Tribunal de grande instance de Paris, 19 octobre 2017, 2016/12272

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    2016/12272
  • Domaine de propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
  • Numéros d'enregistrement : 002621904-0001
  • Parties : FATBOY THE ORIGINAL BV (Pays-Bas) / EDEN 26 SAS

Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2018-09-11
Tribunal de grande instance de Paris
2017-10-19

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS' JUGEMENT rendu le 19 octobre 2017 3ème chambre 1ère section N° RG : 16/12272 Assignation du 08 août 2016 DEMANDERESSE Société FATBOY THE ORIGINAL B.V. De Steenbok 19-21 5215 MG 'S-HERTOGENBOSCH / PAYS-BAS représentée par Me Myriam MOATTY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0159 DÉFENDERESSE Société EDEN 26 [...] 13001 MARSEILLE représentée par Maître David ELBAZ de l'AARPI GRAUZAM -ELBAZ - SAMAMA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #L0223 COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C, Vice-Présidente Julien R. Juge Aurélie JIMENEZ, Juge assistée de Marie-Aline P, Greffier DEBATS À l'audience du 12 septembre 2017 tenue en audience publique JUGEAIENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort EXPOSE DU LITIGE Créée en 2002, la société de droit néerlandais FATBOY THE ORIGINAL BV est spécialisée dans la conception, la fabrication et la commercialisation d'objets de décoration et design et commercialise ses produits au travers d'un réseau de revendeurs ainsi que sur son site internet fatboy.com. Elle est, en vertu d'une cession inscrite au registre de l'EUIPO le 19 mai 2016 consentie par Monsieur Marijn O, designer créateur du modèle, titulaire des droits de propriété intellectuelle sur le modèle communautaire n° 002621904-0001 déposé le 28 janvier 2015 en classe 06.01 « chaise longue » dans la classification de Locarno : La société FATBOY THE ORIGINAL BV exploite ce modèle décliné en divers coloris sous la marque « LAMZAC » sur son site fatboy.com. La SAS EDEN 26, immatriculée le 16 décembre 2013 au RCS de Marseille, a pour activité principale déclarée l'importation, l'exportation, la distribution et la vente en gros et au détail de tout produit non alimentaire et non soumis à autorisation. Expliquant avoir découvert que la SAS EDEN 26 commercialisait sur son site internet slebag.com, avec une importante communication sur les réseaux sociaux et en utilisant des photographies de son propre site internet, des sièges gonflables dénommés « SLEBAG L'ORIGINAL » constituant des copies serviles de son modèle, la société FATBOY THE ORIGINAL BV l'a mise en demeure, par courrier du 6 juin 2016, de cesser la commercialisation de ces produits et l'usage des photographies de son site internet. Le 29 juillet 2016, elle faisait dresser par huissier de justice un procès-verbal de constat sur le site internet slebag.com. Par ailleurs, la société FAT BOY THE ORIGINAL BV s'est vu notifier le 28 juillet 2016 par les Douanes de Marignane la mise en retenue douanière d'environ 850 sièges gonflables « SLEBAG L'ORIGINAL » importés par la société EDEN 26 depuis la Chine. C'est dans ces circonstances que la société FATBOY THE ORIGINAL BV a, par acte d'huissier du 8 août 2016, assigné la SAS EDEN 26 devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de modèle et en concurrence déloyale et parasitaire. Dans son acte introductif d'instance auquel il sera renvoyé pour un exposé de ses moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société FATBOY THE ORIGINAL B V demande au tribunal, sous le bénéfice de l'exécution provisoire : de dire et juger qu'en fabriquant et/ou en important, en détenant, en offrant en vente et en commercialisant des sièges gonflables reprenant l'ensemble des caractéristiques du modèle communautaire n° 002621904-001, la société EDEN 26 a commis des actes de contrefaçon de ce modèle au préjudice de la société FATBOY THE ORIGINAL B.V. dans les termes des articles 10 et 19 du Règlement (CE) n° 6/2002 ; de dire et juger que la société EDEN 26 s'est également rendue coupable de concurrence déloyale et parasitaire au sens des dispositions de l'article 1382 du code civil et des articles L 120-1 et suivants du code de la consommation, de faire interdiction à la société EDEN 26 de fabriquer ou faire fabriquer, détenir, exporter, offrir en vente et/ou vendre