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Tribunal administratif de Strasbourg, 2ème Chambre, 1 février 2023, 2102238

Mots clés
sanction • requérant • requête • rapport • ressort • saisine • étranger • harcèlement • presse • procès-verbal • pouvoir • principal • publication • recours • rejet

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Strasbourg
1 février 2023
Section disciplinaire du conseil académique de l'université de Strasbourg
13 février 2021

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Strasbourg
  • Numéro d'affaire :
    2102238
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Rapporteur : M. Boutot
  • Nature : Décision
  • Décision précédente :Section disciplinaire du conseil académique de l'université de Strasbourg, 13 février 2021
  • Commentaires :
  • Avocat(s) : AARPI TALARIS AVOCATS
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Résumé

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Partie demanderesse
Personne physique anonymisée
Partie défenderesse

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mars 2021 et le 13 juillet 2022, M. A B, représenté par Me C, demande au tribunal : 1°) d'annuler la décision du 13 février 2021 par laquelle la commission de discipline de la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Strasbourg a prononcé à son encontre une sanction de 18 mois d'exclusion de l'établissement dont 6 mois fermes et 12 mois avec sursis et ordonné l'affichage de la décision sans mention du nom de l'étudiant ; 2°) de mettre à la charge de l'université de Strasbourg la somme de 2 400 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ainsi que les éventuels dépens. Il soutient que : - en vertu des articles R. 712-9, R. 712-11, R. 712-29 et R. 732-31 du code de l'éducation dans leur version antérieure au décret n° 2020-785 du 26 juin 2020, le recteur aurait dû saisir le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche statuant en formation disciplinaire pour pallier l'inaction du président de l'université ; - la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure en ce que le dossier disciplinaire était incomplet ; - elle est entachée d'un vice de procédure en ce que le courrier de saisine de la section disciplinaire du conseil académique ne mentionne pas les faits reprochés ; - l'université de Strasbourg n'établit pas la régularité de la composition de la section disciplinaire du conseil académique au regard des articles R. 811-14 et R. 811-15 du code de l'éducation ; - l'université de Strasbourg n'établit pas la régularité de la composition de la commission de discipline au regard des articles R. 811-28 et R. 811-32 du code de l'éducation. - il appartient à l'université de produire le procès-verbal de la séance de la commission de discipline établi en application de l'article R. 811-35 du code de l'éducation ; - la décision attaquée repose sur des faits matériellement inexacts ; - l'implication du requérant dans les faits reprochés n'est pas établie ; - la sanction est disproportionnée au regard des faits reprochés. Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2022, l'université de Strasbourg conclut au rejet de la requête. Elle soutient que : - à titre principal, les moyens ne sont pas fondés ; - à titre subsidiaire, s'il était considéré que la réglementation applicable était celle antérieure au décret du 26 juin 2020, le tribunal administratif serait incompétent pour statuer sur la requête. Par ordonnance du 19 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 septembre 2022. M. B a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 avril 2021. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ; - le décret n° 2020-785 du 26 juin 2020 relatif à la procédure disciplinaire dans les établissements publics d'enseignement supérieur ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme D, - les conclusions de M. Boutot, rapporteur public, - et les observations de : ' Me Loew, substituant Me C, représentant M. B, ' M. E, représentant l'université de Strasbourg.

