Cour de cassation, Chambre sociale, 23 novembre 2011, 10-23.406

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2011-11-23
Cour d'appel de Versailles
2010-06-22

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que M. X... a été engagé par la société Blue Line, à compter du 1er mars 2003 jusqu'au 30 juin 2003, en qualité de personnel navigant commercial, par contrat à durée déterminée motivé par un accroissement temporaire de l'activité lié à une demande accrue de vols ; qu'un second contrat a été conclu pour le même motif, le 26 juin 2003 prenant effet le 4 juillet 2003 pour se terminer le 25 octobre 2003 auquel a succédé un contrat à durée indéterminée ; que la rémunération mensuelle brute de M. X... s'élevait à 1 300 euros correspondant d'une part, à une part fixe de 400 euros bruts par mois, et un minimum garanti de 60 heures de vol mensuel (60 h x 15 euros bruts), soit 900 euros bruts par mois, et d'autre part, une part variable pour l'activité effectuée au-delà de 60 heures de vol mensuelles, sur la base de 15 euros bruts ; qu'après avoir démissionné de ses fonctions par courrier du 6 septembre 2004, M. X... a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen

:

Attendu que le liquidateur judiciaire de la société Blue Line fait grief à

l'arrêt de la condamner à payer à M. X... la somme de 1 585 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée du 27 février 2003 alors, selon le moyen, que constitue un renouvellement du contrat à durée déterminée initial, motivé par un accroissement d'activité, la conclusion d'un second contrat en tout point identique au précédent, soumis au salarié et signé par lui avant le terme convenu par les parties dans le contrat initial ; qu'en jugeant cependant qu'un tel contrat était soumis au délai de carence de l'article L. 1244-3 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article L. 1243-13 du code du travail ;

Mais attendu

qu'ayant constaté que le second contrat à durée déterminée signé le 26 juin n'avait pris effet que le 4 juillet 2003 postérieurement à l'expiration du premier, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il s'agissait non pas d'un renouvellement mais de deux contrats distincts soumis au délai de carence prévu par l'article L. 1244-3 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen

:

Attendu que le liquidateur judiciaire de la société Blue Line fait grief à

l'arrêt de la condamner à payer une somme au titre des temps d'astreintes, alors, selon le moyen : 1°/ qu'en jugeant que le salarié se trouvait en état de réserve permanent, pour lequel ne sont définies ni les modalités d'ouverture et de fermeture de cette période ni la quantification des heures affectées à cette période, tout en relevant la remise systématique au salarié, quinze jours à l'avance, d'un planning prévisionnel précisant l'amplitude de ce temps de réserve, sur la base duquel elle a calculé les heures de réserve effectué par le salarié au cours des vingt mois d'activité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article L. 3121-8 du code du travail ; 2°/ que les périodes d'astreinte ne constituent pas un temps de travail effectif et n'ont pas à être réglées comme tel ; qu'en l'espèce, le salarié percevait un minimum garanti correspondant à 60 heures de travail effectif, tandis que son temps de travail effectif ne représentait que 40 heures maximum, la rémunération de 20 heures supplémentaires constituant une compensation des temps de réserve ; qu'en refusant de considérer ce règlement comme la compensation légalement requise, du fait d'un nombre supérieur d'heures de réserve par rapport aux heures ainsi réglées, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-7 du code du travail ; 3°/ qu'en application de l'article L. 3121-6 du code du travail, exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est prise en compte pour le calcul de la durée minimale des repos quotidiens et hebdomadaires prévus par le code du travail ; que la cour d'appel a constaté que les périodes de réserve étaient distinctes des temps de repos, en vertu des stipulations contractuelles confirmées par les plannings provisionnels, et n'étaient pas comprises dans le calcul des temps de repos post courrier et repos hebdomadaires ; qu'en refusant toutefois de tenir compte de ce temps de repos supplémentaire pour apprécier l'existence d'une compensation des heures de réserve effectuées par le salarié, au motif que les périodes d'astreintes «ne peuvent être considéré comme un temps de repos», la cour d'appel a violé l'article L. 3121-6 du code du travail ;

Mais attendu

que toute heure d'astreinte doit donner lieu à rémunération ; Et attendu qu'après avoir d'une part, relevé que le temps de «réserve» durant lequel le salarié était obligé de rester à son domicile ou en tout lieu de son choix dès lors qu'il pouvait être joint par la société Blue Line, notamment à l'aide de moyens de téléphonie mobile et se trouver à moins de deux heures de l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle, afin d'intervenir sur un vol, constituait une astreinte, et d'autre part, constaté l'absence de toute disposition contractuelle ou conventionnelle prévoyant la rémunération de ces "temps de réserve", la cour d'appel a apprécié souverainement la durée des astreintes et le montant de la rémunération revenant au salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen

:

Vu

l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter

la société Blue Line de sa demande en remboursement d'un trop-perçu au titre de la prime de fin d'année 2004, l'arrêt énonce qu'elle a reconnu devant les premiers juges être débitrice de la somme de 317,10 euros à titre de solde de prime de fin d'année 2003, mais en cause d'appel, limite les effets aux seuls jours de travail effectif, excluant dix-sept jours d'arrêts maladie et trente-deux jours de congés payés, générant à son crédit respectivement les sommes de 78,94 euros et 147,55 euros ; qu'il résulte des bulletins de salaire émis au titre de l'année 2003 que le salarié n'a été ni en congé maladie ni en congés payés ;

Qu'en statuant ainsi

, alors que dans ses conclusions la société Blue Line invoquait un trop-perçu au titre de la prime de fin d'année 2004 au cours de laquelle avaient été retenus comme travail effectif dix-sept jours de congé maladie, le salarié ayant bénéficié en outre de trente-deux jours de congés payés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société Blue Line de sa demande en trop-perçu au titre de la prime de fin d'année 2004, l'arrêt rendu le 22 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille onze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour M. Z..., ès qualités PREMIER MOYEN DE CASSATION : IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Blue Line à payer à monsieur X... la somme de 1.585 € à titre d'indemnité de requalification du contrat à durée déterminée du 27 février 2003 ; AUX MOTIFS QUE monsieur X... a été engagé pour faire face à un accroissement temporaire de l'activité, par contrat à durée déterminée du 27 février 2003, à effet au 1er mars 2003 pour se terminer le 30 juin 2003, puis par contrat distinct du 26 juin 2003, à effet au 4 juillet 2003 pour se terminer le 25 octobre 2003, sans référence à un quelconque renouvellement du précédent contrat, et enfin par contrat à durée indéterminée du 22 octobre 2003, à compter du 26 octobre 2003 ; que les contrats à durée déterminée signés par les parties, indépendants l'un par rapport à l'autre, se sont succédé avec un simple intervalle courant du 1er juillet au 3 juillet 2003, inférieur au délai de carence exigé par l'article L 1251-36 du code du travail ; que le fait que monsieur X... ait été rémunéré ou ait bénéficié d'une reprise d'ancienneté au 1er jour d'embauche ne saurait faire échec à la demande de requalification pour non respect du délai de carence ; ALORS QUE constitue un renouvellement du contrat à durée déterminée initial, motivé par un accroissement d'activité, la conclusion d'un second contrat en tout point identique au précédent, soumis au salarié et signé par lui avant le terme convenu par les parties dans le contrat initial ; qu'en jugeant cependant qu'un tel contrat était soumis au délai de carence de l'article L 122-3-11 recodifié 1244-3 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article L 122-1-2 recodifié L 1243-13 du code du travail. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION : IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait fait droit à la demande de la société Blue Line de remboursement d'un trop-perçu au titre de la prime de fin d'année 2004 ; AUX MOTIFS QUE l'employeur a reconnu devant les premiers juges être débiteur de la somme de 317,10 € titre de solde de prime de fin d'année 2003, mais en cause d'appel il en limite les effets aux seuls jours de travail effectif, excluant 17 jours d'arrêts maladie et 32 jours de congés payés, générant à son crédit respectivement les sommes de 78,94 € et 147,55 € ; qu'il résulte des bulletins de salaire émis par l'employeur au titre de l'année 2003 que le salarié n'a été ni en congé maladie ni en congés payés ; ALORS QUE la société Blue Line invoquait dans ses conclusions d'appel un trop-perçu au titre de la prime de fin d'année 2004, au cours de laquelle ont été retenus comme travail effectif 17 jours de congés maladies, le salarié ayant bénéficié en outre cette année là du paiement de 32 jours de congés payés, tandis qu'il n'avait droit qu'au paiement de 30 jours, soit un trop-perçu d'un montant respectivement de 90,61 € et 78,94 € dont le jugement avait ordonné le remboursement ; qu'en affirmant que le tropperçu invoqué par l'employeur se rapportait à l'année 2003, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Blue Line et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION : IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Blue Line à payer à monsieur X... la somme de 25.000 € au titre des heures