Vu la procédure suivante
:
Par une requête enregistrée le 17 mai 2022, M. B A, représenté par Me Hay, demande au tribunal :
1°) d'annuler la décision du 20 décembre 2021 par laquelle le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'une carte de résident ;
2°) à titre principal, d'enjoindre à la préfète des Deux-Sèvres de lui délivrer une carte de résident dans un délai de 30 jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la préfète des Deux-Sèvres de réexaminer sa situation administrative ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article
37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision de refus de délivrance d'une carte de résident est entachée d'un vice de procédure, dès lors que le préfet des Deux-Sèvres a omis de saisir le maire de sa commune de résidence en vue de recueillir son avis en application des dispositions de l'article
L. 413-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le trouble à l'ordre public n'est pas constitué et la décision administrative est disproportionnée, dès lors que les faits qui lui sont reprochés n'ont fait l'objet que d'une condamnation à 40 jours-amende de 10 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 août 2023, la préfète des Deux-Sèvres conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. A ne sont pas fondés.
M. A a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pipart a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit
:
1. M. B A, ressortissant comorien né en 1992, est entré sur le territoire, selon ses déclarations, en 1999, alors qu'il était âgé de 7 ans. Il a fait l'objet le 15 octobre 2015 d'un premier refus de titre de séjour et d'une mesure d'éloignement à laquelle il s'est soustrait. Il a eu un enfant français le 1er août 2016 avec une ressortissante française. Il a ensuite bénéficié d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français valable du 13 février 2017 au 12 février 2018, renouvelée deux fois jusqu'au 15 avril 2020. Le 30 juin 2020, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ainsi que la délivrance d'une carte de résident de 10 ans. Il a toutefois fait l'objet, le 3 novembre 2020, d'une condamnation par le tribunal correctionnel de Niort pour avoir exercé volontairement des violences sur sa concubine qui a fait l'objet de 8 jours d'incapacité temporaire totale. Le 20 décembre 2021, le préfet des Deux-Sèvres lui a refusé la délivrance d'une carte de résident compte tenu de son comportement. M. A demande l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, aux termes de l'article
L. 426-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui justifie d'une résidence régulière ininterrompue d'au moins cinq ans en France au titre d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident, de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses besoins et d'une assurance maladie se voit délivrer, sous réserve des exceptions prévues à l'article
L. 426-18, une carte de résident portant la mention "résident de longue durée - UE" d'une durée de dix ans. () ". Aux termes de l'article
L. 426-19 du même code : " La décision d'accorder la carte de résident portant la mention "résident de longue durée - UE" prévue à l'article
L. 426-17 est subordonnée au respect des conditions d'intégration républicaine prévues à l'article
L. 413-7. ". Aux termes de l'article
L. 413-7 du même code : " La première délivrance ( ) de la carte de résident portant la mention "résident de longue durée - UE" prévue aux articles L. 421-12, L. 421-25, L. 424-5, L. 424-14 ou L. 426-19 () est subordonnée à l'intégration républicaine de l'étranger dans la société française, appréciée en particulier au regard de son engagement personnel à respecter les principes qui régissent la République française, du respect effectif de ces principes et de sa connaissance de la langue française qui doit être au moins égale à un niveau défini par décret en Conseil d'État. / Pour l'appréciation de la condition d'intégration, l'autorité administrative saisit pour avis le maire de la commune dans laquelle l'étranger réside. Cet avis est réputé favorable à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la saisine du maire par l'autorité administrative. () Et aux termes de l'article
L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Lorsque des dispositions législatives du présent code le prévoient, la délivrance d'une première carte de résident est subordonnée à l'intégration républicaine de l'étranger dans la société française, appréciée en particulier au regard de son engagement personnel à respecter les principes qui régissent la République française, du respect effectif de ces principes et de sa connaissance de la langue française, qui doit être au moins égale à un niveau défini par décret en Conseil d'Etat (). ".
3. D'une part, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie. Dès lors que le préfet a fondé sa décision sur le non-respect des valeurs essentielles de la société française et de la République révélé par la condamnation du requérant pour des faits de violence conjugale, il ne ressort pas des pièces du dossier que le défaut de recueil de l'avis du maire de la commune de résidence du requérant aurait pu exercer une influence quelconque sur l'appréciation portée par la préfète sur la condition d'intégration de l'intéressé. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce vice de procédure doit être écarté.
4. D'autre part, le préfet de la Vienne n'a pas méconnu les dispositions précitées, ni commis d'erreur d'appréciation en estimant que le comportement de M. A qui, comme il a été dit ci-dessus, a commis des violences sur sa compagne ayant entraîné 8 jours d'incapacité temporaire totale pour cette dernière, et qui était d'ailleurs défavorablement connu des services de police, caractérisait un défaut d'intégration républicaine, condition requise pour la délivrance de la carte de résident longue durée sollicitée.
5. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la requête de M. A doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et à la préfète des Deux-Sèvres.
Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Campoy, président,
M. Henry, premier conseiller,
M. Pipart, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.
Le rapporteur,
Signé
R. PIPART
Le président,
Signé
L. CAMPOYLa greffière,
Signé
D. GERVIER
La République mande et ordonne à la préfète des Deux-Sèvres, en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour le greffier en chef,
La greffière,
Signé
D. GERVIER