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Tribunal administratif de Lille, 5ème Chambre, 6 février 2023, 2007012

Synthèse

  • Juridiction : Tribunal administratif de Lille
  • Numéro d'affaire :
    2007012
  • Type de recours : Excès de pouvoir
  • Dispositif : Satisfaction partielle
  • Rapporteur : M. Babski
  • Nature : Décision
  • Avocat(s) : SCP LYON-CAEN & THIRIEZ
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Chronologie de l'affaire

Tribunal administratif de Lille
6 février 2023
Conseil d'État
6 février 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante

: Par une requête et des mémoires enregistrés les 2 octobre 2020, 29 juin 2021 et 29 octobre 2021, celui-ci n'ayant pas été communiqué, l'association France Energie Eolienne, représentée par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, demande au tribunal : 1°) d'annuler l'arrêté du 4 août 2020 par lequel le préfet de la région Hauts-de-France a approuvé le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires de la région Hauts-de-France ; 2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure dès lors que le schéma n'a pas été adopté dans le délai fixé par le calendrier d'élaboration établi par la délibération du 24 novembre 2016 du conseil régional des Hauts-de-France en application de l'article L. 4251-4 du code général des collectivités territoriales ; - le schéma adopté méconnait l'objectif de développement des énergies renouvelables, et en particulier de l'énergie éolienne, tel que prévu par les articles L. 101-2 du code de l'urbanisme, R. 4251-5 du code général des collectivités territoriales, L. 100-2 et L. 100-4 du code de l'énergie ainsi que le décret n° 2016-1442 du 27 octobre 2016 ; - il méconnait le principe de non-régression environnementale prévu à l'article L. 110-1 du code de l'environnement ; - l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le gel des capacités de production éolienne ne permettra pas d'atteindre les objectifs du schéma en matière de production d'énergie renouvelable et dès lors qu'il a pour effet d'interdire de façon générale et absolue toute nouvelle installation éolienne dans la région ; - l'arrêté attaqué méconnait le principe de libre administration des collectivités territoriales ainsi que les compétences des autres collectivités territoriales. Par des mémoires enregistrés les 26 mars 2021 et 23 juillet 2021, la région Hauts-de-France, représentée par la SCP Seban et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'association France Energie Eolienne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir : - à titre principal, que la requête est irrecevable dès lors que l'association requérante n'a pas intérêt à agir contre un acte à portée régionale et dès lors que son président n'a pas qualité pour agir au nom de l'association ; - à titre subsidiaire, que les moyens de la requête ne sont pas fondés. La requête a été communiquée au préfet de la région Hauts-de-France qui n'a pas produit de mémoire. Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'énergie ; - le code de l'environnement ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l'urbanisme ; - le décret n° 2016-1442 du 27 octobre 2016 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. A, - les conclusions de M. Babski, rapporteur public ; - les observations de Me Poupot, représentant l'association France Energie Eolienne ; - les observations de Me Cazou, représentant la région Hauts-de-France.

