Chronologie de l'affaire
Cour d'appel de Rennes 13 octobre 2009
Cour de cassation 12 octobre 2011

Cour de cassation, Chambre sociale, 12 octobre 2011, 09-72014

Mots clés jour · salarié · récupération · protocole · rapport · hebdomadaire · repos · interprétation · société · terme · lundi · procédure civile · vendredi · dimanche · avantages

Synthèse

Juridiction : Cour de cassation
Numéro affaire : 09-72014
Dispositif : Rejet
Décision précédente : Cour d'appel de Rennes, 13 octobre 2009
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Ortscheidt

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Rennes 13 octobre 2009
Cour de cassation 12 octobre 2011

Texte

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 13 octobre 2009), que M. X..., salarié de la société Sabena Technics DNR, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande, en application d'un accord du 28 avril 1997, à titre de rappel de salaire ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut faire prévaloir son interprétation de l'accord collectif au regard de la commune intention des parties signataires sur la lettre de cet accord ; qu'en décidant que le terme "semaine" devait être interprété, au regard des dispositions des articles 1156, 1157, 1158 et 1162 du code civil, comme signifiant seulement "semaine habituellement travaillée, soit du lundi au vendredi", après avoir pourtant constaté que l'article 1 du "protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés", en date du 28 avril 1997, prévoyait que "le régime applicable aux jours fériés sera le suivant : … b) le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire en semaine le jour férié : le salarié récupère le jour férié", ce dont il résultait que le texte de l'accord ne procédant à aucune distinction entre les jours de la semaine, le salarié en repos hebdomadaire en semaine, un jour férié, pouvait récupérer ce jour férié, la cour d'appel a violé l'article 1.b du protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés du 28 avril 1997 ;

2°/ qu'en toute hypothèse, dans ses conclusions d'appel, reprises oralement, M. X... faisait expressément valoir que de toute façon, l'accord du 28 avril 1997 avait créé un nouvel avantage si l'on se référait au précédent accord du 18 octobre 1983 ; qu'en affirmant que "c'est à tort que le salarié soutient que l'accord de 1997 octroie nécessairement les mêmes avantages aux salariés que ceux qui leur étaient précédemment accordés par le protocole de 1983", le salarié faisant valoir, au contraire, que l'accord du 28 avril 1997 créait un nouvel avantage par rapport à celui du 18 octobre 1983, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et prévis des conclusions d'appel précitées, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en toute hypothèse, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant expressément invitée, si les dispositions de l'article 1.b du protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés du 28 avril 1997 ne devaient pas être interprétées au regard du précédent accord, signé le 18 octobre 1983, qui précisait que "les seuls jours fériés à prendre en considération sont ceux intervenant du lundi au vendredi", puisque du rapprochement des deux, il en résultait que l'intention des parties, au moment de la conclusion du nouvel accord en 1997, avait été de prévoir la récupération des jours fériés même lorsque le salarié était en récupération hebdomadaire, un samedi ou dimanche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1.b du protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés du 28 avril 1997 et de l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que l'article 1-b de l'accord du 28 avril 1997 prévoyant le régime applicable au jour férié dispose que "le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire en semaine le jour férié : le salarié récupère le jour férié" ; qu'après avoir relevé que le précédent accord, renégocié, avait fait l'objet de concessions réciproques, la cour d'appel, sans modifier l'objet du litige, a fait l'exacte application de cet article en retenant que la référence à la "semaine" s'entendait de la semaine habituellement travaillée, soit du lundi au vendredi ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

:

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la société Sabena Technics Dnr à lui payer un rappel de salaire correspondant aux jours fériés non travaillés ayant coïncidé avec un samedi ou un dimanche, et qui n'ont pas donné lieu à récupération ;

