Vu la requête
, enregistrée à la Cour le 18 avril 2011, présentée pour Mme Saldijana , épouse , domiciliée 203, avenue du Général de Gaulle à Vonnas (01540) ;
Mme demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1007716, du 15 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Ain du 26 novembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de réexaminer sa situation administrative ;
Elle soutient qu'elle est entrée en France en 2010, enceinte de son premier enfant, pour y rejoindre son époux, ressortissant bosnien en situation régulière sur le territoire français, où il vit avec sa famille depuis l'âge de quinze ans ; que la décision du préfet de l'Ain, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale sur le fondement des dispositions du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif qu'elle est admissible à la procédure de regroupement familial, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle a pour conséquence de séparer temporairement la cellule familiale et d'éloigner l'enfant de l'un de ses parents ; qu'elle méconnaît également les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que son état de santé ne lui permet pas de voyager et que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est elle-même entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que cette mesure d'éloignement méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 juin 2011, présenté par le préfet de l'Ain, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que le mariage de Mme est récent, qu'elle ne justifie ni d'une insertion sociale particulière, ni d'une vie privée et familiale ancienne, intense et stable sur le territoire français, qu'elle dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine et n'établit pas le caractère conflictuel allégué des relations qu'elle entretiendrait avec ses parents ; qu'enfin, elle peut prétendre au bénéfice du regroupement familial et peut être accueillie par le grand-père de son époux en Bosnie-Herzégovine le temps de l'instruction de cette demande ; que, dès lors, il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'en outre, compte tenu de la possibilité de mise en oeuvre d'une procédure de regroupement familial, sa décision n'a pas pour effet de priver l'enfant du couple d'un de ses parents et n'est donc pas contraire aux stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Vu la décision du 23 août 2011, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
Vu le code
de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2011 :
- le rapport de M. Le Gars, président,
- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;
Sur la
légalité de la décision de refus de délivrance de titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, que Mme , de nationalité bosnienne, est entrée en France le 22 août 2010, selon ses déclarations, à l'âge de dix-neuf ans, pour y rejoindre son époux, compatriote titulaire d'une carte de séjour temporaire salarié d'un an, avec lequel elle s'est mariée dans son pays d'origine le 6 août 2009 ; que, le 26 août 2010, Mme a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui lui a été refusé par le préfet de l'Ain, par décision du 26 novembre 2010, motif pris de ce qu'elle appartenait à une catégorie d'étrangers susceptibles de bénéficier d'une mesure de regroupement familial ; qu'elle fait valoir que son époux vit en France avec sa famille depuis l'âge de quinze ans, qu'elle a accouché d'un enfant le lendemain de son arrivée en France et que si elle devait retourner en Bosnie-Herzégovine le temps de l'instruction d'une demande de regroupement familial, son enfant serait séparé de son père et elle devrait faire face à l'hostilité de sa famille qui désapprouve son union et voulait la contraindre à avorter ou à abandonner son enfant ; que, toutefois, Mme , qui a rejoint son époux en situation régulière sur le territoire français sans qu'il soit fait application de la réglementation sur le regroupement familial dans le champ d'application de laquelle elle entrait, n'était présente en France que depuis trois mois à la date de la décision contestée et n'établit, par la production d'une attestation du grand-père de son conjoint, dépourvue de caractère probant, ni la réalité de l'opposition de sa famille à son union, ni qu'elle se retrouverait isolée avec son enfant en Bosnie-Herzégovine, où elle a vécu sa grossesse, éloignée de son époux ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de Mme en France, et alors, au demeurant, que la décision lui refusant un titre de séjour n'a ni pour objet, ni pour effet de la séparer de son enfant ou de son époux, le préfet de l'Ain n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant que Mme fait valoir que la décision en litige priverait momentanément son enfant de la présence de son père ; que, toutefois, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'a, par elle-même, ni pour effet, ni pour objet de séparer l'enfant de l'un ou l'autre de ses parents ; que, dans les circonstances de l'espèce, en l'absence de circonstance empêchant M. de rendre visite à son épouse et son enfant durant la procédure de regroupement familial qu'il peut solliciter à leur profit, les stipulations sus-rappelées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, n'ont pas été méconnues ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant, en premier lieu, qu'en se bornant à produire un certificat médical daté du 28 mars 2011, attestant qu'alors enceinte de quatre mois et demi, elle ne pouvait voyager en avion, Mme n'établit pas qu'à la date de la mesure d'éloignement prise à son encontre, le 26 novembre 2010, son état de santé l'empêchait de repartir en Bosnie-Herzégovine ; que, pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de titre de séjour et tenant aux conditions de son entrée sur le territoire français, à sa durée de séjour en France et aux attaches dont elle dispose en Bosnie-Herzégovine, l'obligation faite à Mme de quitter le territoire français n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Considérant, en second lieu, qu'eu égard à ce qui précède et à la possibilité, pour l'époux de la requérante, de rendre visite à cette dernière et à leur enfant en Bosnie-Herzégovine le temps de l'instruction d'une demande de regroupement familial, l'obligation de quitter le territoire français qui a été faite à Mme n'est pas contraire aux stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Saldijana , épouse , et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 19 octobre 2011 à laquelle siégeaient :
M. Le Gars, président de la Cour,
M. Montsec, président assesseur,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 novembre 2011,
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N° 11LY00973