Considérant ce qui suit

: 1. Par une délibération du 30 juin 2020, le conseil régional des Hauts-de-France a adopté le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Par un arrêté du 4 août 2020, le préfet de la région Hauts-de-France a approuvé ce schéma. Par la requête susvisée, l'association France Energie Eolienne demande au tribunal d'annuler cet arrêté. Sur les fins de non-recevoir opposées en défense : 2. En premier lieu, en l'absence, dans les statuts d'une association, de stipulation réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif, celle-ci est régulièrement engagée par l'organe tenant des mêmes statuts le pouvoir de représenter en justice cette association. 3. Il ressort de l'article 7 des statuts de l'association France Energie Eolienne que son président est mandaté pour la représenter en justice et qu' " il a notamment qualité pour agir en justice ". Par suite, la fin de non-recevoir opposée en défense tirée de ce que la requête est irrecevable faute pour l'association requérante de justifier de la qualité pour agir en justice de son président ne peut qu'être écartée. 4. En second lieu, si, en principe, le fait qu'une décision administrative ait un champ d'application territorial, fait obstacle à ce qu'une association ayant un ressort national justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour en demander l'annulation, il peut en aller autrement lorsque la décision soulève, en raison de ses implications, des questions qui, par leur nature et leur objet, excèdent les seules circonstances locales. 5. Il ressort des pièces du dossier que si le SRADDET des Hauts-de-France a un champ d'application régional, il contient une règle générale n°8 écartant la production d'énergie éolienne des énergies renouvelables à développer et fixe également un objectif de stabilisation de production de l'énergie éolienne pour l'année 2031 au niveau de mai 2018. Il ressort également des pièces du dossier que la région Hauts-de-France, première productrice d'énergie éolienne en France métropolitaine, contribue à hauteur de 20% à 25% de la production d'énergie éolienne sur le territoire national. Dans ces conditions, au regard de l'importance de la part des Hauts-de-France dans le marché national de l'énergie éolienne et des enjeux environnementaux et énergétiques y afférent, les dispositions en litige du SRADDET sont de nature à affecter le développement de ce secteur économique et soulèvent, dès lors, des questions qui par leur nature et leur objet excèdent les seules circonstances locales. Par suite, l'association requérante qui, aux termes de ses statuts, s'est notamment donnée pour objet de favoriser le développement progressif et soutenu de l'énergie éolienne en France ainsi que la part de la valeur ajoutée de cette source d'énergie, justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir à l'encontre de ce schéma. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée en défense tirée de ce que la requête est irrecevable faute pour l'association requérante de justifier d'un intérêt à agir contre le SRADDET doit être écartée. Sur les conclusions à fin d'annulation : En ce qui concerne le calendrier prévisionnel d'élaboration : 6. Aux termes de l'article L. 4251-4 du code général des collectivités territoriales : " Les modalités d'élaboration du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires sont prévues par délibération du conseil régional à l'issue d'un débat au sein de la conférence territoriale de l'action publique. / Cette délibération détermine notamment les domaines contribuant à l'aménagement du territoire, en dehors des domaines énumérés au deuxième alinéa de l'article L. 4251-1, dans lesquels le schéma peut fixer des objectifs en application du sixième alinéa du même article L. 4251-1. / Elle fixe le calendrier prévisionnel d'élaboration et les modalités d'association des acteurs ainsi que la liste des personnes morales associées sur les différents volets du schéma régional. ". 7. Il résulte expressément de ces dispositions que le calendrier d'élaboration du SRADDET adopté par le conseil régional dans sa délibération du 24 novembre 2016 présente un caractère prévisionnel. Par suite, la circonstance que le conseil régional n'a pas adopté le SRADDET avant l'échéance prévue par cette délibération est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 4251-4 du code général des collectivités territoriales doit être écarté. En ce qui concerne l'objectif de développement des énergies renouvelables : 8. Aux termes de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa version applicable au litige : " La région () élabore un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. / Ce schéma fixe les objectifs de moyen et long termes sur le territoire de la région en matière d'équilibre et d'égalité des territoires, d'implantation des différentes infrastructures d'intérêt régional, de désenclavement des territoires ruraux, d'habitat, de gestion économe de l'espace, d'intermodalité, de logistique et de développement des transports de personnes et de marchandises, de maîtrise et de valorisation de l'énergie, de lutte contre le changement climatique, de pollution de l'air, de protection et de restauration de la biodiversité, de prévention et de gestion des déchets. / () / Les objectifs sont déterminés dans le respect des principes mentionnés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme et dans l'ambition d'une plus grande égalité des territoires. () ". Aux termes de l'article L. 4251-7 du même code : " Le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires () est approuvé par arrêté du représentant de l'État dans la région. Ce dernier s'assure du respect, par le conseil régional, de la procédure d'élaboration prévue au présent chapitre, de la prise en compte des informations prévues à l'article L. 4251-5 et de sa conformité aux lois et règlements en vigueur et aux intérêts nationaux () ". 9. En l'espèce, le SRADDET de la région Hauts-de-France contient une règle générale n° 8 selon laquelle " Les SCoT et les PCAET contribuent à l'objectif régional privilégiant le développement des énergies renouvelables et de récupération autre que l'éolien terrestre. La stratégie territoriale, chiffrée dans le cadre des PCAET, doit permettre d'atteindre une production d'EnRetR d'au moins 28% de la consommation d'énergie finale de leur territoire en 2031. Elle tient compte de leur potentiel local et des capacités d'échanges avec les territoires voisins et dans le respect des écosystèmes et de leurs fonctions ainsi que de la qualité écologique des sols. ". Il contient également un objectif n° 33 intitulé " Développer l'autonomie énergétique des territoires et des entreprises " qui énonce notamment que " la production d'énergie éolienne est stabilisée à son niveau de mai 2018. ". 10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : / () / 7° la lutte contre le changement climatique et l'adaptation à ce changement, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, l'économie des ressources fossiles, la maîtrise de l'énergie et la production énergétique à partir de sources renouvelables () ". Aux termes de l'article L. 100-2 du code de l'énergie, dans sa version applicable au litige : " Pour atteindre les objectifs définis à l'article L. 100-1, l'Etat, en cohérence avec les collectivités territoriales et leurs groupements et en mobilisant les entreprises, les associations et les citoyens, veille, en particulier, à : / () / 3° Diversifier les sources d'approvisionnement énergétique, réduire le recours aux énergies fossiles, diversifier de manière équilibrée les sources de production d'énergie et augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale () ". Enfin, aux termes de l'article L. 100-4 du même code, dans sa version applicable au litige : " I. - La politique énergétique nationale a pour objectifs : / () / 4° De porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation finale brute d'énergie en 2020 et à 32 % de cette consommation en 2030 () ". 11. Il ressort de la règle générale n°8 citée au point 9 que le SRADDET prévoit de porter la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie à au moins 28% en 2031, celle-ci étant de 9% en 2015. Le rapport du SRADDET mentionne aussi, dans ses développements relatifs à l'objectif n° 33, un objectif de doublement de la production d'énergies renouvelables passant de 18 995 gigawattheures (GWh) en 2015 à 39 538 GWh en 2031 grâce notamment à l'augmentation de la production d'énergie hydraulique, d'énergie solaire thermique et photovoltaïque, de biogaz, de gaz de mine, d'énergie fatale ou de géothermie basse température. De tels objectifs permettent de contribuer au développement des énergies renouvelables prises dans leur ensemble conformément aux dispositions du 7° de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme. Ils répondent en outre aux prescriptions du 3° de l'article L. 100-2 du code de l'énergie en tant qu'ils tendent notamment à une diversification équilibrée des sources de production d'énergie et à une augmentation de la part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale. Par ailleurs, la circonstance que la part d'énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie en 2031 soit fixée à 28% ne caractérise pas, à elle seule, l'existence d'une incompatibilité manifeste entre le schéma litigieux et les dispositions du 4° de l'article L. 100-4 du code de l'énergie. Par suite, le moyen tiré de ce que le SRADDET méconnaitrait les dispositions du code de l'urbanisme et du code de l'énergie citées au point précédent doit être écarté. 12. En deuxième lieu, l'article 3 du décret du 27 octobre 2016 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie fixe des objectifs en terme de puissance totale installée en matière d'énergie éolienne à 15 000 mégawatts (MW) au 31 décembre 2018 et compris entre 21 800 MW pour l'option basse et 26 000 MW pour l'option haute au 31 décembre 2023. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si le SRADDET contient des règles générales et des objectifs en matière de production d'énergie éolienne, exprimée en GWh, il ne fixe pas de règles générales ou d'objectifs en matière de puissance installée en matière d'énergie éolienne, laquelle se mesure en GW. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 du décret du 27 octobre 2016 est inopérant et doit être écarté. 13. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 4251-5 du code général des collectivités territoriales : " Les objectifs relatifs au climat, à l'air et à l'énergie portent sur: / () / - le développement des énergies renouvelables et des énergies de récupération, notamment celui de l'énergie éolienne et de l'énergie biomasse, le cas échéant par zones géographiques. () ". 14. Il résulte de ces dispositions que le SRADDET doit notamment fixer un objectif relatif au développement de l'énergie éolienne. 15. Il ressort des pièces du dossier que le rapport du SRADDET mentionne, dans le tableau de production des énergies renouvelables relatif à l'objectif n° 33 un objectif de production d'énergie éolienne de 7 824 GWh en 2031, identique au niveau de production de l'année 2021 et prévoit, ainsi qu'il a été dit au point 9, une stabilisation de la production d'énergie éolienne dans la région Hauts-de-France à son niveau de mai 2018. Toutefois, l'objectif mentionné à l'article R. 4251-5 du code général des collectivités territoriales ne doit pas porter sur la seule production d'énergie éolienne mais sur son développement, impliquant nécessairement un accroissement de celle-ci. Dans ces conditions, le schéma contesté ne saurait être regardé comme incluant un objectif de développement de l'énergie éolienne, contrairement à ce que la région soutient. Si celle-ci fait valoir qu'elle est d'ores et déjà la première région productrice d'énergie éolienne et à l'origine de 20 à 25% de la production nationale, ces seules circonstances ne sont pas de nature à établir l'existence du phénomène de saturation des paysages régionaux qu'elle invoque pour justifier l'absence d'un tel objectif. Il ressort au demeurant des pièces du dossier, et notamment de l'avis du conseil économique, social et environnemental régional et de plusieurs contributions à l'enquête publique, que la modernisation du parc éolien existant peut permettre un accroissement de la production d'énergie éolienne sans pour autant augmenter le nombre d'éoliennes implantées sur le territoire régional, ni augmenter la consommation d'espaces naturels et agricoles, les allégations de la région quant à l'existence d'incertitudes économiques et environnementales en ce qui concerne cette modernisation n'étant quant à elles établies par aucune pièce du dossier. Par suite, en arrêtant un objectif de simple stabilisation de la production d'énergie éolienne à son niveau de mai 2018 sans justifier de l'impossibilité de prévoir un objectif portant sur le développement de cette source d'énergie, le SRADDET méconnaît les dispositions précitées de l'article R. 4251-5 du code général des collectivités territoriales. En ce qui concerne le principe de non-régression environnementale : 16. Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage. / II. Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : () 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. ". 17. Il ressort des pièces du dossier que le SRADDET fixe des objectifs, ainsi qu'il a été dit plus haut, de doublement de production des énergies renouvelables entre 2015 et 2031 et de triplement de la part de ces énergies dans la consommation finale d'énergie sur cette même période. Il n'est par ailleurs pas établi que l'absence d'augmentation de la production d'énergie éolienne entre 2021 et 2031 serait de nature à engendrer une diminution du niveau de protection de l'environnement. Dans ces circonstances, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-régression de la protection de l'environnement énoncé à l'article L. 110-1 du code de l'environnement doit être écarté. En ce qui concerne le principe de libre-administration des collectivités territoriales : 18. Aux termes de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " () Des règles générales sont énoncées par la région pour contribuer à atteindre les objectifs mentionnés au présent article, sans méconnaître les compétences de l'Etat et des autres collectivités territoriales. ". Aux termes de l'article L. 4251-3 du même code : " Les schémas de cohérence territoriale et, à défaut, les plans locaux d'urbanisme, les cartes communales ou les documents en tenant lieu, ainsi que les plans de déplacements urbains, les plans climat-air-énergie territoriaux et les chartes des parcs naturels régionaux : / 1° Prennent en compte les objectifs du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires ; / 2° Sont compatibles avec les règles générales du fascicule de ce schéma, pour celles de leurs dispositions auxquelles ces règles sont opposables () ". 19. Ainsi qu'il a été dit plus haut, la règle générale n°8 du SRADDET prévoit que " les SCoT et les PCAET contribuent à l'objectif régional privilégiant le développement des énergies renouvelables et de récupération autre que l'éolien terrestre ", cet objectif étant de porter la production d'énergies renouvelables à 39 538 GWh en 2031, dont 7 824 GWh d'énergie éolienne. D'une part, cette règle à caractère général, avec laquelle les SCOT et les PCAET entretiennent un simple rapport de compatibilité, ne fixe qu'une obligation de moyen qui n'est pas d'une précision telle qu'elle serait de nature à méconnaitre le principe de libre-administration des collectivités territoriales. D'autre part, les objectifs chiffrés du SRADDET doivent simplement être pris en compte par les schémas de cohérence territoriale et les plans climat-air-énergie territoriaux en application des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales. Il ne ressort pas en outre des pièces du dossier que le SRADDET interdise, même implicitement, de manière générale et absolue l'implantation de nouvelles éoliennes dans la région Hauts-de-France dès lors qu'il ne fixe qu'un objectif concernant la production d'énergie éolienne et ne comprend ni règle générale ni objectif relatifs à la puissance énergétique éolienne installée. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de libre-administration des collectivités territoriales ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté. En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation : 20. En l'espèce, d'une part, si l'énergie éolienne représente actuellement 27% de la production d'énergie renouvelable régionale, il ne ressort pas des pièces du dossier que la stabilisation du niveau de production d'énergie éolienne empêcherait d'atteindre les objectifs du SRADDET en matière de production d'énergie renouvelable dès lors que celui-ci prévoit le développement d'autres sources d'énergies renouvelables, dont principalement le biogaz. Aucun élément versé au dossier ne permet d'établir, ainsi que l'allègue l'association requérante, que le recours à d'autres sources d'énergies renouvelables serait inefficace et inopportun. Il n'est pas non plus établi que l'objectif en matière de développement du biogaz, s'il est ambitieux, ne serait pas réalisable ni même que les objectifs en matière de production d'énergie hydraulique, lequel est 130 fois inférieur à celui de production d'énergie éolienne, ou de production de bois ne pourront pas être atteints en 2031. Par ailleurs, l'énergie éolienne sera, selon le SRADDET, la deuxième source d'énergies renouvelables régionale en 2031. Il n'apparait pas non plus que l'objectif de production d'énergies renouvelables ne pourrait pas être atteint sans augmentation de la production d'énergie éolienne si les objectifs concernant les autres sources d'énergies renouvelables sont eux-mêmes atteints. Enfin, la stabilisation de la production d'énergie éolienne ne méconnaît pas de manière manifeste les objectifs régionaux ou nationaux relatifs à la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie dès lors que cette consommation finale d'énergie se fonde aussi sur d'autres sources d'énergies renouvelables ainsi que sur des énergies produites en dehors de la région Hauts-de-France. 21. D'autre part, ainsi qu'il a été dit au point 21, le SRADDET n'a pas pour effet d'interdire de manière générale et absolue l'implantation de nouvelles éoliennes ni d'empêcher le renouvellement du parc éolien actuel. 22. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté en toutes ses branches. 23. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêté du 4 août 2020 du préfet de la région Hauts-de-France doit être annulé en tant qu'il approuve, d'une part, l'objectif n° 33 du SRADDET ne fixant pas d'objectif de développement de l'énergie éolienne et, d'autre part, la règle générale n° 8 en ce qu'elle exclut l'énergie éolienne terrestre du champ d'application de l'objectif régional tendant au développement des énergies renouvelables et de récupération. Sur les frais liés au litige : 24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'association France Energie Eolienne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la région Hauts-de-France demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme au bénéfice de l'association France Energie Eolienne en application de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 4 août 2020 du préfet du Nord est annulé en tant qu'il approuve l'objectif n°33 du SRADDET en ce que celui-ci ne fixe pas d'objectif portant sur le développement de l'énergie éolienne et la règle générale n° 8 en ce que celle-ci exclut l'énergie éolienne terrestre du champ d'application de l'objectif régional tendant au développement des énergies renouvelables et de récupération. Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté. Article 3 : Les conclusions de la région Hauts-de-France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : Le présent jugement sera notifié à l'association France Energie Eolienne, à la région Hauts-de-France et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Copie en sera adressée au préfet du Nord, préfet de la région Hauts-de-France. Délibéré après l'audience du 5 décembre 2022, à laquelle siégeaient : - M. Chevaldonnet, président, - M. Liénard, conseiller, - Mme Leclère, conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2023. Le rapporteur, Signé Q. LIENARD Le président, Signé B. CHEVALDONNET La greffière, Signé M. B La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement. Pour expédition conforme Le greffier,