Cour d'appel de Paris, Chambre 6-11, 10 janvier 2023, 20/07073

Synthèse

  • Juridiction : Cour d'appel de Paris
  • Numéro de pourvoi :
    20/07073
  • Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
  • Décision précédente :Tribunal de commerce de Paris, 6 décembre 2018
  • Lien Judilibre :https://www.courdecassation.fr/decision/63bfb3715e2fbe7c900439b5
  • Président : Madame Isabelle LECOQ-CARON
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Chronologie de l'affaire

Cour d'appel de Paris
2023-01-10
Tribunal de commerce de Paris
2018-12-06

Texte intégral

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 6 - Chambre 11

ARRET

DU 10 JANVIER 2023 (n° , 12 pages) Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/07073 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCRKP Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Octobre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F18/07378 APPELANTE Madame [F] [Z] [Adresse 3] [Localité 4] Représentée par Me Stephan ZITZERMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : R149 INTIMEES La SELAFA MJA prise en la personne de Maître [H] [B] ès-qualités de mandataire liquidateur de la Société AGENCE PUBLICS [Adresse 1] [Localité 5] Représentée par Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS, toque : D223 AGS CGEA IDF OUEST [Adresse 2] [Localité 6] Représentée par Me Sabine SAINT SANS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0426 COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine VALANTIN, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de : Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre, Madame Catherine VALANTIN, Conseillère, Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI ARRET : - contradictoire - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. - signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES Mme [F] [Z], née en 1973, a été engagée par la SAS Agence Publics, par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 09 mai 2012 en qualité de chargée de développement, statut cadre. Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques. Par jugement du 06 décembre 2018, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Agence Publics, et a désigné la société MJA prise en la personne de maître [H] [B] ès qualités de mandataire judiciaire. Par lettre datée du 25 mai 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable fixé au 06 juin 2018. Elle a ensuite été licenciée pour motif économique le 15 juin 2018. A la date du licenciement, Mme [Z] avait une ancienneté de 6 ans et 1 mois, et la société Agence Publics occupait à titre habituel moins de onze salariés. Demandant diverses indemnités et dommages et intérêts outre des rappels de salaires pour heures supplémentaires, Mme [Z] a saisi, le 02 octobre 2018, le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement du 08 octobre 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit : - déboute Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, - déboute la société MJA et les AGS CGEA IDF Ouest de leurs demandes reconventionnelles respectives, - condamne Mme [Z] aux dépens. Par déclaration du 19 octobre 2020, Mme [Z] a interjeté appel de cette décision, notifiée le 15 octobre 2020. Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 22 janvier 2021, Mme [Z] demande à la cour de : - infirmer le jugement frappé d'appel en toutes ses dispositions, - statuer à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, - fixer le salaire mensuel brut de référence de Mme [Z] à la somme de 5 220,36 euros, - dire que le licenciement de Mme [Z] est nul, - fixer la créance de Mme [Z] au passif de la liquidation judiciaire de la société Agence Publics aux sommes de : - 29 713,11 euros au titre des heures supplémentaires du 2 octobre 2015 au 31 mars 2018, - 2 971,31 euros au titre des congés payés afférents, - 5 130,05 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos, - 513,00 euros au titre des congés payés afférents, - 31 322,16 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, -18 793,29 euros d'indemnité spéciale forfaitaire contractuelle au titre de la clause de non-concurrence, -10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation d'information du nombre d'heures de repos, du droit au repos hebdomadaire et de la durée maximale journalière et hebdomadaire de travail, - 34 137,01 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, - 15 661,08 euros au titre de l'indemnité de préavis, - 1 