Chronologie de l'affaire
Tribunal de Commerce de Paris 12 novembre 2020
Cour d'appel de Paris 01 juillet 2022

Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - Chambre 11, 1 juillet 2022, 21/00265

Mots clés Demande en paiement relative à un autre contrat · contrat · société · résiliation · procédure civile · systèmes · transfert · rapport · projet · local · credit · résolution · phase · prestations · calendrier · comité

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro affaire : 21/00265
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Décision précédente : Tribunal de Commerce de Paris, 12 novembre 2020, N° 2017062037
Président : Mme Marion PRIMEVERT

Chronologie de l'affaire

Tribunal de Commerce de Paris 12 novembre 2020
Cour d'appel de Paris 01 juillet 2022

Texte

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRET DU 01 JUILLET 2022

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00265 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC33U

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Novembre 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS 04 - RG n° 2017062037

APPELANTE

S.A. DEXIA CREDIT LOCAL

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Louis DE GAULLE de la SELAS DE GAULLE FLEURANCE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0035

INTIMEE

Société ECONOCOM INFOGÉRANCE SYSTÈMES

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me François TEYTAUD de l'AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Me Alain BENSOUSSAN de la SELAS ALAIN BENSOUSSAN SELAS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0241

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 mai 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marion PRIMEVERT, présidente à l'audience.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M.Denis ARDISSON, Président de chambre,

Mme Marie-Sophie L'ELEU DE LA SIMONE, conseillère

Mme Marion PRIMEVERT, conseillère,

qui en ont délibéré,

un rapport ayant été présenté à l'audience par Mme Marion PRIMEVERT, présidente à l'audience, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Damien GOVINDARETTY

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par M.Denis ARDISSON, Président de chambre, et par M.Damien GOVINDARETTY, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.

Il sera succinctement rapporté que la sa Dexia Crédit Local (DCL) dont le siège est à [Adresse 6], se présente comme la principale entité opérationnelle du groupe Dexia géré en résolution ordonnée depuis 2012, laquelle a induit l'arrêt des activités commerciales du groupe qui se consacre à la gestion en extinction de son portefeuille d'actifs, composé majoritairement d'actifs liés au secteur public local, tout en veillant à préserver les intérêts des États actionnaires et garants du groupe.

La sas Econocom Infogérance Systèmes (Econocom), sise au Plessis-Robinson (92) qui vient aux droits de la sas Econocom Osiatis France, est une filiale française du groupe européen Econocom spécialisé dans les services liés à la transformation numérique. Elle assure la gestion et l'exploitation sur site des systèmes informatiques de ses clients et/ou le traitement de leurs données et leur offre également des services d'assistance connexes. A la suite d'une scission du 1er août 2019, elle a repris une partie de l'activité d'Econocom-Osiatis France dont le contrat conclu avec DCL.

Afin de mettre en 'uvre l'objectif stratégique de maintien de la continuité opérationnelle et de résoudre l'obsolescence de son infrastructure tout en réduisant les coûts, DCL a décidé d'externaliser les activités d'infrastructure informatique du groupe Dexia. La Direction des Systèmes d'Information Dexia (DSI Dexia) a lancé le projet INPROM (INfrastructure, PROduction et Monitoring) par appel d'offres dès juin 2015.

Le projet INPROM devait permettre la migration vers un opérateur cloud de l'infrastructure ainsi que les données informatiques du groupe. Dans un second temps, le projet INPROM était suivi du projet HORIZON qui avait pour objet l'externalisation des applications métiers et des activités métiers du groupe incluant notamment le back-office crédit, le back-office paiement et toute l'activité informatique.

Le projet INPROM a été contractualisé avec Econocom le 15 juillet 2016 pour une durée de 5 ans, entré en vigueur rétroactivement le 1er avril 2016 ; le projet HORIZON l'a été avec une société de droit américain Cognizant, le 4 octobre 2017.


Considérant qu'

Econocom n'avait pas été en mesure de respecter le calendrier contractuel relatif à la phase de transfert de l'infrastructure alors qu'elle avait sur ce point une obligation de résultat en application de l'article 11 du contrat, DCL la mettait en demeure le 28 juillet 2017 de respecter les délais et de finaliser les prestations, puis résiliait unilatéralement le contrat le 2 octobre 2017 en visant les torts exclusifs d'Econocom et l'article 25.3 du contrat prévoyant cette résiliation.

Le 11 octobre 2017 Econocom prenait acte de la résiliation tout en contestant l'inexécution de ses obligations contractuelles et émettait, au titre de la phase 1 du projet dont le prix de base était fixé à 2.086.238,92 € HT (article 1.1.1 de l'annexe VI.I « Conditions financières »), plusieurs factures dont DCL refusait le paiement.

