Cour d'appel de Paris, Chambre 4-8, 14 septembre 2022, 20/16882

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    20/16882
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Décision précédente :TJ hors, 15 octobre 2020
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/6322c160e2d0c6fcb0c3cb46
  • Président : Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2022-09-14
TJ hors
2020-10-15

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT

DU 14 SEPTEMBRE 2022 (n° 2022/ 132 , 23 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/16882 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCV7L Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS RG n° 18/06391 APPELANTE S.A.S. M70, Agissant en la personne de tous représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité [Adresse 2] [Localité 3] N° SIRET : 531 .21 7.8 42 Représentée par Me Christophe PACHALIS de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K148, ayant pour avocat plaidant, Me Julie AUZAS, avocat au barreau de PARIS, toque L 262 INTIMÉES S.A. ALLIANZ IARD [Adresse 1] [Localité 5] Représentée par Me Philippe MARINO de la SCP DORVALD MARINO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0143 ayant pour avocat plaidant, Me Hervé KEROURÉDAN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque C 40 S.A. MAAF ASSURANCES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Chaban [Localité 4] Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034 assistée de Me Pierre-Vincent ROUX, avocat plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque : B0393 COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 24 Mai 2022, en audience publique, devant la Cour composée de : Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre M. Julien SENEL, Conseiller Mme [C] FAIVRE, Présidente de chambre qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. [J], dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile. Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET ARRÊT : Contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Laure POUPET, Greffière présente lors de la mise à disposition. **** EXPOSÉ DU LITIGE : M. [K] [V] et Mme [C] [V], parents d'[N] [V] et assurés auprès de la S.A. MAAF ASSURANCES (la MAAF), sont propriétaires d'une maison d'habitation et d'un garage attenant à celle-ci situés au [Adresse 2] à [Localité 3]. Le 3 décembre 2011, un incendie est survenu dans ce garage alors que M. et Mme [V] recevaient leurs cousins M. [X] [Z] et Mme [E] [Z], parents de [S] [Z] assurés auprès de la S.A. ALLIANZ IARD ( ALLIANZ). L'incendie a entraîné la destruction du garage et de son contenu. M. et Mme [V] ont déclaré le sinistre à la MAAF par courrier du 5 décembre 2011. Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 7 décembre 2011, M. et Mme [Z] ont déclaré le sinistre à leur assureur ALLIANZ, précisant que l'incendie avait été causé involontairement par leur fille [S] et par [N] [V]. Le 1er mars et le 28 mars 2012, M. et Mme [V] ont fait constater par Maître [F], huissier de justice, la destruction de leur garage et la présence de stocks de vêtements conditionnés pour être enlevés à la suite du sinistre. Par lettres recommandées en date du 27 avril 2012, la S.A.S M70 (société M70) a mis en demeure ALLIANZ et la MAAF de l'indemniser de la perte des marchandises textiles lui appartenant, entreposées dans le garage de M. et Mme [V] et détruites dans l'incendie. Elle sollicitait auprès de chacun des assureurs la moitié du préjudice provisoire encore en cours d'évaluation, soit la somme de 302.034,27 euros chacune. La société M70 a été constituée le 10 février 2011 par M. [V], M. [Z], et Mme [T], puis immatriculée le 25 mars 2011, avec pour objet le commerce de détail et de gros de vêtements, de chaussures et d'accessoires sportifs, importés d'Inde et du Bangladesh pour être revendus sur le territoire français. Un contrat de domiciliation et de mise à disposition à titre gratuit et temporaire a été conclu le 10 février 2011 entre M. [V] et la société M70 aux fins de permettre à cette dernière d'y entreposer ses marchandises. Par lettre en date du 30 avril 2012, la MAAF a indemnisé M. et Mme [V] à hauteur de 41 856,99 euros, correspondant au coût de reconstruction et de remplacement de leurs biens vétusté déduite, outre une indemnité complémentaire de 21 672 euros, correspondant au 'remboursement des vétustés retenues', mais a refusé d'indemniser M. et Mme [V] de la perte des marchandises stockées dans le garage, indiquant qu'aucune garantie n'était applicable à ce titre. Les parties n'étant pas parvenues à trouver une solution amiable à leur litige, M. et Mme [V] et la société M70 ont cité ALLIANZ et la MAAF par actes d'huissier en date des 5 et 8 octobre 2012 devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, lequel, par ordonnance du 23 janvier 2013, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris, à la suite d'une exception d'incompétence soulevée par ALLIANZ. Par acte d'huissier délivré le 13 mai 2013, M. et Mme [V] ont assigné ALLIANZ et la MAAF devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris en paiement d'une indemnité provisionnelle. Par acte du même jour, la société M70 a assigné ALLIANZ et la MAAF devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins de provision et d'expertise. Par ordonnance en date du 9 juillet 2013, le juge des référés a notamment prononcé la jonction des deux instances, débouté les parties de leurs demandes de provision et ordonné une mesure d'expertise confiée à M. [P] [U] aux fins de fournir tous les éléments en vue de déterminer les préjudices subis par la société M70, tant matériels qu'immatériels, et d'en proposer une évaluation. L'expert a déposé son rapport le 29 février 2016. Par acte d'huissier en date du 26 novembre 2013, M. et Mme [V] ont fait citer ALLIANZ devant le tribunal de grande instance de Paris afin d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice résiduel non indemnisé par leur assureur la MAAF. Par acte d'huissier du 27 novembre 2013, la société M70 a fait citer ALLIANZ et la MAAF devant le même tribunal afin d'obtenir leur condamnation in solidum à lui payer différentes indemnités résultant de la perte de ses marchandises entreposées dans le garage sinistré. Ces deux procédures ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état en date du 7 mai 2015. Par décision contradictoire du 15 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Paris a : - déclaré M. [K] [V] et Mme [C] [V] recevables en leur action, - déclaré la S.A.S M70 recevable en son action, - déclaré responsables in solidum M. [K] [V] et Mme [C] [V] d'une part et M. [X] [Z] et Mme [E] [Z] d'autre part des conséquences dommageables de l'incendie causé par le fait de leurs enfants mineurs, - condamné in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES à payer à la S.A.S. M70 la somme de 159 968,47 euros au titre des dommages matériels, - débouté la S.A.S. M70 de sa demande d'indemnisation au titre de la facture afférente au comptage de marchandises, - débouté la S.A.S. M70 de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice commercial, - débouté la S.A.S. M70 de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive, - condamné in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES à payer à la S.A.S. M70 la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamné in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES aux dépens avec recouvrement direct au profit de Me Julie AUZAS de la SELARL HERTZOG ZIBI RUFF & Associés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile, - ordonné l'exécution provisoire, à hauteur de moitié, - débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires qui ont été reprises dans l'exposé du litige. Par déclaration électronique du 20 novembre 2020 , enregistrée au greffe le 25 novembre 2020, la SAS M70 a interjeté appel du jugement à l'encontre d'ALLIANZ et de la MAAF, 'en ce qu'il a : - Condamné in solidum ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES à payer à la société M70 la seule somme de 159 968,47 euros au titre des dommages matériels, - Débouté la société M70 de sa demande d'indemnisation au titre de la facture afférente au comptage de marchandises, - Débouté la société M70 de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice commercial, - Débouté la société M70 de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive, - Condamné in solidum ALLIANZ IARD et la MAAF ASSURANCES à payer à la société M70 la seule somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et plus généralement toutes dispositions faisant grief aux appelants, selon les moyens qui seront développés dans ses conclusions'. Aux termes de ses dernières écritures (n°2) transmises par voie électronique le 6 juillet 2021, la société M70 demande à la cour, de : - la recevoir en ses conclusions, l'y déclarer bien fondée et y faisant droit ; - confirmer le jugement en ce qu'il a : . déclaré la société M70 recevable en son action , . déclaré responsables in solidum M. [K] [V] et Mme [C] [V] d'une part et M. [X] [Z] et Mme [E] [Z] d'autre part, des conséquences dommageables de l'incendie causé par le fait de leurs enfants mineurs, - dit que les garanties des compagnies ALLIANZ et la MAAF étaient acquises, - infirmer le jugement pour le surplus, et notamment en ce qu'il a limité le quantum octroyé à la société M70 à titre de dommages et intérêts à la somme de 159.968,47 euros mise à la charge des compagnies ALLIANZ et MAAF in solidum ; Statuant à nouveau et y ajoutant, - condamner in solidum la compagnie MAAF et la compagnie ALLIANZ à lui verser : * une indemnité de 620.014,55 euros HT au titre des dommages matériels se décomposant comme suit : . 