Vu la procédure suivante
:
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 29 juin 2016 par laquelle le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident déclaré survenu le 14 mai 2013 ainsi que la décision de la même autorité du 13 septembre 2016 portant rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1619669/2-2 du 12 mars 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 mai 2018, Mme E..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) de condamner l'AP-HP au remboursement de ses traitements non réglés en intégralité à compter du 27 octobre 2017 ;
4°) de condamner l'AP-HP à lui verser la somme de 15 000 euros au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du refus de lui accorder la protection fonctionnelle ;
5°) d'enjoindre au directeur général de l'AP-HP de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 14 mai 2013 et de constater que les arrêts de travail postérieurs au 14 mai 2013 sont imputables à cet accident, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne précise pas les raisons pour lesquelles le lien de causalité entre l'accident du 14 mai 2013 et sa maladie ne serait pas établi ;
- le jugement est entaché de contradiction de motifs en ce que les premiers juges ont refusé de considérer que son état dépressif majeur dans un contexte de souffrance au travail est en lien direct avec l'accident du 14 mai 2013 ;
- les décisions attaquées des 29 juin 2016 et 13 septembre 2016 sont insuffisamment motivées ;
- les décisions attaquées sont entachées d'un vice de procédure dès lors que la commission de réforme aurait dû faire appel à un médecin spécialiste, ainsi que le prévoient l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière et l'article
5 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- les faits survenus le 14 mai 2013 doivent être reconnus comme accident de service ;
- l'AP-HP aurait dû lui accorder la protection fonctionnelle prévue à l'article
11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires à raison des violences et du harcèlement moral qu'elle a subis ;
- l'AP-HP aurait dû diligenter une enquête suite à l'agression du 14 mai 2013 et prendre des mesures disciplinaires à l'encontre de ses auteurs sur le fondement de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le lien de causalité entre sa maladie et l'accident du 14 mai 2013 est établi ;
- le refus de protection de l'AP-HP suite aux faits du 14 mai 2013 est illégal et de nature à engager sa responsabilité ;
- les préjudices qu'elle a subis du fait du défaut de protection fonctionnelle doivent être évalués à 15 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2019, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme E... de la somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens de la requête soulevés au soutien des conclusions en annulation ne sont pas fondés ;
- les conclusions indemnitaires de Mme E... sont, à titre principal, irrecevables et subsidiairement non fondées ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article
8 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de Me A..., pour Mme E....
Considérant ce qui suit
:
1. Mme E..., recrutée le 15 octobre 1998 en qualité d'aide-soignante, a été titularisée le 1er juillet 2000 et affectée dans le service de médecine interne de l'hôpital Bichat (Paris 18ème). En 2007, elle a été reconnue comme travailleur handicapé. En septembre 2009, elle a été détachée à temps plein auprès du syndicat CFTC. Le 4 novembre 2015, Mme E... a déclaré un accident du travail survenu le 14 mai 2013, dans le local syndical CFTC de l'hôpital Bichat, constitué, selon les termes de sa déclaration, par une " maltraitance professionnelle de la part de (ses) collègues ", l'ayant fait " basculer physiquement et psychologiquement dans une profonde souffrance physique ". Par une décision du 29 juin 2016, confirmée par une décision du 13 septembre 2016, prise sur recours gracieux de Mme E... en date du 26 juillet 2016, le directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des faits ayant fait l'objet de la déclaration d'accident du travail précitée. Mme E... relève appel du jugement du 12 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article
L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. En premier lieu, Mme E... invoque l'insuffisance de motivation du jugement attaqué en ce que les premiers juges n'auraient pas énoncé les raisons propres à expliciter le motif tenant à ce qu'elle n'établit pas le lien de causalité entre la pathologie dont elle souffre et l'accident du 14 mai 2013. Toutefois, ce moyen relève du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. En tout état de cause, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement sur ce point.
4. En deuxième lieu, Mme E... soutient qu'en estimant, d'une part, qu'elle " a été victime d'une altercation déclarée le 14 mai 2013 comme accident de service et a été placée en congés maladie à compter du 6 juin 2013 jusqu'au 7 décembre 2013, puis du 7 juillet au 3 août 2014 et en congés de longue durée du 27 janvier 2015 au 26 juillet 2016 à raison d'un état dépressif dans un contexte de souffrance au travail ", et en refusant de considérer, d'autre part, que cette souffrance au travail a un lien direct avec l'accident du 14 mai 2013, les premiers juges auraient entaché le jugement d'une contradiction de motifs. Toutefois, et en tout état de cause, ce moyen relève également du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.
Sur la légalité des décisions des 29 juin 2016 et 13 septembre 2016 :
5. En premier lieu, aux termes de l'article
L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article
L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
6. La décision du 29 juin 2016 vise, outre les différents textes relatifs à son objet, l'avis rendu par la commission de réforme en date du 21 juin 2016 ainsi que la déclaration d'accident en date du 14 mai 2013 établie par Mme E... et indique, d'une part, que l'accident déclaré survenu le 14 mai 2013 n'est pas reconnu imputable au service et, d'autre part, que la requérante n'apporte pas la preuve formelle d'un lien direct et certain avec le service. Dans ces conditions, cette décision comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de nature à permettre à Mme E... d'en connaître et comprendre les motifs à sa seule lecture, sans que celle-ci puisse utilement faire valoir que la décision n'indique pas les raisons pour lesquelles l'AP-HP considère qu'elle n'apporte pas la preuve formelle d'un lien avec le service. Si la requérante soutient que la décision indique que " l'accident de service... n'est pas reconnu imputable au service pour les motifs exposés ci-dessous ", alors que ces motifs annoncés ne figurent pas dans la décision, l'argument manque en fait dès lors que l'article 1er contient bien ces motifs, à savoir " avis défavorable à la reconnaissance d'un accident de service " et " N'apporte pas la preuve formelle d'un lien direct et certain avec le service ". Mme E... n'est pas davantage fondée à invoquer une contradiction à l'article 2 de la décision dès lors que s'il y est mentionné que " les arrêts de travail et les soins relatifs à cet accident de service ne seront pas pris en charge par le site au titre de la législation sur les accidents de service, mais au titre de la maladie ordinaire ", cette rédaction doit être regardée comme signifiant que les arrêts de travail et les soins de Mme E..., dont celle-ci estime qu'ils sont imputables aux faits survenus le 14 mai 2013 qualifiés par elle d'accident de service, ne peuvent relever des dispositions spécifiques à ce type d'accident, en particulier celles du deuxième alinéa du 2° de l'article
41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 susvisée. Enfin, si Mme E... doit être regardée comme soutenant que la décision attaquée se réfère à l'avis de la commission de réforme dans sa séance du 21 juin 2016, dont le procès-verbal fait état d'une " maltraitance professionnelle de la part de deux collègues appartenant à la même organisation syndicale (agression verbale, pression psychologique, remis en cause de sa nouvelle fonction, non respect de son statut de travailleur handicapé) " ainsi que d'un " état dépressif majeur " en lien avec une souffrance au travail, sans que l'auteur de la décision tire les conséquences de cette qualification des faits, il résulte de l'examen de ce procès-verbal que cette qualification fait référence aux mentions indiquées par l'intéressée dans sa déclaration d'accident du 4 novembre 2015 et ne constitue pas une analyse des faits par la commission de réforme.
Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du directeur général de l'AP-HP du 29 juin 2016 doit être écarté.
7. Mme E... invoque en outre l'insuffisance de motivation de la décision du directeur général de l'AP-HP du 13 septembre 2016, prise sur recours gracieux de l'intéressée en date du 26 juillet 2016. Il y a lieu d'écarter ce moyen, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 4 de leur jugement.
8. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 27 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Il est créé auprès du préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, deux commissions de réforme compétentes respectivement : (...) 2° Pour les personnels affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, non soumis à l'article 118 susvisé et relevant d'établissements, administrations ou services publics ayant leur siège à Paris, à l'exception du centre de gestion prévu à l'article
17 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. ". Et aux termes de l'article 30 du même arrêté : " Ces commissions présidées, selon le cas, par le préfet de Paris, ou par le préfet de police ou leur représentant, qui dirige les délibérations mais ne prend pas part au vote, sont composées comme suit : / - deux praticiens de médecine générale, membres du comité médical dont relève l'agent, auxquels est adjoint, pour les cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste, qui participe aux délibérations mais ne participe pas aux votes (...) ".
9. D'autre part, aux termes de l'article
41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article
L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ".
10. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
11. Il ressort des pièces du dossier que, lors de sa séance du 21 juin 2016, la commission de réforme était saisie, sur le fondement des dispositions qui précèdent, en premier lieu, de l'appréciation de l'imputation au service de l'accident déclaré survenu le 14 mai 2013 par Mme E... et, à supposer que cet accident soit reconnu imputable au service, en second lieu, à l'imputabilité de sa maladie, à savoir un état dépressif majeur, à cet accident. Il est constant que la commission chargée d'examiner la demande de Mme E... était composée de deux praticiens de médecine générale et ne s'est pas adjoint de médecin spécialiste en psychiatrie. Toutefois, la commission de réforme disposait de certificats médicaux rédigés par deux médecins psychiatres ainsi que de l'ensemble du dossier de l'intéressée en vue de se prononcer sur l'appréciation de l'existence d'un accident de service, condition préalable à l'examen de l'imputabilité de sa maladie à un tel accident. Par suite, dans les circonstances de l'espèce et dès lors qu'elle s'est bornée à apprécier l'existence d'un accident de service, émettant un avis défavorable à sa reconnaissance qui n'impliquait pas qu'elle examinât l'imputation au service de la maladie de Mme E..., l'absence d'un spécialiste en psychiatrie au sein de la commission de réforme n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision, prise à la suite de cet avis, et n'a pas privé l'intéressée d'une garantie. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme doit être écarté.
12. En troisième lieu, Mme E... soutient, d'une part, que les faits déclarés par elle survenus le 14 mai 2013 constituent un accident de service et, d'autre part, que cet accident est la cause directe et certaine de son état dépressif.
13. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce. Doit être regardé comme un accident un événement précisément déterminé et daté, caractérisé par sa violence et sa soudaineté, à l'origine de lésions ou d'affections physiques ou psychologiques qui ne trouvent pas leur origine dans des phénomènes à action lente ou répétée auxquels on ne saurait assigner une origine et une date certaines.
14. Il ressort des pièces du dossier que, en premier lieu, dans sa main courante en date du 14 avril 2014, Mme E... n'indique aucune date relative aux faits qu'elle impute à ses deux collègues, alors qu'elle indique par ailleurs de manière précise les trois dates correspondant aux élections de secrétaire de section. Il ne saurait, dès lors, être déduit de cette main courante l'existence d'un événement précisément déterminé et daté, caractéristique première d'un accident. En outre, dans sa déclaration d'accident précitée, si l'intéressée fait état, de la part de ses collègues, d'une maltraitance caractérisée par une agression verbale et différentes imputations de faits et de propos dépréciatifs de sa personne et de sa fonction, elle ne précise pas, alors que cela lui est expressément demandé, les circonstances de l'accident invoqué, de nature à permettre d'apprécier l'existence d'un événement caractérisé par sa violence et sa soudaineté. De plus, alors que Mme E... a mentionné, au titre du récit des faits, une agression verbale, il résulte également de l'examen de cette déclaration qu'elle n'a pas validé l'item " Agression non physique " qui lui était proposé dans la rubrique " Mécanisme de l'accident ", lequel correspondait pourtant précisément à l'hypothèse d'une agression verbale, et a préféré évoquer un " burn-out professionnel ", événement auquel on ne saurait assigner une origine et une date certaine et qui ne se caractérise pas par sa violence et sa soudaineté. Au surplus, il résulte du recours gracieux formé par Mme E... à l'encontre de la décision du 29 juin 2016 que, alors que celui-ci avait pour objet déclaré " imputation au service de l'accident de service du 14 mai 2013 ", l'intéressée n'a fait dans ce recours aucune référence précise à des faits ou des propos qui se seraient déroulés le 14 mai 2013. Par suite, il ne ressort d'aucun des documents précités, ni au demeurant des témoignages produits, insuffisamment circonstanciés, que les faits survenus le 14 mai 2013, à 11 heures, au sein du local syndical CFTC de l'hôpital Bichat, ou les propos tenus à cette occasion à l'encontre de Mme E..., à les supposer établis, auraient été caractérisés par une violence et une soudaineté telles qu'ils pouvaient être qualifiés d'accident de service. Dès lors, en refusant de reconnaître que Mme E... avait été victime d'un accident imputable au service, le directeur général de l'AP-HP n'a pas entaché les décisions contestées d'une erreur d'appréciation.
15. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 juin 2016 du directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), ainsi que sa décision confirmative du 13 septembre 2016.
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne la demande de remboursement des traitements non réglés en intégralité :
16. Ainsi qu'il a été dit aux points 5 à 14, les décisions du directeur de l'AP-HP refusant de reconnaître l'accident déclaré par Mme E... le 4 novembre 2015 en tant qu'accident de service ne sont entachées d'aucune illégalité. Par suite, Mme E..., qui n'est pas fondée à invoquer le bénéfice des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article
41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée ni au demeurant celles du 4° de l'article
34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, qui ne lui sont pas applicables, n'est pas davantage fondée à demander à l'AP-HP, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de cette demande, le remboursement de traitements prétendument non réglés en intégralité à compter du 27 octobre 2017.
En ce qui concerne la demande de réparation liée au refus d'accorder la protection fonctionnelle :
17. Aux termes de l'article
11 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...) ". Ces dispositions législatives établissent à la charge de la collectivité publique et au profit des fonctionnaires, lorsqu'ils ont été victimes d'attaques à l'occasion de leurs fonctions, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général. L'obligation imposée à la collectivité publique peut avoir pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles le fonctionnaire est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu'il a subis.
18. Mme E... invoque les dispositions qui précèdent en soutenant que l'AP-HP aurait dû lui accorder la protection qu'elles prévoient à raison du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi à l'occasion des faits survenus le 14 mai 2013 ou des propos tenus à son encontre ce même jour. Toutefois, Mme E... n'a pas demandé le bénéfice de la protection fonctionnelle. En tout état de cause, ces faits et ces propos, à les supposer même établis, ne sauraient, compte tenu de leur caractère isolé et, compte tenu de ce qui a été dit au point 14, être qualifiés de harcèlement moral. Dès lors, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que l'AP-HP aurait dû prendre des mesures disciplinaires à l'encontre des prétendus auteurs de ce harcèlement sur le fondement de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983. Par suite, l'AP-HP, qui n'était pas, compte tenu de ce qui précède, tenue d'accorder la protection fonctionnelle à Mme E..., n'a commis aucune faute en relation avec les faits ou les propos susévoqués. Il s'ensuit que la demande indemnitaire de la requérante doit être rejetée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par l'AP-HP.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
19. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme E..., n'appelle, par lui-même, aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par la requérante doivent être également rejetées.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E... le versement de la somme que l'AP-HP demande sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... et à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Délibéré après l'audience du 29 mai 2020 à laquelle siégeaient :
- Mme F..., présidente,
- M. C..., premier conseiller,
- Mme Mach, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2020
La présidente,
M. F...
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01500