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 12 novembre 2020 qui a :

- débouté Econocom Infogerance Systemes de ses demandes d'exception d'incompétence et d'irrecevabilité ;

- s'est dit compétent,

- pris acte de ce que la société Econocom Infogerance Systemes vient aux droits de la société Econocom-Osiatis France ;

- rejeté la demande de communication de pièces formulée par Econocom Infogerance Systemes ;

- dit que la résiliation décidée par DCL le 2 octobre 2017 du contrat de prestation de services du 15 juillet 2016 est fautive

- débouté DCL de l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;

- condamné DCL à verser à Econocom Infogerance Systemes :

o 71.111,40€ et 124.695,12€ au titre des factures impayées, avec intérêts à compter du 28 décembre 2017 au taux d'intérêt appliqué par la BCE majoré de 10 points de pourcentage, et avec anatocisme ;

o 300.000 € à titre d'indemnité de résiliation ;

o 15.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- débouté Econocom Infogerance Systemes de ses demandes indemnitaires autres ou plus amples ;

- rejeté la demande d'exécution provisoire,

- condamné DCL aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 213,79€ dont 34,99€ de TVA.

Vu l'appel interjeté par la sa Dexia Crédit Local le 24 décembre 2020,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 19 avril 2022 pour la sa Dexia Crédit Local, par lesquelles elle demande à la cour de :

Vu l'article 1134 ancien du code civil ensemble avec les articles 1147 et suivants anciens du même code,

Vu les pièces versées aux débats,

- recevoir l'Appelante en ses demandes, fins, moyens et prétentions :

Y faisant droit :

- Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 12 novembre 2020 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il :

o Déboute la société Econocom Infogerance Systemes de ses demandes d'exception d'incompétence et d'irrecevabilité ;

o Prend acte de ce que la société Econocom Infogerance Systemes vient aux droits de la société Econocom-Osiatis France ;

o Rejette la demande de communication de pièces formulée par la société Econocom Infogerance Systemes ;

Statuant à nouveau :

A titre principal :

- Juger que l'obligation de résultat de la société Econocom Infogerance Systemes s'applique au calendrier stipulé dans le contrat du 15 juillet 2016 portant sur le projet INPROM ;

- Juger qu'en ne respectant pas son obligation de résultat sur le calendrier, la société Econocom Infogerance Systemes a engagé sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de la société Dexia Credit Local ;

A titre subsidiaire :

- Juger qu'en ne respectant pas le calendrier, ni son obligation de contrôle de l'état d'avancement des prestations, ni son obligation d'information, de conseil et d'alerte, ni son obligation de délivrance conforme, ni les règles de l'art en matière de développement informatique, la société Econocom Infogerance Systemes est exclusivement responsable des retards et de l'échec du projet INPROM et a engagé sa responsabilité contractuelle vis-à-vis de la société Dexia Credit Local ;

En tout état de cause :

- Juger que les rapports de Monsieur [T] [K] du 31 août 2021 et du 28 mars 2022 respectent les règles déontologiques posées à l'article IV-1) du CNCEJ 2017 et les admettre dans les débats ;

- Rejeter la demande d'expertise judiciaire formulée par la société Econocom Infogerance Systemes ;

- Juger que la société Dexia Credit Local était en droit de résilier le contrat du 15 juillet

2016 pour faute de la société Econocom Infogerance Systemes ;

- Condamner en conséquence la société Econocom Infogerance Systemes à verser à la société Dexia Credit Local la somme de 15.552.236 € de dommages-intérêts en réparation du préjudice financier et d'image subi, sauf à parfaire au vu de la communication d'éléments complémentaires qui pourront être réclamés en cours d'instance ;

- Débouter la société Econocom Infogerance Systemes de son appel incident et de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions ;

- Condamner la société Econocom Infogerance Systemes à verser à la société Dexia Credit Local la somme de 400.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner la société Econocom Infogerance Systemes aux entiers dépens.

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 15 avril 2022 pour la sas Econocom Infogérance Systèmes, par lesquelles elle demande à la cour de :

- déclarer Econocom Infogérance Systèmes recevable et bien fondée en son appel incident et en l'ensemble de ses fins, moyens et prétentions, y faire droit et en conséquence :

- infirmer le jugement du 12 novembre 2020 rendu par le Tribunal de commerce de Paris

(RG n°2017062037) en ce qu'il a débouté Econocom Infogérance Systèmes de sa demande d'exception d'incompétence et en conséquence renvoyer l'affaire devant le Tribunal de commerce de Nanterre ;

à défaut :

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Econocom Infogérance Systèmes de sa demande de dire Dexia Crédit Local irrecevable en son action;

- infirmer le jugement du 12 novembre 2020 en ce qu'il a débouté Econocom Infogérance Systèmes de sa demande de production forcée de pièces et en conséquence enjoindre à Dexia Crédit Local de produire à Econocom Infogérance Systèmes :

o le contrat de prestation de services conclu avec Cognizant le 4 octobre 2017 ;

o la lettre de mission d'audit de la société McKinsey & Company sur le projet Inprom,

o le rapport d'audit réalisé par la société McKinsey & Company, le 27 juillet 2017, sur le projet Inprom ;