des sièges gonflables contrefaisants sous la dénomination « SLEBAG», « SLEBAG L'ORIGINAL », ou toute autre dénomination, sous astreinte de 500 € par produit litigieux dont la fabrication, l'importation, la détention, l'offre en vente, et/ou la vente auront pu être constatées postérieurement à la signification du jugement à intervenir, et préciser que cette astreinte sera provisoire pendant une durée de deux mois à dater de la signification du jugement à intervenir et qu'il sera ensuite statué par la chambre du tribunal de céans qui aura rendu le jugement ; d'ordonner la confiscation et la remise à la société FATBOY THE ORIGINAL B.V., en vue de leur destruction aux frais de la société EDEN 26, de tous les produits contrefaisants détenus par la défenderesse au jour de la signification du jugement à intervenir, de condamner la société EDEN 26 à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL B.V. la somme de 50.000 € de dommages et intérêts au titre de l'atteinte portée à son modèle du fait de la contrefaçon ; de condamner la société EDEN 26 à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL B. Via somme de 20.000 € de dommages et intérêts au titre du préjudice résultant des faits de concurrence déloyale et de parasitisme ; d'ordonner la publication du Jugement à intervenir dans cinq journaux ou périodiques, aux frais de la société EDEN 26, et au choix de la société FATBOY THE ORIGINAL B.V.et ce, à titre de complément de dommages intérêts, sans que le coût de chaque insertion ne puisse excéder 3.000 € HT; de condamner la société EDEN 26 à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL B.V.la somme de 15.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ; de condamner la société EDEN 26 à rembourser à la société FATBOY THE ORIGINAL B.V. tous les frais de constat préalables à la présente assignation, de condamner la société EDEN 26 en tous les dépens et autoriser Me Myriam MOATTY à les recouvrer en application de l'article 699 du code de procédure civile. La SAS EDEN 26, bien que régulièrement constituée, ne prenait aucune écriture en réponse. L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2017. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile

MOTIFS

DU JUGEMENT Le tribunal constate à titre liminaire que la SAS EDEN 26 est régulièrement constituée et qu'ainsi les dispositions de l'article 472 du code de procédure civile ne régissent pas le litige : son appréciation portera sur le bien-fondé des prétentions de la société FATBOY THE ORIGINAL BV en considération des seuls moyens qu'elle aura mis dans le débat et des pièces produites, dont la force probante sera tenue pour acquise faute de contestation, sans examen de la recevabilité non critiquée de ses demandes, titularité des droits et validité de l'enregistrement du modèle étant par ailleurs présumées en application des articles 17 et 85 du règlement (CE) n° 6/200 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires. 1°) Sur la contrefaçon

Moyens

de la société FATBOY THE ORIGINAL BV Au soutien de ses prétentions, la société FATBOY THE ORIGINAL BV expose que les produits référencés SLEBAG L'ORIGINAL commercialisés par la SAS EDEN 26 sur son site internet et retenus par les services des Douanes reproduisent l'ensemble des caractéristiques protégées par le modèle communautaire n° 0026219040001 et ne suscitent pas de ce fait une impression visuelle globale différente de celle produite par le modèle communautaire antérieur. Appréciation du tribunal Sur la matérialité et l'imputabilité de la contrefaçon En application de l'article 1 §3 du règlement (CE) n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires, le dessin ou modèle communautaire a un caractère unitaire et produit les mêmes effets dans l'ensemble de la Communauté. Sauf disposition contraire du règlement, il ne peut être enregistré, transféré, faire l'objet d'une renonciation ou d'une décision de nullité et son usage ne peut être interdit que pour l'ensemble de la Communauté. Conformément à l'article 10 « Étendue de la protection » du règlement CE n° 6/2002 du 12 décembre 2001 : 1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente. 2. Pour apprécier l'étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle. En vertu de l'article 19§1 du règlement n° 6/2002 du 12 décembre 2001, le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation ou l'utilisation d'un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui- ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins. Et, conformément aux articles L 515-1 et L 522-1 du code de la propriété intellectuelle, toute atteinte aux droits définis par l'article 19 du règlement n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur, les dispositions des articles L 521- 1 à 19du même code régissant le contentieux des dessins ou modèles nationaux étant applicables au contentieux des dessins ou modèles communautaires. Conformément à l'article L 513-4 du code de la propriété intellectuelle, sont interdits, à défaut du consentement du propriétaire du dessin ou modèle, la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation, le transbordement, l'utilisation, ou la détention à ces fins, d'un produit incorporant le dessin ou modèle. Et, en vertu de l'article L 513-5 du code de la propriété intellectuelle, la protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble différente. L'appréciation des impressions visuelles d'ensemble, qui n'implique pas la démonstration d'un risque de confusion, est faite par référence à un utilisateur averti, doté d'une vigilance particulière dans le secteur considéré. À cet égard, la CJUE précisait dans son arrêt PepsiCo Inc. c. Grupo Promer Mon Graphie SA et OHMI du 20 octobre 2011 que la notion d'utilisateur averti était intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marques, auquel il n'est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n'effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle d'homme de l'art, expert doté de compétences techniques approfondies et qu'elle pouvait de ce fait s'entendre comme désignant un utilisateur doté d'une vigilance particulière en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré. Elle ajoutait que le qualificatif « averti » suggère que, sans être un concepteur ou un expert technique capable d'observer dans le détail les différences minimes susceptibles d'exister entre les modèles ou dessins en conflit, l'utilisateur connaît différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d'un certain degré de connaissance quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement et, du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d'un degré d'attention relativement élevé lorsqu'il les utilise. Ainsi compris, l'utilisateur averti procédera lorsque cela est possible à une comparaison directe des dessins ou modèles en cause mais, si une telle comparaison est infaisable ou inhabituelle dans le secteur concerné, pourra se fonder sur le souvenir imparfait de l'impression globale produite par les dessins ou modèles opposés. Le TUE soulignait dans son arrêt du 29 octobre 2015 Roca S SAe c.OHMI et Villeroy & Boch AG que, lors de l'appréciation du caractère individuel il devait être tenu compte de la nature du produit auquel le dessin ou modèle s'applique ou dans lequel celui-ci est incorporé et notamment du secteur industriel dont il relève, du degré de liberté du créateur dans l'élaboration du dessin ou modèle, d'une éventuelle saturation de l'état de l'art qui peut être de nature à rendre l'utilisateur averti plus sensible aux différences entre les dessins ou modèles comparés, ainsi que de la manière dont le produit en cause est utilisé, en particulier en fonction des manipulations qu'il subit normalement à cet occasion. Il ajoutait que l'impression globale produite sur l'utilisateur averti doit être différente de celle produite par l'antériorité opposée, exclusive de tout sentiment de déjà-vu, en ayant égard à des différences suffisamment marquées. En revanche, ainsi que l'a rappelé le TUE dans ses arrêts du 25 avril 2013 Bell & Ross BV c. OHMI et du 21 novembre 2013 El Hogar Perfecto del Siglo XXI, SL c. OHMI, l'intention du créateur, le processus de création, le succès commercial du produit et la reconnaissance acquis auprès du public ainsi que les qualités respectives d'utilisation ou de fonctionnement des produits auxquels sont appliqués les dessins ou modèles comparés ne sont pas des facteurs pertinents. Le modèle communautaire n° 002621904-0001 déposé le 28 janvier 2015 en classe 06 01 « chaise longue » dans la classification de Locarno est un siège gonflable. Par nature, il a vocation à être utilisé par des particuliers ou des professionnels. L'utilisateur averti étant celui à qui le produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé est destiné et qui de ce fait l'observera (considérant 14 du règlement), il est ici tant l'utilisateur final, amateur de sièges et de poufs atypiques que le fabricant ou le vendeur de tels produits. La comparaison présidant à l'appréciation de l'impression globale suscitée chez l'utilisateur ou l'observateur averti s'opère entre les représentations figurant au dépôt indépendamment de ses conditions de commercialisation et l'apparence du produit commercialisé par la défenderesse. Elle est réalisée en considération de toutes les caractéristiques dominantes prises dans leur combinaison et non isolément à l'exception de celle exclusivement asservie à une fonction technique (article 8§1 du règlement). La description du modèle communautaire est ici inutile car la simple comparaison des représentations de l'enregistrement et des photographies visibles sur les impressions d'écran du site slebag.com (pièce 14), dont les conditions générales de vente (pièce 15) démontrent qu'il est édité et exploité par la SAS EDEN 26, du site reservechic.com exploité par un tiers mais proposant des articles référencés « SLEBAG » ainsi que sur le procès-verbal de constat du 29 juillet 2016 (pièce 18) suffisent à établir que le produit référencé « SLEBAG » vendu par la SAS EDEN 26 au prix de 89,90 euros réduit à 69,90 euros est une copie servile du modèle. A ces faits d'offre en vente caractérisant des actes de contrefaçon, s'ajoutent des faits d'importation établis par les pièces dressées lors de la retenue douanière pratiquée le 27 juillet 2016 (pièce 19) révélant que la SAS EDEN 26 a acquis auprès d'un fournisseur chinois 850 sièges gonflables identiques au modèle opposé. En conséquence, la SAS EDEN 26 a commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société FATBOY THE ORIGINAL BV. Sur les mesures réparatrices En application de l'article L 521-7 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ; 2° Le préjudice moral causé à cette dernière ; 3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon. Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n'est pas exclusive de l'indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée. Et, en vertu de l'article L 521-8 du code de la propriété intellectuelle, en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner, à la demande de la partie lésée, que les produits reconnus comme produits contrefaisants, les matériaux et instruments ayant principalement servi à leur création ou fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, détruits ou confisqués au profit de la partie lésée. La juridiction peut aussi ordonner toute mesure appropriée de publicité du jugement, notamment son affichage ou sa publication intégrale ou par extraits dans les journaux ou sur les services de communication au public en ligne qu'elle désigne, selon les modalités qu'elle précise. Les mesures mentionnées aux deux premiers alinéas sont ordonnées aux frais du contrefacteur. Le tribunal ne dispose d'aucune information sur la marge pratiquée par les parties, sur les quantités effectivement vendues par la SAS EDEN 26, seule la masse retenue par les Douanes étant communiquée, sur les investissements réalisés par la société FATBOY THE ORIGINAL BV et sur les bénéfices du contrefacteur. Face à cette carence commune des parties, le tribunal ne peut pas apprécier les chefs de préjudice qu'il doit prendre en considération distinctement, les produits retenus n'ayant par définition généré aucun bénéfice pour la SAS EDEN 26 et ne fondant aucun manque gagner quantifiable pour la société FATBOY THE ORIGINAL BV. Aussi seule une atteinte à la valeur du modèle causée par sa banalisation, dont l'importance se déduit de celle de la masse retenue en douane sera réparée par l'allocation d'une somme de 10 000 euros que la SAS EDEN 26 sera condamnée à lui payer. Pour mettre un terme aux actes de contrefaçon et prévenir leur réitération, il sera fait droit aux mesures d'interdiction et de destruction dans les termes du dispositif sous astreinte conformément à l’article L 131-1 du code des procédures civiles d'exécution. En revanche, le préjudice de la société FATBOY THE ORIGINAL BV étant intégralement réparé, la demande de publication judiciaire, qui s'analyse en une mesure de réparation complémentaire, sera rejetée. 2°) Sur la concurrence déloyale et parasitaire Moyens de la société FATBOY THE ORIGINAL BV Au soutien de ses prétentions, la société FATBOY THE ORIGINAL BV expose que la SAS EDEN 26 offre en vente une gamme complète de produits contrefaisants, reprend les mêmes couleurs que celles de la gamme des produits « LAMZAC » et use sur son site internet des mêmes photographies qu'elle et de la désignation « SLEBAG L'ORIGINAL » faisant directement référence à sa dénomination sociale et à la référence de son produit « LAMZAC THE ORIGINAL ». Elle en déduit sa volonté de créer une confusion afin d'opérer un détournement de sa clientèle et de profiter indûment des investissements qu'elle expose pour la promotion de son article. Appréciation du tribunal En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 (devenus 1240 et 1241) du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer, chacun étant responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu'un signe qui ne fait pas l'objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit, circonstance attentatoire à l'exercice paisible et loyal du commerce. L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité et la notoriété de la prestation copiée. Le parasitisme, qui s'apprécie dans le même cadre que la concurrence déloyale dont il est une déclinaison mais dont la constitution est toutefois indifférente au risque de confusion, consiste dans le fait pour une personne physique ou morale de profiter volontairement et déloyalement sans bourse délier des investissements, d'un savoir- faire ou d'un travail intellectuel d'autrui produisant une valeur économique individualisée et générant un avantage concurrentiel. Il n'est pas contesté que les parties commercialisent des produits identiques à des prix voisins auprès d'une clientèle commune. Elles sont en situation de concurrence directe. L'action en concurrence déloyale, qui échappe aux règles spéciales régissant l'action en contrefaçon qui sanctionne une atteinte à un droit réel privatif, ne peut être invoquée cumulativement à cette dernière qu'en présence d'un fait dommageable fautif distinct du comportement constitutif de la contrefaçon. Elle peut en revanche l'être à titre subsidiaire pour des faits identiques à charge pour la partie qui l'invoque de les qualifier et de les motiver conformément aux règles propres à la concurrence déloyale et parasitaire, le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle ne pouvant jouir de plus de droits sur le terrain de la concurrence déloyale et parasitaire qu'il n'en a en application du droit des modèles et l'action fondée sur la responsabilité délictuelle ne pouvant constituer une protection de repli par rapport à celle, spéciale, offerte par l'action en contrefaçon. . • La société FATBOY THE ORIGINAL BV invoque effectivement au soutien de sa demande additionnelle en concurrence déloyale et parasitaire des faits distincts de ceux développés au titre de la contrefaçon qui réside dans l'usage d'une dénomination évocatrice, dans un effet de gamme et dans la reproduction de photographies utilisées sur le site fatboy.com, ces faits n'étant pas l'accessoire des actes de commercialisation sanctionnés au titre de la contrefaçon. Il ressort des impressions d'écran produites tirées des sites slebag.com (pièce 14) et fatboy.com (pièce 3) que les photographies utilisées par la SAS EDEN 26 pour promouvoir son produit sont strictement identiques, suppression de l'étiquette mise à part, à celles dont use la société FATBOY THE ORIGINAL BV ce qui est en soi de nature à créer un sérieux risque de confusion notamment par association, la copie étant servile. Par ailleurs, alors que le terme « original » figure dans la dénomination sociale de la demanderesse et accompagne presque systématiquement la référence « LAMZAC » dans les communications servant sa promotion (pièce 3 -site fatboy.com-, pièce 4 - page Facebook de la demanderesse-, pièce 8 - extraits du site revendeur fleux.com- et pièce 10 -site plus.lefigaro.fr- ), l'utilisation par la SAS EDEN 26 du même mot, quoiqu'en français, sur sa page Facebook (pièce 18 -procès-verbal de constat-) pour promouvoir la vente d'un produit identique est de nature à aggraver cette confusion en induisant de surcroît l'idée d'une antériorité et d'une garantie de qualité supérieure dans l'esprit du consommateur moyen. Enfin, la déclinaison dans des coloris identiques et nombreux, parfois peu habituels pour de tels produits (violet, orange ou bleu vif) et partant sans nécessité, constitue un élément supplémentaire établissant la prégnance du risque de confusion généré par le comportement de la SAS EDEN 26. En revanche, en l'absence du moindre élément établissant le principe et la mesure des investissements engagés par la société FATBOY THE ORIGINAL BV pour concevoir, promouvoir, valoriser et commercialiser son produit, aucun acte de parasitisme ne peut être imputé à la SAS EDEN 26. En l'absence d'élément fourni au tribunal pour apprécier le gain manqué de la société FATBOY THE ORIGINAL BV, son seul préjudice indemnisable réside dans l'atteinte à son image et sera réparé par l'allocation d'une somme de 10 000 euros. Son préjudice étant intégralement réparé, sa demande de publication judiciaire sera également rejetée à ce titre. 3°) Sur les demandes accessoires Succombant au litige, la SAS EDEN 26 sera condamnée à payer la société FATBOY THE ORIGINAL BV la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à lui rembourser les frais du procès-verbal de constat du 29 juillet 2016 et à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile. Compatible avec la nature et la solution du litige, l'exécution provisoire du jugement sera ordonnée en toutes ses dispositions, exceptées celles portant sur la destruction des produits contrefaisants, conformément à l'article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et mis à la disposition par le greffe le jour du délibéré, Dit qu'en important, en offrant en vente, en commercialisant et en détenant à ces fins des sièges gonflables constituant la copie servile du modèle communautaire n° 002621904-001 de la société FATBOY THE ORIGINAL BV, la SAS EDEN 26 a commis au préjudice de cette dernière des actes de contrefaçon ; Condamne en conséquence la SAS EDEN 26 à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL BV la somme de DIX MILLE euros (10 000 €) en réparation du préjudice causé par ses actes de contrefaçon ; Interdit à la SAS EDEN 26, sous astreinte de 150 euros par infraction constatée pendant un délai de 4 mois courant à compter de la signification du jugement, de fabriquer ou faire fabriquer, d'exporter depuis le territoire de l'Union européenne et d'importer, d'offrir en vente et de vendre des sièges gonflables référencés « SLEBAG » ou « SLEBAG L'ORIGINAL » ou tout autre produit identique à ceux-ci quelle que soit sa référence ; Se réserve la liquidation de cette astreinte ; Ordonne la confiscation et la remise à la société FATBOY THE ORIGINAL BV en vue de leur destruction sous le contrôle d'un huissier de justice choisi par cette dernière et aux frais de la SAS EDEN 26 de tous les produits contrefaisants détenus par la SAS EDEN 26 au jour de la signification du jugement (produits référencés « SLEBAG » ou « SLEBAG L'ORIGINAL » ou tout autre produit identique quelle qu'en soit la référence), Dit qu'en commercialisant dans une gamme de couleurs identiques des copies serviles du produit « LAMZAC » vendu par la société FATBOY THE ORIGINAL BV en utilisant la dénomination « SLEBAG L'ORIGINAL » ainsi que des photographies tirées du site fatboy.com, la SAS EDEN 26 a commis au préjudice de cette dernière des actes de concurrence déloyale distincts mais non des actes de parasitisme ; Condamne en conséquence la SAS EDEN 26 à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL BV la somme de DIX MILLE euros (10 000 €) en réparation de son préjudice causé par les actes de concurrence déloyale ; Rejette la demande de publication judiciaire présentée par la société FATBOY THE ORIGINAL BV tant au titre de la contrefaçon que de la concurrence déloyale et parasitaire ; Condamne la SAS EDEN 26 à payer à la société FATBOY THE ORIGINAL BV la somme de CINQ MILLE euros (5 000 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à lui rembourser les frais afférents au procès-verbal de constat du 29 juillet 2016 ; Condamne la SAS EDEN 26 à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés directement par Maître Myriam MOATTY conformément à l'article 699 du code de procédure civile ; Ordonne l'exécution provisoire du jugement en toutes ses dispositions exceptées celles portant sur la destruction des produits contrefaisants.