AUX MOTIFS QUE suivant « protocole d'accord sur lé rémunération et la récupération des jours fériés » en date du 28 avril 1997, remplçant et annulant un précédent accord du 18 octobre 19983 ayant le même objet, la société LAB (aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Sabena Technics Dnr) et les organisations syndicales représentatives du personnel convenaient, pour une durée indéterminée, ce qui suit : « Article 1 : Modalités d'application. Selon les cas, le régime applicable au jour férié sera le suivant : a) Le salarié travaille le jour férié : Les heures travaillées sont majorées de 100 % b) Le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire en semaine le jour férié : Le salarié récupère le jour férié. c) Le salarié est programmé en journée courte le jour férié : Le salarié récupère les heures correspondant à la demi-journée non travaillée. d) Le salarié est en déplacement à l'étranger : Les heures travaillées sont majorées de 50 % et le jour férié sera récupéré et chômé à une autre date » ; (…) ; qu'en présence d'un article 1-b pour le moins maladroitement rédigé (« le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire en semaine le jour férié : le salarié récupère le jours férié »), il appartient au juge de l'interpréter à la lumière des règles fixées par le code civil (livre III, titre III, Chapitre III, section V : « De l'interprétation des conventions »), et notamment de l'article 1156 du code civil selon lequel On doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes, de l'article 1157 selon lequel lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun, de l'article 1158 selon lequel les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat et de l'article 1162 selon lequel dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation ; qu'à la lumière de ces principes que la « semaine » doit s'entendre seulement de la semaine habituellement travaillée, soit du lundi au vendredi, puisque : si les parties contractantes avaient voulu convenir d'une récupération de tous les jours fériés, y compris de ceux coïncidant avec des jours habituellement non travaillés (soit les samedi et dimanche), elles auraient rédigé la clause comme suit : « Le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire le jour férié : le salarié récupère le jour férié » et ce sans faire référence à la notion de « semaine » ; un jour férié est nécessairement l'un des sept jours de la semaine (au sens commun du terme), ce dont il résulte qu'en l'espèce, la référence conventionnelle à la « semaine » ne peut avoir d'autre objet que de distinguer les cinq jours habituels de travail (du lundi au vendredi) des deux derniers (le samedi et le dimanche) habituellement non travaillés ; qu'il doit être surabondamment observé à cet égard qu'en signant le protocole de 1997, la Sas Sabena Technics DNR a consenti aux salariés divers avantages qui ne sont pas imposés par le Code du travail (notamment le paiement d'une majoration pour les heures travaillées un jour férié, alors que ceux-ci, à l'exception du 1er mai et sauf accord collectif, ne sont pas obligatoirement chômés) ; qu'il y a donc lieu d'interpréter strictement les obligations supplémentaires que la Sas Sabena Technics DNR est susceptible d'avoir contractées par rapport au droit commun selon lequel, en l'absence de dispositions conventionnelles plus favorables pour les salariés, le jour férié coïncidant avec un jour de repos hebdomadaire ne donne pas lieu au paiement d'une indemnité particulière (cf. en ce sens un arrêt de la Cour de cassation du 2 juillet 2002) ; que par ailleurs, c'est à tort que le salarié soutient que l'accord de 1997 octroie nécessairement les mêmes avantages aux salariés que ceux qui leurs étaient précédemment accordés par le protocole de 1983 alors qu'une renégociation de cet accord avait ainsi eu lieu avec des concessions réciproques, les salariés ne pouvant pas - en toute hypothèse - se prévaloir d'un droit acquis s'agissant du régime des jours fériés ; que c'est également vainement que l'appelant sous-entend que la cour d'appel aurait, par son arrêt du 20 octobre 2005, validé le protocole de 1997 et l'interprétation qu'ils en font aujourd'hui ; qu'en effet, le litige alors soumis à l'appréciation du juge concernait, non pas l'interprétation de la clause 1-b, mais seulement le champ d'application de ce protocole, c'est-à-dire la catégorie de personnels auxquels il devait bénéficier ;

