Cour de cassation, Chambre sociale, 13 janvier 2016, 14-17.915

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2016-01-13
Cour d'appel de Colmar
2014-03-27

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que M. X..., a été engagé par la société Locatim en qualité de directeur administratif et financier, que le 29 juillet 2008, il a été licencié pour faute grave ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail ; que M. Y... a été désigné mandataire liquidateur de la société Locatim le 13 juin 2013 ;

Sur le premier moyen

ci-après annexé : Attendu que le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui a estimé que les pièces produites par le salarié n'étaient pas suffisamment précises quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur d'y répondre en fournissant ses propres éléments ;

que le moyen n'est pas fondé

;

Mais sur le second moyen

:

Vu

les articles L. 3141-12, L. 3141-14, D. 3141-5 et D. 3141-6 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande tendant à obtenir réparation de son préjudice du fait de l'absence de prise de congés, l'arrêt retient

, par motifs adoptés, que la fiche individuelle de formation fournie par l'AGEFOS ne permet pas en soi de rapporter la preuve que le salarié n'a pas été en congé tout au long du mois de janvier 2008, qu'aucune trace écrite, aucun mode opératoire relatif à la demande et à la prise de congés payés n'est produit par le salarié au titre des années antérieures, de sorte que ne peut être déterminé dans quelles conditions les congés payés sont demandés par le salarié, validés par l'employeur et pris par le salarié ;

Qu'en se déterminant ainsi

, sans rechercher si l'employeur avait pris des mesures suffisantes pour permettre au salarié d'exercer effectivement son droit à congé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande tendant à obtenir réparation de son préjudice du fait de l'absence de prise de congés au mois de janvier 2008, l'arrêt rendu le 27 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ; Condamne M. Y..., en qualité de mandataire liquidateur de la société Locatim aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par M. Lacabarats, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et M. David, conseiller référendaire en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du treize janvier deux mille seize

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué de n'avoir fixé au profit de M. X..., qui sollicitait le paiement d'une somme de 56.785,76 euros, outre celle de 16.155,96 euros de repos compensateurs, qu'une créance de 2520 euros au titre des heures supplémentaires réalisées par celui-ci au passif de la liquidation judiciaire de la société Locatim, outre celle de 722,15 euros au titre du repos compensateur afférent ; AUX MOTIFS QUE le salarié réclame le paiement d'heures supplémentaires qui auraient été accomplies à compter de l'année 2005 ; que cette demande en paiement d'heures supplémentaires a été formée par celui-ci par acte introductif d'instance adressé par lettre recommandée le 4 novembre 2008 au greffe du conseil de prud'hommes de Strasbourg ; que par conséquent la prescription quinquennale de l'article L. 3245-1 du code du travail n'était pas acquise lorsque cette demande a été formée, étant précisé que le conseil de prud'hommes ayant été saisi par acte introductif d'instance du 6 novembre 2008, ce sont les règles de prescription de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 qui s'appliquent ; que la demande en paiement d'heures supplémentaires doit donc être déclarée recevable pour son intégralité ; que s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que pour l'année 2005, le salarié n'a fourni aucun élément que l'employeur aurait pu discuter ; qu'il n'étaye donc pas sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour cette année ; que s'agissant des années suivantes, le salarié a produit aux débats un relevé de tous les week-ends au cours desquels il prétend avoir travaillé du 1er janvier 2006 au 30 décembre 2007 ; qu'il produit également des relevés d'opérations exécutées pendant ces fins de semaine ; que toutefois, il ne fournit aucun détail des heures de travail qu'il prétend avoir accomplies que pour les samedi 9 et dimanche 10 septembre 2006, les samedi 16 et dimanche 17 septembre 2006, samedi 23 et dimanche 24 septembre 2006, samedi 30 et dimanche 1er octobre 2006 ainsi que les samedi 7 et dimanche 8 octobre 2006 pour un total de 96 heures supplémentaires ; qu'ainsi il n'étaye sa demande que pour ces week-ends car il fournit alors des éléments sur les horaires qu'il affirme avoir effectivement réalisés que l'employeur peut discuter ; que pour les autres fins de semaines, le salarié ne pouvait se contenter, pour étayer sa demande, de fournir une liste sans détailler les heures qu'il prétendait avoir travaillées pendant ces samedis et dimanches, ce que l'employeur aurait pu ensuite discuter ; que, de son côté, l'employeur n'a fourni aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié alors qu'il doit avoir un rôle actif dans l'administration de la preuve ; qu'il s'ensuit que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires ; que, statuant à nouveau à ce sujet, il y a lieu de fixer à son profit une créance de 2520 ¿ au titre des heures supplémentaires dues pour les week-ends des samedi 9 et dimanche 10 septembre 2006, les samedi 16 et dimanche 17 septembre 2006, samedi 23 et dimanche 24 septembre 2006, samedi 30 et dimanche 1er octobre 2006 et samedi 7 et dimanche 8 octobre 2006 ; que s'agissant d'heures supplémentaires exécutées avant le 22 août 2008, à l'intérieur du contingent annuel d'heures supplémentaires fixé à 220 heures par an, le salarié a droit à un repos compensateur obligatoire à partir de la 41ème heure de travail égal à 50 % du temps travaillé de sorte qu'il y a lieu de fixer à son profit une créance de 722,15 euros à ce titre ; 1°) ALORS QUE les juges ne peuvent débouter les parties de leurs demandes sans avoir analysé, fût-ce sommairement, les pièces produites aux débats ; qu'en affirmant que « pour l'année 2005, le salarié n'a fourni aucun élément que l'employeur aurait pu discuter » et qu'il « n'étaye donc pas sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour cette année », lorsque M. X... faisait valoir que « pour la période 2005/2006 je réclame 1.140 heures supplémentaires (...) » (conclusions de l'exposant, p. 4, in fine) et produisait une « annexe AR 9 » (prod. n° 6), qui exposait que celui-ci avait réalisé 215 heures supplémentaires restant dues au 31 décembre 2005, et une « annexe ASA 2 » (prod. n° 7), de laquelle il ressortait que l'employeur lui devait la somme de 30.000 euros au titre des heures supplémentaires réalisées entre octobre 2005 et décembre 2007, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur fournit aux juges les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et le juge ne peut, pour rejeter une demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié ; que pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaires pour heures supplémentaires et congés payés y afférents, relatives aux autres heures que celles effectuées les samedi 9 et dimanche 10 septembre 2006, les samedi 16 et dimanche 17 septembre 2006, les samedi 23 et dimanche 24 septembre 2006, les samedi 30 et dimanche 1er octobre 2006 ainsi que les samedi 7 et dimanche 8 octobre 2006, l'arrêt retient que le salarié « ne pouvait se contenter, pour étayer sa demande, de fournir une liste sans détailler les heures qu'il prétendait avoir travaillées pendant ces samedis et dimanches, ce que l'employeur aurait pu ensuite discuter » tout en constatant que l'employeur « n'a fourni aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié alors qu'il doit avoir un rôle actif dans l'administration de la preuve » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations, que le salarié produisait des éléments de nature à étayer sa demande et que l'employeur n'en fournissait aucun, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à obtenir réparation de son préjudice du fait de l'absence de prise de congés du salarié au mois de janvier 2008 ; AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article 6 du code de procédure civile prévoit qu'à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder ; que l'article 9 du Code de procédure civile prévoit qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; que l'article 1331 du Code civil prévoit que les registres et papiers domestiques ne font point un titre pour celui qui les a. Ils font foi contre lui : 1° dans tous les cas où ils énoncent formellement un paiement reçu ; 2° lorsqu'ils contiennent la mention expresse que la note a été faite pour suppléer le défaut du titre en faveur de celui au profit duquel ils énoncent une obligation ; que la fiche individuelle de formation fournie par l'AGEFOS ne permet pas en soi de rapporter la preuve que Monsieur X... n'a pas été en congé tout au long du mois de janvier 2008 ; qu'aucune trace écrite, aucun mode opératoire relatif à la demande et à la prise de congés payés n'est produit par Monsieur X... au titre des années antérieures, le Conseil de céans n'est pas en mesure de déterminer dans quelles conditions les congés payés sont demandés par le salarié, validés par l'employeur et pris par le salarié ; qu'en conséquence, dit qu'il y a lieu de débouter Monsieur X... de sa demande de paiement du solde de congés payés ; ALORS QU'il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ; qu'en déboutant M. X..., qui prétendait que son employeur a « retiré 5 semaines de congés consécutives en janvier 2008, soit la totalité du mois », de sa demande de « restitution de congés déduits à torts sur (s)a fiche de paie de janvier 2008, soit 3.819,49 € bruts » (p. 7 et 8), ce qui était attesté par le fait qu'il formait son remplaçant, ayant même suivi des journées de formation, déclarées par son employeur, aux motifs adoptés « qu'aucune trace écrite, aucun mode opératoire relatif à la demande et à la prise de congés payés n'est produit par Monsieur X... au titre des années antérieures, le Conseil de céans n'est pas en mesure de déterminer dans quelles conditions les congés payés sont demandés par le salarié, validés par l'employeur et pris par le salarié », la cour d'appel a violé la Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, et les articles L. 3141-12, L. 3141-14, D. 3141-5 et D. 3141-6 du code du travail.