Vu la procédure suivante
:
Par une requête enregistrée le 7 janvier 2020, la SAS Préfabéton, représentée par Me Ghedir, avocate, doit être regardée comme demandant au tribunal :
1°) d'annuler la décision du 8 novembre 2019 par laquelle le directeur régional des finances publiques de La Réunion a refusé de lui accorder le remboursement d'un crédit d'impôt d'un montant total de 15 488 euros au titre de dépenses de recherche se rattachant à l'exercice 2018 ;
2°) d'ordonner avant-dire droit une expertise du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15 488 euros augmentée des intérêts moratoires prévus à l'article
L. 208 du livre des procédures fiscales ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative
Elle soutient que son projet de mise en œuvre d'un nouveau procédé de fabrication de produits à base de béton auto-plaçant est une activité éligible au crédit d'impôt recherche prévu à l'article 244 quater B du code général des impôts.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 juin 2020, le directeur régional des finances publiques de La Réunion conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 20 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 25 octobre 2022 :
- le rapport de M. Banvillet, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Baizet, rapporteure publique,
- les parties n'étant ni présentes ni représentées.
Considérant ce qui suit
:
1. La SAS Préfabéton, qui exerce une activité de fabrication d'éléments en béton pour la construction, a présenté une demande de remboursement de son crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elle a engagées au cours de l'exercice 2018 pour un montant de 15 488 euros pour la mise en œuvre d'un nouveau procédé de fabrication de produits à base de béton auto-plaçant. Par décision du 8 novembre 2019, le directeur régional des finances publiques de La Réunion a rejeté sa réclamation. Par la présente requête, La SAS Préfabéton demande au tribunal de lui accorder la restitution de ce crédit d'impôt.
Sur le terrain de la loi fiscale :
2. Aux termes du I de l'article 244 quater B du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel () peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année () II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes. () ; b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. () ; c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; () d bis) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à des organismes de recherche privés agréés par le ministre chargé de la recherche, ou à des experts scientifiques ou techniques agréés dans les mêmes conditions. () j) Les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d'opérations de recherche, dans la limite de 60 000 € par an. () ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; / b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. / Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. ".
3. Ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques.
4. Il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de recherche apportent une contribution théorique ou expérimentale à la résolution de problèmes techniques, ou bien présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts.
5. Il résulte de l'instruction que les travaux réalisés par la SAS Préfabéton dans le cadre de la recherche d'un procédé de fabrication de produits à base de béton auto-plaçant n'ont pas été rendus nécessaires par l'existence de verrous techniques ou technologiques mais répondent, pour l'essentiel, à des préoccupations économiques et en particulier à la volonté de l'intéressée de répondre à la demande de produits en béton léger exprimée sur le marché réunionnais et s'inscrivent, de manière plus générale, dans le cadre d'une réflexion sur le remplacement d'un outil de production devenu obsolète et la redéfinition de son site de production. Ces travaux, réalisés de surcroît selon des méthodes et protocoles scientifiques éprouvés, n'ont en tant que tels, été effectués en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle, au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts. Il suit de là qu'ils n'ont pas le caractère d'opérations de développement expérimental et ne peuvent bénéficier du crédit d'impôt prévu par l'article 244 quater B du code général des impôts.
6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de solliciter l'expertise du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, que la requête de la SAS Préfabéton doit être rejetée y compris les conclusions qu'elle présente sur les fondements de l'article
L. 208 du livre des procédures fiscales et de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Préfabéton est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la SAS Préfabéton et au directeur régional des finances publiques de La Réunion.
Délibéré après l'audience du 25 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Khater, présidente,
M. Biget, premier conseiller,
M. Banvillet, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe du tribunal le 23 novembre 2022.
Le rapporteur,
M. A
La présidente,
A. KHATER
La greffière,
J. BELENFANT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
P/la greffière en chef
La greffière,
J. BELENFANT
No 2000011
jb