Chronologie de l'affaire
Tribunal de Grande Instance de Paris 26 mai 2016
Cour d'appel de Paris 22 septembre 2017

Cour d'appel de Paris, 22 septembre 2017, 2016/14318

Mots clés société · contrefaçon · procès-verbal · vente · bain · concurrence déloyale · nullité · préjudice · procédure civile · produits · astreinte · signification · subsidiaire · accessoire · attache

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro affaire : 2016/14318
Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Décision précédente : Tribunal de Grande Instance de Paris, 26 mai 2016, N° 2015/01027
Parties : DOFA SARL / LES MIGNONETTES SARL
Président : Mme Colette PERRIN

Chronologie de l'affaire

Tribunal de Grande Instance de Paris 26 mai 2016
Cour d'appel de Paris 22 septembre 2017

Texte

COUR D'APPEL DE PARIS ARRET DU 22 septembre 2017

Pôle 5 - Chambre 2 (n°136, 9 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : 16/14318

Décision déférée à la Cour : jugement du 26 mai 2016 - Tribunal de grande instance de PARIS -3ème chambre 1ère section - RG n°15/01027

APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE S.A.R.L. DOFA, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé [...] Tour Maubourg 75007 PARIS Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro B 508 009 297 Représentée par Me Isabelle VEDRINES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2587

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE S.A.R.L. LES MIGNONETTES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé [...] 75008 PARIS Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro B 532 129 871 Représentée par Me Dominique OLIVIER de l'AARPI DOMINIQUE OLIVIER - SYLVIE K T, avocat au barreau de PARIS, toque L 69 Assistée de Me Baptiste L plaidant pour le Cabinet ALEXANDRE - LEVY-KAHN -BRAUN, avocat au barreau de STRASBOURG, toque 70

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 mai 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Colette PERRIN, Présidente, en présence de Mme Véronique RENARD, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

M Colette PERRIN et Véronique R ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Colette PERRIN, Présidente Mme Véronique RENARD, Conseillère Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère, désignée pour compléter la Cour

Greffière lors des débats : Mme Carole T ARRET : Contradictoire Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole T, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES La société Dofa commercialise des maillots de bain, vêtements et accessoires sous la marque DO.

La société Les Mignonettes est spécialisée dans la confection et la distribution de maillots de bain féminins qu'elle commercialise sous la marque 'Pamela de Beaumane' déposée à l'INPI le 8 juin 2011 et enregistrée sous le n° 3837297 en classes 14, 24 et 25.

La société Dofa indique avoir constaté que la société Les Mignonettes distribuait auprès du magasin 'Le Bon Marché' et commercialisait sur le site internet accessible à l'adresse www.pameladebeaumane.com deux maillots de bain reprenant les caractéristiques des maillots de bain 'Isabelle' et 'Babeth' créés et commercialisés par elle depuis 2009.

Après avoir fait dresser un constat d'huissier le 24 mars 2014 au sein du magasin le Bon Marché puis adressé, le 10 avril 2014, une lettre recommandée avec accusé de réception à la société Les Mignonettes lui demandant de cesser la commercialisation des maillots litigieux, la société Dofa a, selon acte d'huissier du 16 décembre 2014, fait assigner la société Les Mignonettes devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur.

Le 25 mars 2014, la société Dofa a fait dresser un procès-verbal de constat sur internet pour établir l'offre à la vente et la commercialisation par la société Les Mignonettes des maillots de bain 'KABA' et 'AKOUMA' argués de contrefaçon.

Par jugement contradictoire en date du 26 mai 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- débouté la société Les Mignonettes de sa demande de nullité du procès-verbal de constat d'achat du 24 mars 2014,

- déclaré la société Dofa irrecevable en ses demandes fondées sur le droit d'auteur, faute de qualité à agir,

- débouté la société Dofa de sa demande subsidiaire en concurrence déloyale et parasitaire, - débouté la société Les Mignonettes de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné la société Dofa à payer à la société Les Mignonettes la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Dofa aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision.

La société Dofa a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 29 juin 2016.

Par dernières conclusions, notifiées par voie électronique en date du 29 septembre 2016, la société Dofa demande à la cour, de:

À titre principal :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en ses demandes fondées sur le droit d'auteur, faute de qualité à agir,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée la société Les Mignonettes de sa demande de nullité du procès -verbal de constat d'achat du 24 mars 2014,

- dire et juger qu'en fabriquant et en offrant à la vente les maillots de bain 'Akouma' et ' Kaba', la société Les Mignonettes a commis des actes de contrefaçon des modèles 'Isabelle' et 'Babeth',

- dire et juger qu'elle est recevable en ses demandes au titre de la contrefaçon, En conséquence :

- faire interdiction à la société Les Mignonettes de fabriquer, reproduire, offrir en vente ou vendre, présenter, notamment sur catalogue, brochures publicitaires ou sur tout site Internet tout produit constituant la contrefaçon des modèles ' Isabelle' et 'Babeth' ainsi que tous autres modèles de la société Dofa, sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir (sic),

- ordonner à la société Les Mignonettes de produire au débat tous documents ou informations permettant de déterminer l'origine et les réseaux de distribution des produits contrefaisons et, plus particulièrement, (a) les nom et adresse des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs et autres détenteurs antérieurs des produits, procédés ou services, ainsi que des grossistes destinataires et des détaillants et (b) les quantités produites, commercialisées, livrées, commandées ainsi que le prix obtenu pour les produits en cause (maillots AKOUMA et Kaba), et ce sous astreinte définitive de 1.500 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir (sic),

- ordonner que les produits reconnus comme étant contrefaisants soient rappelés des circuits commerciaux de la société Les Mignonettes pour être détruits devant huissier de justice en présence de la société Dofa, et ce sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir (sic),

- condamner la société Les Mignonettes à lui verser à titre de provision la somme de 150.000 euros au titre du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon commis, montant à parfaire, - ordonner la communication de la décision à intervenir à la société 'Le Bon Marché', et ce sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée et par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir (sic),

À titre subsidiaire :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande subsidiaire en concurrence déloyale et parasitaire,

- dire et juger que la société Les Mignonettes a eu un comportement déloyal à son égard de nature à engager sa responsabilité délictuelle sur le fondement de l'article 1382 du code civil. En conséquence,

- condamner la société Les Mignonettes à lui verser la somme de 50.00 euros (sic) à titre de dommages et intérêts,

En tout état de cause :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Les Mignonettes de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner Les Mignonettes à lui payer une somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner Les Mignonettes aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusion signifiées le 25 novembre 2016, la société Les Mignonettes demande à la cour, de :

in limine litis (sic),

- déclarer nul le procès-verbal de constat d'huissier du 24 mars 2014 produit par la société Dofa, Sur le fond,

- condamner la société Dofa à lui verser à titre de provision, la somme de 100.000 euros au titre du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale commis,

Sur appel principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la société Dofa irrecevable en ses demandes fondées sur le droit d'auteur, faute de qualité à agir, et en ce qu'il a débouté la société Dofa de sa demande subsidiaire en concurrence déloyale.

En tout état de cause,

- constater l'absence d'originalité et d'empreinte de la personnalité de l'auteur quant aux modèles ' Isabelle' et 'Babeth' de la société Dofa,

- dire et juger qu'elle ne s'est pas rendue coupable de contrefaçon des modèles de la société Dofa,

- dire et juger qu'elle ne s'est rendue coupable d'aucun acte de contrefaçon de quelque manière que ce soit,

- dire et juger qu'elle ne s'est rendue coupable d'aucun acte de concurrence déloyale de quelque manière que ce soit,

- déclarer la société Dofa irrecevable et mal fondée dans l'ensemble de ses fins et prétentions et l'en débouter,

- condamner la société Dofa aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à une somme de 20.000 euros au titre de I'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens en application de l'article 699 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 mars 2017.


MOTIFS DE LA DÉCISION


Considérant que le procès-verbal de saisie-contrefaçon constituant un des moyens de preuve de la contrefaçon, il n'y a pas lieu d'en apprécier la validité 'in limine litis';

Que, par ailleurs, l'originalité d'une œuvre est une condition de sa protection par le droit d'auteur et non pas une condition de recevabilité des demandes formées sur ce fondement ;

Que la société Les Mignonettes n'invoquant en l'espèce, aucune fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, le jugement qui a déclaré la société Dofa irrecevable en ses demandes fondées sur le droit d'auteur, faute de qualité à agir tout en déniant un caractère original aux maillots de bain opposés, doit être infirmé de ce chef ;

Sur la protection par le droit d'auteur

Considérant que les dispositions de l'article L.112-1 du code de la propriété intellectuelle protègent par le droit d'auteur toutes les œuvres de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination, pourvu qu'elles soient des créations originales ;

Que selon l'article L.112-2, 14° du même code, sont considérées notamment comme œuvres de l'esprit les créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure ;

Considérant que l'appelante revendique des droits d'auteur sur un maillot de bain une pièce dénommé 'Babeth' et sur sa déclinaison deux pièces dénommée 'Isabelle' dont elle décrit ainsi les caractéristiques : ' le modèle 'Babeth' est un maillot de bain une pièce composé des cinq éléments suivants :

- un bustier, comportant deux bonnets et un accessoire en forme de V avec empattements,

D'apparence droite, le bustier comporte un point de rupture inattendu au niveau du

décolleté qui est formé par l'accessoire en V placé au creux des seins, modifiant ainsi la forme attendue du décolleté bandeau en un décolleté en forme de c'ur ouvert à 60 degrés,

Les deux bonnets du bustier sont plissés, et sont reliés l'un à l'autre par l'accessoire en forme de V sur toute leur hauteur,

- un accessoire / attache en forme de V avec empattements, ornant le décolleté,

Cet accessoire en plastique est en forme de V et comporte deux rainures chacune parallèle à une branche du V, lesquelles permettent d'insérer dans l'accessoire des bandes de tissu et de les maintenir afin de constituer une attache. Ces rainures dessinent des empattements sur le V, visibles uniquement lorsque du tissu est inséré dans lesdites rainures. Cette attache en V permet également de relier les deux bonnets du bustier. Enfin, les deux branches du V sont reliées par un angle aigu d'environ 60 dégrées, - une partie centrale avant, couvrant le ventre et le pubis, reliée au bustier par une double couture et à la partie centrale arrière par un empiècement forme une échancrure originale,

Cette partie comporte un jeu de découpe original au niveau de la hanche où est reliée la partie centrale arrière qui est en pointe,

- une partie centrale arrière, couvrant une partie du dos et des fesses, et reliée à la partie centrale avant par un empiècement original décrit ci-dessus,

- des bretelles amovibles positionnées sous l'épaule, en diagonale, de manière à mettre en valeur la clavicule et l'ensemble du buste sans que la bretelle recouvre le buste.

Pour ce modèle, la combinaison originale formée par les caractéristiques du bustier (à savoir, le décolleté bandeau avec rupture par l'attache en V, les bonnets plissés), de l'attache en forme de V orientée vers le haut et d'un degré d'ouverture de 60 degrés, et de l'empiècement au niveau de la hanche qui forme une échancrure en pointe, forme un ensemble qui porte l'empreinte de la personnalité de l'auteur ;

' le modèle 'Isabelle' est un maillot de bain deux pièces, composé des éléments suivants :

- un bustier, comportant deux bonnets et un accessoire en forme de V avec empattements.

D'apparence droite, le bustier comporte un point de rupture inattendu au niveau du décolleté qui est formé par l'accessoire en V placé au creux des seins, modifiant ainsi la forme attendue du décolleté bandeau en un décolleté en forme de c'ur ouvert à 60 degrés,

Les deux bonnets du bustier sont plissés, et sont reliés l'un à l'autre par l'accessoire en forme de V sur toute leur hauteur,

- un accessoire / attache en forme de V avec empattements, ornant le décolleté.

Cet accessoire en plastique est en forme de V, et comporte deux rainures chacune parallèle à une branche du V », lesquelles permettent d'insérer dans l'accessoire des bandes de tissu et de les maintenir afin de constituer une attache. Ces rainures dessinent des empattements sur le V, visibles uniquement lorsque du tissu est inséré dans lesdites rainures. Cette attache en V permet également de relier les deux bonnets du bustier. Enfin, les deux branches du V sont reliées par un angle aigu d'environ 60 degrés, - une culotte, composée d'une partie supérieure entourant la taille, et comportant un accessoire en forme de V orienté vers le haut au niveau de chaque hanche, et une partie inférieure très échancrée couvrant le pubis et les fesses,

- des bretelles amovibles positionnées sous l'épaule, en diagonale, de manière à mettre en valeur la clavicule et l'ensemble du buste sans que la bretelle recouvre le buste,

Pour ce modèle, la combinaison formée par les caractéristiques du bustier (à savoir, un décolleté bandeau avec rupture par l'attache en V, bonnets plissés), de l'attache en forme de V, du positionnement et de l'empiècement au niveau de la hanche, forme un ensemble qui porte l'empreinte de la personnalité ;

Que pour contester la protection au titre du droit d'auteur de ces deux maillots de bain, la société Les Mignonettes soutient que l'attache en forme de V placée au niveau de la poitrine n'en constitue pas un élément d'identification, les maillots se caractérisant tant par cette attache que leur dos, leurs formes, leurs découpes et leurs imprimés (sic) ; que s'appropriant les motifs du jugement, elle ajoute qu'il s'agit de maillots de bain d'une facture extrêmement classique, que la présence du V revendiqué constitue une simple idée, de libre parcours, dont le monde de la mode s'est emparé 'depuis bien longtemps' et qui de plus est dictée par la nature et le corps de la femme ;

Qu'elle produit à l'appui de cette argumentation une attestation de la société Jokendall et des extraits des sites Internet Victoria's Secret, Morgandetoi et Aliexpress ;

Considérant ceci exposé, que ces trois pages internet ne comportent aucune date et ne peuvent en conséquence être invoquées à titre d'antériorités, lesquelles en tout état de cause sont inopérantes en droit d'auteur ; que, par ailleurs l'attestation de la société Jokendall, en date du 30 avril 2014 et selon laquelle (elle) certifie fabriquer les modèles AKOUMA et KABA depuis plus de 10 ans, que c'est un classique dans le monde de la mode balnéaire, tant est si bien que ce V se vend chez plusieurs fournisseurs qui sont à la disposition de toutes les marques', n'est pas de nature à établir le prétendu caractère usuel des maillots de bain tels que ci-dessus décrits et commercialisés par la société DOFA ; que par ailleurs l'appelante ne revendique pas de droit sur l'apposition d'une pièce de mercerie mais bien sur des maillots de bain comportant un V sur la poitrine et dont les caractéristiques sont ci-dessus décrites ; qu'enfin, la société intimée n'explique pas en quoi la nature imposerait un tel accessoire pas plus qu'elle ne démontre que la forme du corps de la femme l'imposerait également dans la combinaison revendiquée ; Qu'au contraire, en l'espèce, l'originalité des créations de la société DOFA réside dans la combinaison des éléments qui les caractérisent, et qui confère à l'ensemble sa physionomie propre et traduit un parti pris esthétique reflétant l'empreinte de la personnalité de leur auteur ;

Considérant dès lors que les maillots de bain 'Isabelle' et 'Babeth' doivent donc bénéficier de la protection au titre du droit d'auteur instaurée par le Livre I du code de la propriété intellectuelle ;

Sur la contrefaçon

* sur demande de nullité du procès-verbal de constat d'huissier du 24 mars 2014

Considérant que pour solliciter la nullité du procès-verbal de constat d'huissier du 24 mars 2014, l'intimée fait valoir que l'huissier ne s'est pas borné à de simples constatations mais a fait réaliser un achat, qu'il a d'ailleurs placé sous scellés à l'issue d'une véritable saisie- contrefaçon sans autorisation préalable, laquelle n'a pas été suivie d'une assignation dans le délai requis ; qu'elle ajoute que le procès- verbal 'ne constate rien de probant' dès lors que l'huissier s'est contenté de prendre des photographies 'sans décrire les biens saisis', enfin que le constat est imprécis et incomplet ;

Considérant, toutefois, que le défaut de force probante du constat, à le supposer avéré, ne constitue pas une cause de nullité de ce dernier ; que par ailleurs en l'espèce, l'huissier instrumentaire n'a pas pénétré dans le magasin Le Bon Marché mais a précisément décrit ses constatations sans procéder lui-même à l'achat ; qu'il a en effet constaté qu'une personne entrait dans le magasin et en ressortait avec un achat qu'il a décrit comme étant constitué de deux maillots de bain noirs qu'il a photographiés et dont il a annexé les clichés au procès- verbal avec le ticket de caisse ; que dès lors la société Les Mignonettes se peut sans se contredire soutenir à la fois que l'huissier s'est contenté de prendre des photographies 'sans décrire les biens saisis' et qu'il a procédé à une saisie-contrefaçon déguisée ; qu'enfin aucun texte n'impose un délai entre un simple constat huissier et la délivrance de l'assignation ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Les Mignonettes de sa demande de nullité du procès-verbal de constat d'achat du 24 mars 2014 ;

* sur la reproduction des caractéristiques des maillots de bain revendiqués

Considérant qu'aux termes de l'article L.122-4 du Code de la propriété intellectuelle, 'toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en va de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque' ;

Qu'en l'espèce, il résulte tant du procès-verbal de constat d'achat du 24 mars 2014 que du procès-verbal de constat sur internet du 25 mars 2015, que la société Les Mignonettes fabrique et offre à la vente des maillots de bain dénommés 'Akouma' et 'Kaba' qui reproduisent, dans une combinaison identique, l'ensemble des caractéristiques des maillots de bain 'Babeth' et 'Isabelle' ci-dessus décrits, les quelques différences relevées par l'intimée, et tenant principalement à la forme de l'échancrure du dos ou à son attache, à l'absence de découpe sur les hanches et de bretelles, d'ailleurs amovibles sur les maillots DO, ainsi qu'à la présence d'un trou dans le tissu sous le V du décolleté pour le maillot 'Akouma', étant inopérantes dès lors que ces éléments n'affectent pas l'impression d'ensemble qui se dégage respectivement des produits en cause ;

Qu'il s'ensuit que la contrefaçon de droits d'auteur est caractérisée ;

Que la demande en concurrence déloyale formée à titre subsidiaire devient sans objet ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant qu'il sera fait droit à la mesure d'interdiction comme indiqué au dispositif de la présente décision ;

Que cette mesure étant suffisante à faire cesser les actes illicites, il n'y a pas lieu d'ordonner le retrait des circuits commerciaux des produits contrefaisants ;

Considérant que si les actes de contrefaçon ci-dessus caractérisés causent nécessairement un préjudice à la société DOFA, force est de constater que cette dernière ne justifie par aucun argument ni aucune pièce le montant des dommages-intérêts qu'elle sollicite pourtant à hauteur de 150.000 euros ;

Que la cour disposant comme seuls éléments des prix de vente au détail des maillots de bain incriminés par Le Bon Marché, soit respectivement150 euros et 185 euros, et de la représentation et de l'offre en vente sur le site internet de la société intimée de ces mêmes maillots de bain, il sera alloué à la société Dofa la somme de 10.000 euros à titre d'indemnisation définitive de son entier préjudice, et ce sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande de communication de pièces qu'elle sollicite ;

Que les dommages-intérêts alloués étant de nature à réparer l'entier préjudice subi par l'appelante, sa demande visant à communiquer la présente décision au magasin Bon Marché sera rejetée ; Sur la demande incidente en dommages-intérêts Considérant que la société Les Mignonettes qui succombe ne peut voir prospérer sa demande de dommages-intérêts pour concurrence déloyale, au demeurant formée à titre de provision sans qu'aucune mesure d'instruction ne soit sollicitée, et qui consisterait à avoir été privée de son unique point de vente en France constitué du Bon Marché ; qu'elle ne peut pas plus incriminer au même titre un courrier électronique de ce magasin selon lequel '2 de (ses) modèles ont fait l'objet d'accusation de copie' en l'absence d'identification de la source de l'information transmise ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société Les Mignonettes de sa demande en dommages et intérêts sauf à dire que celle-ci avait pour fondement la concurrence déloyale et non pas la procédure abusive ;

Sur les autres demandes

Considérant que la société Les Mignonettes, partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens ;

Considérant, enfin, que la société Dofa a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS



Infirme le jugement rendu entre les parties le 26 mai 2016 sauf en ce qu'il a débouté la société Les Mignonettes de sa demande de nullité du procès-verbal de constat d'achat du 24 mars 2014 et sauf à dire que la société Les Mignonettes est déboutée de sa demande de dommages-intérêts formée au titre de la concurrence déloyale.

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

Dit que les maillots de bains 'Isabelle' et 'Babeth' commercialisés par la société Dofa sont protégeables au titre du droit d'auteur.

Dit qu'en fabriquant et en offrant à la vente les maillots de bain 'Akouma' et 'Kaba', la société Les Mignonettes a commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société Dofa

Interdit à la société Les Mignonettes la poursuite de ces agissements sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours après la signification du présent arrêt. Condamne la société Les Mignonettes à payer à la société Dofa, à titre d'indemnisation définitive, la somme de 10.000 euros au en réparation de son préjudice subi du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre.

Condamne la société Les Mignonettes à payer à la société Dofa la somme de 5.000 euros sur au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne la société Les Mignonettes aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.