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Tribunal administratif de Versailles, 5ème Chambre, 29 novembre 2022, 2107655

Mots clés
société • restitution • principal • compensation • preuve • produits • service • contrat • production • rapport • recouvrement • qualification • réduction • réparation • requête

Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Versailles
29 novembre 2022

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
  • Numéro d'affaire :
    2107655
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Rapporteur : Mme Cerf
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : CABINET VILLEMOT CHAUMONT QUÉRÉ
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Résumé

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Parties demanderesses
Personne physique anonymisée
défendu(e) par CRUVEILHER Catherine du Cabinet CHAUMONT QUERE & ASSOCIESCabinet CHAUMONT QUÉRÉ & ASSOCIES
Personne physique anonymisée
défendu(e) par CRUVEILHER Catherine du Cabinet CHAUMONT QUERE & ASSOCIESCabinet CHAUMONT QUERE & ASSOCIES

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Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une réclamation, soumise d'office par l'administrateur des finances publiques en charge de la direction des vérifications nationales et internationale en application des articles R. 199-1 et R. 200-3 du livre des procédures fiscales le 7 septembre 2021, et un mémoire enregistré le 22 juillet 2022, M. et Mme C I, représentés par la SELARL Villemot-Chaumont-Quéré agissant par Me Cruveilher, demandent au tribunal : 1°) à titre principal de prononcer la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2010 à 2014, pour un montant total de 1 741 994 euros en droits, majorations et intérêts de retard ; 2°) à titre subsidiaire d'ordonner la restitution des prélèvements sociaux acquittés en 2012 sur les dividendes libérés par la société Demeter, assortis des intérêts moratoires au taux légal, le cas échéant par voie de compensation ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Ils soutiennent que : En ce qui concerne les conclusions à titre principal : - La procédure de l'abus de droit n'est pas applicable, les conditions prévues à l'article L. 64 du LPF n'étant pas remplies ; en effet, la localisation de l'activité de promotion internationale dans une filiale étrangère ne constitue pas un montage artificiel ; l'activité rémunérée a bien été réalisée au Luxembourg par les société CDIL, puis CIL, qui disposent de moyens matériels et humains, et a organisé seule les évènements de promotions, avec la contribution apportée en industrie par des associés de la société CDIF, et non en France par la société CGSA comme l'a estimé le service ; la JP de CE n°247729, Société Pléiade (18 fév. 2004) n'est pas transposable à l'espèce dès lors que dans cette affaire la société luxembourgeoise n'avait aucun d'employé ; la localisation de l'activité de promotion dans une filiale luxembourgeoise n'a pas été inspirée par un but exclusivement fiscal, mais dans le but de " structurer cette activité pour répondre à un objectif économique et financier ", dans un contexte de développement international rapide des activités de la société autour de l'année 2009 ; en outre la perception des dividendes de la CDIF n'a pas procuré d'avantage fiscal à un certain nombre de ses associés, par ailleurs gérants-salariés au sein de la CGSA ; cette perception n'a, en particulier, pas permis à M. B E de bénéficier d'un avantage fiscal ; en outre, à défaut d'avoir remis en cause le traitement fiscal des revenus perçus de la sociétés CDIF de ses filiales luxembourgeoises l'administration n'a pas justifié que ces revenus dussent être imposés en tant que salaires, une fois versés aux associés ; contrairement à ce que soutient l'admin, la convention judiciaire d'intérêt public (CPIJ) conclue entre la CGSA et le parquet dans le cadre des poursuites pénales engagées à son encontre ne suffit pas à établir le caractère 'frauduleux' des agissements de celle-ci ; - La participation de M. I à ces activités de promotions, distinctes de ses activités de gestion de fonds auxquelles elle n'est pas nécessairement liée, ne s'est pas effectuée dans le cadre du contrat de travail le liant à la CGSA, et s'exerçait en dehors de tout lien de subordination, alors même que la société CGSA était actionnaire majoritaire de la société CDIF ; tous les gérants de la CGSA n'ont, d'ailleurs, pas participé aux opérations de développement international et ne sont pas associés de la CDIF ; l'administration n'a pas justifié l'existence d'un tel lien de subordination ; le fait que les activités de promotion aient été exercées par les gérants de CGSA dès l'année 2009, soit antérieurement à la constitution de la CDIF, en 2010, ne démontre pas que ces actions s'inscrivaient nécessairement dans le cadre de leurs fonctions salariées ; - En tout état de cause l'existence d'un tel abus ne leur est pas opposable dès lors que M. I n'avait pas connaissance du caractère artificiel du dispositif mis en place par son employeur, et n'a pas délibérément cherché à éluder l'impôt ; - Les produits distribués aux associés de CDIF constituent des dividendes et non des rémunérations ; les versements de la CDIF correspondent en réalité à la rémunération de l'apport en industrie des gérants associés de la société CDIF, pour leur activité de promotion internationale de la société H, confiée par celle-ci aux sociétés CDIL puis CIL ; ils ne rémunèrent ainsi pas leur apport en capital et ne sont pas davantage un complément de salaire déguisé ; en effet, la répartition des bénéfices d'une SAS peut être dé-corrélée du capital détenu par chacun des associés, et dépendre de l'apport en industrie de chacun d'entre eux ; les statuts de CDIF fixent en effet des clés de répartition des bénéfices tenant compte de l'apport en industrie ; cette répartition n'était donc pas, comme l'a estimé l'administration, établie de manière discrétionnaire par les principaux dirigeants de CGSA, au bénéfice de certains gérants ; en outre il est loisible à l'associé d'une société de choisir entre une rémunération sous forme de dividende ou sous une autre forme ; enfin, l'absence de risque sur investissement ne saurait être avancé par l'administration pour écarter la qualification de dividende ; dès lors que des sommes ont été distribuées à la suite d'une décision régulière de l'assemblée générale, elles doivent recevoir la qualification de dividendes quel que soit par ailleurs leur objet ; - L'administration n'était pas fondée à écarter la société Demeter, qui a perçu les revenus de la CDIF, pour les imposer en tant que revenus entre les mains des époux I ; M. B E n'a en effet perçu aucune distribution de la société Demeter, sauf en 2012, or l'impôt ne saurait porter que sur des revenus dont il a eu effectivement la disposition au cours des années d'imposition ; - La majoration pour abus de droit n'est pas applicable, l'administration ayant admis que M. I n'avait pas été à l'initiative du " montage " allégué ; En ce qui concerne les conclusions subsidiaires : - Les sommes imposées en traitements et salaires ne pouvait donner lieu au paiement à la source des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine dont M. I s'est effectivement acquitté à raison des dividendes de la société Demeter qu'il a perçus en 2012 ; en effet, dès lors que les dividendes versés par la société CDIF ont été requalifiés en traitements et salaires, de tels prélèvements, assis sur les revenus de capitaux mobiliers, ne sont pas fondés ; - Leur contestation à cet égard est recevable sur le fondement du c. de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, et en application de la doctrine exprimée sous la référence BOI-CTX-PREA-10-30-20140625, la requalification opérée par l'administration ayant pour conséquence de mettre en cause le principe même de l'assujettissement des sommes en litige aux prélèvements sociaux acquittés ; il y a lieu, dès lors, d'opérer la compensation des prélèvements acquittés à tort pour un montant de 80 794 euros et des impositions restants à leur charge au titre de la même année ; - Par conséquent, les pénalités mises à leur charge doivent être réduites en conséquence de la réduction ainsi opérée de leurs bases d'imposition pour 2012. Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2022, et un mémoire enregistré le 26 septembre 2022, qu'il n'a pas été jugé utile de communiquer, l'administrateur des finances publiques en charge de la direction des vérifications nationales et internationale conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce que la décharge éventuellement accordée aux requérants au titre de l'année 2012 soit réduite du montant de la CSG et de la CRDS sur les revenus d'activité que M. C I aurait dû supporter à raison des revenus litigieux s'ils avaient été régulièrement imposés dans la catégorie des traitements et salaires. Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme I ne sont pas fondés. Par ordonnance du 16 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2022.

