Cour d'appel de Paris, Chambre 5-5, 12 septembre 2019, 17/04515

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    17/04515
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Décision précédente :Tribunal de commerce de Rennes, 17 janvier 2017
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/5fda371e597fbf7d3067f173
  • Président : Monsieur Patrick BIROLLEAU
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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2021-10-20
Cour d'appel de Paris
2019-09-12
Tribunal de commerce de Rennes
2017-01-17

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT

DU 12 SEPTEMBRE 2019 (n° , 10 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04515 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2YOO Décision déférée à la cour : jugement du 17 janvier 2017 -tribunal de commerce de RENNES - RG n° 2016F00426 APPELANTE SAS SCHENKER FRANCE (anciennement SCHENKER JOYAU) Ayant son siège social [Adresse 2] [Localité 3] N° SIRET : 311 799 456 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 Ayant pour avocat plaidant Me Stéphane MIGNE, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON INTIMES Maître [X] [R] es-qualités de mandataire liquidateur de la société ALLIANCE PACK EXPRESS 51 SARL Demeurant [Adresse 1] [Localité 1] Représenté par Me Anthony CHURCH, avocat au barreau de PARIS, toque : B0963 PARTIE INTERVENANTE SELARL AMANDINE RIQUELME prise en la personne de Maître [U] [M] venant en remplacement de Maître [X] [R] ès-qualités de mandataire liquidateur de la société ALLIANCE PACK EXPRESS 51 SARL Demeurant [Adresse 1] [Localité 2] Représenté par Me Anthony CHURCH, avocat au barreau de PARIS, toque : B0963 COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 18 avril 2019, en audience publique, devant la cour composée de : Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de Chambre Madame Christine SOUDRY, Conseillère, chargée du rapport Madame Estelle MOREAU, Conseillère qui en ont délibéré, Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine SOUDRY dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile. Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA ARRÊT : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. *** FAITS ET PROCÉDURE : Le 16 avril 2009, les sociétés Schenker Joyau (devenue Schenker France et ci-après dénommée société Schenker) et Alliance Pack Express 51 ont conclu un contrat de sous-traitance en matière de transport à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2009. Il était stipulé une faculté de résiliation unilatérale par chaque partie moyennant le respect d'un préavis de trois mois si le temps écoulé depuis le début d'exécution du contrat était supérieur à un an. La société Schenker a, en exécution de ce contrat, confié à la société Alliance Pack Express 51 différentes tournées. La dernière annexe au contrat applicable à compter du 4 octobre 2011 définissait cinq tournées : [Localité 7] (01C), [Localité 5] (07), [Localité 4] (01D), [Localité 9] (02) et [Localité 6] (01B). Par lettre non datée faisant référence à un entretien du 28 février 2012, la société Schenker a résilié la tournée 02 à compter du 10 avril 2012. Par suite d'une erreur de la société Schenker, la tournée 02 a été maintenue tandis que la tournée 01B a été arrêtée le 10 avril 2012. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 1er octobre 2012, la société Schenker a résilié la tourné 01B à compter du 31 décembre 2012. Le 31 décembre 2012, la société Alliance Pack Express 51 a facturé à la société Schenker une somme de 39.730 euros HT sur la tournée [Localité 6] (01B) au titre de la garantie de chiffre d'affaires pour l'année 2012 (facture n°001585). Le 28 février 2013, la tournée 01C a été arrêtée. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 avril 2013, la société Schenker a résilié la « tournée semi-remorque » à compter du 31 août 2013. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 25 septembre 2013, la société Alliance Pack Express 51 a mis en demeure la société Schenker de lui régler la facture émise au titre de la garantie de chiffre d'affaires pour la tournée 01B. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 octobre 2013, la société Schenker a mis fin au contrat de sous-traitance avec effet au 10 janvier 2014. Le 30 novembre 2013, la société Alliance Pack Express 51 a facturé à la société Schenker une somme de 53.180 euros HT pour la tournée [Localité 8] (01C) au titre de la garantie de chiffre d'affaires pour l'année 2013 (facture n°002223). Les factures émises par la société Alliance Pack Express 51 au titre de la garantie de chiffre d'affaires étant demeurées impayées, celle-ci a, suivant exploit du 20 janvier 2014, assigné la société Schenker devant le tribunal de la Roche-sur-Yon afin d'obtenir paiement des sommes afférentes. Par jugement du 17 avril 2014, le tribunal d commerce de Châlons en Champagne a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Alliance Pack Express 51. Par jugement du 5 février 2015, la société Alliance Pack Express 51 a été placée en liquidation judiciaire et Me [X] [R] a été désigné en tant que liquidateur. Par jugement en date du 13 septembre 2016, le tribunal de La Roche-sur-Yon s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Rennes, Me [R] ayant formulé une demande d'indemnisation au titre de l'article L 442-6 du code de commerce. Par jugement du 17 janvier 2017, le tribunal de commerce de Rennes a : - débouté la société Schenker France de sa demande prescription et de toutes ses actions à ce titre ; - jugé que la rupture des relations entre les sociétés Alliance Pack Express 51 et Schenker France n'a pas été brutale et débouté Me [R] en sa qualité de mandataire de la société Alliance Pack Express 51 de toutes ses demandes à ce titre ; - condamné la société Schenker France à payer à Maître [R] en sa qualité de mandataire de la société Alliance Pack Express 51 la somme de 84.533,88 euros TTC correspondant à la facturation minimum garantie non réglée des tournées 1B et 1C et a débouté Me [R] du surplus demandé ; - débouté la société Schenker France de toutes ses demandes, fins et conclusions ; - condamné la société Schenker France à payer à Me [R] en sa qualité mandataire de la société Alliance Pack Express 51 la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; - condamné la société Schenker France à payer les entiers dépens ; - refusé l'exécution provisoire du jugement. La société Schenker France a interjeté appel de cette décision le 1er mars 2017. Par ordonnance du 2 novembre 2017, le conseiller de la mise en état a : - constaté le désistement, parfait, de la SELARL Amandine Riquelme, ès qualités de liquidateur de la société Alliance Pack Express 51, de son incident d'irrecevabilité d'appel ; - dit, en conséquence, le conseiller de la mise en état dessaisi de cet incident ; rejeté le surplus des demandes ; - dit que les dépens de l'incident seraient fixés au passif de la société Alliance Pack Express 51, avec distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles, en application de l'article 699 du code de procédure civile. ***

Prétentions et moyens des parties

: Dans ses dernières conclusions du 22 mars 2019, la société Schenker France demande à la cour de : - dire et juger son appel recevable et fondé, et y faire droit, - dire et juger irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel incident de Me [U] [M] ès-qualités de liquidateur de la société Alliance Pack Express 51,

En conséquence

, - confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Me [R], désormais Me [M], de ses demandes fondées sur les dispositions de l'article L.442-6 du code de commerce, - le réformer pour le surplus, et par suite, Principalement, - dire et juger irrecevables et en tout cas mal fondées les demandes de la société Alliance Pack Express 51 prise en la personne de son liquidateur et l'en débouter, Subsidiairement, - réformer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué à Me [R], désormais Me [M], une somme supérieure à ses demandes au titre de la tournée 1B, et la réduire à une somme de 39.730 euros HT, En toute hypothèse, - condamner la société Alliance Pack Express 51 prise en la personne de son liquidateur à lui payer une somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens d'instance et d'appel lesquels pourront être recouvrés directement par la SELARL Lexavoue Paris-Versailles pour ceux dont elle aurait fait l'avance sans recevoir provision. A l'appui de ses demandes, la société Schenker sollicite tout d'abord la confirmation du jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a jugé que la rupture des relations n'a pas été brutale. Elle prétend à cet effet que le délai de trois mois accordé à la société Alliance Pack Express 51 était suffisant étant équivalent à celui prévu tant contractuellement que par le contrat type figurant en annexe I du décret 2003-1295 du 26 décembre 2003. Ensuite, la société appelante considère que le jugement du tribunal de commerce doit être réformé en ce qu'il n'a pas retenu la prescription annale prévue à l'article L.133-6 du code de commerce alors que ces dispositions étaient applicables aux demandes de la société Alliance Pack Express 51 s'agissant