Cour de cassation, Chambre sociale, 15 janvier 2013, 11-23.628

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2013-01-15
Cour d'appel de Bordeaux
2011-06-16

Texte intégral

Donne acte à la Fédération hospitalière de France de son intervention volontaire ;

Sur le moyen

unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 16 juin 2011), statuant en référé, que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André a, par délibération du 16 avril 2010, décidé de recourir à une expertise en raison d'un projet comportant "le passage de nuit des infirmiers de jour dans l'ensemble des services de l'hôpital Saint-André" ; que le CHU de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André a contesté cette décision devant le tribunal de grande instance ;

Attendu que le CHU de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André fait grief à

l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen : 1°/ qu'est un marché public le contrat à titre onéreux conclu entre un opérateur économique et un pouvoir adjudicateur -tel un établissement public hospitalier- ayant pour objet une prestation de service ; que le recours à un expert agréé à l'initiative du CHSCT d'un établissement public hospitalier en application de l'article L. 4614-12 du code du travail emporte conclusion d'un marché public, nonobstant la personnalité civile reconnue au CHSCT, dès lors que c'est l'hôpital qui, procurant au CHSCT l'essentiel de ses ressources, finance la mesure d'expertise ; qu'en jugeant le contraire, pour débouter le groupe hospitalier Saint-André de sa demande d'annulation de la délibération du CHSCT du 16 avril 2010, pour ne pas avoir soumis le choix de l'expertise aux règles de publicité et de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics, la cour d'appel a violé l'article 1er du code des marchés publics ; 2°/ subsidiairement, que sont soumis aux principes généraux de la commande publique les marchés passés avec un prestataire de service pour la réalisation de prestations de services, par les organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique et qui ont été créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à l'ordonnance 2005-649 du 6 juin 2005 ; que le CHSCT d'un établissement public hospitalier ayant pour mission la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement, est un organisme de droit privé doté de la personnalité juridique, créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial qui dépend financièrement de l'établissement public hospitalier au sein duquel il est constitué, lequel rémunère ses membres et finance ses activités ; que l'expertise diligentée à sa demande en application de l'article L. 4614-12 du code du travail constitue une prestation de service répondant à ses besoins de fonctionnement ; qu'en jugeant que le recours à un expert agréé dans les conditions prévues par l'article L. 4614-12 du code du travail ne constitue pas un marché de services au sens des dispositions de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, pour refuser d'annuler la délibération du CHSCT du groupe hospitalier Saint-André du 16 avril 2010 ayant désigné le cabinet Technologia afin de procéder à une expertise sans que soient respectées les dispositions de cette ordonnance, la cour d'appel a violé l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 "relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics" ;

Mais attendu

que la décision de recourir à un expert, prise par le CHSCT d'un établissement public en application de l'article L. 4614-12 du code du travail, n'est pas au nombre des marchés de service énumérés limitativement par l'article 8 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 portant application de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ; Qu'il en résulte que la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si les modalités de désignation de l'expert par le CHSCT répondaient à des règles particulières de la commande publique, a déduit à bon droit que le recours à un expert agréé par le CHSCT ne constituait pas un marché de services au sens des dispositions précitées ; D'où il suit le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne le Centre hospitalier universitaire de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Centre hospitalier universitaire de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André à payer au CHSCT du Centre hospitalier universitaire de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour le Centre hospitalier universitaire de Bordeaux - Groupe hospitalier Saint-André et la Fédération hospitalière de France. IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR, confirmant l'ordonnance entreprise, débouté le CHU de Bordeaux - groupe hospitalier SAINT ANDRE de sa demande d'annulation de la délibération du 16 avril 2010 du CHSCT du CHU de Bordeaux groupe hospitalier SAINT ANDRE ayant ordonné une mesure d'expertise et d'AVOIR condamné le CHU de Bordeaux groupe hospitalier SAINT ANDRE à verser au CHSCT 2.392 euros TTC au titre des honoraires engagés en cause d'appel AUX MOTIFS PROPRES QUE « il ressort des faits constants de la cause tels qu'ils sont établis par les écritures des parties et les documents versés aux débats que, en raison d'une nouvelle organisation du personnel de nuit, faisant appel pour partie au volontariat des personnels infirmiers de jour et, à défaut, à un tirage au sort organisé dans le cadre des services, il était décidé, lors d'une réunion extraordinaire du CHSCT de l'établissement, de recourir à une expertise "pour le passage de nuit des infirmiers de jour dans l'ensemble des services de l'hôpital Saint André", Attendu que le CHU de Bordeaux-Saint André fait principalement valoir, à l'appui de son appel, que la décision prise le 16 avril 2010 de recourir à une expertise, qui doit rester exceptionnelle, doit être annulée dès lors + qu'elle est injustifiée dés lors que, contrairement à ce que le CHSCT Groupe Saint André fait plaider, + l'existence d'un risque grave et réel n'est pas établie, - que ce soit au titre des démissions, qui ne représentent que 1,47 % de l'effectif total des agents, ou au titre des remplacements, qui sont assurés par l'emploi en contrat à durée déterminée de personnels diplômés et formés, ou au titre des arrêts pour maladie, des congés de maternité et des congés pour accidents du travail, qui sont couverts par le personnel disponible ou par les "pools de remplacement", ou au titre des heures supplémentaires qui font l'objet soit d'une compensation horaire, soit d'une indemnisation, ou au titre, enfin des témoignages des rares infirmières concernées, - étant rappelé, par ailleurs, que le travail de nuit est une question qui a été abordée par la Commission locale relative à l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail en 2007, qui a fait l'objet d'une étude par le Service de Médecine du travail et des pathologies professionnelles, et qui est mentionnée dans son projet social 20 11-20 15 au titre des risques psycho-sociaux, + ni non plus l'existence d'un projet important modifiant les conditions d'hygiène et de sécurité ou les conditions de travail dès lors - que, la continuité du service imposant un fonctionnement de manière ininterrompue, le service de nuit a toujours existé, - que, dans l'attente de recrutements, une alternance jour/nuit a dû être envisagée de manière transitoire, sur la base du volontariat ou, à défaut, par tirage au sort ou par tour alphabétique de manière limitée, seules 58 infirmières n'ayant pas été volontaires sur un total de 450 personnes en moyenne, - et que le recours au personnel de jour a diminué à compter du mois d'août 2010 en raison de recrutements, + et que, en toute hypothèse, elle a été prise en violation des règles auxquelles il est soumis en matière de marché public, Attendu que le CHSCT Groupe Saint André, Madame Annie X..., en qualité, et Monsieur Christophe Y..., en qualité, font plaider pour leur part - qu'il existe bien, au sein du CHU de Bordeaux, un risque grave pour la santé du personnel soignant, dont les infirmières, résultant d'un sous-effectif chronique de tout le personnel, et surtout du personnel soignant, d'un absentéisme très important, d'une augmentation des accidents du travail, des mouvements de main d'oeuvre avec des départs très importants notamment de l'effectif du personnel soignant et de mouvements de main d'oeuvre concernant du personnel jeune, inexpérimenté et non formé, - qu'une mesure d'expertise s'impose au regard de la nouvelle organisation mise en place par la Direction, sans évaluation actualisée des risques relatifs au travail de nuit, pour pourvoir à un manque d'effectifs pour les soins infirmiers de nuit qui concerne 150 infirmiers de jour qui peuvent, par tirage au sort ou par ordre alphabétique, se voir imposer le travail de nuit, avec des incidences sur les services de jour déjà eux-mêmes en sous-effectifs, - et que, enfin, la réglementation des marchés publics n'a pas à s'appliquer en la cause, l'expertise ayant été décidée par le CHSCT et le paiement des honoraires de l'expert s'imposant à l'employeur pour lequel il s'agit d'une dépense légalement obligatoire, Attendu que la Cour se référera par ailleurs pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties aux dispositions de la décision dont appel en ce qu'elles ne sont pas contraires à celles du présent arrêt ainsi qu'aux conclusions visées ci-dessus en référence et déposées les 18 et 26 avril 2011 au dossier de la procédure, Attendu que selon l'article L. 4614-12 du code du travail, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé 1° Lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnelle est constaté dans l'établissement, 2° En cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de-travail, prévu à l'article L. 4612-8, Attendu qu'il convient tout d'abord de relever, comme l'a justement relevé le premier juge, que l'alternance de travail jour et nuit présente des risques professionnels pour les salariés concernés, situation rappelée tant par l'inspecteur du travail dans un courrier du 18 mars 2010 adressé à la directrice du groupe hospitalier Saint André que par le document unique pour l'évaluation des risques professionnels au CHU de Bordeaux et par un document établi par le médecin du travail du CHU, Attendu, ensuite, que l'organisation du travail de nuit, imposé, selon les consignes données par la direction des ressources humaines du groupe hospitalier Saint André, pour pallier le manque d'infirmiers de nuit dans l'hypothèse d'un manque de volontaires est de nature à aggraver ces risques en raison tant du mode de désignation des personnels non volontaires que des perturbations physiologiques et sociales et/ou familiales occasionnées par son caractère occasionnel, Attendu que la situation de ces personnels est illustrée de manière claire par les attestations de plusieurs infirmières qui indiquent avoir subi, à l'occasion de ces remplacements du personnel de nuit, outre des perturbations dans leur vie familiale et sociale, des troubles physiologique et notamment du sommeil induisant des épisodes de fatigue lors de leur retour à leur poste d'infirmière de jour, Attendu que ces éléments établissent que la santé de ces personnels est soumise à un risque grave en raison de leurs conditions de travail, Attendu par ailleurs qu'il apparaît que ces mesures organisationnelles, décrites par la direction du CHU de Bordeaux - Saint André comme limitées et transitoires, devaient, selon ce que le premier juge a pu constater, se poursuivre au mois de septembre 2010 sans qu'aucun engagement formel n'ait été pris en ce qui concerne leur terme, Attendu qu'il résulte de tout ceci que la décision du CHSCT de recourir, pour mener à bien sa mission relative à la prévention des risques professionnels, à l'assistance d'un expert agréé en application des dispositions des légales rappelées plus haut, est ainsi justifiée, Attendu par ailleurs, qu'il doit être constaté que le recours à un expert agréé dans les conditions prévues par l'article L. 4614-12, qui ne constitue pas un marché de services ayant pour objet une prestation mentionnée à l'article 8 du décret n° 2005-1742 du 30 décembre 2005 pris pour l'application de l'ordonnance 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, n'est pas, conformément aux dispositions de l'article 9 de ce même décret, soumis aux règles édictées par ces textes, Attendu qu'il s'ensuit que le CHU de Bordeaux-Saint André ne peut qu'être débouté de sa demande d'annulation de la délibération du CHSCT - groupe Saint André du 16 avril 2010 en ce qu'elle a désigné un expert agréé, Attendu que l'ordonnance déférée sera confirmée sur ce point, Attendu, enfin, qu'il sera fait droit à la demande du CHSCT - groupe Saint André en versement, en application de l'article L. 4614-13 du Code du travail selon lequel l'employeur doit supporter le coût de l'expertise et les frais de procédure de contestation de cette expertise, dès lors qu'aucun abus du CHSCT n'est établi, de la somme de 2.392 euros TTC, au titre des honoraires engagés en cause d'appel, l'ordonnance déférée étant également confirmée de ce chef » ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « La direction des ressources humaines et la direction du service infirmier ont indiqué avoir identifié à l' hôpital Saint André de Bordeaux durant les quatre premiers mois de l'année 2010 des départs prévisionnels de personnels infirmiers de nuit, au nombre d'une dizaine, soit 8,5 % des 117 infirmiers de nuit. Aux départs en retraite, se sont ajoutés des mutations vers d'autres sites pour raisons personnelles, des congés de maternité, des arrêts maladie de longue durée, des mises en disponibilité et des congés parentaux. Le personnel infirmier de nuit ne pouvant ainsi assurer seul la continuité du service de nuit dans l'attente de nouvelles embauches, il a été demandé au personnel infirmier de jour de travailler