- débouter Dexia Crédit Local de son appel et de l'ensemble de ses fins, moyens et prétentions ;

- confirmer le jugement en ce que Econocom Infogérance Systèmes vient aux droits d'Econocom-Osiatis France ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* dit que la résiliation décidée par la société Dexia Crédit Local le 2 octobre 2017 du contrat de prestations de services du 15 juillet 2016 était fautive ;

* débouté la société Dexia Crédit Local de l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;

* condamné Dexia Crédit Local à verser à la société Econocom Infogérance Systèmes :

o les sommes de 71.111,40 € TTC et 124.695,12 € TTC, au titre des factures impayées, avec intérêts à compter du 28 décembre 2017 au taux d'intérêt appliqué par la BCE majoré de 10 points de pourcentage, et avec anatocisme ;

o la somme de 300.000 € à titre d'indemnité de résiliation ;

o la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Econocom Infogérance Systèmes de ses autres demandes indemnitaires :

En conséquence et statuant à nouveau :

- condamner la société Dexia Crédit Local à payer à la société Econocom Infogérance Systèmes la somme de 1.426.487,69 € HT, soit 1.711.785,63 € TTC, au titre de la facture n°1751707 émise par la société Econocom Infogérance Systèmes le 28 décembre 2017, augmentée des pénalités de retard de paiement et des indemnités forfaitaires de recouvrement correspondant à la somme à parfaire de 733.528,25 € arrêtée au 12 mai 2022 ;

- condamner la société Dexia Crédit Local à verser à la société Econocom Infogérance Systèmes la somme de 4.788.817 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices suivants :

o coûts engagés pour la phase d'exploitation courante en pure perte : 2.691.460 €,

o manque à gagner sur l'exécution du contrat jusqu'à son terme : 1.429.722 € ;

o manque à gagner sur le renouvellement du contrat pour l'exploitation courante : 617.635 €,

et ce, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2018 date correspondant aux premières conclusions de première instance.

Subsidiairement,

- infirmer le jugement en ce qu'il a limité la condamnation de Dexia Crédit Local à verser à la société Econocom Infogérance Systèmes la somme de 300.000 € à titre d'indemnité de résiliation et statuant à nouveau :

- condamner la société Dexia Crédit Local à verser la somme de 3.816.793,92 € à Econocom Infogérance Systèmes à titre d'indemnité de résiliation avec intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2021 date des premières conclusions d'appel.

Très subsidiairement,

- ordonner, si la Cour l'estime nécessaire pour l'éclairer sur les problématiques techniques qui auraient une incidence sur la qualification juridique du calendrier et donc sur l'appréciation d'une faute dans la résiliation du contrat, une expertise judiciaire au visa des articles 143, 144 et 146 du Code de procédure civile, limitée aux incidences techniques sur le calendrier prévisionnel :

o convoquer et entendre contradictoirement les parties en leurs dires et explications ;

o indiquer aux parties son absence de lien avec chacune d'elle et/ou avec leurs

conseils ;

o se rendre en tous lieux nécessaires à l'exécution de sa mission ;

o entendre tout sachant utile à sa mission ;

o faire procéder, en présence des parties, à la sauvegarde contradictoire de l'ensemble des éléments livrés par la société Econocom en exécution du contrat de prestation de services du 15 juillet 2016 et non détruits par Dexia ;

o prendre connaissance de l'ensemble des engagements contractuels conclus entre les parties et de la liste des griefs de la société Dexia invoqués dans sa lettre de résiliation du 2 octobre 2017 ;

o se faire remettre tout document qu'il estimera utile à l'accomplissement de sa mission ;

o apprécier l'évolutivité des besoins de la société Dexia entre le début du projet et la rupture des relations contractuelles et donner son avis sur l'impact de cette évolutivité sur le projet et le décalage du calendrier prévisionnel ;

o donner son avis sur l'absence de fourniture et/ou la fourniture tardive, par la société Dexia, des éléments nécessaires à la bonne exécution, par la société Econocom, de ses prestations et le cas échéant, leur impact sur le projet et son calendrier prévisionnel ;

o déterminer l'incidence du décalage résultant de la société Dexia dans le raccordement MPLS quant au décalage du calendrier prévisionnel ;

o établir, à l'issue de chaque réunion d'expertise, une note de synthèse aux parties avec un bilan des actions en cours et à faire, leur planning et un ordre du jour de la prochaine réunion ;

o établir un pré-rapport intermédiaire préalablement au dépôt du rapport définitif et solliciter des parties leurs observations et réclamations sur ce pré-rapport ;

- dire que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du Code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au greffe de la Cour dans les quatre mois de sa saisine ;

- fixer la consignation à valoir sur la rémunération de l'expert, à parts égale entre Dexia

Crédit Local et Econocom Infogérance Systèmes.