566,10 euros au titre des congés payés afférents, - 1 580,72 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, subsidiairement, s'il n'était pas fait droit à la demande principale de Mme [Z] au titre du complément d'indemnité conventionnelle de licenciement : - fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Agence Publics à la somme de 4,33 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, - dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes en ce qui concerne les heures supplémentaires, le repos compensateur, le préavis et les congés payés afférents, et à compter de la décision à intervenir pour les autres sommes, - dire qu'en l'absence de fonds disponibles, l'AGS CGEA Ile de France Ouest est tenue à garantie, conformément aux dispositions de l'article L 3253-6 du code du travail, - ordonner la communication d'un bulletin de paye et de l'attestation destinée au pôle emploi, conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, - débouter Mme [B] es qualité de liquidateur de la société Agence Publics et l'AGS CGEA Ile de France Ouest de toutes leurs demandes, - condamner Mme [B] es qualités de liquidateur de la société Agence publics à payer à Mme [Z] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, - condamner Mme [B] es qualités de liquidateur de la société Agence publics aux entiers dépens. Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 08 mars 2021, l'Unedic Délégation AGS CGEA Ile de France Ouest demande à la cour de : à titre principal : - confirmer le jugement rendu par la cour d'appel de paris le 8 octobre 2020,

en conséquence

: - débouter Mme [Z] de l'intégralité de ses demandes, subsidiairement, si la cour d'appel infirme la décision de première instance : - débouter Mme [Z] de sa demande d'indemnité de préavis, - débouter Mme [Z] de ses demandes de dommages et intérêts, faute de justifier de son préjudice, - débouter Mme [Z] de sa demande pour travail dissimulé, - réduire à de plus justes proportions les montants alloués à Mme [Z], en tout état de cause, sur la garantie de l'AGS vu l'article L.3253-8 du code du travail - dire et juger que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale, - dire et juger que s'il y a lieu à fixation, conformément aux dispositions de l'article L.3253-20 du code du travail, la garantie de l'AGS n'est due qu'à défaut de fonds disponibles permettant le règlement des créances par l'employeur et sous réserve qu'un relevé de créances soit transmis par le mandataire judiciaire, - dire et juger qu'en tout état de cause la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié, le plafond des cotisations maximum au régime d'assurance chômage, en vertu des dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail, - dire et juger qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution ou pour cause de rupture du contrat de travail au sens dudit article L. 3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou de l'article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie ; - statuer ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'Unédic AGS, - condamner Mme [Z] à verser à l'AGSCGEA Ile de France Ouest la somme de 1.000€ au titre de l'article 700 du CPC. Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 mai 2022, la société MJA es qualités de mandataire liquidateur de la société Agence Publics demande à la cour de : in limine litis : - dire et juger les demandes de rappel d'heures supplémentaires et de repos compensateur comprises entre le 1er septembre 2015 au 2 octobre 2015 présentées par Mme [Z], sont frappées par la prescription triennale, - déclarer irrecevable Mme [Z] en ses demandes au titre de ladite période, dans tous les cas : - confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 8 Octobre 2020 en ce qu'il a débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, - prendre acte de l'absence de contestation du licenciement pour motif économique de la part de Mme [Z], - débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions, - déclarer recevable et bienfondée la SELAFA MJA en ses demandes reconventionnelles: en conséquence : - condamner Mme [Z] à verser à la SELAFA MJA la somme de 198,12 € nets au titre du trop-perçu sur l'indemnité de licenciement, sur la garantie de l'AGS, si par extraordinaire, la cour devait entrer en voie de fixation : - juger que le liquidateur n'a pas à démontrer l'inexistence de fonds disponibles pour que la garantie de l'AGS CGEA soit mise en 'uvre, - juger que