de demandes de paiement de factures nées de l'exécution d'un contrat de sous-traitance dans le domaine des transports. Elle ajoute que cette prescription court à compter du jour où la marchandise a été remise ou offerte au destinataire et non à compter de la date de fin des relations contractuelles comme le soutient l'intimée. Elle prétend ainsi qu'il convient de définir pour chaque tournée, objet d'une demande de la société Alliance Pack Express 51, la date de la dernière remise effective de la marchandise afin de déterminer le point de départ du délai de prescription y afférent. Elle considère qu'en ce qui concerne la facture n° 1585, la société Alliance Pack Express 51 aurait dû engager une action au plus tard le 31 avril 2013 à l'effet d'en solliciter le paiement dès lors que les prestations se sont achevées le 31 avril 2012. En ce qui concerne la facture n° 2223, elle estime que le délai de prescription annale a commencé à courir à compter du 28 février 2013 au plus tard, date de la dernière prestation figurant sur ladite facture. A titre subsidiaire, la société Schenker fait valoir le défaut d'intérêt à agir de la société Alliance Pack Express 51 dans la mesure où le chiffre d'affaires total réalisé par cette dernière sur les différentes tournées est largement supérieur au chiffre d'affaires total annuel garanti par le contrat cadre. A titre encore plus subsidiaire, la société Schenker explique que les demandes en paiement adverses doivent être réduites. Elle soutient tout d'abord que la société Alliance Pack Express 51 ne peut se prévaloir que d'une perte de chance dès lors que la nature même des prestations confiées à la société Alliance Pack Express 51 était sujette à des éléments économiques extrinsèques qu'elle ne pouvait maîtriser : arrêt de tournées, perte de clients' Par ailleurs, elle prétend que la société Alliance Pack Express 51 ne peut réclamer à titre d'indemnisation de son préjudice qu'une somme équivalente à la perte de marge brute dès lors qu'elle a économisé des charges en ne réalisant pas les tournées. Or elle relève que l'intimée ne verse aux débats aucun élément permettant de déterminer cette perte. A titre infiniment plus subsidiaire, la société Schenker considère que le tribunal a statué ultra petita en omettant de déduire du montant de 62.000 euros HT la somme de 22.270 euros HT correspondant au chiffre d'affaires réalisé par la société Alliance Pack Express 51 sur les mois de janvier 2012 à avril 2012, la résiliation étant effective le 31 décembre 2012 de sorte qu'il n'aurait dû accorder qu'une somme de 39.730 euros HT. Dans ses dernières conclusions du 3 décembre 2018, Me [U] [M] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Alliance Pack Express 51 demande à la Cour de : Vu les articles 1134 et suivants (anciens) du code civil, Vu l'article L.442-6-I-5° du code du commerce, Vu l'article 1382 (ancien) du code civil, - confirmer le jugement entrepris sur le principe de la condamnation de la société Schenker France au titre de la facturation minimum garantie non réglée des tournées 01B et 01C ; - infirmer le jugement pour le surplus ; Y ajoutant, - débouter la société Schenker de toutes demandes, fins et conclusions ; - condamner la société Schenker à lui payer la somme de 111.120,36 euros conformément aux factures en date des 31 décembre 2012 et 30 novembre 2013, majorée des pénalités de retard de paiement égales à 3 fois et demi le taux d'intérêt légal à compter du 25 septembre 2013, date de la première lettre de mise en demeure, conformément aux dispositions de l'article L.441-6-I du code de commerce ; - condamner la société Schenker à lui payer la somme de 115.624,74 euros en réparation du préjudice subi en raison de la rupture brutale de la relation commerciale établie ; - condamner la société Schenker à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; - condamner la société Schenker aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Anthony Church, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. En défense, sur la rupture brutale de relations commerciales établies, Me [M] ès qualités fait valoir que l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce est applicable. Elle soutient que la durée prévue par le contrat type n'est qu'un délai minimal et que l'application du contrat type n'exclut pas l'application de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce. Elle ajoute que le délai de préavis de trois mois contractuellement prévu et observé était insuffisant au regard de la durée de la relation de cinq années et du fait que ladite relation représentait 22% du chiffre d'affaires de la société Alliance Pack Express 51. Elle prétend que dans ces circonstances, la durée de préavis qui aurait dû être respecté devait être d'au moins six mois. A l'appui de ses demandes en paiement, Me [M] ès qualités soutient que le contrat de sous-traitance qui liait la société Alliance Pack Express 51 à la société Schenker prévoyait une facturation minimum garantie. Elle affirme que la prescription visée à l'article L 133-6 du code de commerce concerne les prestations de transport et non le respect d'un contrat de sous-traitance de sorte que la prescription applicable à ses demandes en paiement est de cinq ans et non d'un an. Elle ajoute que si l'article L 133-6 du code de commerce devait être appliqué, le point de départ de la prescription serait le 10 janvier 2014, date effective de résiliation du contrat commercial de sous-traitance, et non le 31 décembre 2012. Me [M] ès qualités fait encore valoir son intérêt à agir dans la mesure où la clause de garantie de chiffre d'affaires est insérée dans le contrat prévoyant une seule tournée et que cette clause n'a pas vocation à garantir l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé par la société Alliance Pack Express 51 pour le compte de la société Schenker France, toutes tournées confondues, mais à garantir le chiffre d'affaires que lui procurera son mandant, pour ce seul contrat concernant une seule tournée. Elle soutient encore que l'application de cette clause exclut toute notion de perte de chance ou toute indemnisation sur la base d'un perte de marge brute. L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2019. *** MOTIFS : Sur les demandes en paiement au titre de la facturation minimum garantie Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription Selon l'article L 133-6 du code de commerce, les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité. Toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l'article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d'un an. Le délai de ces prescriptions est compté, dans le cas de perte totale, du jour où la remise de la marchandise aurait dû être effectuée, et, dans tous les autres cas, du jour où la marchandise aura été remise ou offerte au destinataire. Il résulte de ces dispositions que sont soumises à la prescription annale, toutes les actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu. En l'espèce, la demande en paiement de la société Alliance Pack Express 51 n'est pas relative à la prestation de transport mais à l'exécution d'une clause du contrat de sous-traitance prévoyant la garantie d'un chiffre d'affaires annuel minimal de sorte que l'article susvisé n'est pas applicable et que le délai de prescription est de cinq ans. En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Schenker. Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir En application de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Selon l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention. En l'espèce, la société Schenker conteste l'intérêt à agir de la société Alliance Pack Express 51 dans la mesure où le chiffre d'affaires total réalisé par cette dernière sur les différentes tournées est largement supérieur au chiffre d'affaires total annuel garanti par le contrat cadre. La société Alliance Pack Express 51 conteste cette interprétation de la clause de garantie de chiffre d'affaires minimal annuel prévue au contrat du 16 avril 2009. Dès lors que la société Alliance Pack Express 51 revendique, dans le cadre de son action en justice, l'application d'une clause contractuelle dont l'interprétation est contestée par la partie adverse, elle a intérêt à agir. La fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Alliance Pack Express 51 sera donc rejetée. Sur le bien-fondé des demandes en paiement L'article 2 du contrat de sous-traitance conclu le 16 avril 2009 stipule que : « l'opérateur de transport garantit au sous-traitant un Chiffre d'Affaires hors taxes (hebdomadaire, bimensuel, mensuel ou autre) par véhicule(s) de Euros par an. » et que « Le prix et le Chiffre d'Affaires garanti sont renégociés chaque année à la date anniversaire de la conclusion du présent contrat sur proposition du sous-traitant et après accord de l'opérateur de transport. » Selon le tableau annexé au contrat et applicable au 4 octobre 2011, le montant de la garantie annuelle de chiffre d'affaires a été fixé par tournée et non de manière globale sur toutes les tournées contrairement à ce que prétend la société Schenker. Ainsi il a été prévu que le montant de la garantie annuelle de chiffre d'affaires sur la tournée 01C