Vu :

- les autres pièces du dossier ; Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. G, - les conclusions de Mme Cerf, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit

: 1. En application des articles R. 199-1 et R. 200-3 du livre des procédures fiscales, le directeur départemental des finances publiques a soumis d'office au tribunal la réclamation du 24 septembre 2018 par laquelle les époux I ont sollicité le dégrèvement des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2010 à 2014, pour un montant total de 1 741 994 euros en droits, majorations et intérêts de retard. Sur le bien-fondé des impositions litigieuses En ce qui concerne l'abus de droit 2. Aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années d'impositions en litige : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. / Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. / Les avis rendus font l'objet d'un rapport annuel qui est rendu public ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque l'administration use des pouvoirs que lui confère ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, ou bien, à défaut, recherchent le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs et n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles. L'administration fiscale apporte cette preuve par la production de tous éléments suffisamment précis attestant du caractère fictif des actes en cause ou de l'intention du contribuable d'éluder ou d'atténuer ses charges fiscales normales. Dans l'hypothèse où l'administration s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au contribuable, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de la réalité des actes contestés ou de ce que l'opération litigieuse est justifiée par un motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer ses charges fiscales normales. 3. En l'espèce, à la suite des vérifications de comptabilité dont ont fait l'objet les sociétés H Gestion SA (CGSA), dont M. I est salarié, et H Distribution Internationale France (CDIF), dans laquelle il avait souscrit 5 % du capital, et après que des demandes d'assistance administrative internationale ont été formulées auprès des autorités fiscales luxembourgeoises, le service, estimant que la société CGSA avait fictivement domicilié l'activité de développement international, effectuée depuis la France par ses gérants, dont M. I, dans les sociétés de droit luxembourgeois H gestion Luxembourg (CGL), H développement international Luxembourg (CDIL) et H international Luxembourg (CIL), dans le seul but de soustraire à l'impôt sur le revenu une partie de leur rémunération ensuite rapatriée sous la forme de produit de participation, et, estimant, d'autre part, que M. I, qui avait connaissance des finalités du dispositif ainsi mis en place, l'avait complété en interposant fictivement la société Demeter, dont il était l'unique actionnaire, a écarté, sur le fondement des dispositions précitées, l'existence desdites sociétés et requalifié les dividendes perçus par M. I, par l'intermédiaire de la société Demeter, en traitements et salaires, et fait application, en dernier lieu et au titre de l'ensemble des années en litige, de la majoration de 40% prévue par les dispositions du b. de l'article 1729 du code général des impôts. M. et Mme I demandent au tribunal de prononcer la décharge des impositions supplémentaires ainsi mises à leur charge à hauteur de la somme de 1 741 994 euros. 4. Il résulte de l'instruction qu'au cours des cinq années en litige, la société anonyme de droit français CGSA qui exerce une activité de gestion de fonds d'investissement, dont M. D H est le président directeur général et M. A F le directeur général délégué, détenait, d'une part, 99,9 % du capital de la société de droit luxembourgeois H Gestion Luxembourg (CGL), et, d'autre part, 53 % du capital de la société par actions simplifiée de droit français H Distribution Internationale France (SAS CDIF), et dont les autres titres étaient détenus par MM. H et F, ainsi que par dix gérants salariés de la société CGSA, dont M. I, associé à hauteur de 5%. La société CGL exerçait une activité d'organisation du réseau de distribution des fonds d'investissement gérés par la CGSA hors de France. La SAS CDIF, avait pour activité, à compter de l'année 2010, la prise, la détention et la cession de toute participation directe ou indirecte, sous quelque forme que ce soit, dans toute entreprise et sociétés ayant pour objet le développement à l'international de la marque H Gestion et de la distribution des fonds. Par ailleurs, au titre des mêmes années, la SAS CDIF détenait elle-même l'intégralité du capital des sociétés de droit luxembourgeois H Distribution Internationale Luxembourg (CDIL) et H International Luxembourg (CIL), l'une et l'autre ayant pour objet social le développement et la promotion à l'international de la marque H Gestion ainsi que le développement et la promotion des fonds gérés par la CGSA et plus généralement toute activité concourant au développement international de la marque et des produits H Gestion au Luxembourg et à l'étranger, la prise de participations dans d'autres entreprises luxembourgeoises ou étrangères, l'acquisition par achat, souscription, ou de toute autre manière ainsi que l'aliénation par vente, échange, ou de toute autre manière de titres, obligations, créances, billets et autres valeurs de toutes espèces, ainsi que la possession, l'administration, la mise en valeur et la gestion de ces participations. Entre 2010 et 2014, la CGSA a, ainsi, rémunéré la société CGL au titre de son activité d'organisation du réseau de distribution des fonds d'investissement gérés par la SA CG hors de France ; la CGL a, d'autre part, rémunéré les sociétés CIDL, en 2010, et CIL, entre 2011 et 2014, au titre de cette même activité ; les recettes ainsi perçues par ces dernières ont été, enfin, reversées, après déduction de charges, à la SAS CDIF, qui détenait l'intégralité de leur capital et dont le chiffre d'affaire était exclusivement composé des distributions effectuées par les sociétés CDIL et CIL ; le bénéfice réalisé par la SAS CDIF était, par la suite, réparti entre ses actionnaires, par le comité des résultat, composé de MM. H, F et de Mme Guillier, secrétaire générale de l'équipe de direction de la CGSA, selon sept critères comprenant, notamment, l'implication des associés dans les activités de développement international, l'existence d'un réseau professionnel actif à l'international, la participation aux actions de promotion et de communication conduites par les filiales de la SAS CDIF. Il est constant que M. I, qui détenait au cours des années d'imposition 5% du capital de la SAS CDIF, soit 75 000 euros correspondant à 500 actions d'une valeur de 150 euros, a perçu, à ce titre, par l'intermédiaire de la société Demeter, des dividendes à hauteur de 525 00 euros en 2010, 700 000 euros en 2011, 473 000 euros en 2012, 907 500 euros en 2013 et 251 000 euros en 2014. 5. Pour établir l'existence d'un abus de droit, l'administration fait valoir, en premier lieu, que les revenus de l'activité de promotion à l'international des fonds H ont été localisés artificiellement dans ses sociétés étrangères. Elle indique que les sociétés CDIL et CIL qui ne disposaient pas de moyens de nature à leur permettre de réaliser des services de promotion à l'international des fonds H, n'employant ni gérants de portefeuille ni salariés, sans lesquels cette activité ne peut être conduite, et ne disposant que de moyens administratifs et organisationnels très limités, et n'ayant comptabilisé aucune charge de personnel ou de sous-traitance liée à cette activité ; elle rappelle que les autorités fiscales luxembourgeoises ont confirmé, en réponse à une demande d'assistance administrative, que les sociétés CDIL et CIL exerçaient des fonctions uniquement administratives. Elle relève, par ailleurs, que les revenus de l'activité de promotion à l'international des fonds H ont été presque intégralement reversés à la SAS CDIF, qui les a réattribués à ses propres actionnaires, par ailleurs salariés et mandataires sociaux de la CGSA. A cet égard, il est constant, ainsi qu'il a déjà été indiqué, que le résultat de la SAS CDIF était exclusivement composé des distributions effectuées par les sociétés CDIL et CIL, elles-mêmes rémunérées par la société CGL, cette dernière étant quant à elle rémunérée par la SA CG. 6. L'administration soutient que l'activité de promotion internationale des produits de la CGSA a été en réalité assurée depuis la France par ses gérants dans le cadre de leur contrat de travail. Elle souligne, à ce titre, que les contrats de travail des gérants ayant bénéficié du dispositif litigieux prévoyaient dans plusieurs cas, et n'excluaient dans aucun cas, l'exercice d'une partie de leur activité salariée à l'étranger, et qu'ainsi les missions de promotion des produits de gestion commercialisés par la CGSA ne pouvaient être regardées comme ayant été exercées en dehors de ce cadre. Elle précise que la procédure d'affectation du résultat de la SAS CDIF entre ses associés, indépendante du montant de leur participation au capital, était confiée à un comité composé de trois membres de la direction générale de la société CGSA, parmi lesquels M. Carmignac, président de la CGSA, et M. F, directeur général, témoigne de l'existence d'un lien de subordination, et qu'en outre, le rapport entre la valeur de la participation détenue par M. I dans la SAS CDIF et le montant des dividendes qui lui ont été alloués au cours des années en litige, équivalent au minimum à un taux de retour sur investissement compris entre plus de 300% et près de 2 000 % par an, constitue également un indice que de tels versements doivent être regardés comme un complément de rémunération. 7. L'administration a enfin estimé que l'objectif poursuivi par les salariés et mandataires sociaux de la CGSA était de bénéficier d'une économie d'impôt en appréhendant des revenus de nature salariale sous l'apparence de dividendes, soumis à un régime fiscal plus favorable et à un taux d'imposition inférieur à celui des traitements et salaires. Elle ajoute que ce dispositif a été complété, à l'initiative de M. I, par l'interposition de la société Demeter, qui lui a permis de se placer sous le régime prévu aux article 145 et 216 du code général des impôts. Elle indique, à cet égard et sans être contestée sur ce point, que, alors que les revenus litigieux auraient dû faire l'objet d'une imposition au barème au taux de 41%, ils n'ont été imposées qu'à hauteur de 5% au titre de la quote-part de frais et charges prévue par les dispositions de l'article 216. 