En toute hypothèse :

- constater que les rapports de Monsieur [T] [K] du 31 août 2021 et du 28 mars 2022 ne respectent pas les règles déontologiques posées à l'article IV-1) du CNCEJ 2017 et les rejeter des débats ;

- condamner la société Dexia Crédit Local à payer à la société Econocom Infogérance Systèmes, la somme de 200.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile à compter du 30 janvier 2018 correspondant aux premières conclusions de première instance ;

- ordonner la capitalisation des intérêts, en application de l'article 1343-2 du Code civil, sur l'ensemble des condamnations financières prononcées à l'encontre de la société Dexia Crédit Local ;

- assortir l'ensemble des condamnations financières prononcées à l'encontre de la société Dexia Crédit Local d'une astreinte de 1.000 € par jour de retard ;

- dire que l'ensemble des astreintes commencera à courir passé le délai de 8 jours de la

signification de la décision à intervenir ;

- dire que les astreintes prononcées seront productrices d'intérêts au taux légal ;

- se réserver expressément le pouvoir de liquider les astreintes prononcées ;

- condamner la société Dexia Crédit Local aux dépens d'appel dont distraction au profit de Me Teytaud de la AARPI Teytaud-Saleh, au titre de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture du 21 avril 2022,

SUR CE, LA COUR,

Sur la compétence du tribunal de commerce de Paris

Aux termes de l'article 48 du code de procédure civile, toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée.

En l'espèce c'est à juste titre que le tribunal de commerce de Paris a relevé que deux articles du contrat du 15 juillet 2016 (pièce 10 Econocom), les articles 38 « loi applicable » et 39 « résolution des différends », rédigés de façon très apparente avec des titres sont parfaitement clairs désignant spécialement la procédure de résolution des différends, indiquaient que « tout litige relatif à l'exécution du contrat seront tranchés par les tribunaux de commerce de Paris » et « la compétence expresse au fond étant attribuée aux tribunaux de commerce de Paris ».

L'article 39 étant le dernier du contrat, la compétence du tribunal de commerce de Paris apparaît en outre juste au-dessus de la signature des parties en page 29 du contrat, de telle sorte qu'elle est très apparente .

Partant l'exception d'incompétence au profit du tribunal de commerce de Nanterre doit être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur la recevabilité de l'action au fond

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Le non-respect d'une procédure de conciliation prévue au contrat constitue également une fin de non-recevoir.

En l'espèce, l'article 39 du contrat, « résolution des différends » stipule que « les Parties souhaitent mettre en place une procédure de Résolution des différends facilitant le règlement rapide et amiable de toute éventuelle difficulté d'exécution du Contrat qui n'aurait pu être tranchée en Comité de niveau pilotage. A ce titre, les Parties s'efforceront de régler leurs éventuels différends comme suit:

- Si un désaccord non résolu en Comité de pilotage survient entre les Parties concernant l'exécution du Contrat, l'une ou l'autre peut demander une réunion d'un Comité stratégique. Le Comité stratégique devra se réunir dans les dix (10) jours ouvrés suivant

la réception de la Notification demandant sa réunion.

- le Comité stratégique disposera alors d'un délai de dix (10) jours ouvrés, ou tout autre délai plus long convenu le cas échéant entre les Parties, courant à compter de sa première réunion pour trouver une solution acceptable par les Parties. En cas d'accord total ou partiel, celui-ci fera l'objet d'un compte rendu écrit de la réunion du Comité stratégique dans un délai de trois (3) jours suivant la tenue dudit Comité et validé par les

deux Parties.

- En cas d'échec des procédures définies au présent article, l'article 38 (Loi applicable) sera applicable, la compétence expresse au fond étant attribuée aux tribunaux de commerce de [Localité 5], nonobstant pluralité de défendeurs, demande incidente ou appel en garantie.

Il ressort de cet article et donc de la volonté des parties qu'en cas de désaccord non résolu en comité de pilotage, les parties s'efforceront de régler leurs éventuels différends par une procédure de conciliation, et que l'une des parties peut demander une réunion d'un comité stratégique. Contrairement à ce qu'indique Econocom, l'emploi de « à ce titre » relie les deux premières phrases de l'article, établissant ainsi que, s'agissant d'une simple possibilité et non d'une clause de conciliation préalable obligatoire, la fin de non-recevoir ne peut être retenue.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de production de pièces

Aux termes de l'article 11 du code de procédure civile, les parties sont tenues d'apporter leur concours aux mesures d'instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d'une abstention ou d'un refus. Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l'autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d'astreinte. Il peut, à la requête de l'une des parties, demander ou ordonner, au besoin sous la même peine, la production de tous documents détenus par des tiers s'il n'existe pas d'empêchement légitime.

En l'espèce, Econocom fait valoir que pour démontrer que le projet INPROM a été repris par Cognizant dans le cadre du projet Horizon, permettant ainsi à DCL de l'évincer, elle a besoin de disposer du contrat conclu avec la société Cognizant pour le projet Horizon et des éléments relatifs à l'audit du projet Inprom effectué par McKinsey, à savoir la lettre de mission d'audit et le rapport d'audit.