de nuit pendant des périodes limitées sur la base du volontariat, et à défaut par tirage au sort organisé dans le cadre des services. C'est ainsi que lors de la réunion du CHSCT du CHU de BORDEAUX du 8 mars 2010, a été abordé au titre des points nouveaux le thème du travail de nuit du personnel infirmier, les élus du syndicat FO souhaitant le recours à un expert extérieur sous forme d'audit pour évaluer les conditions de travail jour/nuit et les roulements dans les services en difficultés. Puis, par courrier électronique du 17 mars 2010, le syndicat FO a demandé la tenue d'une réunion extraordinaire du CHSCT sur cette question. Celle-ci a été organisée le 16 avril 2010. A l'issue de cette réunion, il a été voté « le recours à une expertise pour le passage de nuit des infirmiers de jour dans l'ensemble des services de l'hôpital Saint André » et le cabinet TECHNOLOGIA a été désigné pour y procéder. La direction du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE de BORDEAUX, GROUPE HOSPITALIER SAINT ANDRÉ, a saisi sur le fondement de l'article L. 4614-13 du code du travail, le président du tribunal de grande instance de Bordeaux statuant en référé pour voir annuler la délibération du CHSCT du 16 avril 2010 décidant d'une expertise, en soutenant d'une part que le CHSCT ne doit être consulté, aux termes de l'article L. 4612-8 du code du travail, qu'avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de travail, ce qui ne serait pas le cas en l'espèce, et d'autre part que le CHSCT ne saurait mandater un expert alors que la condition tenant à l'existence d'un projet important modifiant les conditions de travail exigée par l'article L. 4614-12 du code du travail ne serait pas remplie. 1°) Sur la consultation du CHSCT : Si aux termes de l'article L. 4612-8 du code du travail « le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité où les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produits ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liée ou non à la rémunération du travail », il importe de rappeler qu'en, l'espèce le CHSCT a été régulièrement convoqué pour être consulté sur un changement de l'organisation du travail du personnel infirmier de jour appelé à effectuer un service de nuit de sorte que, indépendamment de l'importance du changement des conditions de travail que lui accorde le personnel concerné par rapport à la direction du CHU qui en relativise la portée, le CHSCT dispose de l'intégralité de ses compétences, dont celle de mandater un expert en application de l'article L. 4614-12 du code du travail. Il ne saurait dès lors lui être fait grief d'avoir décidé du recours à une expertise, alors qu'il aurait été convoqué sans nécessité, par simple souci de transparence. 2°) Sur le recours à un expert : L'article L. 4614-12 du code du travail énonce : « Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé : 1° Lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement ; 2° En cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité où les conditions de travail, prévu à l'article L. 4612-8... » Il n'est pas sérieusement contestable que l'alternance de travail de jour et de travail de nuit génère un risque professionnel pour le personnel infirmier qui y est soumis, de nature à modifier les conditions de santé et de sécurité. L'inspecteur du travail avait au demeurant attiré l'attention de la directrice du CHU groupe hospitalier Saint André sur ce point, selon lettre du 18 mars de 2010 versée au débat, en concluant ainsi : « Or, en sus des risques traditionnellement induits par le travail de nuit, y compris lorsque les travailleurs sont volontaires, l'imposition de ces conditions de travail est de nature à exposer vos personnels à des risques psychosociaux (rupture de rythmes, articulation vie professionnelle/vie personnelle, nouvelles tâches et procédures à appréhender dans le cadre de la mobilité, incertitudes sur la stabilité de cette nouvelle organisation, etc.). Afin de satisfaire vos obligations, je vous invite, en tant que présidente du CHSCT, à rechercher en concertation avec les représentants du personnel au sein de l'instance, d'éventuelles pistes organisationnelles susceptibles de supprimer, ou au moins de réduire, ces risques ». Le document unique pour l'évaluation des risques professionnels au CHU de Bordeaux décrit au demeurant les dommages que subissent les agents travaillant de nuit, tels que troubles du sommeil (raccourcissement de la durée de sommeil quotidien et baisse de la qualité du sommeil), fatigue chronique associée à des épisodes de somnolence et de baisse de la vigilance, troubles digestifs, syndrome de désynchronisation - désadaptation). Le médecin du travail du CHU de Bordeaux avait également établi un document constatant l'existence de nombreux risques sur la santé occasionnés par le travail de nuit, auxquels il convient d'ajouter les incidences familiales et sociales. Ces risques sont bien réels dans l'établissement; et ressortent des témoignages des personnels infirmiers concernés produits aux débats ainsi que de la pétition signée par 359 salariés du CHU Saint André. Les souffrances physiques et mentales endurées par les personnels infirmiers de jour soumis occasionnellement au travail de nuit constituent à l'évidence des risques graves pour leur santé de nature à justifier le recours à un expert agréé en application du texte sus rappelé. En outre, le changement dans l'organisation du service des infirmiers de jour, appelés désormais également à travailler occasionnellement de nuit, doit être considéré comme important, même si quantitativement il ne pourrait concerner qu'un nombre limité de postes, dans la mesure où il ne s'agit pas seulement d'une proposition faite sur la base du volontariat, mais bien de l'obligation pour l'ensemble du personnel infirmier de jour d' y participer par tirage au sort ou par ordre alphabétique en l'absence de volontaires, indépendamment de l'état de santé et des contraintes familiales et sociales des personnes concernées, contribuant de la sorte à accroître encore davantage le malaise de la profession. Enfin, à supposer même qu'il ne s'agisse que de remplacements ponctuels appelés à cesser dans un proche avenir ainsi que le soutient le direction du CHU, force est de constater que le mode organisationnel décrit à la date de délivrance de l'assignation comme limité et transitoire devrait néanmoins se poursuivre au mois de septembre prochain, et qu'aucun engagement formel n'a été pris à ce jour concernant son terme. Dans ces conditions, le CHSCT dont le rôle est notamment de concourir à la prévention des risques professionnels, était fondé à recourir à l'assistance d'un expert agréé en application des articles L. 4612-8 et suivants et L. 4614-12 du code du travail pour mener à bien sa mission. La mission de l'expert deviendrait naturellement sans objet si le remplacement du personnel de nuit par du personnel de jour venait à cesser. En outre, le code des marchés publics n'est pas applicable au CHSCT, qui n'est pas un organisme public et qui dispose par l'effet de la loi du choix de l'expert, sauf recours éventuel de l'employeur devant le juge judiciaire. Aussi lui appartenait-il en l'espèce de désigner lui même un expert agréé pour être assisté dans l'accomplissement de ses missions. Le CHU de Bordeaux, Groupe Saint André, ne peut dès lors qu'être débouté de sa demande d'annulation de la délibération du CHSCT désignant un expert. Par ailleurs, les frais de l'expertise étant à la charge de l'employeur, selon les dispositions de l'article L. 4614-13 du code du travail, ce dernier doit également supporter les frais de la procédure de contestation de l'expertise qu'il a engagée, et notamment les frais et honoraires d'avocat. Il importe en conséquence de condamner le CHU de Bordeaux, Groupe Saint André, à verser au CHSCT la somme justifiée de 3.000,00 € hors-taxes, soit 3.588,00 € TTC, au titre des frais d'avocat. Il supporte enfin la charge des entiers dépens » 1/ ALORS QU' est un marché public le contrat à titre onéreux conclu entre un opérateur économique et un pouvoir adjudicateur - tel un établissement public hospitalier - ayant pour objet une prestation de service ; que le recours à un expert agréé à l'initiative du CHSCT d'un établissement public hospitalier en application de l'article L. 4614-12 du Code du travail, emporte conclusion d'un marché public, nonobstant la personnalité civile reconnue au CHSCT, dès lors que c'est l'hôpital qui, procurant au CHSCT l'essentiel de ses ressources, finance la mesure d'expertise ; qu'en jugeant le contraire, pour débouter le groupe hospitalier SAINT-ANDRE de sa demande d'annulation de la délibération du CHSCT du 16 avril 2010, pour ne pas avoir soumis le choix de l'expertise aux règles de publicité et de mise en concurrence prévues par le Code des Marchés Publics, la Cour d'appel a violé l'article 1er du code des Marchés publics ; 2/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE sont soumis aux principes généraux de la commande publique les marchés passés avec un prestataire de service pour la réalisation de prestations de services, par les organismes de droit privé dotés de la personnalité juridique et qui ont été créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur soumis au Code des marchés publics ou à l'Ordonnance 2005-649 du 6 juin 2005 ; que le CHSCT d'un établissement public hospitalier ayant pour mission la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement, est un organisme de droit privé doté de la personnalité juridique, créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial qui dépend financièrement de l'établissement public hospitalier au sein duquel il constitué, lequel rémunère ses membres et finance ses activités; que l'expertise diligentée à sa demande en application de l'article L. 4614-12 du Code du travail, constitue une prestation de service répondant à ses besoins de fonctionnement; qu'en jugeant que le recours à un expert agréé dans les conditions prévues par l'article L. 4614-12 du Code du travail ne constitue pas un marché de services au sens des dispositions de l'ordonnance 2005-649 du 6 juin 2005, pour refuser d'annuler la délibération du CHSCT du groupe hospitalier SAINT ANDRE du 16 avril 2010 ayant désigné le cabinet TECHNOLOGIA afin de procéder à une expertise sans que soient respectées les dispositions de cette ordonnance, la Cour d'Appel a violé l'Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 « relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ».