Chronologie de l'affaire
Tribunal administratif de Limoges 19 novembre 2015
Cour administrative d'appel de Bordeaux 26 mai 2016

Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre (formation à trois), 26 mai 2016, 16BX00149

Mots clés étrangers · séjour des étrangers Refus de séjour · séjour · vie privée · préfet · santé · pays · rapport · traitement · arrêté · étranger · médicale · familiale · agence · médecin · saisie

Synthèse

Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro affaire : 16BX00149
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Limoges, 19 novembre 2015, N° 1501142
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur : Mme Patricia ROUAULT-CHALIER
Rapporteur public : M. NORMAND
Avocat(s) : ROUX

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Limoges 19 novembre 2015
Cour administrative d'appel de Bordeaux 26 mai 2016

Texte

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler l'arrêté en date du 20 avril 2015 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1501142 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2016, M. B...C...représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1501142 du 19 novembre 2015 du tribunal administratif de Limoges ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 20 avril 2015 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 588 euros TTC à verser à Me A...en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L.761-1 du code de justice administrative, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité d'aide juridictionnelle.

.............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le pacte relatif aux droits civils et politiques adopté le 19 décembre 1966 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Patricia Rouault-Chalier a été entendu au cours de l'audience publique.


Considérant ce qui suit

:

1. M. B...C..., ressortissant géorgien né le 20 avril 1990, serait entré en France le 2 avril 2012, selon ses déclarations, en compagnie de sa mère et de son frère cadet. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 20 mars 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 26 septembre 2013. Le 12 juin 2014, M. C...a sollicité le renouvellement de son titre de séjour " étranger malade " valable du 15 janvier 2014 au 14 juillet 2014. Par un arrêté du 20 avril 2015, le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C...relève appel du jugement n° 1501142 du 19 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 20 avril 2015 :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. L'étranger mentionné au 11° de l'article L. 313-11 qui ne remplirait pas la condition de résidence habituelle peut recevoir une autorisation provisoire de séjour renouvelable pendant la durée du traitement ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale - la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois ".

3. M. C...fait valoir qu'il est suivi au plan psychiatrique pour un état de stress post-traumatique et qu'il est atteint d'une pathologie oculaire pour laquelle il a déjà subi trois greffes de cornée au niveau de l'oeil gauche et qui pourrait en nécessiter une quatrième. Toutefois, les avis du médecin de l'agence régionale de santé des 22 mai, 6 novembre et 11 décembre 2014, produits par le préfet devant le tribunal, énoncent que si l'état de santé de M. C...nécessite une prise en charge médicale, son défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Si M. C...produit trois certificats médicaux, ces derniers sont tous postérieurs à l'arrêté contesté et se bornent à indiquer que les deux premières greffes de cornée qu'il a subies ont échoué à cause d'un défaut de traitement et qu'il doit bénéficier d'un suivi ophtalmologique, ainsi que d'un traitement anti-rejet à vie. Ces pièces médicales ne se prononcent pas sur l'offre de soins en Géorgie et ne sont donc pas de nature à infirmer les avis du médecin de l'agence régionale de santé sur l'existence d'un traitement adapté dans son pays d'origine. Enfin, la seule circonstance que le préfet mentionne que l'intéressé n'a pas produit d'élément de nature à contredire sérieusement l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ne permet pas d'établir qu'il n'aurait pas examiné la situation du requérant. Par suite, le préfet de la Haute-Vienne n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

5. Pour écarter les moyens tirés de ce que la décision portant refus de séjour méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les principes posés par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, les stipulations de l'article 23 du pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M.C..., les premiers juges ont relevé que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille et ne justifie pas de ressources propres ni d'un logement personnel. Ils ont également indiqué que M. C...n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 22 ans et que, s'il se prévaut de la présence en France de son frère, Témuri, et de sa mère, le premier fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et la seconde, qui bénéficie d'un titre de séjour à raison de son état de santé valable jusqu'au 14 janvier 2016, n'a pas vocation à se maintenir sur le territoire national. Enfin, ils ont rappelé qu'il n'était pas établi qu'un défaut éventuel de prise en charge serait susceptible d'avoir des conséquences sur l'état de santé de l'intéressé. M.C..., qui ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance, ne critique pas sérieusement la réponse apportée par le tribunal administratif, alors au demeurant que le préfet indique que sa mère a fait l'objet, le 12 février 2016, d'une obligation de quitter le territoire. Par suite, et alors que la cour rejette par arrêt du même jour la demande de son frère tendant à l'annulation du refus de titre de séjour avec obligation de quitter le territoire qui le concerne, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

6. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 312-2 dudit code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ". Il résulte des dispositions de l'article R. 312-2 du même code que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à ces articles auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. En l'espèce, compte tenu de ce qui a été dit aux points 3 et 5, le préfet de la Haute-Vienne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de se prononcer sur la demande de M. C....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

7. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les moyens tirés de ce que les décisions attaquées porteraient une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C...ou seraient entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle doivent être écartés.

9. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 20 avril 2015. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être également rejetées.

DECIDE :



Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

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N° 16BX00149