Cour de cassation, Troisième chambre civile, 12 septembre 2012, 11-17.564

Synthèse

Voir plus

Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2012-09-12
Cour d'appel de Paris
2011-03-09

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Paris, 9 mars 2011), qu'en 1994, la société civile immobilière Habitat Marais (SCI) a acquis un immeuble, qu'elle a revendu par lots en s'engageant à faire réaliser des travaux de réhabilitation ; que la SCI a souscrit une police dommages-ouvrage auprès de la société Albingia ; que les travaux ont été confiés à la société Aleph Bâtir, assurée auprès de la société Axa, sous la maîtrise d'oeuvre d'exécution de M. X... ; que la société Aleph bâtir a sous-traité le lot VMC à la société S2A, assurée par la Société mutuelle assurances du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), et le lot couverture-zinguerie à la société La Corrézienne, assurée par la société Axa ; qu'après expertise, le syndicat des copropriétaires a assigné les divers intervenants à l'acte de construire et les assureurs en indemnisation de ses préjudices ;

Sur le deuxième moyen

, ci-après annexé : Attendu que le syndicat des copropriétaires s'étant borné à conclure qu'il était fondé à exercer une action directe contre la société SMABTP, assureur de la société S2A, et contre la société Axa, assureur de la société La Corrézienne, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à des recherches qui ne lui étaient pas demandées ;

D'où il suit

que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen

:

Vu

l'article 1792-6 du code civil ;

Attendu que pour débouter le syndicat des copropriétaires de ses demandes formées au titre de la responsabilité décennale contre la société Albingia, la société Axa, assureur de la société Aleph bâtir, M. X... et son assureur la MAF, l'arrêt retient

que l'élément volontariste de la réception tacite n'est pas établi et qu'à défaut de réception les assureurs responsabilité civile décennale doivent être mis hors de cause ;

Qu'en statuant ainsi

, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la réception tacite n'était pas caractérisée par les circonstances que le maître de l'ouvrage avait pris possession de l'immeuble afin de procéder à sa revente et que les travaux avaient été payés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le troisième moyen

:

Vu

l'article 624 du code de procédure civile ; Attendu que la disposition déboutant le syndicat des copropriétaires de ses demandes formées au titre de la responsabilité décennale attaquée par le premier moyen se rattachant par un lien de dépendance nécessaire au chef critiqué par le troisième moyen, la cassation de l'arrêt sur le premier moyen entraîne, par voie de conséquence, l'annulation de la disposition relative à la condamnation de M. X... ;

PAR CES MOTIFS

: CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes formées à l'encontre de la société Axa, prise en sa qualité d'assureur de la société La Corrézienne, et de la société SMABTP, prise en sa qualité d'assureur de la société S2A, l'arrêt rendu le 9 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie, sur le surplus, devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne la société Albingia, la société Axa France IARD et la société MAF aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Albingia, la société Axa France IARD et la société MAF, ensemble, à payer au syndicat des copropriétaires 33 rue des Tournelles à Paris 3e la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze septembre deux mille douze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires 33 rue des Tournelles à Paris PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR dit qu'il n'y avait pas eu de réception des travaux et d'AVOIR débouté le syndicat des Copropriétaires du 33, rue des Tournelles 75003 PARIS de ses demandes autres que celles auxquelles il a été fait droit aux termes du dispositif de l'arrêt attaqué et particulièrement de ses demandes à l'encontre de l'architecte et des assureurs AXA France IARD, ALBINGIA, SMABTP et MAF ; AUX MOTIFS QUE « la SCI HABITAT MARAIS a acquis un ensemble immobilier rue des Toumelles le 5 octobre 1994. Elle a placé cet ensemble sous le régime de la copropriété et a vendu les lots à divers acquéreurs avec engagement de faire réaliser des travaux de réhabilitation des parties communes et privatives au plus tard le 30 septembre 1999. Elle a souscrit une police d'assurance dommages à l'ouvrage auprès d'ALBINGIA et a confié ces travaux à la société ALEPH BA TIR selon un devis estimatif du 21 septembre 1998, pour être exécutés sous la maîtrise d'oeuvre d'exécution de Paul X... conformément au contrat passé le 14 mai 1999. L'architecte a dressé un procès-verbal dont il résulte qu'il a été procédé à la réception des travaux avec réserves le 30 octobre 2000 à 18. 00 heures. L'architecte a signé ce procès-verbal ainsi que les entreprises REDEP, S2A, MAR. GUET et Européenne de Menuiserie. Ni la SCI, ni l'entreprise ALEPH BA TIR, toutes deux représentées par M Y..., si on en croit la double mention de son nom sur le procès verbal, n'ont signé la réception. La copropriété soutient le contraire en s'appuyant sur l'expert qui estime que la calligraphie du nom figurant sur le procès-verbal est identique à celle de sa feuille de présence. La comparaison des écritures ne permet ni d'exclure cette hypothèse, ni de la retenir comme évidente. En tout état de cause, elle n'établirait que la présence de M Y... lors de la visite de réception et non l'existence d'une manifestation non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir l'ouvrage. Il en résulte que le procès-verbal du 30 octobre 2000 ne vaut pas réception des travaux et que l'élément volontariste de la réception tacite n'est pas établi. L'ouvrage n'est donc pas réceptionné. La copropriété ne demande pas que soit prononcée la réception judiciaire des travaux » ; ET QUE « Les assureurs responsabilité civile décennale des constructeurs doivent être mis hors de cause à défaut de réception. La garantie de l'assureur dommages ouvrage est recherchée par la copropriété du chef des désordres décennaux après réception qu'ils soient réservés ou non. On a vu qu'il n'y avait pas réception. La garantie avant réception en cas de résiliation du marché pour inexécution par l'entreprise de ses obligations n'est pas recherchée. Il doit donc être mis hors de cause. L'application de la règle proportionnelle conduit à réduire à néant la garantie due pour les chantiers qui n'ont pas été déclarés. Cette réduction est opposable au tiers lésé » ; 1) ALORS QUE la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ; qu'en écartant l'existence d'une réception expresse au prétexte que le procès-verbal du 30 octobre 2000 n'avait pas été signé par le maître de l'ouvrage, mais par l'architecte Paul X..., sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions d'appel page 32), si l'architecte n'avait pas reçu mandat du maître de l'ouvrage pour procéder à la réception, quand l'exposant versait aux débats (production d'appel n° 16) un courrier de la SCI HABITAT MARAIS indiquant elle-même que la réception avait été réalisée « par notre architecte », la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1792-6 du Code civil ; 2) ALORS en outre QU'en affirmant péremptoirement que l'élément volontariste de la réception tacite n'était pas établi faute pour le maître de l'ouvrage d'avoir signé le procèsverbal du 30 octobre 2000, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions d'appel page 31 et s.), si la réception tacite n'était pas caractérisée par les circonstances, en premier lieu, que le maître de l'ouvrage n'avait jamais contesté la validité du procès-verbal de réception signé par l'architecte le 30 octobre 2000 y compris au cours des opérations d'expertises ou lors des assemblées générales de copropriété, en deuxième lieu, que le maître de l'ouvrage avait pris possession de l'immeuble afin de procéder à la revente, et en troisième lieu, que les travaux avaient été payés, aucune réclamation n'ayant jamais été formulée à ce titre par les entreprises chargées des travaux qui avaient toutes signé le procès-verbal de réception, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6 du Code civil. 3) ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en retenant que « L'application de la règle proportionnelle conduit à réduire à néant la garantie due pour les chantiers qui n'ont pas été déclarés. Cette réduction est opposable au tiers lésé », quand ni la compagnie AXA France IARD, ni la société ALBINGIA, ni la SMABTP n'invoquaient un défaut de déclaration d'un risque, la Cour d'appel a violé l'article 4 et l'article 16 du Code de procédure civile ; 4) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de motiver leurs décisions ; qu'en affirmant que « L'application de la règle proportionnelle conduit à réduire à néant la garantie due pour les chantiers qui n'ont pas été déclarés. Cette réduction est opposable au tiers lésé » sans préciser quel contrat d'assurance aurait été concerné par un prétendu défaut de déclaration d'un risque, sans constater que l'obligation de déclaration évoquée aurait été valablement et clairement stipulée et sans dire d'où il aurait résulté que le chantier litigieux n'aurait effectivement pas été déclaré auprès d'un assureur quelconque, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR débouté le syndicat des Copropriétaires du 33, rue des Tournelles 75003 PARIS de ses demandes autres que celles auxquelles il a été fait droit aux termes du dispositif de l'arrêt attaqué et particulièrement de ses demandes à l'encontre de la compagnie AXA France IARD assureur de la société LA CORREZIENNE CPBE et de la société SMABTP assureur de la société S2A ; AUX MOTIFS QUE « la copropriété recherche la responsabilité des sociétés S2A pour 29. 125, 40 € (ventilation mécanique) et celle de la Corrézienne CPBE pour 16. 789, 25 € (travaux de couverture zinguerie). Les travaux de l'expert caractérisent les fautes d'exécution des sous-traitants et permettent de retenir leur responsabilité à concurrence de 29. 125, 40 € pour la ventilation et de 12. 811, 11 € pour les travaux de couverture. Ces sommes ne viennent pas en concours avec celles qui sont imputées à l'architecte » ; ET QUE « Les assureurs responsabilité civile décennale des constructeurs doivent être mis hors de cause à défaut de réception. La garantie de l'assureur dommages ouvrage est recherchée par la copropriété du chef des désordres décennaux après réception qu'ils soient réservés ou non. On a vu qu'il n'y avait pas réception. La garantie avant réception en cas de résiliation du marché pour inexécution par l'entreprise de ses obligations n'est pas recherchée. Il doit donc être mis hors de cause. L'application de la règle proportionnelle conduit à réduire à néant la garantie due pour les chantiers qui n'ont pas été déclarés. Cette réduction est opposable au tiers lésé » ; 1) ALORS QU'en omettant de rechercher si la compagnie AXA France IARD n'était pas tenue de garantir la société LA CORREZIENNE CPBE au titre de la garantie responsabilité civile quand la compagnie AXA France IARD admettait elle-même que cette garantie était due dès lors qu'était faite « la démonstration d'une faute imputable à la société CORREZIENNE CPBE qui soit en relation directe avec le préjudice invoqué par le syndicat des copropriétaires » (conclusions d'appel d'AXA page 9) et quand elle avait elle-même relevé « les fautes d'exécution » de la société LA CORREZIENNE CPBE, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 124-1 et suivant du Code des assurances ; 2) ALORS QU'en omettant de rechercher si la compagnie SMABTP n'était pas tenue de garantir la société S2A au titre de la garantie responsabilité civile quand elle avait ellemême relevé « les fautes d'exécution » de la société S2A, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 124-1 et suivant du Code des assurances. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la responsabilité de l'architecte au paiement de la somme de 16. 110, 82 euros concernant l'isolation acoustique et l'habillage d'une souche métallique et de l'avoir exclue pour l'ensemble des autres désordres ; AUX MOTIFS QUE « La copropriété recherche la condamnation de l'architecte pour l'ensemble des désordres alors que l'expert propose de retenir sa responsabilité pour un certain nombre de désordres : l'isolation acoustique (11. 313, 23 €) l'habillage d'une souche métallique (4. 797, 59 €) les travaux de plomberie (10. 730, 46 €), les travaux de couverture (12. 811, 11 €). Celui-ci n'est intervenu qu'au stade de la direction des travaux, mais il n'a pas vu les erreurs et omissions entachant la conception des ouvrages ; il aurait manqué de vigilance dans la surveillance des travaux de plomberie et de couverture. La nature des désordres limités à des fautes ponctuelles d'exécution ne permet pas d'accepter l'avis de l'expert sur ce point. La responsabilité de l'architecte sera donc retenue à concurrence de 11. 313, 23 + 4. 797, 59 = 16. 110, 82 €. Il n'y a pas lieu de suivre plus avant la copropriété dans ses demandes » ; 1) ALORS QUE toute faute engage la responsabilité de son auteur dès lors qu'elle a contribué à la réalisation du dommage ; qu'en affirmant que la responsabilité de l'architecte, en charge de la surveillance des travaux, ne pouvait être retenue que pour les désordres d'isolation acoustique et d'habillage d'une souche métallique, sans dire en quoi les autres désordres auraient exclusivement relevé d'un défaut de conception pour laquelle il n'avait reçu aucune mission, ni en quoi ils n'auraient pas pu être décelés au cours de l'exécution des travaux que l'expert devait surveiller, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ; 2) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de motiver leurs décisions ; qu'en affirmant péremptoirement que certains désordres étaient limités à des fautes ponctuelles d'exécutions sans dire sur quels éléments elle fondait son appréciation, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.