Cette demande ne peut être examinée qu'avec le fond, au regard des moyens invoqués par les parties au soutien de la résiliation et de son caractère légitime ou non.

Sur la résiliation du contrat

En vertu de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne. En l'espèce, le contrat litigieux a été conclu le 15 juillet 2016 de sorte qu'il est ainsi soumis au code civil tel qu'antérieur à cette réforme.

Aux termes de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Aux termes de l'article 1184 du même code, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

En vertu de ce dernier article, la résolution judiciaire peut être prononcée indépendamment de la clause résolutoire, dès lors que l'inexécution de ses obligations par l'une des parties revêt un caractère suffisamment grave.

En l'espèce, l'article 25.3 du contrat stipule qu'en cas de manquement du fournisseur à l'une des obligations mises à sa charge au titre du contrat non résolu dans un délai de 60 jours calendaires à compter de la notification du manquement en cause, le client pourra résilier le contrat de plein droit par notification sans indemnité et sans formalité judiciaire sans préjudice de tous dommages et intérêts.

En l'espèce, la lettre de résiliation de DCL (pièce 28 DCL) adressée le 2 octobre 2017 à Econocom qui renvoie au titre des obligations non exécutées à sa mise en demeure du 28 juillet 2017 (pièce 25) réitérée le 31 août suivant, rappelle l'obligation de résultat sur la direction, la maîtrise, l'exécution et la coordination des obligations mises à la charge d'Econocom par le contrat du 15 juillet 2016 et dénonce au titre de l'inexécution, le non-respect du calendrier conjointement arrêté et l'impossible mise en production.

Sur l'obligation de résultat, l'article 11 du contrat précise que « le fournisseur reconnaît et accepte expressément d'être soumis à une obligation de résultat dans le cadre du contrat et s'engage à exécuter de bonne foi chacune des obligations mises à sa charge et notamment (article 11.1) la direction, la maîtrise, l'exécution et la coordination des obligations.

L'article énumère ensuite à l'alinéa 1 (11.1) les obligations sur lesquelles portent l'obligation de résultat : coordination, supervision, mise en 'uvre des processus' etc.

En revanche, à aucun moment l'article 11.1 ne vise au titre de l'obligation de résultat, les délais de réalisation.

Au contraire, l'article 11.2 stipule que « le fournisseur apportera tout le soin et la diligence appropriés à l'exécution du contrat et à la réalisation des prestations ». La diligence faisant ainsi référence aux délais, il se déduit de cet article et spécialement de l'expression « apportera tout le soin et la diligence », que la volonté commune des parties était d'assortir le calendrier d'une obligation de moyen, l'article 11.2 constituant une dérogation spéciale à l'obligation de résultat prévue en termes généraux.

DCL reprend d'ailleurs elle-même la genèse du contrat en page 48 de ses conclusions, démontrant que si les premières versions du contrat, elles-mêmes postérieures aux notes d'intention qu'elle cite également, prévoyaient une « obligation de résultat en termes de respect des délais et des niveaux de service contractuels », les versions suivantes du contrat dans le cadre des pourparlers, ont retenu dès février 2016 un abandon de l'obligation de résultat d'Econocom sur les délais. La version proposée par DCL le 2 mars 2016 ne retenait elle-même plus d'obligation de résultat sur ces délais.

L'article 4 du contrat qui prévoit que « le fournisseur s'engage à fournir au client les prestations conformément au calendrier défini dans les documents constituant l'annexe VI.3 est pour sa part rédigé de manière générale, l'article 11.2 étant plus précis et donc plus spécial sur la nature de l'obligation en cause. Par ailleurs, le délai de 18 mois invoqué par DCL ne se trouve pas à l'article VI.3 de l'annexe mais à l'article VI.2 non visé par l'article 4 du contrat.

Enfin, l'article 7 sur la recette, en stipulant que « pour chaque prestation, la date de recette définitive est la date prise en compte lors du PV de recette définitive, et doit être conforme à celle prévue au Calendrier du Plan correspondant à la prestation concernée » est sans lien avec une obligation de résultat à l'encontre du fournisseur, la recette étant à la charge du client.

Quant au délai de 18 mois prévu pour la réalisation de la première phase, dite « phase de transfert », il ressort simplement d'un rappel en article 1 « prix des prestations » de l'annexe VI.1 sur les conditions financières et d'une frise chronologique en page 6 de l'annexe VI.2 (pièce 15 DCL) qui indique la succession de la phase de transfert et de la phase opérationnelle, en mentionnant dans la phase de transfert :

- une phase de lancement qui débute avec une « notification »

- une phase de transformation dont le point de départ est nommée « T0 »

- et qui annonce une durée pour cette phase de transfert de : T0 + 18 mois.

A aucun moment l'annexe ne mentionne qu'il est impératif ou attaché à une obligation de résultat. Le contrat, comme il a été vu, ne renvoie d'ailleurs pas à cette annexe VI.2 au titre d'une obligation de respect des délais ou de résultat. Enfin, la frise chronologique dont s'agit se trouve dans un paragraphe intitulé « approche méthodologique PROMEO pour DEXIA » en indiquant juste au-dessous de ce titre et avant la frise « le schéma ci-dessous illustre l'approche méthodologique et décline les chantiers identifiés dans le cadre de la phase de mise en 'uvre ». Les termes employés induisent que la frise n'a pas pour objet la détermination de délais, mais bien la succession des phases du contrat en terme de « méthodologie ». Aucune des lignes de texte qui suivent la frise ne reprend ce délai de 18 mois.

Ce délai n'est d'ailleurs pas repris dans l'article 2.2 de la même annexe pourtant intitulé « planning général du projet » qui précise d'ailleurs « nous détaillerons ci-après les premiers mois de la phase de transfert ('). Dexia et Econocom conviennent que tout ce qui est décrit ci-après relève d'un constat commun et validé lors d'ateliers préparatoires. Il ne saurait être cependant, un engagement contractuel sur la manière de dérouler la phase de transfert. En effet, lors de l'analyse qui sera faite au démarrage de la phase de transfert, certains éléments peuvent apparaître et obligeront à revoir ces choix. Ils ne sont donc pas définitifs mais servent à donner un cadre de travail commun et apprécié de tous ».

Ces éléments démontrent suffisamment que le délai de 18 mois était indicatif et ne pouvait faire peser une obligation de résultat à la charge du fournisseur.

Dès lors, le seul décalage du calendrier ne peut être constitutif d'une inexécution contractuelle et il appartient à DCL de rapporter la preuve d'un manquement suffisamment grave à ses obligations par Econocom, permettant de justifier la résiliation dans les conditions prévues par l'article 25.3 du contrat.

Il y a lieu de relever tout d'abord qu'aucune clause du contrat n'impose à Econocom la proposition d'un avenant en cas de glissement du calendrier sur la phase de transfert, l'article 5 du contrat prévoyant ces avenants uniquement pour l'évolution à la hausse comme à la baisse du périmètre des prestations du contrat.

Il résulte de la mise en demeure du 28 juillet 2017 et de la notification de la résiliation le 2 octobre 2017 que le délai de 60 jours calendaires à compter de la notification du manquement a été respecté.

Les manquements visés à la mise en demeure du 28 juillet 2017 (pièce 25) réitérée le 31 août suivant, qui seuls peuvent donc justifier la résiliation sur le fondement de l'article 25.3, sont :

- le non-respect du calendrier conjointement arrêté,

- et l'impossible mise en production.

Sur ces manquements, les rapports présentés par DCL de M. [T] [K], tels que remis le 31 août 2021 (pièces 92s DCL) et le 28 mars 2022, s'agissant de rapports d'expertise privés non contradictoires, n'ont de valeur probante que s'ils sont corroborés par des pièces versées aux débats. Il en est de même pour les rapports déposés par Econocom, notamment celui de M. [X] [N] du 28 janvier 2022 (pièce 273) et ceux de M. [L] [S] (pièces 274 et 296).

Il n'est pas contesté par Econocom que des retards dans l'exécution de la phase de transfert ont été subis. Le rapport du comité stratégique du 8 mars 2017 (pièce 18 DCL) note ainsi en page 3 que « le projet est globalement en retard » par rapport aux engagements initiaux, le modèle de delivery d'Econocom n'étant pas adapté au projet Dexia qui « se révèle plus complexe que nous ne l'avions imaginé ». A ce titre, Econocom a alors décidé de renforcer son pilotage en remplaçant un des chefs de chantier et en impliquant plus fortement son architecte global dans le pilotage du chantier DaaS (Desktop as a Service).

Lors du comité de chantier environnement utilisateur dont compte rendu du 12 avril 2017, la direction de programme Dexia demande à Econocom de réactualiser d'urgence le planning pour le 13 avril et pose cette condition comme un pré-requis à la reprise des comités hebdomadaires ; la même direction indique qu'elle ne peut rester sans visibilité sur un planning réaliste du DaaS (pièce 201 Econocom).

Le rapport du comité stratégique du 21 avril 2017 (pièce 19 DCL) rapporte un « plan d'actions d'Econocom » pour remédier à ces difficultés avec une adaptation de la stratégie de gouvernance (nouvelle nomination à la direction de programme, nouvel architecte référent, proposition d'un micro planning intégré et actualisé ainsi que de nouveaux indicateurs de pilotage communs) et une évolution de la gouvernance projet avec des personnes en renfort sur les différents chantiers et une nouvelle nomination pour le responsable opérationnel de production. A ce stade, le calendrier prévisionnel ne varie pas de celui initialement fixé (pièce 20 DCL), Econocom indiquant : « nous avons identifié des retards liés à la complexité des chantiers notamment DaaS et Migration auxquels nous avons pallié au travers du renfort des équipes de Build ».

Par courrier du 4 juillet 2017 (pièce 21DCL), DCL rappelait à Econocom le caractère essentiel pour elle du respect des délais et s'inquiétait de la capacité de cette dernière à délivrer la phase de transfert, les comités de pilotage ne présentant selon elle pas de points d'avancement clairs et précis. Elle envisageait ainsi de réaliser un audit en application de l'article 17 du contrat. La réunion prévue le 11 juillet suivant a été décalée deux fois par Econocom (pièce 33 DCL). Dès le 21 octobre 2016 elle avait réclamé à Econocom la mise en place d'un tableau de bord sous excel dénommé « Dashboard » (pièce 38 DCL) sur lequel les parties s'accorderont finalement lors du comité de pilotage du 27 juillet 2017.

Ce même comité du 27 juillet 2017 reprend le calendrier en fixant la dernière échéance de la phase 1 au 6 octobre 2017 permettant à la suite, la migration, tout en indiquant : « retard sur le planning initial => choix conjoint de décalage au 06/10 du jalon INPROM V4 » puis ajoute à titre d'information l'indisponibilité des ressources Econocom et Dexia lors de la période de congé.

A ce stade, la cour relève que DCL n'impute plus, dans le statut d'avancement d'INPROM, les retards à Econocom, mais fait le choix d'un décalage du calendrier, conjoint, et tient compte des périodes de congés des deux entreprises. Les retards sont attribués soit à « des contraintes calendaires », soit à la « complexité rencontrée sur la mise en 'uvre de la migration ». De même, le comité de pilotage « invite les directions de programme à s'entendre sur les KPIs (indicateurs clés de performance) qui doivent reposer sur une définition partagée de recette des Paas » (Platform-as-a-service), prévoit de planifier un atelier sur le niveau de services des plateformes et d'organiser un point entre les chefs de chantier Sécurité et la direction de programme en amont du prochain Copil afin de remontrer l'avancement sur les niveaux de sécurité attendus et actuels.

Ainsi à la date du 27 juillet 2017, aucun reproche n'est plus formulé à l'encontre d'Econocom par DCL, les deux parties s'accordant pour décaler le calendrier et s'organiser pour travailler de concert.

En conséquence, la mise en demeure adressée le lendemain, 28 juillet 2017, apparaît en contradiction avec l'évolution des chantiers et des relations entre les parties.

Dans tous les cas, il n'est pas rapporté à cette date un manquement grave imputable à Econocom sur le non-respect du calendrier et l'impossible mise en production comme visés à la mise en demeure. Partant, la résiliation du 2 octobre 2017 est intervenue à tort.

Par ailleurs, en cherchant à retenir contre Econocom un manquement à son obligation de résultat sur le pilotage du projet, sur son obligation générale de conseil et sur son obligation de contrôle de l'état d'avancement des prestations, alors que ces points ne sont pas visés à la mise en demeure, DCL se place dans l'hypothèse d'une résiliation pour faute lourde prévue à l'article 25.3 a) V, avec effet immédiat (sans respect d'un délai de 60 jours après la mise en demeure). Or le comité de pilotage du 27 juillet 2017 ne rapporte aucun manquement d'Econocom sur ces points, pas plus que dans les documents postérieurs. Les retards sur le calendrier initial ont par ailleurs toujours été annoncés par Econocom qui dès le comité stratégique du 21 avril 2017 a mis en 'uvre un plan d'action pour y remédier. Quant aux spécifications techniques du projet, il ressort des échanges entre les parties (mails, comité de pilotage) que les difficultés techniques rencontrées se sont fait jour au fur et à mesure de l'avancement du projet, Econocom les ayant rapportés à chaque réunion et ayant ainsi rempli son devoir de conseil, d'alerte et de mise en garde ; DCL ne peut avancer son absence de compétence en matière informatique alors que l'ensemble des documents précités renvoient à la Direction des Services Informatiques de Dexia et qu'il ressort des échanges entre les parties (mails, comités de pilotages) la parfaite compréhension par DCL des spécificités techniques du projet et l'adaptation et l'actualisation de ses demandes tout au long du processus (pièce 97 Econocom).

Les demandes de DCL relatives à la faute lourde d'Econocom ne peuvent donc pas plus être retenues.

Le jugement doit donc être confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a :

- rejeté la demande de communication de pièces formulée par Econocom Infogerance Systemes, non nécessaire à la résolution du litige,

- dit que la résiliation décidée par DCL le 2 octobre 2017 du contrat de prestation de services du 15 juillet 2016 était fautive,

- débouté DCL de l'ensemble de ses demandes indemnitaires subséquentes,

- et en conséquence condamné DCL à verser à Econocom Infogerance Systemes :

o 71.111,40€ et 124.695,12€ au titre des factures impayées, avec intérêts à compter du 28 décembre 2017 au taux d'intérêt appliqué par la BCE majoré de 10 points de pourcentage, et avec anatocisme ;

o 300.000 € à titre d'indemnité de résiliation, le tribunal ayant justement apprécié que la résiliation fautive devait en effet être requalifiée en résiliation de convenance, pour laquelle le contrat prévoit en son article 25.1 une indemnité de 30 % du montant qui aurait dû être perçu par le fournisseur entre la date de résiliation effective et le terme initialement prévu du contrat, ce montant étant calculé sur la base du prix facturé au titre des 6 derniers mois d'exécution du contrat, soit 30 % du montant restant à facturer au titre de la phase 1 de transfert (1.000.258€), l'affirmation par Econocom de ce que « le projet était en état de basculer dans la phase 2 » n'étant étayée par aucune preuve ; c'est donc à juste titre que le tribunal a limité l'indemnité de résiliation à la phase 1.

C'est sans statuer au-delà de ce qui lui était demandé que le tribunal a procédé à cette requalification, l'article 12 alinéa 2 du code de procédure civile prescrivant que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

o 15.000 € au titre des frais irrépétibles en application de l'article 700 du code de procédure civile, DCL étant déboutée de ses demandes et ainsi condamnée aux dépens et partant aux frais irrépétibles.

S'agissant des demandes indemnitaires complémentaires formées par Econocom, c'est à juste titre que le tribunal a relevé que les prestations complémentaires devaient faire l'objet d'un devis, voire d'un avenant en application de l'article 5 du contrat, rejetant ainsi la demande de condamnation de DCL au titre de la facture n°1751707 à hauteur de 1.711.785, 63 € TTC alors que celle-ci détaille seulement 8 prestations, sans date, avec un libellé lapidaire, portant chacune sur plusieurs milliers d'€ sans plus de précision (pièce 68 Econocom). Ces dépassements ne sont pas plus rapportés par le rapport d'expertise privé produit en pièce 269 par Econocom présentant un tableau reprenant ces chiffres (page 14) sans référence aux commandes correspondantes de Dexia ou à l'envoi de devis par Econocom correspondant à ces prestations. Ils ne sont pas rapportés non plus par le rapport de demande économique (pièce 70 Econocom) qui vise « l'incapacité de Dexia à respecter ses engagements contractuels » dont son devoir de collaboration, l'expression de ses besoins, son obligation de recettage et la rédaction des spécifications détaillées : ces manquements ne ressortent pas des comités de pilotages, et les demandes de modifications formées par DCL au cours de la phase 1 n'apparaissent pas excéder l'adaptation prévue contractuellement. Dès lors, la réalité de l'accord de DCL sur les prestations ainsi visées n'est pas rapportée, la facture n'est pas due, pas plus que les indemnités de retard demandées sur cette facture à hauteur de 733.528,25€.

S'agissant des autres demandes indemnitaires d'Econocom à hauteur de 4.788.817 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait de la rupture, les seuls tableurs évoquant des factures pour les montants de 1.048.525,79€, 859.000€, 105.911,72€, 315.117,46€, 343.492,48€ et 19.747,62€, sur une page, sans plus de précision qu'un « n° de pièce interne » et renvoyant à des factures produites en pièces 132 et suivantes, n'entrent pas dans le cadre de la réparation d'un préjudice subi du fait de la résiliation, dès lors que le coût de l'intervention des sociétés prestataires sollicitées par Econocom devait entrer dans l'économie générale du contrat et partant être couvert :

- soit par des factures adressées à DCL en vertu des prestations commandées, Econocom ne pouvant notamment pas valablement faire valoir qu'elle a « volontairement réalisé les prestations objets de [ces factures] en reportant l'émission des devis correspondants et leur facturation dans l'objectif de favoriser l'avancement du projet » (rapport [L] [S] n°2, pièce Econocom 274 page 14 n°24), ne rapportant ainsi pas la preuve de l'accord de DCL sur ces prestations , ni sur le taux horaire de 850€ réclamé, l'annexe VI.1 relative aux conditions financières prévoyant pour les prestations complémentaires un taux horaire compris entre 290 et 700€ selon le profil de l'intervenant (article 2 « prix par profils ») ;

- soit par l'indemnité de résiliation pour convenance, déjà retenue ,s'agissant du manque à gagner sur l'exécution du contrat jusqu'à son terme et sur le renouvellement du contrat pour l'exploitation courante. Sur ce dernier point, la cour relève qu'Econocom reprend pour justifier cette demande, les manquements qu'elle reproche à DCL, dont il a été vu qu'ils n'étaient pas établis.

Le jugement doit donc être confirmé dans l'ensemble de ses dispositions par substitution de motifs, y compris en ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Statuant de ces chefs en cause d'appel, l'appelante comme l'intimée succombant pour partie dans leurs demandes en appel, il y a lieu de laisser à chacune la charge de leurs propres dépens et frais irrépétibles en application des articles 696 et 700 du code de procédure civile et partant de débouter la sas Econocom Infogérance Systèmes de sa demande subséquente de distraction des dépens.

PAR CES MOTIFS

,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions par substitution de motifs,

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens,

Déboute la sas Econocom Infogérance Systèmes de sa demande de distraction des dépens,

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile,

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT