CIV.3
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 avril 2016
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10166 F
Pourvoi n° Y 15-16.641
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Krief Group, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
contre l'arrêt rendu le 17 février 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Q] [F], domicilié [Adresse 4], pris en qualité , d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Krief Group dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société [C] & [C], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne de Mme [M] [C]-[C], mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de la société Krief Group, domiciliée [Adresse 1],
3°/ à la société CM-CIC Lease, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 8 mars 2016, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Maunand, conseiller rapporteur, M. Jardel, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Krief Group, de Me Bertrand, avocat de la société [C] & [C], de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société CM-CIC Lease ;
Sur le rapport de M. Maunand, conseiller, l'avis de M. Kapella, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article
1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Krief Group aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, condamne la société Krief Group à payer à la société CM-CIC la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille seize.
MOYEN ANNEXE
à la présente décision
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Krief Group
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir admis la totalité de la créance, d'un montant de 4.240.641,44 euros, à titre privilégié, au passif de la société Krief Group ;
AUX MOTIFS QUE sur l'indemnité de résiliation l'article 24 du contrat met à la charge du preneur en cas de résiliation anticipée, une indemnité égale à la moitié des loyers restant dus jusqu'au terme de l'opération ; que le juge commissaire a analysé cette indemnité de résiliation contractuelle comme une clause pénale, mais a considéré qu'il n'y avait pas lieu de la modérer, son montant étant très proche du préjudice subi par le crédit bailleur, estimé à 2.750.264 euros ; que le débat ne porte devant la cour d'appel que sur l'appréciation du caractère manifestement excessif de cette indemnité, la nature de la clause pénale n'étant pas discutée ; que Krief Group déduit le caractère manifestement excessif de cette indemnité de la date précoce de résiliation du contrat qui la contraint à faire face au paiement de l'équivalent des loyers jusqu'au terme fixé alors qu'elle n'a plus la possibilité de rentabiliser son investissement, de l'absence de prise en compte de la valeur de l'immeuble comprise entre 5,5 et 7 millions d'euros ; qu'elle soutient en outre que l'indemnité intègre des échéances déjà comptabilisées au titre des loyers impayés ; tandis que la société CM-CIC Lease fait valoir que la créance déclarée au passif s'appréciant au jour du jugement d'ouverture et la résiliation ne modifiant pas le fait qu'elle est propriétaire du bien loué depuis son acquisition, il n'a pas à être tenu compte d'un éventuel prix de revente de l'immeuble intervenant après le jugement d'ouverture, lequel n'a d'ailleurs qu'une valeur de 3.6 millions d'euros et que l'indemnité réclamée correspond à son préjudice chiffré à 2.750.264 euros, outre le coût de portage de l'immeuble jusqu'à son éventuelle revente ; que l'article
L 622-25 du code de commerce, selon lequel la déclaration doit porter le montant de la créance au jour du jugement d'ouverture, ne fait pas obstacle à ce que le juge-commissaire, puis la cour, appelés à se prononcer sur l'admission d'une indemnité de résiliation dont le montant est contesté, apprécient l'existence d'une disproportion en comparant le montant de la peine conventionnellement fixée et celui du préjudice effectivement subi ; que l'indemnité de résiliation a été calculée par CM-CIC Lease sur la base de la moitié des loyers restant à échoir à compter de la date de résiliation le 8 septembre 2011, conformément au contrat et n'intègre pas, contrairement à ce que soutient le liquidateur, des loyers échus antérieurement, ceux-ci faisant l'objet d'une déclaration spécifique au titre des échéances impayées durant le contrat ; que CM-CIC Lease a calculé l'amortissement de l'opération en capital et intérêts sur une durée de 15 ans ; que la résiliation du crédit-bail, constatée à effet du 8 septembre 2011 est intervenue alors que les 4/5èmes du contrat restaient à courir, CM-CIC Lease ayant durant le contrat encaissé 1.104.427 euros et bénéficiant en outre d'une créance de 1.536.701,74 euros dont l'admission au passif n'est pas contestée ; que la résiliation du contrat a certes permis au crédit-bailleur de retrouver de façon anticipée la disponibilité de son actif immobilier et la faculté d'en disposer, mais le contrat, en stipulant que l'indemnité de résiliation sera calculée sur la moitié et non la totalité du montant des loyers restant à échoir, a pris en compte cette conséquence parfaitement prévisible de la rupture anticipée, étant observé que la revente d'un bien immobilier, organisé en l'espèce en centre d'affaires, faiblement occupé à ce jour, est aléatoire dans le temps et que dans cette attente le crédit bailleur doit faire face au frais de portage de l'immeuble, évalués à 137.000 euros par an ; que Krief Group n'établissant pas que l'indemnité de résiliation est manifestement excessive, n'est pas fondée à demander à la cour d'en modérer le montant ;
ET AUX MOTIFS EXPRESSEMENT ADOPTES QUE la société CMCIC LEASE a déclaré au passif de la société KRIEF GROUP une créance de 4.240.641,44 € à titre privilégié ; que cette créance résulte d'un contrat de crédit-bail en date du 11 mai 2007 et d'un avenant audit contrat en date du 27 août 2008 ; qu'elle a été contestée à hauteur de 3.073.142 € par courriers des 5 décembre 2012 et 4 février 2013 ; que la contestation porte sur : - indemnité d'occupation précaire : 326.151,21 € correspondant à la période du - intérêts de retard : 34.494,85 € - frais de procédure : 8.556,37 € -indemnité de résiliation : 2.703.939,70 € ; que l'affaire a fait l'objet d'une reconvocation au 2 octobre 2013, à la demande du jugecommissaire afin de permettre à CMCIC LEASE de communiquer aux parties, avant le 15 octobre 2013, les éléments chiffrés concernant le préjudice qu'elle prétend subir du fait de la résiliation anticipée du contrat de crédit-bail CMCIC LEASE pouvant répondre à cette communication ; qu'une note en délibéré a été adressée au juge commissaire le 15 octobre 2013 par CMCIC LEASE à laquelle la société KRIEF GROUP et Me [C] ont répondu respectivement au juge commissaire le 15 octobre 2013 par CMCIC LEASE ; (…) que 2° en ce qui concerne l'indemnité de résiliation, l'article 24 du contrat de crédit-bail prévoit qu'en cas de résiliation anticipée le preneur doit verser au bailleur une indemnité égale à la moitié des loyers restant dus jusqu'au terme de l'opération ; que la société KRIEF GROUP soutient que cette clause constitue un clause pénale susceptible d'une appréciation par le juge ; que peu importe que la Cour d'appel ait jugé, par arrêt du 12 juin 2012, statuant sur une ordonnance de référé, que la clause d'indemnité de résiliation prévue au contrat ne constitue pas une clause pénale, cette décision n'ayant pas l'autorité de la chose jugée au principal ; que CMCIC LEASE, par conclusions déposées lors de l'audience du 5 juin 2013, rappelle que la Cour d'appel, dans son arrêt du 12 juin 2012 a jugé que cette clause ne constituait pas une clause pénale ; que la clause de résiliation prévue au contrat de crédit-bail s'analyse en une sanction contractuelle du manquement par une des parties à ses obligations s'appliquant du seul fait de cette inexécution ; qu'elle constitue donc une clause pénale que le juge peut modérer ou augmenter si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; que l'appréciation de ce caractère excessif ou dérisoire dépend d'un chiffrage du préjudice effectivement subi par le créancier ; que les pièces produites par ce dernier, à notre demande, établissent que ce préjudice peut s'estimer à la somme de 2.4750.265 € très proche de la créance déclarée au titre de l'indemnité de résiliation ; qu'en particulier, CMCIC LEASE a pris en considération : - d'une part du côté de l'actif, la valeur expertisée de l'immeuble ; que cette prise en compte ruine les affirmations du débiteur soutenant que cette valeur n'a pas été retenue dans l'appréciation du préjudice ; - que d'autre part, du côté du passif de tous les chefs de créance résultant du contrat et restés impayés ; - que la contestation marginale du taux d'intérêt appliqué au refinancement de l'opération par la banque n'établit nullement le caractère manifestement excessif de la clause pénale, exigé par le texte légal pour une modération par le juge ;
1°) ALORS QUE pour apprécier le caractère manifestement excessif d'une clause pénale, le juge doit se fonder, au moment où il statue, sur la disproportion manifeste entre l'importance du préjudice effectivement subi par le créancier et le montant conventionnellement fixé par les parties ; qu'en estimant que la clause pénale stipulée au contrat de crédit-bail, dont elle relevait qu'il avait fait l'objet d'une résiliation anticipée intervenue lorsque les 4/5e du contrat d'une durée de 15 ans, restaient à courir, n'était pas manifestement excessive, motif pris que « le contrat, en stipulant que l'indemnité de résiliation sera calculée sur la moitié et non sur a totalité du montant des loyers restant a échoir, a pris en compte cette conséquence parfaitement prévisible de la rupture anticipée », la cour d'appel a violé l'article
1152 du code civil ;
2°) ALORS QUE pour apprécier le caractère manifestement excessif d'une clause pénale, le juge doit se fonder sur la disproportion entre l'importance du préjudice effectivement subi par le créancier et le montant conventionnellement fixé par les parties ; qu'en estimant que la clause pénale n'était pas manifestement excessive au regard d'un préjudice hypothétique du crédit-bailleur dès lors que « la revente d'un bien immobilier, organisé en l'espèce en centre d'affaires, faiblement occupé à ce jour, est aléatoire dans le temps », la cour d'appel a violé les article
1147,
1149 et
1152 du code civil.