606.014,55 euros HT au titre des dommages matériels, . 14.000 euros HT au titre de la facture afférente au comptage des marchandises, * une indemnité de 300.000 euros au titre du préjudice commercial, * une indemnité de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance dolosive, - la somme de 15.000 euros s'agissant de la première instance, et celle de 15.000 euros au titre de la présente instance, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel, dont distraction ; - débouter les compagnies ALLIANZ IARD et MAAF ASSURANCES de l'ensemble de leurs demandes. Aux termes de ses conclusions récapitulatives d'appel incident transmises par voie électronique le 15 novembre 2021, la société ALLIANZ demande à la cour de : - déclarer la société M70 mal fondée en son appel, - l'en débouter, ainsi que de toutes ses demandes, - déclarer la compagnie ALLIANZ IARD recevable et fondée en son appel incident, Y faisant droit, - infirmer le jugement en ses dispositions contraires à ses intérêts ; Et statuant à nouveau, au visa de l'article 14 du code de procédure civile : - infirmer le jugement ayant déclaré les époux [Z], qui n'ont jamais été parties à l'instance, responsables de l'incendie in solidum avec les époux [V]. A titre surabondant, au visa des articles L 124-1 et L 124-3 du code des assurances et de l'absence de réclamation amiable ou judiciaire contre M. et Mme [Z], elle demande de : - infirmer le jugement l'ayant condamnée in solidum avec la société MAAF ASSURANCES à payer à la société M70 la somme de 159.968,47 euros au titre des dommages matériels ; - déclarer la société M70 tant irrecevable que mal fondée en son action ; - la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions. A titre subsidiaire, au visa des articles 1382 et 1384 al.4 du code civil en leur rédaction applicable à l'époque des faits, elle demande de : - dire que la responsabilité encourue par M. et Mme [V], assurés auprès de la MAAF, tant à titre personnel qu'en leur qualité de civilement responsable de leur enfant mineur [N] [V], constitue une cause exonératoire de toute responsabilité à l'égard de M. et Mme [Z] ; - débouter de plus fort la société M70 de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à tort contre elle. A titre très subsidiaire, ALLIANZ demande d'ordonner un partage de responsabilité dans la proportion d'un cinquième (1/5ème) pour la compagnie ALLIANZ IARD, assureur de responsabilité des époux [Z] au titre de leur contrat multirisques habitation, et des quatre cinquièmes (4/ 5ème) pour les époux [V] assurés auprès de la SA MAAF ASSURANCES. Sur l'évaluation des dommages, ALLIANZ demande de : - déclarer que le montant des dommages ne peut s'évaluer au-delà de la somme de 100.000 euros sur laquelle il sera fait application du partage de responsabilité dans la limite de 20% à la charge de la compagnie ALLIANZ IARD, assureur des époux [Z], soit une indemnité d'un montant maximal de 20.000 euros ; - à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement ayant fixé à la somme de 159.968,47 euros la demande d'indemnisation de la société M70 et l'ayant déboutée du surplus de ses demandes. En toute hypothèse, ALLIANZ demande de : - débouter la société M70 de sa demande de condamnation formulée à son encontre au paiement de la somme de 80.000 euros sur le fondement de la police d'assurance habitation souscrite par les époux [V] auprès de MAAF ASSURANCES. - condamner M. et Mme [V] au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction. Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 19 juillet 2021, la société MAAF ASSURANCES demande à la cour au visa des anciens articles 1384 alinéa 4 et 1134 du code civil applicables à la cause, de l'ancien article 1315 al.1 du code civil, des pièces au dossier et notamment des pièces contractuelles, de la police d'assurance, et du rapport d'expertise judiciaire et de ses annexes, d'infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a énoncé qu'elle ne démontrait pas que les époux [V] n'avaient pas eu connaissance des clauses d'exclusion qu'elle avait soulevées, et en ce qu'il a jugé qu'elle devait sa garantie ; - pour ces raisons, la mettre hors de cause. A titre subsidiaire, elle demande à la cour de : - entériner les conclusions du rapport d'expertise judiciaire définitif de M. [U] ; - confirmer le jugement en toutes ses dispositions ; - limiter en conséquence le préjudice de la société M70 à la seconde hypothèse posée par M. [U] et donc retenir l'évaluation basse, à savoir la somme de 159.968,47 euros HT ; - rejeter les réclamations revendiquées en indemnisation d'une part d'un préjudice commercial et d'autre part en raison d'une réticence dolosive de la société MAAF ASSURANCES ; - débouter la société M70 du surplus de ses demandes ; - débouter toute partie de ses demandes. Il convient de se reporter aux conclusions pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties conformément à l'article 455 du code de procédure civile. La clôture est intervenue le 13 décembre 2021. En cours de délibéré, le conseil de la société M70 a produit, à la demande de la cour, un extrait k-bis récent concernant cette société (à jour au 30 mai 2022).

MOTIFS

DE LA DÉCISION Il convient au préalable de rappeler que, si, au terme de sa déclaration d'appel, la société M70 a entendu saisir la cour uniquement des chefs du jugement concernant le quantum des dommages intérêts alloués, et ceux refusés, outre les frais irrépétibles, dans le cadre de l'appel incident formulé expressément par ALLIANZ, la cour est par ailleurs saisie du chef du jugement ayant déclaré la société M70 recevable en son action et de celui ayant déclaré les époux [Z] responsables de l'incendie in solidum avec les époux [V]. Par ailleurs, bien qu'elle ne formule pas expressément un appel incident, tel que prévu à l'article 548 du code de procédure civile et ne vise pas les chefs du jugement au sens des articles 562, 901, et 954 qu'elle entend critiquer dans ses dernières conclusions, il convient de prendre acte du fait que la société MAAF demande à la cour à titre principal d'infirmer le jugement dont appel 'en ce qu'il a énoncé que la MAAF ne démontrait pas que les époux [V] n'avaient pas eu connaissance des clauses d'exclusion' qu'elle avait soulevées en première instance, et 'en ce qu'il a jugé que la MAAF doit sa garantie', ce qui apparaît en page 11 du jugement, dans la motivation ayant conduit le tribunal à prononcer une condamnation in solidum de la MAAF avec ALLIANZ, dont il n'est pas contesté qu'elle est dévolue à l'examen de la cour par ALLIANZ, et ainsi, implicitement, par la MAAF. Les autres chefs du jugement (notamment la recevabilité de l'action de M. et Mme [V]) ne sont quant à eux pas soumis à l'examen de la cour. 1) Sur la recevabilité de la société M70 en son action directe à l'égard d'ALLIANZ Le tribunal a déclaré l'action de la société M70 dirigée à l'encontre d'ALLIANZ recevable. En cause d'appel, dans le cadre de son appel incident, ALLIANZ soulève au visa de l'article L. 124-1 du code des assurances, l'irrecevabilité de l'action directe exercée à son encontre par la société M70 du fait de l'absence de réclamation amiable ou judiciaire de la part de la société M70 à l'encontre des époux [Z], assurés auprès d'elle au titre de leur contrat multirisques habitation. La société M70 réplique en substance, au visa de l'article L. 124-3 alinéa 1 du code des assurances, que le jugement doit être confirmé sur ce point dès lors que : - la recevabilité de l'action directe n'est pas subordonnée à l'appel en cause de l'assuré par la victime ; - M. et Mme [Z] avaient nécessairement connaissance de sa réclamation dès lors que M. [Z] était associé de cette société et qu'il a formalisé une déclaration de sinistre auprès de son assureur responsabilité civile ALLIANZ afin de faire jouer les garanties souscrites, notamment au bénéfice de la société. Comme l'a relevé à juste titre le tribunal, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner le moyen surabondant soutenu par la société M70 sur ce point, il résulte des dispositions précitées que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable. L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré. La recevabilité de l'action directe intentée par la victime à l'encontre de l'assureur du responsable n'étant pas subordonnée à l'appel en cause de l'assuré par la victime, le jugement est confirmé en ce qu'il a exactement retenu la recevabilité de l'action de la société M70 dirigée à l'encontre d'ALLIANZ. 2) Sur les circonstances de l'incendie et les responsabilités Le tribunal a déclaré Messieurs et Mesdames [V] et [Z] responsables in solidum des conséquences dommageables de l'incendie causé par le fait de leurs enfants mineurs respectifs, [N] et [S]. Sur ce point, la cour rappelle que dans le cadre d'une action directe, la responsabilité de l'assuré peut être discutée en son absence, de sorte que le moyen soutenu à titre liminaire par ALLIANZ tendant à infirmer le jugement au visa de l'article 14 du code de procédure civile, en ce qu'il a déclaré les époux [Z] responsables in solidum avec les époux [V] des conséquences dommageables de l'incendie causé par leurs enfants mineurs, du seul fait qu'ils n'ont pas été appelés en la cause, est infondé et ne peut qu'être rejeté. Vu les articles 1384 alinéa 4 et 1382 du code civil, dans leur version applicable au présent litige ; Il suffit que le dommage invoqué par la victime ait été causé par le fait même non fautif du mineur. Seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer les père et mère de la responsabilité de plein droit encourue du fait de leur enfant mineur. En l'espèce, le tribunal a jugé que faute de cause d'exonération, Messieurs et Mesdames [V] et [Z] devaient être déclarés responsables in solidum des conséquences dommageables de l'incendie causé par le fait de leurs enfants mineurs. En cause d'appel, la société M70 soutient notamment que le jugement doit être confirmé sur ce point dès lors que : - Messieurs et Mesdames [V] et [Z] sont civilement responsables du fait de leurs enfants mineurs [N] et [S], de sorte que les garanties souscrites à ce titre trouvent à s'appliquer ; - les enfants ont tous deux participé aux faits ayant causé l'incendie et doivent en être déclarés responsables in solidum, sans qu'il soit nécessaire de déterminer le rôle précis de chacun d'eux ni de démontrer que leur fait était fautif ; - les deux enfants ont agi conjointement, [S] ayant eu un rôle actif et causal dans la survenance du dommage, et non un seul rôle d'observatrice, excluant ainsi tout partage de responsabilité ; - M. et Mme [V] n'ont pas commis de faute personnelle qui exonérerait M. et Mme [Z] de leur responsabilité ; - la responsabilité du fait des enfants est une responsabilité de plein droit dont seule la force majeure ou la faute de la victime permet de s'exonérer, ce qui n'est en l'espèce pas caractérisé. ALLIANZ fait valoir en substance que le jugement doit être infirmé en ce que : - l'action directe exercée à son encontre n'est pas fondée, dès lors que la preuve de ce que la responsabilité de M. et Mme [Z] du fait de leur enfant mineure [S] est engagée n'est pas rapportée, parce que seul [N] [V], alors âgé de neuf ans et demi, a pris l'initiative des faits qui ont causé l'incendie au domicile de ses parents, et que [S] [Z], fille de M. et Mme [Z], alors âgée de six ans et ne disposant d'aucun repère au domicile de son cousin, n'a joué qu'un rôle purement passif dans le transport de cendres chaudes de la cheminée du salon au garage du pavillon des époux [V], où se trouvait la poubelle en plastique dans laquelle [N] a jeté les cendres ; - le tribunal a méconnu les circonstances de la cause et de fait en posant en principe que les deux enfants ont participé aux faits, le tribunal a méconnu les circonstances de la cause et de fait dès lors que [S] n'a joué aucun rôle actif dans la survenance de l'incendie et qu'il n'est pas contesté qu'[N] a brûlé une feuille avant de manipuler les cendres incandescentes ; - la preuve d'un lien causal impulsif et déterminant de la part de [S] n'est pas rapportée; - M. et Mme [V] ont fait preuve de négligences fautives pour avoir laissé sans surveillance des cendres chaudes dans la cheminée de leur salon en présence de plusieurs enfants mineurs à leur domicile à proximité du garage dont l'accès n'était pas clos bien qu'abritant des marchandises textiles particulièrement inflammables entreposées ; - aucune part de responsabilité n'est susceptible d'être retenue à l'encontre de M. et Mme [Z] qui ne sont d'ailleurs pas mis en cause par la société M70, dont le gérant est M. [V] ; - seules peuvent être retenues les responsabilités exclusives de M. et Mme [V] à titre personnel au visa de l'article 1382 du code civil, ou en leur qualité de civilement responsable de leur enfant [N] au visa de l'article 1384 alinéa 4 du code civil (revendiquée comme telle dans leurs dernières conclusions devant le tribunal) ; - subsidiairement, ces responsabilités constituent au sens de l'article 1384 alinéa 2 du code civil, des causes exonératoires de responsabilité pour M. et Mme [Z] dès lors que M. et Mme [V], chez lesquels ils étaient hébergés, étaient tenus d'une obligation de sécurité de résultat à leur égard ; - à titre très subsidiaire, les circonstances du sinistre justifient de prononcer un partage de responsabilité dans la proportion d'un cinquième pour ALLIANZ IARD en sa qualité d'assureur des époux [Z], et des quatre cinquièmes pour les époux [V] et de leur assureur habitation la MAAF ASSURANCE. La MAAF maintient quant à elle en cause d'appel que les enfants [S] et [N] sont tous deux responsables de l'incendie et qu'il n'est pas possible de déterminer le rôle précis de chacun d'eux dans la survenance du dommage, s'agissant bien d'une faute commune. Sur ce, C'est par une exacte analyse des pièces versées aux débats, concernant les circonstances de l'incendie, et des règles de droit applicables, que la cour fait sienne, que le tribunal a retenu la responsabilité de plein droit des parents des deux enfants mineurs, à défaut de cause d'exonération. En effet, selon procès-verbal d'audition en date du 6 décembre 2011, [N] [V], âgé alors de 9 ans, fils de M. et Mme [V], a déclaré les faits suivants aux enquêteurs de la gendarmerie : 'Suite à l'incendie, j'ai dit à mon père dimanche 04.12.2011 en début de soirée que l'incendie pouvait être dû en partie au fait des cendres que j'ai déversées avec ma cousine [S] dans la poubelle du garage, qui est un gros bac en plastique qui est noir. Samedi 03.12.2011, vers 08 heures voire 09 heures, mes parents dormaient. Ma cousine [S] était à mon domicile. Pour faire plaisir à mes parents, j'ai décidé avec ma cousine de faire le ménage. Nous avons vidé les cendres de la cheminée. Les cendres étaient encore chaudes, incandescentes, rouges. Nous avons mis les cendres dans un sceau (ainsi orthographié) en plastique dans lequel il y avait déjà des cendres. Nous sommes allés dans le garage avec le sceau pour vider les cendres. Nous avons vidé les cendres incandescentes dans un sceau en plastique. Les cendres étaient encore chaudes. Le samedi vers midi, nous avons vu la fumée qui sortait du garage. Nous sommes tous sortis voir. Le garage s'est écroulé car le garage était en feu. Les pompiers sont arrivés et ont éteint le feu. Ma s'ur était au garage une heure avant et a senti que ça sentait le cramé. (...) J'ai été pris de remords, le dimanche soir, j'ai dit à mon père ce que nous avions fait avec ma cousine'. [S] [Z], âgée alors de 6 ans, fille de M. et Mme [Z] et cousine d'[N] [V], a quant à elle déclaré les faits suivants selon procès-verbal d'audition en date du 6 décembre 2011 : '[N], mon cousin a brûlé une feuille le samedi. Il a brûlé la feuille dans la cheminée chez mon tonton [K]. Nous sommes allés chercher un sceau avec mon cousin dans le garage. On a mis les cendres de la cheminée dans le sceau. ['] Elles fumaient encore. ['] Nous sommes partis vider le sceau de cendres dans le garage dans un sceau noir en plastique. A côté de ce sceau en plastique il y avait des outils. Après on a refermé le garage. J'ai demandé à [N] si les cendres ça ne risquait rien et [N] m'a dit que non. A midi, quand on a mangé, on a vu de la fumée et on est parti chez la voisine. Au début, [N] quand il a vu le feu, il s'est dit que ça venait des cendres et il m'a dit de ne pas en parler aux parents car en vidant les cendres, il voulait leur faire plaisir. Dimanche soir, [N] et moi, nous avons dit à nos parents que nous avions vidé les cendres dans le bac en plastique dans le garage et que le feu du garage pouvait provenir des cendres'. Comme l'a exactement relevé le tribunal, s'il ressort de l'audition de [S] [Z] que seul [N] [V] a mis le feu à une feuille dans la cheminée, il apparaît cependant que les deux enfants ont eu un rôle actif dans la survenance du dommage. En effet, l'usage constant de la première personne du pluriel dans les deux auditions indique que les enfants ont tous deux déversé les cendres incandescentes de la cheminée dans un seau qu'ils ont vidé dans la poubelle du garage. Ils reconnaissent ainsi avoir participé conjointement au nettoyage de l'âtre et au transport des cendres vers le garage. Or, c'est le dépôt des cendres dans le garage qui a directement causé l'incendie qui s'y est déclaré, de sorte que [S] [Z] et [N] [V] ont eu tous deux un rôle actif et causal dans la survenance du dommage sans qu'il soit possible de déterminer le rôle précis de chacun d'eux, comme le soutient la MAAF. En outre, l'argumentation d'ALLIANZ selon laquelle [N] [V] a pu encourager [S] [Z] à participer à ces actes ou lui indiquer qu'il n'y avait pas de danger est inopérante dès lors que le fait même non fautif de l'enfant suffit à engager la responsabilité de ses parents. Enfin, M. [X] [Z], père de [S] [Z], a déclaré aux enquêteurs dans son procès-verbal d'audition en date du 6 décembre 2011 ce qui suit : 'Le dimanche soir, le 04.12.2011, en début de soirée, les enfants sont venus nous voir et nous ont dit qu'ils avaient fait le ménage le 03.12.2011 vers 07 heures 30 ' 08 heures. Ils ont mis les cendres de la cheminée dans le sceau et ont vidé le sceau dans la poubelle en plastique du garage. Je ne sais pas si les cendres étaient éteintes le matin mais elles n'étaient pas consumées entièrement à 02 heures du matin. Les enfants sont venus nous le dire car ils ont été pris de remords. D'après eux, les enfants expliquent l'incendie du garage par le fait que les cendres aient été jetés dans la poubelle en plastique du garage. Question : Quel enfant aurait mis les cendres dans la poubelle ' Réponse : Je ne sais pas. Il y avait ma fille et les enfants de mon cousin. Je ne sais (pas) qui a fait quoi'. M. [X] [Z] confirme ainsi la présence de sa fille [S] aux côtés de son cousin [N] au moment du dépôt des cendres dans le bac du garage. Selon procès-verbal en date du 6 décembre 2011, M. [K] [V], père d'[N] [V], a pour sa part déclaré les faits suivants aux gendarmes : 'Dimanche soir, mes enfants sont venus, mon fils [N] m'a dit qu'il avait vidé les cendres avec ses cousins et cousines dans les poubelles du garage. Il n'a pas dormi de la nuit et s'en est voulu et m'a dit cela dimanche soir. Samedi matin avec ses cousines, [N] a voulu faire le ménage pour nous faire plaisir. Vers 07 heures et demi ' 8 heures, les enfants auraient vidé les cendres de la cheminée dans les poubelles du garage'. Ainsi, nonobstant les contradictions relevées par ALLIANZ dans les diverses dépositions recueillies par les gendarmes, qui ne sont pas de nature à remettre en cause l'analyse pertinente faite par le tribunal sur ce point, il est établi que les parents d'[N] [V] et de [S] [Z], qui n'ont pas eux-mêmes assisté à la scène, ont recueilli les confidences de leurs enfants, dont il ressort que ceux-ci ont participé tous les deux au nettoyage de l'âtre et au dépôt des cendres dans le bac du garage. Il en résulte que [S] [Z] et [N] [V] ont tous deux participé aux faits qui ont directement causé l'incendie, sans qu'il soit possible de déterminer le rôle précis de chacun d'eux dans l'enchaînement des événements et dans la réalisation du dommage en son ensemble de sorte qu'ils doivent être déclarés responsables in solidum de l'incendie. Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu que la responsabilité des parents de [S] [Z] et d'[N] [V] est engagée de plein droit sauf à démontrer une faute de la victime ou un cas de force majeure les exonérant de leur responsabilité. Or, il ressort des procès-verbaux d'audition que les cendres étaient dans la cheminée de la maison d'habitation de M. et Mme [V], et que les marchandises textiles détruites étaient situées dans le garage, qui est séparé du reste de la maison. Le tribunal en a exactement déduit que le fait de laisser des cendres incandescentes dans l'âtre de la cheminée ne revêt pas de caractère fautif exonératoire de responsabilité, dès lors que ces cendres ne présentaient aucun danger pour la sécurité des personnes et des biens tant qu'elles n'étaient pas déplacées par les enfants, étant rappelé que l'incendie a été causé par le déplacement des cendres vers le garage et qu'il ne s'est pas déclenché dans la cheminée. Le jugement est ainsi confirmé en ce qu'il a exactement retenu que la faute personnelle de M. et Mme [V], victimes de l'incendie, n'est pas établie. Enfin, suivant en cela le premier juge, la cour estime que les faits à l'origine de l'incendie ne constituent pas pour M. et Mme [Z] un événement imprévisible et irrésistible, présentant les caractères de la force majeure, faute d'imprévisibilité s'agissant d'actes commis par des enfants de 6 et 9 ans susceptibles de se livrer à des actes d'imprudence et qui pouvaient circuler librement dans la maison. Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu que, faute de cause d'exonération, Messieurs et Mesdames [V] et [Z] devaient être déclarés responsables in solidum des conséquences dommageables de l'incendie causé par le fait de leurs enfants mineurs, et rejeté de ce fait les demandes subsidiaires concernant la responsabilité exclusive des époux [V] à titre personnel et en leur qualité de civilement responsables de leur enfant mineur [N], ainsi que la demande très subsidiaire tendant à effectuer un partage de responsabilité. 3) Sur la garantie d'ALLIANZ Vu l'article L. 124-3 du code des assurances ; Vu l'article 5.4 des conditions générales du contrat multirisques habitation souscrit par les époux [Z] auprès de la société ALLIANZ ; En l'espèce, le tribunal a jugé que la garantie d'ALLIANZ était acquise, dans le cadre de l'action directe diligentée contre elle notamment par la société M70. En cause d'appel, la société M70 maintient qu'ALLIANZ est tenue à garantie en sa qualité d'assureur de responsabilité civile de M. et Mme [Z] au titre du contrat multirisques habitation souscrit par ces derniers, et demande la confirmation du jugement sur ce point. Elle verse aux débats les dispositions particulières du contrat multirisques habitation souscrit par M. et Mme [Z] auprès d'ALLIANZ, laquelle ne conteste pas le principe de sa garantie au titre de la responsabilité civile. Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu que la garantie de cette dernière était acquise. 4) Sur la garantie de la MAAF Vu les articles R. 112-3, L.112-2 alinéa 2 et L. 124-3 du code des assurances ; Vu l'article 1134 du code civil, dans sa version applicable au litige ; En l'espèce, le tribunal a jugé que la MAAF ne démontrait pas que ses assurés avaient eu connaissance des clauses d'exclusion dont elle se prévaut de sorte que ces dernières leur sont inopposables, et qu'il en résultait qu'elle devait sa garantie, dans le cadre de l'action directe diligentée contre elle notamment par la société M70. En cause d'appel, la société M70 expose que le jugement doit être confirmé sur ce point dès lors que : - la garantie 'responsabilité civile' souscrite par M. et Mme [V] s'applique mais en revanche les clauses d'exclusion qui figurent dans les conditions générales du contrat dont excipe la MAAF lui sont inopposables faute de preuve qu'elles ont été portées à la connaissance des assurés préalablement à la signature du contrat ; - les conditions générales communiquées par la MAAF et celles obtenues, après l'incendie, par les époux [V] sont différentes notamment pour ce qui concerne les montants de garantie et les clauses d'exclusion visées par la MAAF ; subsidiairement, la société M70 sollicite l'application de la garantie 'habitation' souscrite par M. et Mme [V] dans la limite du capital de 80.000 euros ; - la clause d'exclusion à laquelle se réfère la MAAF est inapplicable parce que dénuée de clarté et les biens en cause ne correspondent pas à des biens à usage professionnel tels que définis par cette clause. La MAAF réplique que le jugement doit être infirmé en faisant valoir principalement que: - si elle ne conteste pas l'absence de signature des conditions générales par les époux [V], les demandeurs avaient, dans le cadre de la procédure de référé -initiée par la seule société M70-, produit eux-mêmes les conditions particulières et les conditions générales pour solliciter la mobilisation des garanties de la MAAF ainsi qu'une provision; - la production par l'appelante elle-même des conditions générales même non signées, suffit à démontrer que les consorts [V] avaient non seulement connaissance de ces éléments mais encore que ces conditions générales définissaient leurs garanties, et donc leurs éventuelles limites ; - la fiche personnalisée d'assurance, c'est à dire les conditions particulières (pièce 1 ' intimée), rappelle qu'il s'agit d'un document 'à joindre à votre contrat' ; or, le contrat (pièce 2 ' intimée) est expressément mentionné en en-tête et sur les deux pages, et les références figurent dès la première page des conditions générales produites de sorte qu'il n'y a aucune ambiguïté sur les conditions générales applicables au litige dont est saisie la cour ; - le contenu des garanties choisies telles que figurant dans la fiche d'assurance mentionne bien la formule INTEGRALE qui ne peut se comprendre qu'en prenant connaissance des conditions générales, ce qui démontre que les époux [V] avaient conscience et connaissance dès la signature du contrat à la fois des garanties souscrites et des éventuelles exclusions de garantie ; - ses assurés ont eu connaissance des conditions générales du contrat qui leur sont donc opposables ; - si elle ne conteste pas la responsabilité de ses assurés du fait de leur enfant, elle fait valoir que : * les garanties 'responsabilité civile' (vie privée et habitation) excluent en page 31 les dommages causés par un incendie ; or, le dommage subi par les biens de la société M70 n'a pas été causé ici par un bâtiment (du type chute de pierre ou de cheminée) mais par le feu allumé accidentellement par les enfants de M. et Mme [V] et de M. et Mme [Z] ; de plus, le dommage ayant été causé à des biens mobiliers qui ont été confiés aux assurés par la société M70, il est exclu au titre des garanties responsabilité vie privée et responsabilité habitation du contrat ; * la garantie 'habitation' exclut en page 14 les biens à usage professionnel ; or, non seulement il ne s'agit pas de biens de l'assuré, mais de ceux de la société M70, mais encore aucun capital biens professionnels n'était souscrit, ces biens ne se trouvaient pas dans l'habitation mais dans une dépendance, et les marchandises ne sont jamais garanties, de sorte qu'aucune garantie n'est mobilisable. Sur ce, Comme l'a parfaitement rappelé le tribunal, il appartient à l'assureur qui invoque à l'encontre de la victime d'un dommage et de son assuré des clauses de limitation de garantie figurant aux conditions générales du contrat de rapporter la preuve que ces dernières ont été portées à la connaissance du souscripteur lors de l'adhésion ou tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre. En l'espèce, la société M70 verse aux débats les conditions générales du contrat d'assurance 'multirisque habitation' dénommé Tempo Habitation qui stipulent en page 29, au titre de la garantie 'responsabilité civile vie privée', ce qui suit, en gras dans le texte:'Nous garantissons les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir dans le cadre de sa vie privée, du fait de : dommages corporels, dommages matériels, résultant d'un accident, causé à un tiers'. Il est précisé : 'Nous garantissons notamment les dommages causés aux tiers : par vos enfants qui poursuivent leurs études en France, qu'ils résident avec vous habituellement ou épisodiquement y compris lors d'activités scolaires ou extrascolaires, y compris les stages'. Deux clauses d'exclusion figurent notamment en page 31 des conditions générales, au titre de la garantie responsabilité civile : - 'Les dommages causés par un incendie, une explosion ou une fuite d'eau ayant pris naissance dans un bâtiment occupé par l'assuré (...). - Les dommages subis par un bien mobilier loué, prêté ou confié à l'assuré'. La MAAF verse quant à elle un exemplaire des conditions générales de ce même contrat d'assurance 'multirisque habitation', dont la rédaction diffère certes pour ce qui concerne les montants de garantie (en page 6) mais pas pour les clauses d'exclusion visées par la MAAF, stipulées en page 31. En dépit de ces deux versions, la cour relève que chacune des premières pages des exemplaires des conditions générales produites comporte une seule et unique référence, à savoir 'réf. HA2 003/11/09', et qu'il n'est pas contesté que les conditions générales du contrat comportant les deux clauses d'exclusion en question ne sont pas signées par M. et Mme [V]. En outre, comme l'a à juste titre retenu le tribunal, les conditions particulières (contenues dans le document intitulé 'fiche personnalisée d'assurance', signé le 22 décembre 2009) ne mentionnent pas que les conditions générales ont été portées à leur connaissance lors de la souscription du contrat et qu'elles leur ont été remises. Certes, comme le fait observer la MAAF, les conditions particulières (composées de trois pages) comportent la référence correspondant aux conditions générales applicables ('HA 2003-11/2009') afférentes au contrat souscrit ('résidence principale TEMPO HABITATION'), en en-tête et sur les deux autres pages. Cependant, comme l'a à bon droit relevé le tribunal, cela ne permet pas de pallier à cette carence. Le fait que les conditions particulières rappellent qu'il s'agit d'un document 'à joindre à votre contrat' et que le contenu des garanties choisies y figurant mentionne bien la formule INTEGRALE sont également inopérants pour attester de la prise de connaissance par les époux [V] des conditions générales et donc des exclusions de garanties, telle qu'exigée par les textes précités. Il en est de même de la production par la société M70 elle-même des conditions générales dans le cadre de la procédure de référé puis en première instance et enfin en cause d'appel, qui ne permet pas de démontrer que les assurés avaient pris connaissance de ces éléments lors de l'adhésion au contrat ou tout au moins avant la réalisation du sinistre. La MAAF ne démontrant pas davantage en cause d'appel qu'elle ne l'a fait devant le premier juge que ses assurés ont eu connaissance des clauses d'exclusion dont elle se prévaut, le jugement est confirmé en ce qu'il a exactement retenu que ces dernières leur sont inopposables et que la MAAF doit sa garantie, sans qu'il y ait lieu d'examiner la validité de ces clauses d'exclusion, et en conséquence le moyen soutenu par ALLIANZ concernant la demande de condamnation à la somme de 80.000 euros en application des dispositions contractuelles de la police d'assurance habitation souscrite par les époux [V] auprès de MAAF, étant précisé qu'il n'est pas contesté que les conditions générales de la police d'assurance en cause mentionnent au chapitre 'responsabilité civile' expressément en page 29 ce qui suit: 'Lorsque votre responsabilité se trouve être engagée solidairement ou in solidum, nous garantissons les conséquences pécuniaires dans la limite de votre part de responsabilité dans vos rapports avec les co-auteurs du dommage'. 5) Sur les préjudices invoquées par la société M70 Le tribunal a condamné ALLIANZ et la MAAF in solidum à payer à la société M70 la somme de 159.968,47 euros au titre des dommages matériels résultant de la perte des marchandises stockées. Il a débouté la société M70 du surplus de ses demandes d'indemnisation au titre de la facture afférente au comptage de marchandises et au titre du préjudice commercial (outre celle au titre de la résistance abusive). La société M70 soutient principalement que le jugement doit être infirmé sur les quanta alloués ou les demandes d'indemnisation rejetées, dès lors que : - doit être prise en compte l'évaluation de l'expert judiciaire résultant de son document de synthèse d'avril 2015 qui correspond à un calcul basé sur une méthodologie motivée et détaillée, tout en réintégrant le bon de commande n°11 qu'elle verse désormais aux débats de manière lisible (signé par la société FTB, comportant son cachet, d'un montant de 14.390 euros HT), bon que l'expert avait écarté faute de lisibilité, ainsi que la facture, enregistrée dans sa comptabilité, de 14.000 euros HT correspondant au comptage des marchandises de la société ITS (comptage qui avait été sollicité par la MAAF et ALLIANZ pour vérifier sous le contrôle d'un huissier de justice les stocks de marchandises annoncés et qui est selon l'expert 'un des éléments constitutifs du sinistre'), sauf, en cas contraire, à les inclure expressément dans les dépens de l'instance s'agissant d'une dépense nécessaire pour établir son préjudice indemnisable ; - les calculs réalisés par l'expert dans son rapport définitif sont en revanche contestables parce qu'ils contredisent ses conclusions précédentes malgré l'absence de tout élément nouveau et parce qu'il s'est livré à des calculs incohérents et artificiels ; - dans les deux hypothèses proposées par l'expert, il n'y a de toute façon pas lieu de prendre en compte : * l'abattement de 30% pour obsolescence, applicable aux marchandises n'ayant pas fait l'objet d'un bon de commande, alors même que l'expert avait écarté le risque d'obsolescence de ces marchandises tout récemment livrées dans son premier document de synthèse, d'autant plus qu'il s'agissait de la collection printemps-été 2012, ce qui laissait encore du temps pour écouler la marchandise, lorsque le sinistre a eu lieu, en décembre 2011, et que l'abattement a été fixé à 30% sans explication, * l'abattement de 50% pour incertitude concernant le préjudice sur certaines factures, retenu pour la première fois dans son rapport définitif, alors même qu'elle justifie avoir réceptionné les marchandises et fait procéder aux formalités douanières ; * l'abattement de 70% pour incertitude concernant les marchandises ayant fait l'objet d'un bon de commande concernant des sociétés de travaux et écrits 'semble-t-il' de la même main ; - le caractère probant des documents produits ne peut être mis en doute ; - le tribunal a omis dans son jugement de répondre au moyen soulevé par la société M70 concernant l'erreur de calcul de l'expert qui a déduit un abattement supplémentaire de 50% qualifié inexactement de 'marge pour rotation lente' correspondant à l'abattement de 50% pour incertitude qu'il n'entendait pourtant pas déduire, tendant à ce que le tribunal, s'il entendait exclure la facture HIMKER et retenir un abattement de rotation lente, n'y ajoute pas un abattement pour incertitude et condamne les compagnies d'assurance à tout le moins à la somme de 224.180 euros ; - elle justifie par ailleurs d'un préjudice commercial découlant notamment de l'arrêt de son activité, du licenciement de deux salariés, de la fermeture de la boutique d'[Localité 6] en mars 2013 et du non paiement d'une facture de dédouanement de 65.386,05 euros auprès de la société CLI Transit ; - elle n'a reçu des deux compagnies d'assurance aucune indemnité en dépit des termes de la note de synthèse d'avril 2015 puis du rapport d'expertise judiciaire définitif déposé le 29 février 2016, ce qui lui a causé des difficultés de trésorerie justifiant sa demande d'indemnité forfaitaire au titre de la résistance dolosive. La société ALLIANZ fait valoir notamment qu'il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée in solidum avec la société MAAF ASSURANCES à payer à la société M70 la somme de 159.968,47 euros au titre des dommages matériels, et de juger que le montant des dommages ne peut s'évaluer au-delà de la somme de 100.000 euros sur laquelle il sera fait application du partage de responsabilité dans la limite de 20% à la charge d'ALLIANZ IARD, assureur des époux [Z], soit une indemnité d'un montant maximal de 20.000 euros. Subsidiairement, elle demande de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé à la somme de 159.968,47 euros la demande d'indemnisation de la société M70 et l'a déboutée du surplus de ses demandes. Elle fait valoir notamment que : - la société M70 ne justifie pas d'un préjudice certain au titre des dommages matériels, en l'absence d'éléments probants quant à la réalité de l'achat des marchandises dont il est demandé l'indemnisation, le rapport d'expertise, qui n'évoque que des hypothèses, n'étant pas suffisant pour caractériser le préjudice invoqué ; - la société M70, alors en cours de formation et ne bénéficiant d'aucune notoriété, n'établit pas l'existence de son préjudice commercial et la résistance abusive alléguée à l'encontre d'ALLIANZ n'est pas caractérisée dès lors que celle-ci présente des moyens de défense pertinents. La MAAF soutient qu'il convient d'entériner le rapport d'expertise judiciaire définitif, et en conséquence de confirmer le jugement sur les préjudices, en exposant notamment que: - la société M70, à qui incombe la charge de la preuve des préjudices qu'elle invoque, tente en réalité de remettre en cause les conclusions d'une expertise qui s'est déroulée dans le respect de la mission confiée par le juge des référés, contradictoirement, avec minutie, et durant laquelle elle s'est révélée taisante sur les nombreuses interrogations soulevées par l'expert et les conseils des assureurs, et récalcitrante lorsqu'il s'agissait de communiquer certaines pièces afin de justifier ses demandes indemnitaires ; - il existe toujours des incertitudes quant à la présence physique de la totalité des achats effectués sur le site sinistré, quant au mode de financement des achats qui constituent le stock sinistré et quant à leur volume ; - la rétention d'informations par la société M70 justifie les abattements pratiqués par l'expert judiciaire dans son rapport définitif, nourri par le débat contradictoire entre les parties ; - ni la preuve de l'existence d'un préjudice commercial, ni la preuve d'une résistance abusive ne sont rapportées. A) Sur les dommages matériels Vu les articles L. 121-1 du code des assurances et 246 du code de procédure civile ; En l'espèce, il ressort de l'extrait Kbis et des statuts de la société M70 que celle-ci a été constituée le 10 février 2011 par M. [K] [V], M. [X] [Z] et Mme [W] [T], avec un capital social de 2 500 euros, puis immatriculée le 25 mars 2011, avec pour objet, en France et à l'étranger, le commerce de détail et de gros de vêtements, de chaussures et d'accessoires sportifs (importés d'Inde et du Bangladesh) pour être revendus sur le territoire français. M. [V], qui était demandeur en première instance, est le président de la société M70 et détient la majorité des parts. Comme l'a exactement relevé le tribunal, dans le ' document de synthèse' établi le 30 avril 2015, l'expert judiciaire conclut en page 26/28 en précisant qu'il le fait 'en l'état', ce qui suit : 'A la suite de mes travaux et compte tenu des éléments communiqués, j'estime que le stock des marchandises présent dans le garage de M. [V] lors de la survenance du sinistre s'élevait à un prix d'achat total de 423.905,85 euros hors taxe. Par ailleurs, compte tenu de l'existence de bons de commande qui n'ont pu être honorés par la société M70 à la suite du sinistre, j'estime la marge qui devait être réalisée par la société M70, sur ces stocks correspondant à des articles ayant fait l'objet d'un bon de commande, à 167.718,70 euros hors taxe. Par conséquent, je considère en l'état des éléments transmis que le stock détenu par la société M70 lors de la survenance du sinistre peut être estimé à 591.624,55 euros hors taxe ['] Je n'ai pas pris en compte une éventuelle provision pour rotation lente des stocks (obsolescence...) car les premiers achats de la société M70 (société créée en février 2011) ayant été effectués en avril 2011 (soit à peine huit mois avant le sinistre du 3 décembre 2011) rendent peu vraisemblable un risque d'obsolescence'. L'expert judiciaire a ainsi, dans cette première note, évalué le préjudice subi par la société M70 au montant de 591 624,55 euros HT décomposé comme suit : - Stock de marchandises évalué à son prix d'achat : 396 054,55 euros HT (423 905,85 euros - prix d'achat des marchandises objets d'un bon de commande : 27 841,30 euros = 396 064,55 euros) - Stock de marchandises évalué à son prix de vente (marge comprise) : 195 560 euros HT. Puis, dans son rapport déposé le 29 février 2016, à partir de l'inventaire au 3 décembre 2011 présenté par la société M70, l'expert a posé deux hypothèses d'appréciation du préjudice de la société M70 avec une fourchette haute de 209.773,29 euros hors taxes (première hypothèse) et une fourchette basse de 159.968,47 euros hors taxes (seconde hypothèse). La première hypothèse consiste à prendre en compte dans le calcul du préjudice la facture du fournisseur HIMKER KNITS du 4 novembre 2011 d'un montant de 213 508 euros, tandis que la seconde hypothèse consiste à déduire le montant total de cette facture au motif qu'il n'est pas certain que la marchandise ait été débloquée (pages 48 et 49 du rapport). La facture du fournisseur HIMKER KNITS porte la mention 'DELIVERY AGAINST PAYMENT' (livraison contre paiement) et l'expert estime en page 44 de son rapport que les éléments produits en demande ne démontrent pas le règlement de ladite facture ni la livraison des marchandises s'y rapportant, les marchandises pouvant être bloquées en zone portuaire ou aéroportuaire en attente de leur dédouanement. Dans chacune des hypothèses, l'expert propose de pratiquer certains abattements. Dans les deux hypothèses, avec ou sans prise en compte de la facture HIMKER KNITS, l'expert applique un abattement pour obsolescence de 30% aux marchandises n'ayant pas fait l'objet d'un bon de commande en expliquant que 'eu égard aux effets de mode impactant le domaine du textile, il parait usuel de pratiquer une décote pour prendre en compte cette obsolescence plus d'un an après chaque année' (page 48). Dans la première hypothèse, avec prise en compte de la facture HIMKER KNITS, l'expert pratique un abattement pour incertitude de 50% sur le préjudice portant sur les stocks non vendus au 3 décembre 2011, soit une déduction de 150.101,28 euros hors taxes. Il justifie cette décote par l'incertitude liée à la facture HIMKER KNITS de 213.508 euros et par l'absence de réponse de la société M70 concernant certaines de ses questions. Le rapport mentionne que certains éléments demandés à la société M70 n'ont pas été communiqués à l'expert, à savoir, notamment, la justification des règlements intervenus pour les factures comptabilisées au cours de l'exercice 2011 dues aux fournisseurs indiens, les documents de dédouanement portant sur les marchandises achetées aux fournisseurs indiens en 2011 ainsi qu'une analyse permettant de faire le lien entre les factures d'achat des marchandises, les documents de dédouanement et les factures des commissionnaires ayant livré les marchandises (pages 28 et 29). Dans la deuxième hypothèse, l'expert précise ce qui suit : 'je ne retiens pas d'abattement pour incertitude car j'ai retranché de l'assiette du préjudice la totalité de la facture HIMKER KNITS' (page 48). Dans les deux hypothèses, avec ou sans prise en compte de la facture HIMKER KNITS, l'expert propose une décote de 70% pour incertitude concernant les marchandises ayant fait l'objet d'un bon de commande. Pour justifier cette décote, l'expert indique que les bons de commande concernent essentiellement des sociétés de travaux et qu'ils ont tous été rédigés sur une période très concentrée entre le 3 novembre 2011 et le 2 décembre 2011 et 'semble-t-il de la même main' (page 40). S'agissant des marchandises ayant fait l'objet de factures, l'expert précise 'ne pas être certain que les marchandises étaient toutes présentes sur le lieu de l'incendie du 3 décembre 2011, une partie pouvant être bloquée dans les ports ou aéroports de livraison, faute de paiement' (page 38) et 'je ne peux avoir la certitude que ces marchandises étaient présentes en stock au moment de l'incendie' (page 43). S'agissant du mode de financement des marchandises, l'expert judiciaire a fait part en page 21 de son rapport des observations des conseils des assureurs recueillies dans leurs dires respectifs, concernant le financement de l'activité de la société et des garanties accordées aux fournisseurs indiens. Ceux-ci ont en effet relevé que le capital social de la société M70 (libéré par apports en numéraire) s'élevait alors à 2.700 euros et que seules des dettes financières relatives aux comptes courants des associés figuraient au passif de la société, dont 62.609,52 euros pour M. [V] et 60.158,80 euros pour la société ANNET POIDS LOURDS soit un total de 122.768,32 euros, suscitant ainsi des interrogations sur: - les modalités de financement de l'activité de la société M70 au regard du volume d'achats réalisé au cours de l'exercice 2011 (642.513,60 euros hors taxe) et du solde des dettes fournisseurs à la clôture de ce même exercice (699.086,54 euros) ; - les garanties accordées aux fournisseurs indiens dans le cadre des achats effectués pour un montant de 613.321,12 euros, au cours de l'exercice 2011. L'expert relève également en page 22 qu'un des conseils des assureurs s'interroge sur les règlements partiels, intervenus au cours de l'exercice 2012, des factures dues aux fournisseurs indiens, règlements qui ont été effectués essentiellement par le mouvement du compte courant de M. [V] sans mouvement de trésorerie au sein de la société M70. Il mentionne en page 23 que dans leurs dires respectifs, les avocats des assureurs soulignent les insuffisances de la documentation comptable produite par la société M 70. Sur ces divers points, l'expert a certes obtenu de la société M70 des précisions qu'il développe en pages 24 à 30 de son rapport du 29 février 2016. Mais il relève, en pages 30 à 33 de ce même rapport, une pratique qu'il qualifie de non 'usuelle' (caractère anonyme du 'garant' de la société M70 auprès des fournisseurs indiens) pour ce qui concerne le financement de l'activité et les garanties accordées aux fournisseurs indiens et il souligne plusieurs violations des règles comptables. Aucun des documents comptables communiqués retraçant le flux des marchandises n'a ainsi été certifié par un commissaire aux comptes ni un expert-comptable. Enfin, dans le cadre de la méthodologie retenue pour évaluer les dommages matériels subis lors du sinistre, l'expert indique ne pas avoir pris en compte le bon de commande n°11 pour le préjudice subi au titre des marchandises en stock pour lesquelles un bon de commande avait été établi, en raison de la mauvaise qualité du document communiqué (page 39). En réplique, la société M70 a versé aux débats devant les premiers juges et la cour, notamment : - la copie dudit bon de commande n°11, en date du 28 novembre 2011, d'un montant de 14.390 euros HT, au profit de la société FTB (figurant parmi d'autres copies de bons de commandes, en pièce n°20) ; - une attestation, non datée, de Mme [B] [M], se présentant comme ancienne commerciale de la société M70, déclarant ceci : 'une liste de clients m'avait également été transmise par M. [V]. A sa demande, j'ai été les voir à plusieurs reprises afin de présenter chaque vêtement (en déposant les échantillons) jusqu'à l'élaboration de bons de commande. Ces commandes devaient être livrées courant décembre 2011 afin que les clients puissent les utiliser comme cadeaux de fin d'années pour leurs propres clients' ; - un tableau récapitulatif de la valorisation des marchandises détruites dans lequel le prix total des marchandises est évalué à 467.455,79 euros HT et la perte de marge brute à 2.705.308,21 euros si tous les articles avaient été vendus (pièce n°18). Dans son 'état préparatoire au règlement du dossier' établi le 21 mars 2012, le cabinet CEF, expert mandaté par M. [V], avait évalué le stock théorique sinistré à 55 344 pièces(1573+1941+1968+1710+1968+3695+3696+5696+176+1806+176+176+1976+176+3898+3003+5935+5876+1971+2928+3000+300+200+300+600+300+300) d'une valeur totale de 424.023,85 euros HT. Par courrier en date du 23 mars 2012, la société ITS ayant procédé au comptage des marchandises sinistrées conclut : 'après comptage de l'ensemble des lots, nous arrivons à un total de 48 587 pièces. Sachant que M. et Mme [V] nous ont fourni un tableau avec un total de 55 344 pièces. Le pourcentage de perte par rapport au stock avant sinistre s'élève à 12,20%'. Contrairement à ce que soutient de nouveau la société M70, et comme l'a exactement relevé le tribunal au terme d'un examen attentif des pièces versées aux débats, l'évolution des conclusions de l'expert entre le rapport de synthèse d'avril 2015 et le rapport définitif de février 2016 est cohérente pour résulter d'une analyse actualisée en fonction des échanges contradictoires, des dires et des pièces produites qui ont enrichi le débat, l'expert ayant notamment demandé, à plusieurs reprises, et souvent vainement, à la société M70 de communiquer certaines pièces pour pouvoir procéder à des vérifications. Il convient ainsi de retenir la seconde hypothèse du rapport définitif de l'expert judiciaire, qui déduit du préjudice la totalité du montant de la facture HIMKER KNITS n°53 du 4 novembre 2011, dès lors que la société M70 n'a pas apporté les justificatifs probants de paiement de cette facture tant devant l'expert, qu'in fine, devant la cour. En effet, le tableau récapitulatif de règlement aux fournisseurs indiens produit par la société M70 à titre de justificatif est un document établi par la société M70 elle-même, qui n'indique pas la date de règlement de cette facture. Or, sa force probante est contestée par les assureurs. Les copies de documents intitulées 'balances de paiement établies par les fournisseurs indiens en date des 9 et 10 mai 2012' produites en cause d'appel ne sont pas probantes, en ce qu'elles ne sont pas certifiées par un expert comptable, alors même que ce point est contesté depuis l'expertise. De plus, comme l'a retenu le tribunal, suivant en cela l'expert, l'abattement de 30% pour obsolescence appliqué aux marchandises n'ayant pas fait l'objet d'un bon de commande est justifié compte tenu de la nature des produits stockés subissant des effets de mode et des volumes d'achat conséquents à écouler, étant précisé que cet abattement ne contrevient nullement au principe de la réparation intégrale du préjudice, et que la société M70 ne possède qu'une seule boutique à Arcachon dont le chiffre d'affaires s'est élevé à 13.581 euros en 2011. S'agissant des abattements pour incertitude, de 50% et 70 %, comme il l'a été rappelé ci-dessus, la société M70 n'a pas fourni à l'expert judiciaire l'ensemble des éléments lui permettant de vérifier la réalité de la totalité des achats de marchandises réalisés. En outre, les constats de l'expert l'ont conduit, à juste titre et comme le font valoir les assureurs, à s'interroger sur la présence physique effective de certaines marchandises dans le garage sinistré ainsi que sur les modalités de financement des marchandises au regard de la disproportion entre le volume des achats réalisés et la trésorerie dont la société M70, nouvellement créée, disposait. Enfin, les éléments communiqués par la société M70 tant devant le tribunal que par la suite devant la cour, ne permettent pas d'établir avec la certitude qui s'impose en la matière, la réalité de son préjudice, en l'absence notamment de certification par un commissaire aux comptes et de communication par la société M70 de documents bancaires attestant avec précision de l'ensemble du règlement des marchandises sinistrées, qui mentionnent les émetteurs des factures d'achat produites. Comme l'a relevé le tribunal, l'attestation de Mme [M] peut certes expliquer que les bons de commandes aient tous été signés de sa main ; il demeure cependant, nonobstant les explications développées sur ce point par la société M70 en cause d'appel, indéniablement de nombreuses incertitudes quant à la réalité de ces bons de commande, s'agissant de sociétés de transports, de bâtiment et de services funéraires ayant commandé des vêtements sportifs ne jouissant au surplus d'aucune notoriété particulière, pour un prix moyen de 17 000 euros par facture pour des cadeaux de fin d'année à leurs propres clients sans aucun versement d'acompte et sans autre justificatif. Les pièces nouvelles communiquées en cause d'appel, à savoir l'attestation de M. et Mme [O], la copie de la balance comptable globale définitive de la société M70 (société ITS) (période du 01/01/2013 au 31/12/2013), la copie de l'extrait du grand-livre comptable de la société M70 pour la période du 25/03/2011 au 31/12/2011 et les pièces présentées comme étant des justificatifs du règlement des factures de dédouanement par la société M70 ainsi que les échanges de courriels entre la société M70 et son agent en date des 21, 22 et 24 octobre 2011 ne permettent pas de pallier ces multiples carences, déplorées tant par l'expert que par les intimées, à juste titre. Le jugement est ainsi confirmé en ce qu'il a exactement déduit de ces éléments que la société M70 se révèle défaillante dans l'administration de la preuve qui lui incombe quant à la production d'éléments permettant d'objectiver l'étendue de son préjudice au-delà de ce qui a pu être retenu par l'expert judiciaire, aucune des pièces présentées comme nouvelles en cause d'appel n'étant de nature à remettre en cause cette exacte analyse, au regard des contestations soulevées en défense. Les abattements pour incertitudes pratiqués par l'expert dans son rapport définitif sont en conséquence toujours justifiés, étant relevé que ce dernier s'est livré avec minutie à une vérification de chacun des éléments fournis, au regard de la cohérence entre les factures d'achat, les bons de commande, le grand livre comptable et le comptage des marchandises détériorées réalisé par la société ITS le 23 mars 2012. Néanmoins, la société M70 n'est pas contredite lorsqu'elle soutient que l'expert a commis une erreur de calcul dans son rapport d'expertise définitif, dans le cadre de la seconde hypothèse. En effet, concernant l'abattement pour incertitude de 50%, comme il l'a été rappelé ci-dessus, l'expert indique lui-même expressément que 'dans la deuxième hypothèse, je ne retiens pas d'abattement pour incertitude car j'ai retranché de l'assiette du préjudice, la totalité de la facture HIMKER KNITS du 3 décembre 2012'. Or, dans ses calculs, l'expert a déduit, manifestement par erreur un abattement supplémentaire de 50 % (qualifié inexactement de marge pour rotation lente) qui correspond à l'abattement de 50% qu'il entendait en réalité ne pas déduire. En effet, l'expert a procédé en page 45 sur 57 du rapport d'expertise définitif à une première déduction pour rotation lente ce qui ramène le stock à 164.512,17 euros, puis en dépit de ses affirmations dans ses conclusions en page 48, il a procédé à un second abattement de 50 % pour incertitude de sorte que le stock restant, présenté en prix d'achat, s'élèverait à 82.256,08 euros (50% de 164.512,17 euros). Il convient dès lors de réintégrer dans les calculs ces 50% déduits indûment, ce qui aboutit à une somme de 164.512 euros de préjudice de la société M70 au titre des marchandises achetées n'ayant pas fait l'objet d'un bon de commande. Il s'en déduit qu'en retenant uniquement la rotation lente de 30%, il convient de déduire uniquement la somme de 18.044,38 euros (182.556,55 ' 164.512,17) au lieu de la somme de 82.256,08 euros. Il convient ainsi de retenir l'évaluation du préjudice faite par l'expert dans la deuxième hypothèse de son rapport définitif, mais en rectifiant son erreur de calcul, ce qui fait une somme de 224.180 euros au lieu de la somme de 159.968,47 euros allouée par le tribunal. La production par la société M70, postérieurement au dépôt du rapport d'expertise définitif, du bon de commande n°11 écarté par l'expert ne permet pas de vérifier que l'ensemble des éléments indiqués sur ce bon de commande sont exacts, alors même que ce fait est contesté en défense, et ceci nonobstant l'usage d'absence de versement d'acompte entre professionnels pour de telles ventes, invoqué par la société M70, usage au demeurant non démontré, contesté en défense et d'autant plus incertain qu'il s'agissait d'une société nouvellement créée, de sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il ne l'a pas pris en compte dans l'indemnisation du préjudice. Il s'en déduit que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné ALLIANZ et la MAAF in solidum à payer à la société M70 la somme de 159.968,47 euros au titre des dommages matériels résultant de la perte des marchandises stockées (la cour retenant la somme de 224.180 euros), sans qu'il soit nécessaire de suivre davantage les parties dans le détail de leur argumentation. B) Sur la facture afférente au comptage des marchandises Dans le document de synthèse établi le 30 avril 2015, l'expert conclut ceci : 'je considère ['] que la facture de la société ITS (société ayant inventorié la marchandise sinistrée en présence d'un huissier de justice) d'un montant de 14 000 euros hors taxe, que j'ai pu examiner, liée au comptage des marchandises détériorées par l'incendie, est un des éléments constitutifs du coût du sinistre'. La société M70 a produit un courrier de la société ITS en date du 23 mars 2012 évaluant le nombre de marchandises détériorées à la suite des opérations de comptage. Elle n'est pas contredite lorsqu'elle soutient que ce comptage a été sollicité par la MAAF et ALLIANZ, pour vérifier sous le contrôle d'un huissier de justice, les stocks de marchandises annoncés. En cause d'appel, la société M70 justifie que le contrat souscrit auprès de la MAAF par les époux [V] garantit les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'assuré peut encourir dans le cadre de sa vie privée du fait de dommages matériels et plus particulièrement, en page 29 des conditions générales, qu'elle prend en charge les dommages immatériels lorsqu'ils sont la conséquence d'un dommage matériel garanti. Les dommages immatériels y sont définis comme étant 'tout préjudice à caractère financier qui est la conséquence d'un dommage matériel ou corporel garanti'. La société M70 n'est par ailleurs pas contredite lorsqu'elle soutient que le contrat souscrit par les époux [Z] auprès d'ALLIANZ garantit les conséquences résultant de la responsabilité de leur assuré, et notamment les frais résultant du sinistre provoqué par l'assuré. Il convient en conséquence de faire droit à la demande tendant à condamner in solidum la compagnie MAAF et la compagnie ALLIANZ à verser à la société M70 la somme de 14.000 euros HT au titre de la facture afférente au comptage des marchandises, cette dépense constituant un préjudice financier qui est la conséquence du dommage matériel garanti, somme qui n'aurait pas été exposée si le sinistre n'avait pas eu lieu, distincte des frais de procédure, et qui doit être prise en charge par les assureurs des responsables. Le jugement est ainsi infirmé en ce qu'il a débouté la société M70 de la demande présentée de ce chef et l'a intégrée dans les frais de procédure. C) Sur le préjudice commercial Dans son document de synthèse établi le 30 avril 2015, l'expert indique au sujet du préjudice commercial invoqué : 'L'impact financier de ces désordres pour la société M70 n'a pas été chiffré. Je ne peux donc, en l'état de la documentation transmise, me prononcer sur leur quantum'. La société M70 fait état de l'arrêt de l'activité de la société, du licenciement de deux salariés, de la fermeture de la boutique d'[Localité 6] et du non-paiement d'une facture de dédouanement. Devant le tribunal, elle n'a fourni aucun élément de preuve, à l'exception du contrat de travail à durée déterminée de Mme [Y] [A] et de Mme [M] du 12 avril 2011. En cause d'appel, elle a communiqué les lettres de convocation à entretien préalable (datée du 7 février 2013) et de licenciement économique (datée du 27 février 2013) de Mme [A] et le bulletin de paie afférent, de sortie des effectifs (le 27 mars 2013). Cependant, comme l'a relevé le tribunal, la société M70 a été constituée en février 2011 et immatriculée en mars 2011, soit moins d'un an avant le sinistre ; elle ne possède qu'une seule boutique, son capital social est de 2 700 euros et son chiffre d'affaires s'est élevé à 13 581 euros en 2011. A la date du sinistre, la société M70 était une société nouvellement créée dont l'activité commerciale était limitée. Elle n'a fourni tant devant le tribunal qu'en cause d'appel, aucun élément comptable certifié par un expert-comptable, de sorte que la réalité de ses pertes financières, contestées en défense, n'est toujours pas établie. Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation au titre du préjudice commercial. D) Sur la résistance dolosive Vu l'article 1382 devenu 1240 du code civil ; En l'espèce, la société M70, qui sollicite l'octroi d'une indemnité forfaitaire pour sanctionner la résistance dolosive des compagnies ALLIANZ et MAAF à exécuter leurs obligations, ne justifie pas d'une résistance abusive ou dolosive de la part des intimées qui ont soulevé tant en première instance que devant la cour des contestations sérieuses à l'encontre des demandes de la société M70, lesquelles ne sont, in fine, que partiellement satisfaites. Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande présentée de ce chef. 6) Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile Compte tenu de l'issue du litige, il convient de confirmer le jugement sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile. En cause d'appel, il serait inéquitable de laisser à la charge de la société M70 les sommes exposées par elle dans la présente instance et non comprises dans les dépens. Il convient donc de condamner in solidum ALLIANZ et la MAAF à payer à cette dernière la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. ALLIANZ et la MAAF seront déboutées de leurs demandes formées de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant en dernier ressort, contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe, dans la limite de sa saisine, CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a : - Débouté la S.A.S. M70 de sa demande d'indemnisation au titre de la facture afférente au comptage de marchandises, - Condamné in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES à payer à la S.A.S. M70 la somme de 159.968,47 euros au titre des dommages matériels, Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant : DEBOUTE la S.A MAAF ASSURANCES de sa demande de mise hors de cause ; CONDAMNE in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES à payer à la S.A.S. M70 les sommes suivantes : - 224.180 euros au titre des dommages matériels, - 14.000 euros HT au titre de la facture afférente au comptage des marchandises, CONDAMNE in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES à payer à la S.A.S. M70 en cause d'appel la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; CONDAMNE in solidum la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES aux dépens lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ; DEBOUTE la S.A. ALLIANZ IARD et la S.A. MAAF ASSURANCES de leurs demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens. LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE