues avec les compagnies d'assurance et de réassurance en conformité avec les délais qui lui sont accordés par celles-ci ; que Risk, qui avait une obligation de transfert, s'en est abstenue, invoquant l'engagement solidaire des sociétés maître d'ouvrage, contenu à l'article 9.3 précité, au paiement des primes d'assurance impayées des autres participants contractuels à l'opération de construction et l'autorisation de compensation énoncée à l'article 10.1 ; que cet article 10.1 prévoit une hypothèse particulière qui est celle de l'exigibilité immédiate des primes, commissions ou honoraires liés au programme de couverture d'assurances provoquée par le retard de paiement des sociétés ou de tout autre participant contractuel ; qu'il n'appartient pas à la Cour qui, statuant en matière de référé, ne peut interpréter les clauses d'un contrat, de dire si cette hypothèse est ou non réalisée de même qu'elle n'a pas le pouvoir de dire si l'engagement de responsabilité conjointe et solidaire des sociétés maîtres d'ouvrage du paiement des primes d'assurance, visé à l'article 9.3, permettait à Risk Management de retenir d'office les primes payées par les sociétés ; que ces points constituent des contestations sérieuses qui s'opposent à ce que la demande de reversement des primes d'assurances de Risk vers Aviva, qui s'analyse en une obligation de faire, soit accueillie ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le Maître de l'Ouvrage nous présente une demande au titre de l'article 873 du CPC ; que ce dernier dispose que « Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » ; que les pièces versées aux débats ainsi que les demandes présentées par Risk Management établissent que le litige dépasse les demandes qui nous sont présentées aujourd'hui ; qu'en particulier le rôle de la Société Inso SPA et ses dettes alléguées vis-à-vis de Risk Management, pour lesquelles il est affirmé que le Maître de l'Ouvrage aurait donné sa garantie, doit impérativement être clarifié ; que la Société Inso SPA n'a pas été appelée dans la cause et n'a donc pas pu faire valoir son point de vue ; que, si la rétention par Risk Management des sommes dues à Aviva nous est présentée comme un trouble manifestement illicite, nous ne disposons pas d'une vue d'ensemble du litige permettant de prescrire les mesures de remise en état qui s'imposent ; qu'en outre, l'évidence nécessaire en référé fait défaut ; qu'en conséquence, nous dirons n'y avoir lieu à référé ;
1°) ALORS QUE le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter la Société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS) et la Société d'Hébergement de la Pointe Simon (SHPS) de leur demande, que le rôle de la Société Inso Spa devait être impérativement clarifié, qu'elle n'avait pas été appelée dans la cause et qu'elle ne disposait pas d'une vue d'ensemble du litige, sans rechercher, comme elle y était légalement tenue, si la rétention d'office par la Société Risk Management des primes qu'elle avait perçues pour près de 2,8 millions d'euros constituait un trouble manifestement illicite, qu'il lui appartenait de le faire cesser en enjoignant à la société de courtage d'exécuter ses obligations contractuelles en reversant lesdites primes à la Société Aviva Assurances nonobstant les incertitudes qui pouvaient exister quant au rôle de la Société Inso Spa et son absence dans la cause, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873, alinéa 1er, du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; qu'en déboutant la Société Centre d'Affaires de la Pointe Simon (CAPS), la Société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS) et la Société d'Hébergement de la Pointe Simon (SHPS) de leur demande, motif pris qu'il n'appartenait pas au juge des référés d'interpréter les clauses d'un contrat, sans indiquer en quoi le contrat de courtage et conseil en risk management était ambigu, de sorte qu'elle aurait été incompétente pour ordonner son exécution, en faisant injonction à la Société Risk Management de reverser les primes à la Société Aviva Assurances, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article
873, alinéa 2, du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; qu'en se bornant à énoncer, pour débouter la Société Centre d'Affaires de la Pointe Simon (CAPS), la Société Immobilière de la Pointe Simon (SIPS) et la Société d'Hébergement de la Pointe Simon (SHPS) de leur demande, qu'il ne lui appartenait pas, en sa qualité de juge des référés, de dire si la Société Risk Management était en droit de se prévaloir des articles 9.3 et 10.1 du contrat de courtage et conseil en risk management, sans rechercher, comme elle y était tenue, si la demande dont elle était saisie ne se heurtait à aucune contestation sérieuse faisant obstacle à ce qu'il soit ordonné à la Société Risk Management de reverser lesdites primes à la compagnie d'assurances, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article
1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article
873, alinéa 2, du Code de procédure civile.