était de 62 000 euros HT et que le montant de la garantie annuelle de chiffre d'affaires sur la tournée 01B était de 62 000 euros HT. Ainsi il importe peu que le chiffre d'affaires total réalisé par la société Alliance Pack Express 51 sur les années 2012 et 2013 ait été supérieur au chiffre d'affaires total annuel garanti, la garantie annuelle de chiffre d'affaires s'appliquant annuellement tournée par tournée. En outre, et contrairement à ce que soutient la société Schenker, la clause litigieuse prévoit la garantie d'un chiffre d'affaires minimum annuel par tournée de sorte que le montant indiqué au titre de cette garantie est dû par la société Schenker à la société Alliance Pack Express 51 du seul fait que le chiffre d'affaires effectivement réalisé par cette dernière sur l'année est inférieur à celui garanti sous réserve de l'absence de résiliation de la tournée litigieuse. Ainsi la société Schenker ne saurait utilement prétendre à une réduction du montant garanti en invoquant une perte de chance ou une indemnisation sur la base du taux de marge brute. Il résulte des pièces versées aux débats que la tournée 01B a été résiliée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 1er octobre 2012 à compter du 31 décembre 2012. Or il est établi (pièce 11 de la société Schenker) que pour l'année 2012, le chiffre d'affaires réalisé par la société Alliance Pack Express 51 sur la tournée 01B s'est élevé à 22.270 euros HT. Le montant de la garantie annuelle de chiffre d'affaires sur la tournée 01B étant de 62.000 euros HT, il est dû une somme de 39.730 euros HT (62.000 euros ' 22 270 euros) ou 47 517,08 euros TTC par la société Schenker à la société Alliance Pack Express 51. Par ailleurs, il résulte des pièces versées aux débats que la tournée 01C a été résiliée par la lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 octobre 2013 mettant fin aux relations contractuelles entre les sociétés Schenker et Alliance Pack Express 51 à effet au 10 janvier 2014. En effet, aucune lettre de résiliation visant la tournée 01C n'a été adressée à la société Alliance Pack Express 51 avant la lettre du 11 octobre 2013. Or il est établi (pièce 11 de la société Schenker et 5 de la société Alliance Pack Express 51) que pour l'année 2013, le chiffre d'affaires réalisé par la société Alliance Pack Express 51 sur la tournée 01C s'est élevé à 8 820 euros HT. Le montant de la garantie annuelle de chiffre d'affaires sur la tournée 01C étant de 62 000 euros HT, il est dû une somme de 53 180 euros HT (62 000 euros ' 8 820 euros) ou 63.603,28 euros TTC par la société Schenker à la société Alliance Pack Express 51. En conséquence, la société Schenker sera condamnée à régler à Me [M] ès qualités une somme de 47 517,08 euros TTC au titre de la garantie de chiffre d'affaires sur la tournée 01B pour l'année 2012, avec intérêts à un taux égal à trois fois le taux légal, conformément aux dispositions de l'article L 441-6-I du code de commerce de sa version applicable au litige, à compter du 25 septembre 2013 conformément à la demande. En outre, la société Schenker sera condamnée à régler à Me [M] ès qualités une somme de 63 603,28 euros TTC au titre de la garantie de chiffre d'affaires sur la tournée 01C pour l'année 2013, avec intérêts à un taux égal à trois fois le taux légal, à compter du 31 décembre 2013 conformément aux dispositions de l'article L 441-6-I du code de commerce dans sa version applicable au litige. Sur la demande d'indemnisation au titre de la rupture brutale des relations commerciales L'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige dispose qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Cet article, qui instaure une responsabilité de nature délictuelle, ne s'applique pas dans le cadre des relations commerciales de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, lorsque le contrat-type qui prévoit la durée des préavis de rupture, institué par la loi 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs régit, faute de dispositions contractuelles, les rapports du sous-traitant et de l'opérateur de transport. L'article 12.2 du contrat type figurant en annexe I du décret 2003-1295 du 26 décembre 2003 prévoit que le contrat de sous-traitance à durée indéterminée peut être résilié par l'une ou l'autre partie par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception moyennant un préavis d'un mois quand le temps déjà écoulé depuis le début d'exécution du contrat n'est pas supérieur à six mois. Le préavis est porté à deux mois quand ce temps est supérieur à six mois et inférieur à un an. Le préavis à respecter est de trois mois quand la