l'obligation de l'AGS CGEA de l'Ile de France Ouest de s'acquitter des créances relevant de sa garantie, et notamment des sommes correspondant à des créances établies par décision de justice, est rendue exigible par la seule transmission des relevés de créances salariales consécutives à l'ouverture d'une procédure collective et non par la preuve que devrait rapporter le mandataire judiciaire / liquidateur que l'employeur n'est pas en mesure de payer ces créances sur les fonds disponibles, - juger que l'AGS CGEA de l'Ile de France Ouest devra garantir l'ensemble des créances de Mme [Z] fixées au passif de la société Agence publics, - juger que l'AGS CGEA de l'Ile de France Ouest devra faire l'avance, et ce sans condition, des sommes représentant les créances garanties, sur présentation du relevé établi par le liquidateur, - condamner Mme [Z] verser à la SELAFA MJA la somme de 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamner Mme [Z] aux éventuels entiers dépens. L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 septembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 17 novembre 2022. Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION Sur la prescription demandes de rappel d'heures supplémentaires et de repos compensateur: La société MJA soutient que les demandes de rappel de salaire sur la période du 1er septembre au 02 octobre 2015 sont prescrites. Or, les demandes faites par Mme [F] [Z] au titre des heures supplémentaires portent uniquement sur la période du 2 octobre 2015 au 31 mars 2018. La prescription soulevée par la société Agence Publics est en conséquence sans objet. Sur les heures supplémentaires : Pour infirmation du jugement, Mme [F] [Z] soutient qu'elle a accompli de très nombreuses heures supplémentaires qui n'ont jamais été rémunérées, les prétendues journées de récupération mentionnées dans ses bulletins de paye ayant en réalité été travaillées. Pour confirmation du jugement, la société Agence Publics prise en la personne de son mandataire, fait valoir que le contrat de travail et les fiches de paye mentionnaient une durée de travail de 151,67 heures par mois et qu'il n'a jamais été demandé à la salariée d'effectuer des heures supplémentaires. Elle affirme en outre que le décompte produit par la salariée est incohérent car il ne tient pas compte de ses congés ou de ses absences pour maladie. En application de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant. En l'espèce, à l'appui de sa demande, la salariée produit un tableau récapitulatif de ses horaires journaliers de travail depuis le 1er septembre 2015 et le décompte du nombre d'heures supplémentaires qui en découle par semaine. Elle verse également aux débats de nombreux échanges de mails confirmant qu'elle a été amenée à travailler en soirée à des heures parfois tardives, certains samedis et dimanches et durant une partie de ses congés ou de ses arrêts maladie, son décompte ne pouvant dès lors être considéré comme incohérent au motif qu'il ferait apparaître des heures travaillées pendant des périodes de congés ou d'arrêts maladie. La salariée présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle dit avoir réalisées, permettant ainsi à l'employeur qui assure le contrôle des heures effectuées d'y répondre utilement. La société MJA et l'AGS qui se limitent à rappeler les termes du contrat de travail fixant la durée du travail à 151,67 heures par mois sans d'ailleurs mentionner les horaires de la salariée, ne justifient d'aucun élément de nature à remettre en cause le tableau et le décompte de Mme [F] [Z] relatifs à ses horaires de travail, étant en outre relevé que les échanges de mails entre Mme [Z] et l'agence que ce soit en soirée, en fin de semaine ou durant ses congés ou arrêts maladie démontrent qu'à l'évidence la société Agence Publics avait non seulement connaissance des heures supplémentaires de travail effectuées par Mme [Z] mais était en outre parfois à l'origine de la demande de la prestation réalisée par cette dernière. Par infirmation du jugement, il sera en conséquence fait droit à la demande de Mme [F] [Z] mais, après analyse des pièces, dans une proportion moindre que celle revendiquée par la salariée dont la créance au titre des heures supplémentaires sur la période du 2 octobre 2015 au 31 mars 2018 sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Agence Publics à la somme de 19 808,74 euros, outre la somme de 1 980,87 euros au titre des congés payés afférents. Sur le repos compensateur : Mme [Z] soutient en substance qu'elle a dépassé à hauteur de 362,75 heures le contingent annuel d'heures supplémentaires entre 2016 et 2018, ce qui lui ouvre à 181,37 heures de repos, et donc à une contrepartie obligatoire sous forme de repos. La société MJA réplique que la société Agence Publics n'employait que 6 salariés et que le repos compensateur obligatoire légal ne concerne plus les entreprises de moins de 20 salariés depuis l'ordonnance du 8 août 2016. Or, il résulte des dispositions de l'article L3121-30 du code du travail, en leur rédaction applicable au 10 août 2016, que des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos. Aux termes de l'article L3121-38 du code du travail en sa rédaction applicable entre le 10 août 2016 et le 1er janvier 2020, à défaut d'accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos mentionnée à l'article L. 3121-30 est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné au même article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés. Le contingent annuel des heures supplémentaires est fixé par la convention collective Syntec à 130 heures. Mme [Z] justifie d'un dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires sur la période d'octobre 2015 à mars 2018 de 241,83 heures. La société Agence Publics ayant moins de 20 salariés, Mme [F] [Z] est bien fondée à solliciter la fixation de sa créance au titre de la contrepartie obligatoire en repos à la somme de 3 420,03 euros correspondant à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel, outre la somme de 342 euros au titre des congés payés afférents. Sur le travail dissimulé : Mme [Z] soutient en substance qu'au vu du nombre d'heures supplémentaires réellement effectuées, l'absence de leur mention sur ses bulletins de paye, et l'absence de réponse à la mise en demeure de payer qu'elle a adressé à la société le 19 juillet 2018 constituent une dissimulation volontaire de son travail. La société MJA rétorque que Mme [Z] n'établit pas l'existence d'une volonté délibérée de la société Agence Publics de cacher l'existence d'heures supplémentaires. L'article L 8121-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur - soit de soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité relative à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli - soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires et aux cotisations sociales. Aux termes de l'article L 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8122-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires. En l'espèce, si l'employeur n'ignorait pas que Mme [Z] pouvait travailler en dehors de ses horaires ou de ses jours de travail, aucun décompte des heures accomplies par semaine n'a jamais été établi pendant la relation de travail et la salariée n'a jamais revendiqué avoir accompli des heures supplémentaires, de sorte que l'élément intentionnel, qui ne se présume pas, n'est pas caractérisé. Mme [F] [Z] sera, en conséquence, déboutée de la demande faite à ce titre. Sur la clause de non-concurrence : Pour infirmation du jugement, Mme [Z] expose qu'elle n'a pas été libérée de la clause de non concurrence stipulée dans son contrat de travail, et que la société Agence Publics est en conséquence redevable d'une indemnité forfaitaire contractuelle. La société MJA soutient de son coté que suite au jugement de liquidation judiciaire de la société Agence Publics, la clause de non-concurrence n'avait plus d'objet, et que le versement de la contrepartie n'est donc pas dû. Il est constant que la cessation d'activité de l'employeur suite notamment au prononcé d'une liquidation judiciaire n'a pas pour effet de décharger le salarié de son obligation de non concurrence et l'employeur de son obligation d'en payer la contrepartie financière. En l'espèce aux termes de l'article 11 du contrat de travail Mme [F] [Z] s'interdisait en cas de rupture du contrat de travail à l'initiative de l'une ou de l'autre des parties et pour quelque cause que ce soit, à titre de condition essentielle et déterminante du contrat et pour une durée de 2 ans, d'exercer une activité concurrente à la société Agence Publics sur le territoire français, au Qatar ainsi que tout autre territoire ou serait établi le client ou le budget confié à Mme [F] [Z]. Le contrat précisait qu'en contre partie de cette obligation Mme [F] [Z] percevrait, après la cessation effective de son contrat de travail et pendant toute la durée de cette interdiction, une indemnité spéciale forfaitaire d'un montant égal à 30 % de la rémunération fixe annuelle brute perçue au cours des 12 derniers mois précédant la date de cessation effective de son contrat de travail. Le contrat de travail prévoyait la faculté pour la société Agence Publics de libérer la salariée de son obligation de non concurrence, au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la rupture du contrat. Au constat que la société Agence Publics n'a pas libéré Mme [F] [Z] de son obligation de non concurrence, la cour, par infirmation du jugement, fait droit à la demande de fixation de la créance de Mme [F] [Z], au titre de l'indemnité forfaitaire stipulée au contrat de travail, à la somme de 16 508,01 euros sur la base de la rémunération brute des 12 derniers mois de salaire, après intégration des heures supplémentaires. Sur le manquement à l'obligation d'information : Mme [Z] expose ne pas avoir été informée du nombre d'heures de repos porté à son crédit et ne pas avoir bénéficié des deux jours de repos hebdomadaires conventionnellement prévus durant plusieurs mois. Elle ajoute qu'elle a, à de nombreuses reprises, dépassé la durée maximale journalière de travail effectif de 10 heures, et affirme que ces manquements lui ont occasionné un préjudice. La société Agence Publics qui conteste l'existence d'heures supplémentaires, affirme ne pas avoir manqué à ses obligations. Aux termes des dispositions de l'article D 3171-11 du code du travail les salariés doivent être tenus informés du nombre d'heures de repos porté à leur crédit par un document annexé au bulletin de salaire. Dès que ce nombre atteint 7 heures, ce document comporte, en outre une mention notifiant l'ouverture du droit et rappelant que le repos compensateur doit être pris dans un délai maximum de 2 mois suivant l'ouverture du droit. Les articles L 3121-18 et L3121-20 du code du travail limite par ailleurs à 10 heures la durée maximale journalière du travail et à 48 heures la durée maximale hebdomadaire. La société Agence Publics ne justifiant pas avoir rempli ses obligations en matière d'informations relatives au nombre d'heures de repos, alors qu'il résulte du nombre d'heures supplémentaires accomplies que la salariée n'a pas systématiquement bénéficié de 2 jours de repos hebdomadaires et que la durée maximale journalière et hebdomadaire de travail n'a pas été respectée, ce qui a causé à la salariée un préjudice, qui a ainsi été privée de son droit au repos, qu'il y a lieu d'évaluer à la somme de 1 500 euros. La créance de Mme [F] [Z] sera en conséquence fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Agence Publics à cette somme. Sur la nullité du licenciement économique : Pour infirmation du jugement, Mme [Z] soutient que son licenciement est discriminatoire et en conséquence nul, le premier critère d'ordre des licenciements mis en place par l'employeur ayant été l'âge, la société Agence Publics ayant souhaité 'rajeunir' ses équipe et se débarrasser des salariés les plus âgés. La société MJA réplique que la société Agence Publics a respecté ses obligations légales en matière de définition des critères pour fixer l'ordre des licenciement , l'âge constituant l'un des critères prévus par le code du travail. Elle ajoute que Mme [Z] étant la seule salariée de sa catégorie, les dispositions relatives à l'ordre des licenciements ne s'appliquaient pas à elle et ne peuvent donc entraîner la nullité de son licenciement. Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son âge. L'article L.1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n°'2008-496 du 27'mai'2008, au vu desquels, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. L'article L. 1233-5 du code du travail dispose par ailleurs que lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements après consultation du Comité Social et Economique. Ces critères prennent en compte: 1) les charges de famille, en particulier celles des parents isolés 2) l'ancienneté de services dans l'établissement ou l'entreprise 3) la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celles des personnes handicapées et des salariés âgés 4) les qualités professionnelles appréciées par catégorie. L'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article. Il résulte de la combinaison de ces articles que l'employeur ne peut retenir comme seul critère d'ordre de licenciement l'âge des salariés pour procéder au licenciement des plus âgés d'entre eux, l'âge constituant au contraire un des critères à prendre en compte en faveur des salariés les plus âgés, en raison des difficultés qu'ils sont susceptibles de rencontrer pour retrouver un emploi. En l'espèce, la salariée justifie du projet de licenciement économique soumis aux délégués du personnel et du compte rendu de l'avis donné par ces derniers démontrant que l'âge a été le premier critère retenu par la société Agence Publics pour procéder au licenciement de 4 salariés, 3 d'entre eux, dont Mme [F] [Z], étant âgé de plus de 40 ans et faisant partie des salariés les plus âgés de l'agence, alors que l'employeur avait manifesté publiquement lors d'une réunion avec les salariés le 4 mai 2018 sa volonté de 'rajeunir' les équipes. Ces éléments laissent supposer l'existence d'une discrimination. Pour tenter de prouver que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la société Agence Publics affirme que Mme [Z] était la seule salariée de sa catégorie professionnelle à être licenciée, son poste ayant été supprimé, et que les critères d'ordre n'ont ainsi pas été mis en oeuvre à son égard. Or, il ressort du projet de licenciement que la société a soumis aux délégués du personnel que 4 salariés dont Mme [F] [Z] étaient visés nommément pour être licenciés, sans que leur catégorie professionnelle ne soit précisée, l'employeur justifiant son choix par un projet de réorganisation qui n'a jamais été explicité ni même présenté que se soit au moment du licenciement ou dans le cadre de la présente procédure. La société Agence Publics ne justifie ainsi pas par des éléments objectifs étrangers à une discrimination en raison de son âge, sa décision de licencier Mme [F] [Z]. Par infirmation du jugement, la cour retient donc que le licenciement de Mme [F] [Z] est discriminatoire et en conséquence nul. - sur les conséquences financières : En application des dispositions de l'article L1235-3-1 du code du travail, lorsque le juge constate que le licenciement est entâché d'une nullité en raison de son caractère discriminatoire, il octroi au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieur au salaire des 6 derniers mois. Aux termes de l'article 15 de la convention collective des bureaux d'étude techniques la salariée a par ailleurs droit à un préavis de 3 mois. Il y a, en conséquence lieu de fixer la créance de Mme [Z] au passif de la liquidation judiciaire de la société Agence Publics aux sommes de: - 30 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul - 13 756,68 euros au titre de l'indemnité de préavis - 1 375,66 euros au titre des congés payés afférents. - sur l'indemnité conventionnelle de licenciement: Au soutien de sa demande de complément d'indemnité Mme [Z] fait valoir que le salaire à prendre en compte pour déterminer le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement est celui qu'elle aurait dû percevoir après intégration des heures supplémentaires qui lui sont dues, sur la période de mai 2017 à juin 2018. La société MJA fait de son côté valoir que la salariée est au contraire redevable d'un trop perçu, la moyenne des salaires à prendre en compte étant celle figurant sur l'attestation pôle emploi visant la période du 01/01/2017 au 31/12/2017. La moyenne des salaires à prendre en compte étant celle des 12 derniers mois ayant précédé le licenciement, soit la période de mai 2017 à juin 2018 et non celle de décembre 2017 à janvier 2018 comme mentionné par erreur dans l'attestation pôle emploi, et l'indemnité conventionnelle de licenciement payée à la salariée ayant été calculée sur la base d'un salaire ne tenant pas compte des heures supplémentaires réalisées, la créance de Mme [Z] au titre du complément de l'indemnité de licenciement sera fixée à la somme de 311,12 euros. La société MJA sera parallèlement déboutée de sa demande reconventionnelle au titre d'un trop perçu. Sur la garantie de l'AGS: La salariée fait valoir qu'en l'absence de fonds disponibles, l'AGS est tenue à garantie. L'AGS rappelle les limites de sa garantie quant à la nature des créances et au plafond légal et fait valoir qu'elle n'est tenue à cette garantie qu'à défaut de fonds disponibles permettant le règlement des créances par l'employeur et sous réserve qu'un relevé de créance soit établi par le mandataire. La société MJA soutient quant à elle, qu'elle n'a pas à démonter l'inexistence de fonds disponibles pour que la garantie de l'AGS soit mise en oeuvre et que cette dernière devra s'acquitter des créances relevant de sa garantie sur simple transmission du relevé des créances salariales. Aux termes de l'article L. 3253-15 du code du travail, les institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 avancent les sommes comprises dans le relevé établi par le mandataire judiciaire, même en cas de contestation par un tiers. Elles avancent également les sommes correspondant à des créances établies par décision de justice exécutoire, même si les délais de garantie sont expirés. Les décisions de justice sont de plein droit opposables à l'association prévue à l'article L. 3253-14. L'article L. 3253-19 fixe les conditions et les délais dans lesquels le mandataire doit établir les relevés de créances. L'article L.3253-20 du code du travail précise que si les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l'expiration des délais prévus par l'article L. 3253-19, le mandataire judiciaire demande, sur présentation des relevés, l'avance des fonds nécessaires aux institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la garantie de l'AGS n'est pas subordonnée à la démonstration par le mandataire de l'absence de fonds disponibles mais à la seule présentation des relevés de créance. Il y a, en conséquence lieu de dire et juger que la présente décision sera opposable à l'AGS et qu'en l'absence de fonds disponibles et sur simple présentation par le mandataire du relevé de créances, les créance fixées au passif de la liquidation judiciaire seront ainsi garanties par cette dernière dans les limites de la garantie légale et du plafond légal, toutes créances confondues et sous déduction des sommes déjà avancées. Sur les intérêts : Aux termes de l'article L. 622-28 du code du commerce le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous les intérêts de retard et majorations. Sur la remise des documents : Il y a lieu d'ordonner la remise par la société MJA es qualités d'une attestation Pôle emploi et d'un bulletin de paie récapitulatif conformes à la présente décision, dans un délai de 2 mois à compter de sa signification, sans qu'il soit nécessaire de prononcer une astreinte. Sur les autres demandes : L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens seront inscrits au passif de la liquidation judicaire.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, INFIRME le jugement ; Et statuant à nouveau ; DIT que la prescription soulevée par la SELAFA MJA es qualités de mandataire liquidateur de la société Agence Publics est sans objet ; DIT que le licenciement de Mme [F] [Z] est nul ; FIXE la créance de Mme [F] [Z] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Agence Publics aux sommes suivantes : - 19 808,74 euros au titre des heures supplémentaires sur la période du 2 octobre 2015 au 31 mars 2018, - 1 980,87 euros au titre des congés payés afférents, - 3 420,03 euros au titre du repos compensateur, - 342 euros au titre des congés payés afférents, - 16 508,01 euros d'indemnité spéciale forfaitaire contractuelle au titre de la clause de non concurrence, - 1 500 euros de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation d'information et de la durée maximale de travail, - 30 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul, - 13 756,68 euros au titre de l'indemnité de préavis, - 1 375,66 euros au titre des congés payés afférents, - 311,12 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement ; DÉBOUTE Mme [F] [Z] de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ; DÉBOUTE la SELAFA MJA es qualités de mandataire liquidateur la société SAS Agence Publics, de sa demande reconventionnelle ; ORDONNE la remise par la SELAFA MJA es qualités de mandataire liquidateur la société SAS Agence Publics, d'une attestation Pôle emploi et d'un bulletin de paie récapitulatif conformes à la présente décision, dans un délai de 2 mois à compter de sa signification ; DIT n'y avoir lieu à prononcer une astreinte ; RAPPELLE que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous les intérêts de retard et majorations ; DIT que la présente décision sera opposable à l'AGS et qu'en l'absence de fonds disponibles et sur simple présentation par le mandataire du relevé de créances, les créance fixées au passif de la liquidation judiciaire seront ainsi garanties par cette dernière dans les limites de la garantie légale et du plafond légal, toutes créances confondues et sous déduction des sommes déjà avancées ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure collective ; FIXE les dépens au passif de la liquidation judiciaire. La greffière, La présidente.