8. Ces éléments ne sont pas sérieusement contestés par les requérants qui se bornent à soutenir, d'une part, que la structuration de l'activité de promotion internationale et sa localisation au sein de sociétés luxembourgeoise répondaient à un " objectif économique et financier ", à indiquer que la société CIL a employé, au total, six salariés au cours des cinq années en litige. 9. Si les requérants soutiennent, d'une part, que la participation de M. I aux activités de promotions des produits de la CGSA n'a pas été effectuée dans le cadre de son contrat de travail, et s'exerçait en dehors de tout lien de subordination, que le montant des dividendes versés par la SAS CDIF à ses associés doit être regardée comme la rémunération d'un apport en industrie, et qu'il n'aurait tiré de ce dispositif aucun avantage de nature fiscale, ces seules allégations, qui ne sont pas étayées d'éléments précis et circonstanciés, ne sont pas de nature à remettre en cause le caractère probant et concordant des éléments relevés par l'administration. D'autre part, si M. I fait valoir qu'il n'avait pas connaissance du caractère artificiel d'un tel montage, dont il n'aurait tiré aucun avantage, il ne conteste toutefois pas, l'avoir complété, de sa propre initiative, par l'interposition de la société Demeter, ainsi qu'il a été indiqué au point 6. Eu égard, en outre, à son activité au sein du groupe et à son statut d'associé de la SAS CDIF impliquant une connaissance de l'organisation du groupe H et de l'activité des sociétés, un tel moyen doit être écarté. Enfin, si l'administration a également mentionné, dans ses écritures, la convention judiciaire d'intérêt public conclue entre le procureur financier près le tribunal de grande instance de Paris et la CGSA le 20 juin 2019, et signée par le directeur général délégué de la CGSA, par laquelle la société a " admis la réalité des faits dénoncés comme abusifs par l'administration fiscale et pris acte que cette dernière les considère comme susceptible de constituer un abus du régime mère-fille ", il résulte de l'instruction qu'elle n'a, en tout état de cause, pas établi les éléments caractérisant l'abus de droit sur le fondement de cette seule convention. 10. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'existence d'un abus de droit ayant consisté, pour M. I, à percevoir une partie de sa rémunération sous la forme de revenus de participations dans un but exclusivement fiscal. C'est, par suite, à bon droit qu'elle a imposé lesdites sommes à l'impôt sur le revenu au titre des années 2010 à 2014, dans la catégorie des traitements et salaires. En ce qui concerne le principe d'annualité 11. Si les requérants soutiennent, par ailleurs, qu'ils ne peuvent être imposés à raison des revenus perçus par la société Demeter qui n'ont donné lieu à aucune distribution à leur profit, il résulte de ce qui précède que l'existence de cette société n'est pas opposable à l'administration. Le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'annualité doit donc être écarté comme non-fondé. Sur les pénalités 12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / () / b. 80 % en cas d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; elle est ramenée à 40 % lorsqu'il n'est pas établi que le contribuable a eu l'initiative principale du ou des actes constitutifs de l'abus de droit ou en a été le principal bénéficiaire ; / () ". 13. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, alors même qu'il n'est pas contesté que M. I n'était pas à l'initiative et qu'il n'a pas été le bénéficiaire principal du dispositif qualifié d'abus de droit, lui ayant permis de soustraire une partie de sa rémunération à l'impôt sur le revenu, c'est à bon droit que le service a fait application de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées. 14. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de M. et Mme I tendant à la décharge des impositions en litige ne peuvent qu'être rejetées. Sur la demande de restitution des prélèvements sociaux acquittés en 2012 sur les dividendes de la société Demeter perçus par M. I 15. Aux termes du premier alinéa de l'article 117 quater du code général des impôts, dans sa version applicable entre le 1er janvier 2012 et le 1er janvier 2013 : " I.-1. Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui bénéficient de revenus éligibles à l'abattement prévu au 2° du 3 de l'article 158 peuvent opter pour leur assujettissement à un prélèvement au taux de 21 %, qui libère les revenus auxquels il s'applique de l'impôt sur le revenu ". Aux termes du 2° du 3. de l'article 158 de ce code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les revenus mentionnés au 1° distribués par les sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent ou soumises sur option à cet impôt, ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôt sur les revenus et résultant d'une décision régulière des organes compétents, sont réduits, pour le calcul de l'impôt sur le revenu, d'un abattement égal à 40 % de leur montant brut perçu. A compter du 1er janvier 2009 pour les sociétés étrangères n'ayant pas leur siège dans un Etat de la Communauté européenne, cette disposition est réservée aux revenus distribués par des sociétés établies dans un Etat ou territoire ayant conclu une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ". 16. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. / () / Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction ou à la restitution d'impositions indues, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, révélée par une décision juridictionnelle ou par un avis rendu au contentieux ". 17. En l'espèce, les requérants attestent du paiement des prélèvements sociaux par la production du relevé bancaire de la société Demeter mentionnant un virement d'un montant de 206 472 euros en date du 10 juillet 2012 au profit du service des impôts des entreprises (SIE), ainsi que par la production de la déclaration n° 2777 au titre de juin 2012 indiquant que le montant total à payer comprend le prélèvement forfaitaire libératoire à hauteur de 125 679 euros et les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine à hauteur de 80 793 euros. 18. Il est constant qu'ayant requalifié l'ensemble des sommes ainsi distribués en traitement et salaires, l'administration a retenu, pour déterminer les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu des époux I au titre de l'année 2012, le montant du résultat distribué par la société Demeter après déduction du seul montant du prélèvement forfaitaire libératoire. 19. Toutefois, et ainsi que le font valoir les requérants, dès lors que l'administration a entendu procéder à l'imposition de ces sommes dans la catégorie des traitements et salaires, ces sommes ne pouvaient être également soumise aux prélèvements sociaux frappant les revenus du patrimoine. Il s'ensuit que les requérants sont fondés à solliciter la restitution du montant des prélèvements sociaux dont M. I établit s'être acquitté au titre de l'année 2012 à raison des dividendes versés par la société Demeter, à hauteur du montant, non-contesté, de 80 794 euros, et qu'il y a, par suite, lieu d'ordonner la restitution de cette somme, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale invoquées par l'administration, dès lors qu'en tout état de cause le recouvrement des éventuels rappels de prélèvements sociaux assis sur les traitements et salaires relève de la compétence de l'Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) et que les litiges s'y rapportant relèvent de la compétence du seul juge judiciaire. 20. En revanche, à l'exception des hypothèses particulières prévues à l'article L. 204 du livre des procédures fiscales, une compensation ne peut être opérée sur le fondement de l'article L. 203 du même code qu'à la condition qu'elle concerne un même contribuable, une même période d'imposition et une même imposition. Par suite, une telle compensation étant impossible entre les droits acquittés par les époux I au titre des prélèvements sociaux et les droits dus par eux au titre de l'impôt sur le revenu, ces créances ne peuvent faire l'objet de la compensation sollicitée. 21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme I sont seulement fondés à solliciter la restitution des montants visés au point 20 de la présente décision. Sur les conclusions tendant au paiement des intérêts moratoires : 22. Aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'État est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. ". Selon l'article R. 208-1 du même livre, " Les intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 () sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées au contribuable par le comptable chargé du recouvrement des impôts ". 23. En l'absence de litige né et actuel entre le comptable et les requérants concernant les intérêts moratoires mentionnés par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, les conclusions tendant au paiement desdits intérêts ne peuvent qu'être rejetées. Sur les frais de l'instance : 24. Dans les circonstances de l'espèce, l'Etat n'étant pas la partie perdante à titre principal, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article l. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Il est accordé à M. et Mme I la restitution des prélèvements sociaux acquittés au titre de l'année 2012 pour un montant de 80 794 euros. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. et Mme C I et à l'administrateur des finances publiques en charge de la direction des vérifications nationales et internationale. Délibéré après l'audience du 15 novembre 2022, à laquelle siégeaient : M. Delage, président, Mme Florent, première conseillère, M. Thivolle, conseiller. Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2022. Le rapporteur, Signé G. G Le président, Signé Ph. Delage La greffière, Signé V. Retby La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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