durée de la relation est d'un an et plus. L'article 2 du contrat type prévoit que ce contrat s'applique de plein droit, à défaut de convention écrite. En l'espèce, le contrat de sous-traitance en matière de transport conclu le 16 avril 2009 entre les sociétés Schenker et Alliance Pack Express 51 pour une durée indéterminée prévoyait une durée de préavis en cas de résiliation unilatérale par l'une des parties. Il a ainsi été stipulé à l'article 9 que le contrat pouvait être résilié par l'une ou l'autre des parties par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception moyennant un préavis d'un mois quand le temps écoulé depuis le début d'exécution du contrat ne dépassait pas six mois, de deux mois quand cette durée dépassait six mois sans excéder un an et de trois mois quand cette durée était supérieure à un an. Compte tenu de ces stipulations contractuelles, le contrat type figurant en annexe I du décret 2003-1295 du 26 décembre 2003 n'a pas vocation à s'appliquer et les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce sont applicables. La relation commerciale, pour être établie au sens de ces dispositions, doit présenter un caractère suivi, stable et habituel. Le critère de la stabilité s'entend de la stabilité prévisible, de sorte que la victime de la rupture devait pouvoir raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial. En l'espèce, il est démontré que la relation entre les sociétés Schenker et Alliance Pack Express 51 a duré du 1er janvier 2009, date d'effet du contrat du 16 avril 2009, au 10 janvier 2014, et portait sur un chiffre d'affaires de l'ordre de 200.000 euros représentant environ 20% du chiffre d'affaires réalisé par la société Alliance Pack Express 51. Le caractère établi de la relation est donc avéré. Par ailleurs, le délai de préavis doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser en fonction de la durée, de la nature et des spécificités de la relation commerciale établie, du produit ou du service concerné. En l'espèce, compte tenu de l'ancienneté de la relation commerciale (cinq années), de l'absence de dépendance économique et du secteur concerné permettant une réorganisation rapide, le délai de trois mois observé pour mettre fin aux relations apparaît suffisant. Dans ces conditions, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation de ce chef de la société Alliance Pack Express 51. Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Schenker à payer les dépens de première instance. La société Schenker, qui succombe, sera en outre condamnée à supporter les dépens de l'instance d'appel, qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile, et à payer à Me [M] en qualité de liquidateur de la société Alliance Pack Express 51 la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en appel. La demande formulée par la société Schenker au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, Statuant publiquement par arrêt contradictoire en dernier ressort, INFIRME le jugement du tribunal de commerce de Rennes en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action soulevée par la société Schenker, en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation de la société Alliance Pack Express 51 sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce et en ce qu'il a condamné la société Schenker aux dépens de première instance; Statuant à nouveau, REJETTE la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Alliance Pack Express 51 soulevée par la société Schenker ; CONDAMNE la société Schenker à régler à Me [M] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Alliance Pack Express 51 une somme de 47.517,08 euros TTC au titre de la garantie de chiffre d'affaires sur la tournée 01B pour l'année 2012, avec intérêts à un taux égal à trois fois le taux légal à compter du 25 septembre 2013 ; CONDAMNE la société Schenker à régler à Me [M] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Alliance Pack Express 51 une somme de 63.603,28 euros TTC au titre de la garantie de chiffre d'affaires sur la tournée 01C pour l'année 2013, avec intérêts à un taux égal à trois fois le taux légal, à compter du 31 décembre 2013 ; Y ajoutant, CONDAMNE la société Schenker payer à Me [M] en qualité de liquidateur de la société Alliance Pack Express 51 la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en appel ; DÉBOUTE la société Schenker de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNE la société Schenker aux dépens de l'instance d'appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile. La Greffière Le Président Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU