LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la compagnie d'assurances Union des assurances de Paris (UAP), dont le siège social est ... (1er) et son centre 63, agence d'Orsay, rue de Paris à Orsay (Essonne), agissant en la personne de son directeur en exercice, domicilié en cette qualité audit siège,
en cassation d'un arrêt rendu le 24 septembre 1987 par la cour d'appel d'Orléans (Chambre solennelle), au profit :
1°) de M. Z... Mitais,
2°) de Mme A..., épouse Mitais,
demeurant ... (Essonne),
3°) de M. C..., pris ès qualités de syndic de la liquidation des biens de la société Bomur, demeurant ... (Yvelines),
défendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 30 octobre 1990, où étaient présents :
M. Jouhaud, président, M. Averseng, rapporteur, MM. X... Bernard, Massip, Viennois, Grégoire, Lesec, Zennaro, Kuhnmunch, Fouret, Bernard de Saint-Affrique, Thierry, Pinochet, Mabilat, Lemontey, Gélineau-Larrivet, conseillers, Mme Y..., MM. Charruault, Savatier, conseillers référendaires, Mme Flipo, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Averseng, les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la compagnie d'assurances UAP, les conclusions de Mme Flipo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que l'arrêt attaqué (Orléans, 24 septembre 1987) consécutif à un arrêt de cassation, rendu le 25 janvier 1984 par la Première chambre civile sur pourvoi de la compagnie d'assurances UAP, a condamné celle-ci, sur le fondement de la police "décennale entrepreneur" souscrite auprès d'elle par la société Bomur, à payer aux époux B... les indemnités mises à la charge de cette société par la décision du 13 juillet 1982 censurée ;
Sur le premier moyen
, pris en ses deux branches :
Attendu que l'UAP fait grief à l'arrêt de s'être ainsi prononcé, alors, selon le moyen, d'une part, que l'arrêt de cassation avait annulé la décision déférée "sans qu'il y ait lieu de statuer (.. )
sur le second moyen
", qui invoquait l'inopposabilité de l'expertise à l'assureur, de sorte que la censure était totale ; qu'en se référant à l'autorité de la chose jugée attachée à la décision cassée, la cour d'appel a donc violé les articles 623 et 624
du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que l'expertise judiciaire, aux opérations de laquelle l'assureur n'a pas été appelée, lui est inopposable ; qu'en écartant ce moyen, la cour d'appel a violé l'article
16 du nouveau Code de procédure civile ; Mais attendu que la Cour de Cassation n'avait été saisie que par l'UAP, dont le pourvoi critiquait la disposition la condamnant à garantie ; que c'est donc à bon droit que la cour de renvoi a retenu que la décision du 13 juillet 1982 subsistait dans ses dispositions relatives à la "responsabilité de la société Bomur qui constituait pour l'assureur dans ses relations avec le tiers lésé la réalisation du risque couvert et lui était à ce titre opposable sauf en cas de fraude de l'assuré, non alléguée en l'espèce" ; D'où il suit que le moyen, mal fondé dans sa première branche, est inopérant dans la seconde ; Et
sur le second moyen
, pris en ses trois branches, ainsi que sur le moyen d'office soulevé dans les conditions de l'article
1015 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le moyen, d'une part, qu'après avoir constaté que la police d'assurance définissait le sinistre comme toute réclamation du tiers lésé formulée pendant la durée de la garantie, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles
L. 124-1,
L. 124-3 et
L. 112-6 du Code des assurances ; alors, d'autre part, qu'en ne s'expliquant pas sur quel document elle se fondait pour affirmer que les travaux étaient quasi achevés à la date de la résiliation de la police, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article
455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, qu'en ne répondant pas aux conclusions par lesquelles l'UAP faisait valoir que les désordres, sources de responsabilité pour l'entrepreneur assuré, n'avaient pu se produire, compte tenu de la date de la réception des travaux, que postérieurement à la résiliation de la police, la cour d'appel n'a, de nouveau, pas satisfait aux exigences du même texte ; Mais attendu que le versement des primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période ; que la stipulation de la police selon laquelle le dommage n'est garanti que si la réclamation de la victime, en tout état de cause nécessaire, aux termes de l'article
L. 124-1 du Code des assurances, à la mise en oeuvre de l'assurance de
responsabilité, a été formulée au cours de la période de validité du contrat, aboutit à priver l'assuré du bénéfice de l'assurance en raison d'un fait qui ne lui est pas imputable et à créer un avantage
illicite comme dépourvu de cause et par conséquent contraire aux dispositions de l'article
1131 du Code civil au profit du seul assureur, qui aurait alors perçu des primes sans contrepartie ; que cette stipulation doit, en conséquence, être réputée non écrite ; Que, par ce motif substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié et que le moyen du pourvoi ne peut donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;