d'astreinte réalisées; AUX MOTIFS QUE monsieur X..., hors période d'activité de vol et de congés sous toutes ses formes, se trouve contractuellement en état de «réserve» permanent, pour lequel ne sont définies ni les modalités d'ouverture ou fermeture de cette période, ni la quantification des heures affectées à cette période ; qu'il verse aux débats des plannings prévisionnels, desquels il résulte qu'il se trouve placé, semaine après semaine, de jour comme de nuit, soit en repos post courrier ou repos hebdomadaire, soit en activités de vol, soit en congés payés, soit en «réserve», à l'exception de quelques jours ne comportant aucune mention ; que le quantum des heures qualifiées de «réserves» sur les plannings produits s'élève à 3.557,35 heures sur 20 mois ; que si l'employeur conteste la pertinence des plannings prévisionnels versés au débats, affirmant délivrer des plannings définitifs, il reconnaît dans ses écritures que les modifications apportées au planning prévisionnel ne le sont que de façon marginale ; que les rapports d'activité et bulletins de salaire ne comportent aucun élément relatif à ce «temps de réserve » qui ne sont ni transcrits ni comptabilisés ; que monsieur X... n'a pas bénéficié de rémunération spécifique pour les temps ou il est mentionné en réserve ; que les affirmations de l'employeur selon lesquelles les périodes de réserves correspondent au temps rémunéré comme un temps plein à savoir 60 heures sur un travail effectif de 40 heures, n'ont fait l'objet d'aucune contractualisation ou définition avec le salarié et sont en contradiction avec le planning prévisionnel comportant une quantité d'heures de réserve très supérieure ; qu'en l'absence de dispositions conventionnelles, il appartient au juge d'apprécier le montant de la compensation financière susceptible de revenir au salarié au regard des sujétions ; que si les périodes d'astreinte ne constituent pas un temps de travail effectif, elles ne peuvent être considérées comme un temps de repos ; que si l'employeur affirme avoir consenti une indemnisation financière et des repos compensateur, il n'en démontre pas la matérialité à hauteur des astreintes imposées au salarié, en l'absence de toute comptabilisation effective de ces heures d'astreinte ; que celles-ci peuvent être quantifiées à 2.980 heures ; que le salarié est fondé à obtenir une compensation financière à hauteur de 25.000 € ; 1°) ALORS QU' en jugeant que le salarié se trouvait en état de réserve permanent, pour lequel ne sont définies ni les modalités d'ouverture et de fermeture de cette période ni la quantification des heures affectées à cette période, tout en relevant la remise systématique au salarié, quinze jours à l'avance, d'un planning prévisionnel précisant l'amplitude de ce temps de réserve, sur la base duquel elle a calculé les heures de réserve effectué par le salarié au cours des 20 mois d'activité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article L 212-4 B recodifié L 3121-8 du code du travail ; 2°) ALORS QUE les périodes d'astreinte ne constituent pas un temps de travail effectif et n'ont pas à être réglées comme tel ; qu'en l'espèce, le salarié percevait un minimum garanti correspondant à 60 heures de travail effectif, tandis que son temps de travail effectif ne représentait que 40 heures maximum, la rémunération de 20 heures supplémentaires constituant une compensation des temps de réserve ; qu'en refusant de considérer ce règlement comme la compensation légalement requise, du fait d'un nombre supérieur d'heures de réserve par rapport aux heures ainsi réglées, la cour d'appel a violé l'article L 212-4 B recodifié L 3121-7 du code du travail ; 3°) ALORS QU' en application de l'article L 212-4 B recodifié L 3121-6 du code du travail, exception faite de la durée d'intervention, la période d'astreinte est prise en compte pour le calcul de la durée minimale des repos quotidiens et hebdomadaires prévus par le code du travail ; que la cour d'appel a constaté que les périodes de réserve étaient distinctes des temps de repos, en vertu des stipulations contractuelles confirmées par les plannings provisionnels, et n'étaient pas comprises dans le calcul des temps de repos post courrier et repos hebdomadaires ; qu'en refusant toutefois de tenir compte de ce temps de repos supplémentaire pour apprécier l'existence d'une compensation des heures de réserve effectuées par le salarié, au motif que les périodes d'astreintes « ne peuvent être considéré comme un temps de repos », la cour d'appel a violé l'article L 212-4 B recodifié L 3121-6 du code du travail.