ET AUX MOTIFS NON CONTRAIRES QU'il sera observé, en exergue, que Monsieur Jean X... se réfère vainement pour la solution qui sera donnée au présent litige, aux décisions rendues par le Tribunal de Grande Instance de SAINT MALO, puis par la Cour d'Appel de RENNES, puisque celles-ci n'ont fait que trancher la question de savoir si le protocole du 28 avril 1997 s'applique à tous les salariés, et non pas, comme le soutient la Société SABENA TECHNICS DNR, au seul personnel de maintenance et de logistique à horaire programmé ; que le fait que la Cour d'Appel ait confirmé les premiers juges qui ont répondu par l'affirmative ne peut en aucun cas asseoir les prétentions actuelles de Monsieur Jean X..., dont il n'a jamais été contesté qu'il fasse partie du personnel de maintenance, et que les dispositions dudit protocole lui soient applicables ; qu'en réalité, abstraction faite des rappels aux procédures antérieures longuement développées par les parties, et qu'il est inutile d'examiner, la seule question posée au Conseil est celle de savoir comment interpréter les termes "en semaine" de l'article 1-b du protocole d'accord du 28 avril 1997, selon lequel, lorsque "le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire en semaine le jour férié, le salarié récupère le jour férié" ; qu'à l'évidence, et par application de l'article 1158 du Code civil, selon lequel « les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à l'économie du contrat », le terme de semaine désigne, dans le cas d'espèce, l'ensemble des jours ordinaires, des jours ouvrés, c'est-à-dire du lundi au vendredi, et non pas le cycle de sept jours qui va du lundi au dimanche ; qu'en effet, ainsi que le relève avec bon sens la Société SABENA TECHNICS, si l'interprétation de Monsieur Jean X... devait être retenue, la formule de l'article 1-b du protocole serait vidée de tout sens, puisqu'il est impossible qu'un jour férié puisse tomber autrement qu'en semaine" ; qu'en insérant expressément les termes "en semaine" dans le cas de figure visé au 1-b, les rédacteurs du protocole ont voulu exprimer que le salarié récupère le jour férié lorsqu'il est en repos hebdomadaire ou en récupération l'un des jours situés avant la fin de la semaine ; que si l'intention des parties contractantes avait, au contraire, été d'octroyer aux salariés une journée de récupération pour chaque jour férié, quel que soit le jour de la semaine où tombe le jour de repos, y compris le samedi et le dimanche, l'article 1-b aurait été rédigé comme suit : "Le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire le jour férié: le salarié récupère le jour férié" ; que dans ce dernier cas, seuls les salariés du personnel de maintenance et de logistique à horaires programmés seraient autorisés à récupérer le jour férié intervenu un samedi ou un dimanche pour la raison qu'ils se trouveraient en repos hebdomadaire ce jour-là, et seraient donc avantagés par rapport au personnel administratif qui ne peut jamais récupérer un jour férié qui tombe un samedi ou un dimanche, ce qui serait discriminatoire ; qu'enfin, l'interprétation selon laquelle les termes de "en semaine" désigne les jours ouvrés de la semaine, par opposition au week-end, est encore confortée par l'article 3-2-2 de L'"ACCORD LAB RELATIF A L'AMENAGEMENT ET A LA REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL" (page4) signé entre l'employeur et les syndicats le 30 décembre 1999, lequel article stipule : "la durée du travail du personnel classifié en grille administrative s'apprécie normalement sur la semaine, du lundi au vendredi, sauf horaires particuliers" ; qu'il serait en effet incohérent que le même terme puisse recourir deux acceptations différentes dans des accords signés entre les mêmes parties ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut faire prévaloir son interprétation de l'accord collectif au regard de la commune intention des parties signataires sur la lettre de cet accord ; qu'en décidant que le terme « semaine » devait être interprété, au regard des dispositions des articles 1156, 1157, 1158 et 1162 du code civil, comme signifiant seulement « semaine habituellement travaillée, soit du lundi au vendredi », après avoir pourtant constaté que l'article 1 du « protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés », en date du 28 avril 1997, prévoyait que « le régime applicable aux jours fériés sera le suivant : … b) le salarié est en récupération ou repos hebdomadaire en semaine le jour férié : le salarié récupère le jour férié », ce dont il résultait que le texte de l'accord ne procédant à aucune distinction entre les jours de la semaine, le salarié en repos hebdomadaire en semaine, un jour férié, pouvait récupérer ce jour férié, la cour d'appel a violé l'article 1.b du protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés du 28 avril 1997 ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE dans ses conclusions d'appel, reprises oralement, M. X... faisait expressément valoir que de toute façon, l'accord du 28 avril 1997 avait créé un nouvel avantage par rapport au précédent accord du 18 octobre 1983 (concl., p. 9) ; qu'en affirmant que « c'est à tort que le salarié soutient que l'accord de 1997 octroie nécessairement les mêmes avantages aux salariés que ceux qui leur étaient précédemment accordés par le protocole de 1983 », le salarié faisant valoir, au contraire, que l'accord du 28 avril 1997 créait un nouvel avantage par rapport à celui du 18 octobre 1983, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions d'appel précitées, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant expressément invitée, si les dispositions de l'article 1.b du protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés du 28 avril 1997 ne devaient pas être interprétées au regard du précédent accord, signé le 18 octobre 1983, qui précisait que « les seuls jours fériés à prendre en considération sont ceux intervenant du lundi au vendredi », puisque du rapprochement des deux, il en résultait que l'intention des parties, au moment de la conclusion du nouvel accord en 1997, avait été de prévoir la récupération des jours fériés même lorsque le salarié était en récupération hebdomadaire, un samedi ou dimanche, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1.b du protocole d'accord sur la rémunération et la récupération des jours fériés du 28 avril 1997 et de l'article 1134 du code civil.