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Tribunal administratif de Grenoble, 7ème Chambre, 28 avril 2023, 2001237

Mots clés
préjudice • requête • tabac • mineur • principal • risque • service • subsidiaire • sanction • rapport • règlement • rejet • réparation • requis • soutenir

Chronologie de l'affaire

Cour administrative d'appel de Lyon
3 octobre 2024
Tribunal administratif de Grenoble
28 avril 2023

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
  • Numéro d'affaire :
    2001237
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Rejet
  • Rapporteur : Mme Brenner Adanlété
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : TABANI SURMONT
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Résumé

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête enregistrée le 24 février 2020, Mme D H, M. A F et Mme C G, représentés par Me Tabani Surmont, demandent au tribunal : 1°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 euros chacun, en indemnisation du préjudice moral subi du fait du décès en prison par suicide de leur fils, demi-frère et frère, M. E G ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que : - l'administration pénitentiaire a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; - le suicide de M. G leur a causé un préjudice moral évalué à 20 000 euros chacun. Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2022, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut à titre principal au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que les prétentions sollicitées soient ramenées à de plus justes proportions. Il fait valoir que : - à titre principal, aucune faute n'est imputable à l'administration pénitentiaire ; - à titre subsidiaire, le préjudice doit être ramené à de plus justes proportions. Par une ordonnance du 3 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au même jour, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme d'Elbreil, conseillère, - et les conclusions de Mme Brenner Adanlété, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit

: 1. M. G, né le 7 mars 1999, a été écroué à la maison d'arrêt de Bonneville le 24 janvier 2017. Dans la nuit du 5 au 6 septembre 2017, il est décédé à la suite d'un incendie volontaire dans sa cellule. Par un courrier du 27 septembre 2019, Mme D H, mère de M. G, agissant en son nom propre ainsi qu'au nom de Mme C G, née en 2004, sœur de M. G, et de M. A F, né en 2015, demi-frère de M. G, a sollicité le règlement de la somme de 20 000 euros à leur profit respectif en réparation du préjudice moral subi du fait du suicide de M. G. Cette réclamation préalable a été reçue le 24 octobre 2019. Aucune réponse explicite n'ayant été adressée à cette demande, Mme H, agissant toujours en son nom ainsi qu'au nom du demi-frère et de la sœur de M. G, demande au tribunal de condamner l'Etat à leur verser la somme de 20 000 euros chacun. 2. La responsabilité de l'Etat en cas de préjudice matériel ou moral résultant du suicide d'un détenu peut être recherchée pour faute des services pénitentiaires en raison notamment d'un défaut de surveillance ou de vigilance. Une telle faute ne peut toutefois être retenue qu'à la condition qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas pris, compte tenu des informations dont elle disposait, en particulier sur les antécédents de l'intéressé, son comportement et son état de santé, les mesures que l'on pouvait raisonnablement attendre de sa part pour prévenir le suicide. 3. Il résulte de l'instruction que M. G, incarcéré le 24 janvier 2017 alors qu'il était encore mineur, a été diagnostiqué en avril 2016 comme schizophrène et a été hospitalisé à plusieurs reprises en pédopsychiatrie. Suite à sa majorité en mars 2017, il a été transféré d'un service pour mineur à un service pour adulte, changement qui s'est avéré compliqué et a donné lieu à une nouvelle hospitalisation du 11 juillet au 29 août 2017. Toutefois, il résulte du compte rendu de prise en charge par l'établissement public de santé mentale du centre hospitalier Alpes Léman, qui l'a suivi de janvier à septembre 2017, qu'il ne présentait pas d'idées suicidaires. En outre, s'il a démonté des prises électriques murales dans sa cellule lors d'un incident du 16 mars 2017, quelques mois avant les faits, il a lui-même affirmé rechercher des caméras dans les murs, de sorte que cet acte n'était pas lié à une tentative de suicide. De même, s'il a incendié volontairement son matelas lors d'un incident du 18 avril 2017, il résulte de la sanction disciplinaire prise par la suite qu'il a agi suite à une frustration dans l'obtention de tabac et a déclaré " je ne suis pas suicidaire et je regrette mes actes ". En outre, il résulte de l'instruction que le 5 septembre 2017, jour de son décès, il a effectué le matin un échange d'objet contre du tabac, mais a déclaré avoir ressenti une injustice dans le nombre de cigarettes obtenues, situation reproduisant un contexte de frustration liée au tabac. La seule circonstance qu'il ait refusé de prendre son traitement plus tard dans la matinée n'est pas de nature à permettre d'identifier un risque de passage à l'acte imminent, alors qu'il a expliqué ce refus en déclarant que le traitement le faisait dormir. Enfin, au premier passage de la ronde de nuit, il a également interrogé un des rondiers pour savoir si un autre détenu lui aurait fait passer un objet par cet intermédiaire, de sorte qu'il semblait être dans l'attente d'un échange qu'il n'a pas obtenu. Par ailleurs, les requérants ne produisent aucun élément permettant d'établir leurs allégations selon lesquelles Mme H aurait interpellé les services pénitentiaires sur la nécessité de prolonger l'incarcération de son fils dans un quartier dédié aux mineurs. Dans ces circonstances, les informations dont disposait l'administration pénitentiaire sur le détenu ne laissaient pas présager un risque suicidaire avéré, de sorte que le comportement de M. G n'imposait pas de modalités de prise en charge spécifiques. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'Etat aurait commis une faute en ne prenant pas de mesures de surveillance et de vigilance renforcées concernant M. G. 4. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme D H, M. A F et Mme C G doit être rejetée.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D H, M. A F et Mme C G est rejetée. Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme D H, représentante désignée, ainsi qu'au garde des sceaux, ministre de la justice. Délibéré après l'audience du 7 avril 2023, à laquelle siégeaient : M. Wyss, président, Mme Bardad, première conseillère, Mme d'Elbreil, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 avril 2023. La rapporteure, M. D'ELBREIL Le président, J.-P. WYSSLa greffière, L. ROUYER La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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