Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 10 mars 2015, 12-16.956, Publié au bulletin

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2015-03-10
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
2012-02-02

Résumé

La radiation du rôle de la Cour de cassation d'un premier pourvoi prononcée, en application de l'article 1009-1 du code de procédure civile pour inexécution de l'arrêt attaqué, mesure d'administration judiciaire, n'entre pas dans les prévisions de l'article 621 du même code et est dès lors sans incidence sur le sort d'un second pourvoi formé avant l'ordonnance de radiation

Texte intégral

Attendu, selon l'arrêt attaqué

(Aix-en-Provence, 2 février 2012), que la société GTD Absmark (la société) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 21 janvier et 16 juin 2008, la date de cessation des paiements étant fixée au 15 novembre 2007 ; que, le 18 février 2009, le liquidateur a assigné M. X..., gérant de la société, en paiement de l'insuffisance d'actif ; Sur la recevabilité du pourvoi contestée par la défense : Vu l'avis rendu par la deuxième chambre civile, le 27 novembre 2014 ; Vu les articles 621 et 1009-1 du code de procédure civile ; Attendu que le liquidateur conteste la recevabilité du pourvoi formé par M. X... le 4 avril 2012 au motif que ce dernier a déposé un précédent pourvoi le 2 avril 2012, enregistré sous le n° R 12-16. 783 et radié du rôle de la Cour de cassation le 4 juillet 2013 ; Mais attendu que la radiation du rôle de la Cour de cassation d'un premier pourvoi prononcée, en application de l'article 1009-1 du code de procédure civile pour inexécution de l'arrêt attaqué, mesure d'administration judiciaire, n'entre pas dans les prévisions de l'article 621 du même code et est dès lors sans incidence sur le sort d'un second pourvoi formé avant l'ordonnance de radiation ;

Sur le moyen

unique :

Attendu que M. X... fait grief à

l'arrêt de le condamner à supporter la somme de 100 000 euros au titre de l'insuffisance d'actif alors, selon le moyen : 1°/ qu'appelés à se prononcer sur la condamnation d'un dirigeant à contribuer à l'insuffisance d'actif pour avoir omis de déclarer l'état de cessation des paiements, on sait que les juges du fond sont tenus, à la date précise à laquelle ils font remonter l'existence de la cessation des paiements, de caractériser l'impossibilité pour le débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ; qu'en reprochant à M. X... d'avoir omis de déclarer en temps utile l'état de cessation des paiements de la société sans préciser le jour exact comme étant celui de la cessation des paiements lequel constituait la condition nécessaire pour retenir à l'encontre du dirigeant la déclaration tardive de la cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 2°/ qu'en reprochant à M. X... d'avoir omis de déclarer en temps utile l'état de cessation des paiements de la société sans préciser l'existence ou le montant de l'actif disponible, au jour retenu comme celui de la cessation des paiements, pour caractériser à l'encontre du dirigeant la déclaration tardive de la cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 3°/ que M. X... a rappelé dans ses conclusions demeurées sans réponse que la société avait perdu son principal client, la société Orange, qui avait décidé d'avoir recours aux services de la société PC Master qui offrait un meilleur service, ainsi qu'en a témoigné le responsable du département formation ; qu'en affirmant que M. X... avait favorisé la société PC Master au détriment de sa société en transférant à la première, le principal client de la seconde sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le choix de la société PC Master ne résultait pas de la seule décision de la société Orange qui n'était pas satisfaite des prestations de la société, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 4°/ que seule une faute de gestion antérieure à l'ouverture d'une procédure collective peut justifier que le dirigeant soit condamné à contribuer l'insuffisance d'actif de la société ; qu'en reprochant à M. X... d'avoir transféré à la société PC Master l'unique client de la société à compter du mois de janvier 2008, comme le démontrent les courriels du 23 janvier 2008 et du 26 avril 2010, soit après le prononcé du redressement judiciaire de la société, le 21 janvier 2008, quand la condamnation à contribuer à l'insuffisance d'actif social ne peut être justifiée que par une faute antérieure à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ; 5°/ qu'en se bornant à énoncer, pour évaluer l'insuffisance d'actif à la somme de 100 000 euros, que le montant de l'actif est négligeable après avoir fixé le passif admis à la somme de 101 432, 82 euros, la cour d'appel qui s'est abstenue d'évaluer le montant de l'actif, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

Mais attendu

, en premier lieu, que l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal, susceptible de constituer une faute de gestion, s'apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report ; qu'ayant relevé que la date de cessation des paiements avait été fixée au 15 novembre 2007 par le jugement d'ouverture, la cour d'appel en a exactement déduit que M. X..., en déclarant la cessation des paiements de la société le 21 janvier 2008, avait commis une faute de gestion ; Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt constate que le passif déclaré admis définitivement s'élève à la somme de 101 432, 82 euros et que l'actif est négligeable ; que par cette seule constatation, faisant apparaître qu'au moment où elle a statué, l'insuffisance d'actif était certaine, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; Attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel a relevé que la société débitrice a été concurrencée, dès 2005, par la société PC Master, créée et dirigée également par M. X..., et que le transfert du principal client à cette société est intervenu au début du mois de janvier 2008 à la demande expresse de M. X... ; que par ces constatations et appréciations, écartant la prise en considération d'une faute postérieure à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel, sans avoir à procéder à la recherche visée à la troisième branche, que ces constatations et appréciations excluaient, a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS

: REJETTE le pourvoi ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE

au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour M. X... Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que M. X... avait commis des fautes de gestion en rapport avec l'insuffisance d'actif de la procédure de liquidation judiciaire de la société GTD ABSMARK et D'AVOIR condamné M. X... à payer à la société GAUTHIER-SOHM, ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société GTD ABSMARK, la somme de 100. 000 € au titre de l'insuffisance d'actif ; AUX MOTIFS QUE la société GTD ABSMARK, créée en avril 2000, a pour objet social, directement ou indirectement, en France ou à l'étranger, des prestations de services diverses, importation, exportation, formation, fabrication, diffusion et vente en gros ou en détail de tous produits manufacturés et non manufacturés y compris alimentaires ou diététiques, ainsi que la vente ambulante de tous articles non réglementés, toutes opérations mobilières, immobilières, commerciales et financières, se rattachant directement ou indirectement, en totalité ou en partie à l'objet ci-dessus ou à tout autre similaire, connexe ou susceptible d'en faciliter la réalisation, l'extension ou le développement ; que M. Fabien X... en est le gérant ; qu'il est constant que cette société collaborait pour des prestations internet avec la société EQUANT qui est devenue une filiale de FRANCE TELECOM-ORANGE, cette société étant son principal client ; que M. X... est par ailleurs associé de la SARL PC MASTER, créée le 3 mars 2005, dont il détient 400 des 1. 000 parts sociales et dont il est le gérant statutaire ; que cette société a également pour objet principal, directement ou indirectement, en France ou à l'étranger, des prestations de services diverses en informatique, réparation, dépannage, fabrication, diffusion et vente en gros ou en détail, prestations de services diverses, importation, exportation, formation, fabrication, diffusion et vente en gros ou en détail de tous produits manufacturés et non manufacturés, y compris alimentaires ou diététiques, ainsi que la vente ambulante de tous articles non réglementés, toutes opérations mobilières, immobilières, commerciales et financières, se rattachant directement ou indirectement, en totalité ou en partie à l'objet ci-dessus ou à tout autre similaire, connexe ou susceptible d'en faciliter la réalisation, l'extension ou le développement ; qu'ainsi l'objet social des deux sociétés GTD ABSMARK et PC MASTER sont similaires pour partie, celui de la société GTD ABSMARK étant inclus dans celui de la société PC MASTER, ce qui explique que la société PC MASTER ait pu sans aucun problème reprendre la totalité de l'activité de la société GTD ABSMARK pour le compte d'ORANGE ; que le chiffre d'affaires de la société GTD ABSMARK a connu une baisse constante à partir de 2005 puisque d'un montant de 238. 344 euros en 2005, il est passé à 131. 484 € en 2006 et à 59. 400 euros en 2007 ; que la société CORE NETWORKS a obtenu le 23 juin 2006, par ordonnance de référé, la condamnation de la société GTD ABSMARK au paiement d'une somme de 105. 642 euros avec délais de paiement de 18 mois ; que dès juin 2007 la société PC MASTER s'est vue confier de nombreuses commandes par FRANCE TELECOM et par ORANGE, les prestations commandées étant alors sous-traitées ; qu'il résulte des éléments du dossier que la société GTD ABSMARK s'est trouvée confrontée dès 2005 à la concurrence de la société PC MASTER, créée par son gérant également dirigeant de sa concurrente, et a connu concomitamment une baisse de commandes de son principal client ; que la société GTD ABSMARK, déjà en difficulté comme en atteste sa condamnation en 2006 au paiement de factures dues à sa sous-traitante, avec délais de paiement de 18 mois, a vu sa situation s'aggraver au cours des années suivantes et son chiffre d'affaires s'écrouler ; que favoriser une société concurrente au détriment d'une autre constitue pour M. X..., gérant et associé des deux sociétés, une faute de gestion, ne pouvant que nuire à l'exploitation et au développement de la société GTD ABSMARK ; que cette politique de basculement du principal client sur la société PC MASTER s'est parachevée par le transfert définitif d'ORANGE sur PC MASTER intervenu début janvier 2008 à la demande expresse de M. X..., comme le démontrent les courriels tant d'ORANGE en date du 23 janvier 2008 et du 26 avril 2010, que de M. X... du 4 février 2008, la société ORANGE à partir de janvier 2009 ne travaillant plus qu'avec la seule société PC MASTER et ayant effacé toutes les adresses et contacts qu'elle pouvait avoir avec la société GTD ABSMARK, M. X... précisant à Mme Y..., l'unique salariée de GTD ABSMARK travaillant dans les locaux de la société PC MASTER et figurant dans l'organigramme de l'équipe de PC MASTER, " MANDJEEP a prévenu le staff d'Orange qu'il ne fallait plus écrire à ABSMARK " et l'invitant à répondre systématiquement à Orange avec le mail de PC MASTER ; que la motivation invoquée par M. X... à ce transfert, soit sa volonté de sauver GTD ABSMARK en la faisant travailler comme sous-traitante, est inefficace ; qu'en outre, cette manière de procéder a privé cette société de la possibilité de proposer un plan de redressement et a eu pour effet d'entraîner sa mise en liquidation judiciaire ; que les deux attestations versées aux débats par M. X... émanant de Mme Z...et de Mme A...ne démontrent aucunement que le mandataire judiciaire ait approuvé le transfert opéré à la demande du gérant, et non du client comme annoncé dans ces attestations, ni que les " sommes injectées " par M. X..., sans qu'aucune précision ne soit fournie sur leurs dates et leurs montants, aient été de nature à redresser la situation obérée de la société GTD ABSMARK ; que ces fautes de gestion sont d'autant plus graves qu'elles émanent d'un dirigeant ayant déjà connu deux procédures collectives (la société INTERNATIONAL TRADING SERVICES le 16 mars 1998, et la société ABSMARK créée en 1998 ayant le même objet que la précédente) qui devait être d'autant plus attentif à la gestion de la société GTD ABSMARK créée en 2000, après la liquidation d'ABSMARK ; qu'il apparaît en outre que M. X... n'a pas déclaré la cessation de paiements de la société GTD ABSMARK dans le délai requis ; que la déficience apportée par M. X... dans la gestion de la société GTD ABSMARK se manifeste encore par la situation débitrice de son compte courant en cours de période d'observation, alors qu'il était créditeur de 20. 516 euros à l'ouverture de la procédure ; que le passif déclaré admis définitivement s'élève à la somme de 101. 432, 82 euros ; que l'actif est négligeable ; que M. X... sera condamné à contribuer à l'insuffisance d'actif à concurrence de la somme de 100. 000 euros ; qu'il sera condamné à verser à la SELARL GAUTHIER-SOHM, ès-qualités, une indemnité de 1. 500 euros ; 1. ALORS QU'appelés à se prononcer sur la condamnation d'un dirigeant à contribuer à l'insuffisance d'actif pour avoir omis de déclarer l'état de cessation des paiements, on sait que les juges du fond sont tenus, à la date précise à laquelle ils font remonter l'existence de la cessation des paiements, de caractériser l'impossibilité pour le débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ; qu'en reprochant à M. X... d'avoir omis de déclarer en temps utile l'état de cessation des paiements de la société GTD ABSMARK sans préciser le jour exact comme étant celui de la cessation des paiements lequel constituait la condition nécessaire pour retenir à l'encontre du dirigeant la déclaration tardive de la cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 624-2 du Code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 2. ALORS QU'en reprochant à M. X... d'avoir omis de déclarer en temps utile l'état de cessation des paiements de la société GTD ABSMARK sans préciser l'existence ou le montant de l'actif disponible, au jour retenu comme celui de la cessation des paiements, pour caractériser à l'encontre du dirigeant la déclaration tardive de la cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 624-2 du Code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 3. ALORS QUE M. X... a rappelé dans ses conclusions demeurées sans réponse que la société GTD ABSMARK avait perdu son principal client, la société ORANGE, qui avait décidé d'avoir recours aux services de la société PC MASTER qui offrait un meilleur service, ainsi qu'en a témoigné le responsable du département formation (conclusions, p. 8) ; qu'en affirmant que M. X... avait favorisé la société PC MASTER au détriment de la société GTD ABSMARK en transférant à la première, le principal client de la second sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le choix de la société PC MASTER ne résultait pas de la seule décision de la société ORANGE qui n'était pas satisfaite des prestations de la société GTD ABSMARK, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 4. ALORS QUE seule une faute de gestion antérieure à l'ouverture d'une procédure collective peut justifier que le dirigeant soit condamné à contribuer l'insuffisance d'actif de la société ; qu'en reprochant à M. X... d'avoir transféré à la société PC MASTER l'unique client de la société GTD ABSMARK à compter du mois de janvier 2008, comme le démontrent les courriels du 23 janvier 2008 et du 26 avril 2010, soit après le prononcé du redressement judiciaire de la société GTD ABSMARK, le 21 janvier 2008, quand la condamnation à contribuer à l'insuffisance d'actif social ne peut être justifiée que par une faute antérieure à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article L 651-2 du Code de commerce ; 5. ALORS QU'en se bornant à énoncer, pour évaluer l'insuffisance d'actif à la somme de 100. 000 €, que le montant de l'actif est négligeable après avoir fixé le passif admis à la somme de 101. 432, 82 €, la cour d'appel qui s'est abstenue d'évaluer le montant de l'actif, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 651-2 du Code de commerce.