Chronologie de l'affaire
Tribunal administratif de Nantes 08 octobre 1987
Cour administrative d'appel de Nantes 31 décembre 1990

Cour administrative d'appel de Nantes, 31 décembre 1990, 89NT00584

Mots clés contributions et taxes · impots sur les revenus et benefices · revenus et benefices imposables · regles particulieres · benefices industriels et commerciaux · determination du benefice net · acte anormal de gestion · revenus des capitaux mobiliers et assimilables · revenus distribues · notion de revenus distribues · imposition personnelle du beneficiaire

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro affaire : 89NT00584
Type de recours : Plein contentieux fiscal
Textes appliqués : CGI 109 par. 1, CGIAN2 47
Décision précédente : Tribunal administratif de Nantes, 08 octobre 1987
Rapporteur : ISAIA
Rapporteur public : LEMAI

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Nantes 08 octobre 1987
Cour administrative d'appel de Nantes 31 décembre 1990

Texte

VU l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le dossier de la requête présentée au Conseil d'Etat par M. et Mme Gérard Y... et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 8 janvier 1988 sous le n° 94 169 ;
VU la requête susmentionnée et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour sous le n° 89NT00584, présentés pour M. et Mme Y... par Me HENRY, avocat au Conseil d'Etat ;
M. et Mme Y... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 8 octobre 1987 par lequel le Tribunal administratif de NANTES a rejeté leur demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu établi au nom de M. Y... au titre de l'année 1980 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités dont elles ont été assorties ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 12 décembre 1990 :
- le rapport de M. ISAIA, conseiller,
- les observations de Me X..., se substituant à Me HENRY, avocat des époux Y...,
- et les conclusions de M. LEMAI, commissaire du gouvernement,

Sur l'étendue du litige :


Considérant que

par une décision en date du 22 août 1988 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Loire-Atlantique a prononcé le dégrèvement d'une somme de 23 183 F sur le complément d'impôt sur le revenu auquel M. Y... a été assujetti au titre de l'année 1980 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges, en décidant "qu'aucune circonstance particulière propre à la société Studio MADEC n'était de nature à justifier, dans l'intérêt de ladite société, l'abandon de la créance détenue sur M. Y...", ont entendu se référer à toutes les circonstances invoquées à cette fin dans les mémoires des requérants, en estimant qu'aucune d'entre elles n'était de nature à infirmer l'appréciation des faits à laquelle s'était livrée l'administration en ce qui concerne l'imposition de la créance précitée ; que, dès lors, le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 109-1 du code général des impôts : "Sont considérés comme revenus distribués : 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices" et qu'aux termes de l'article 47 de l'annexe II au code précité : "Tout redressement du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera pris en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées" ;
Considérant que lorsqu'une société consent une libéralité à l'un de ses actionnaires ou à un tiers, notamment en renonçant à demander à celui-ci le versement d'une indemnité qui lui est due, le bénéficiaire de cet avantage doit être réputé avoir perçu, à concurrence de la valeur de l'avantage, une distribution de bénéfices sociaux ; que, toutefois, l'exécution par la société d'opérations présentant un avantage pour un actionnaire ou pour un tiers ne peut être regardée comme constitutive d'une libéralité que s'il est établi, compte tenu, le cas échéant, des règles gouvernant la charge de la preuve, que l'avantage consenti ne comportait pas pour la société une contrepartie appréciable qu'elle avait elle-même recherchée dans son propre intérêt ;

Considérant que, par contrat en date du 28 mars 1968, M. Gérard Y... a confié à la S.A.R.L Studio Y..., dans laquelle il détenait la moitié du capital et dont il était le gérant, la gérance libre d'un fonds de commerce de photographie industrielle et publicitaire lui appartenant, pour une durée de quatre ans, neuf mois et quinze jours, renouvelable par périodes successives annuelles et pour une somme de 6 000 F par an ; que l'article 16 dudit contrat stipulait qu'à l'expiration de la location : "quelle qu'en soit la raison, il pourra être constaté une plus-value apportée par la S.A.R.L Studio Y... au fonds présentement loué. Cette plus-value, si elle existe, donnera lieu à une indemnité, fixée d'un commun accord des parties ou, à défaut d'accord, par voie d'arbitrage comme il est prévu sous la rubrique "contestations"" ; que, par convention en date du 29 décembre 1980, M. Y... a cédé le fonds susmentionné à la S.A.R.L Studio Y... pour le prix d'un million de francs et résilié en même temps le contrat de gérance ; que les parties à ladite convention ont expressément indiqué que la vente s'opérait "sans indemnité d'aucune sorte" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la période de gérance la S.A.R.L Studio Y... a ajouté au fonds de commerce une branche "Edition" qui était de nature à augmenter la valeur du fonds et, en cas de résiliation du contrat de gérance, à justifier le versement d'une indemnité égale au montant de la plus-value apportée par la société ; que, suite à la vérification de comptabilité dont celle-ci a été l'objet, la plus-value correspondante a été évaluée en définitive par l'administration à la somme de 270 000 F ; que selon les Epoux Y... la renonciation par la S.A.R.L Studio Y... à l'indemnité susmentionnée a été compensée par, respectivement, la conservation de l'activité d'édition qu'elle avait elle-même créée, le droit au renouvellement du bail, la possibilité d'utiliser le nom commercial et enfin l'exclusion de tout risque de concurrence avec M. Y..., celui-ci se voyant soumis à une interdiction de réinstallation pendant cinq ans ; que, toutefois, les avantages ainsi obtenus par la société découlent uniquement de l'acquisition de la propriété du fonds de commerce et non de la résiliation du contrat de gérance ; que, par suite, de tels avantages ne sauraient réparer le préjudice subi par la société du fait de sa renonciation à l'indemnité prévue à l'article 16 du contrat de gérance ; qu'ainsi, nonobstant le caractère conventionnel de cette renonciation et quelles qu'aient pu être les intentions des parties en ce qui concerne la portée et le sens à donner audit article, la concomitance entre l'acquisition du fonds et la résiliation du contrat de gérance n'a pas constitué pour la S.A.R.L Studio Y... une circonstance particulière de nature à justifier, dans son intérêt, l'abandon de la créance qu'elle détenait sur M. Y... ; que dans ces conditions, la S.A.R.L Studio Y... doit être regardée, pour avoir omis de subordonner la résiliation du contrat de location gérance qu'elle avait conclu le 15 mars 1968 avec M. Y... au versement de l'indemnité prévue par cette convention, comme ayant consenti une libéralité à ce dernier ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans les revenus imposables de M. Y..., au titre de l'année 1980 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, la libéralité qui lui a été consentie par la S.A.R.L Studio Y... ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les EPOUX Y... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de NANTES a rejeté leur demande ;
Article 1 - A concurrence de la somme de 23 183 F, en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. Y... a été assujetti au titre de l'année 1980, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.
Article 2 - Le surplus des conclusions de la requête des EPOUX Y... est rejetée.
Article 3 - Le présent arrêt sera notifié aux EPOUX Y... et au ministre délégué au budget.