N° U 15-83.636 F-D
N° 2655
FAR
15 JUIN 2016
REJET
M. GUÉRIN président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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Statuant sur le pourvoi formé par
:
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M. N... O..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Care distribution,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DOUAI, en date du 14 janvier 2015, qui, dans l'information suivie contre M. M... W... des chefs, notamment, d'escroquerie aggravée, infractions douanières, blanchiment et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction rejetant sa demande de mainlevée d'une saisie pénale des sommes inscrites au crédit d'un compte bancaire ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 mai 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article
567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Chaubon, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseiller CHAUBON, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen
unique de cassation, pris de la violation des articles
99,
198,
591 et
593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de refus de restitution des sommes inscrites au crédit du compte bancaire de la société Care distribution faisant l'objet d'un maintien de saisie pénale ;
"aux motifs que, en vertu de l'article
99, alinéa 4, du code de procédure pénale, le juge d'instruction peut refuser la restitution des objets placés sous main de justice lorsque la confiscation de l'objet est prévue par la loi ; qu'il résulte des éléments de la procédure que la société Care distribution a été utilisée par son gérant M. W... pour commettre les infractions visées au réquisitoire introductif ; que c'est à juste titre que le juge d'instruction a retenu que les sommes figurant au compte bancaire de la société constituaient le produit direct des infractions poursuivies, l'activité illégale constituant le seul financement de la société précitée ; que les sommes saisies sont donc susceptibles d'être confisquées en application de l'article
131-21, alinéa 3, du code pénal ; que les articles
R. 641-23 et
R. 622-19 du code de commerce, de nature réglementaire et qui, au demeurant, sont propres aux procédures de distribution du prix de vente d'un bien, ne sauraient prévaloir sur les articles
706-154 du code de procédure pénale et
131-21 du code pénal, de nature législative ; qu'enfin, aux termes de l'article
L. 643-13 du code de commerce, tel qu'issu de la loi du 26 juillet 2005, une liquidation judiciaire, clôturée pour insuffisance d'actif, peut être reprise, s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure ; que le tribunal est saisi par le liquidateur précédemment désigné, par le ministère public ou par tout créancier intéressé ; que le tribunal peut également se saisir d'office ; qu'en conséquence, en toute hypothèse, la procédure de liquidation judiciaire pourra être reprise si la juridiction pénale ne prononce pas la confiscation des sommes saisies ; qu'il y a donc lieu de confirmer l'ordonnance attaquée ;
"1°) alors que, lorsque la confiscation de l'objet est prévue par la loi, la restitution peut, et non doit, être refusée, si bien qu'il appartient à la juridiction d'instruction de justifier de l'opportunité du maintien de l'objet litigieux sous main de justice ; qu'en se bornant à refuser la restitution sur la seule affirmation que les sommes saisies sont susceptibles d'être confisquées en application de l'article
131-21, alinéa 3, du code pénal sans constater ni que la restitution pouvait être de nature à faire obstacle à la manifestation de la vérité ou à la sauvegarde des droits des parties, ni établir le moindre risque de dissipation des sommes figurant au crédit du compte bancaire de la société Care distribution susceptible de priver la juridiction de jugement de tout risque de confiscation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des exigences de l'article
99, alinéa 4, du code de procédure pénale ;
"2°) alors que, dans son mémoire régulièrement déposé, le demandeur, soutenait que la restitution requise n'emportait strictement aucun risque de dissipation, dès lors, qu'ès qualités de liquidateur judiciaire, il s'engageait à consigner les fonds saisis à la Caisse des dépôts et consignations, et ce, dans l'attente d'une décision pénale définitive dans le cadre des poursuites dirigées contre les diverses personnes mises en examen ; qu'en refusant la restitution des sommes sur la simple possibilité de leur confiscation ultérieure par la juridiction de jugement, sans même s'expliquer, ne fût-ce que pour l'écarter, sur l'argument déterminant de M. O... soulignant l'absence de la moindre privation de la juridiction de jugement de toute perspective de confiscation du fait de la restitution sollicitée, en raison de la consignation des fonds saisis à la Caisse des dépôts et consignations dans l'attente de la décision pénale définitive, la cour d'appel s'est abstenue de répondre à argument déterminant du mémoire de le demandeur, privant de ce fait sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen ;
Attendu qu'il résulte
de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. O..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Care distribution, dont le gérant, M. W..., a été mis en examen, notamment du chef de blanchiment, a sollicité la restitution des sommes versées sur le compte de ladite société, saisies sur le fondement de l'article
706-154 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction refusant cette restitution, l'arrêt énonce
que la société Care distribution a été utilisée par son gérant M. [...] pour commettre les infractions visées au réquisitoire introductif, que les sommes figurant au compte bancaire de la société constituaient le produit direct des infractions poursuivies, l'activité illégale constituant le seul financement de la société précitée, et que les sommes saisies sont susceptibles d'être confisquées en application de l'article
131-21, alinéa 3, du code pénal ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors qu'aux termes de l'article
99 du code de procédure pénale, la restitution peut être refusée quand elle porte sur un objet placé sous main de justice dont la confiscation est prévue par la loi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche, en ce que la chambre de l'instruction n'avait pas à expliquer en quoi la restitution des sommes en cause serait susceptible de faire obstacle à leur confiscation, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze juin deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.