Considérant ce qui suit

: 1. Par courrier du 30 octobre 2020, le président de l'université de Strasbourg a saisi la section disciplinaire du conseil académique compétente à l'égard des usagers aux fins d'exercer des poursuites disciplinaires contre M. B, étudiant à l'institut d'études politiques (IEP) de Strasbourg, pour des faits d'antisémitisme et d'agression physique commis à l'encontre d'un autre étudiant, également inscrit à l'IEP, au cours de l'année scolaire 2018-2019. Par courrier du 8 décembre 2020 l'informant de la possibilité de présenter des observations orales et de se faire assister par un conseil, ainsi que des modalités de consultation du rapport d'instruction et des pièces du dossier, M. B a été convoqué à la séance de la commission de discipline de la section disciplinaire devant se tenir le 14 janvier 2021. A l'issue de la séance, par décision du 13 février 2021, la commission de discipline a prononcé à l'encontre du requérant une sanction d'exclusion de l'université de Strasbourg pour dix-huit mois dont six mois fermes et douze mois avec sursis, et a ordonné l'affichage anonymisé de la décision dans les locaux de l'IEP de Strasbourg. Sur la compétence du tribunal administratif : 2. En vertu des dispositions du décret du 26 juin 2020 susvisé, codifiées dans le code de l'éducation, les recours contre les décisions disciplinaires prises à l'encontre des usagers de l'université, notamment les étudiants, relèvent désormais de la compétence du tribunal administratif territorialement compétent, et non plus, comme le prévoyait auparavant l'article L. 232-2 du code de l'éducation, de celle du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. Conformément à l'article 15 de ce décret, ses dispositions sont applicables aux procédures disciplinaires engagées après la date de sa publication. En vertu de l'article R. 712-29 du code de l'éducation, dans sa version antérieure au décret, et de l'article R. 811-25 du code de l'éducation, dans sa rédaction issue de ce décret, la procédure disciplinaire est engagée du fait de la saisine de la section disciplinaire par le président de l'université. 3. En l'espèce, si le directeur de l'institut d'études politiques de Strasbourg a porté à la connaissance du président de l'université de Strasbourg les faits litigieux par un courrier du 17 décembre 2019, il est constant que c'est par une lettre du 30 octobre 2020 que le président de l'université de Strasbourg a saisi la section disciplinaire des usagers, de sorte que c'est dans leur rédaction issue du décret du 26 juin 2020 que les dispositions du code de l'éducation sont applicables au présent litige. Par suite, le litige relatif à la sanction prise par cette instance relève de la compétence du tribunal administratif. Sur les conclusions à fin d'annulation : 4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de comportements et propos antisémites constatés au sein de l'IEP de Strasbourg, dont l'un des étudiants a été plus particulièrement la victime, plusieurs étudiants de l'IEP ont fait l'objet de poursuites disciplinaires ayant abouti, pour certains, à des lourdes sanctions en adéquation avec la gravité des faits mis au jour. Les poursuites disciplinaires engagées par le président de l'université de Strasbourg contre M. B devant la section disciplinaire s'inscrivent dans ce contexte. 5. En l'absence de disposition législative contraire, il incombe à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction, ainsi que leur imputabilité à la personne à laquelle cette sanction est infligée. 6. Il ressort des énonciations de la décision de la section disciplinaire que la sanction contestée est fondée sur deux séries de faits. 7. D'une part, la décision évoque des remarques antisémites à l'occasion d'une pièce de théâtre portant sur les rapports entre Israël et la Palestine, un harcèlement poursuivi sur les réseaux sociaux par un groupe dénommé " Zythopo ", le fait que l'étudiant mentionné au point 4 s'est vu apposer à l'entrée d'une soirée étudiante une croix gammée sur la main, en lieu et place de la croix simple reçue par les autres participants, ainsi que divers articles de presse décrivant un contexte d'antisémitisme au sein de l'IEP. Toutefois, ces différents éléments sont relevés de manière impersonnelle dans la décision, qui n'en impute aucun à M. B. L'université n'apporte pas davantage de précisions ou d'éléments à cet égard, alors que le requérant produit plusieurs témoignages d'étudiants attestant qu'il est étranger aux faits relevés. 8. D'autre part, la décision contestée met nommément en cause M. B pour deux incidents : il lui est reproché en premier lieu d'avoir, lors du week-end d'intégration du mois de septembre 2018, chanté des chants négationnistes et antisémites devant un étudiant, après que celui-ci avait, la veille, protesté contre cette pratique, dans le but de le provoquer et de " s'assurer qu'il avait bien compris la leçon " ; il lui est reproché en second lieu d'avoir, lors de la dernière soirée du " BDE 2018/2019 " au mois de mai 2019, bousculé le même étudiant dans les toilettes de la boîte de nuit où se déroulait la soirée, en l'accusant de s'être plaint d'être victime d'antisémitisme lors d'un évènement antérieur, le critérium inter-IEP. 9. Toutefois, la mise en cause de M. B pour ces deux incidents repose uniquement sur le témoignage de l'étudiant concerné. Or, s'agissant du premier incident, le requérant, qui conteste fermement les accusations dont il fait l'objet, produit plusieurs courriers et attestations circonstanciés d'étudiants présents lors du week-end d'intégration de septembre 2018, qui non seulement ne confirment pas le comportement reproché, mais encore soulignent que l'intéressé s'est, au contraire, en plusieurs occasions, opposé à des débordements à caractère raciste ou antisémite. Quant au second incident, qui selon le témoignage de l'étudiant concerné se serait déroulé début mai 2019 lors d'une soirée étudiante, les éléments fournis par M. B montrent que la soirée dont il est question n'a pu avoir lieu à cette date mais a vraisemblablement eu lieu à la fin du mois de mai, et qu'il n'y était pas présent. Dans ces conditions, le témoignage de l'étudiant concerné ne suffit pas à établir que M. B est l'auteur des faits qui lui sont reprochés, et dès lors qu'aucun autre élément du dossier ne permet de le corroborer, M. B est fondé à soutenir que la sanction prononcée à son encontre n'est pas justifiée en fait. 10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'il soulève, M. B est fondé à demander l'annulation de cette sanction. Sur les frais de l'instance : 11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, sous réserve que Me C, avocat de M. B, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à M. C de la somme de 1 500 euros hors taxes.

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 13 février 2021 de la commission de discipline de la section disciplinaire du conseil académique de l'université de Strasbourg est annulée. Article 2 : L'université de Strasbourg versera la somme de 1 500 (mille-cinq-cents) euros hors taxes à Me C, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me C renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. A B, à Me C et à l'université de Strasbourg. Délibéré après l'audience du 11 janvier 2023, à laquelle siégeaient : M. Rees, président, Mme Merri, première conseillère, Mme Dobry, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2023. La rapporteure, S. D Le président, P. REES La greffière, M.-C. SCHMIDT La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, La greffière,

Commentaires sur cette affaire

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