Cour de cassation, Chambre commerciale, financière et économique, 13 septembre 2011, 10-19.621

Synthèse

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Chronologie de l'affaire

Cour de cassation
2011-09-13
Cour d'appel de Montpellier
2010-03-16

Texte intégral

Sur le premier moyen

:

Vu

l'article 496 du code de procédure civile, ensemble l'article 90 du décret du 27 décembre 1985 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué

, que, les 2 janvier 2002 et 30 septembre 2003, les sociétés Clever technologies (la société Ct) et Clever on line (la société Col) ont été mises en redressement judiciaire, Mme X... étant désignée représentant des créanciers dans chaque procédure ; que, les 11 octobre 2002 et 3 février 2004, le tribunal a arrêté des plans de cession totale pour chacune des deux sociétés, Mme X... étant désignée commissaire à l'exécution du plan dans les deux procédures ; que, par jugement du 18 mars 2003, le tribunal a désigné Mme X..., en qualité de mandataire ad hoc de la société Ct, pour poursuivre les instances en cours pour le compte de celle-ci ; que, le 20 mai 2008, le tribunal a retenu que Mme X... avait qualité en tant que commissaire à l'exécution du plan des deux sociétés pour agir en responsabilité contre leur créancier, la caisse de crédit agricole mutuel de Toulouse et du Midi-Toulousain (la banque) et a rejeté la tierce opposition nullité formée par cette dernière à l'encontre du jugement du 18 mars 2003 ; Attendu que pour déclarer recevable la tierce opposition nullité formée par la banque à l'encontre du jugement du 18 mars 2003 ayant désigné Mme X... en qualité de mandataire ad hoc de la société Ct, l'arrêt retient que la désignation par le tribunal, devant lequel s'est déroulée la procédure de redressement judiciaire en vertu de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985 d'un mandataire ad hoc, relève de la juridiction gracieuse qui rend un jugement sur requête ; qu'il retient, en outre, que ce type de jugement est attaquable, par celui qui est intéressé et qui n'a pas été partie à la procédure, uniquement par la voie de la tierce opposition en application des articles 582 et suivants du code de procédure civile ; qu'il retient enfin qu'agir par voie de référé rétractation pour attaquer un jugement même rendu sur requête relève de l'aberration parce qu'un jugement n'est pas attaquable par voie de référé, et qui plus est par un tiers vis-à-vis d'un jugement sur requête ;

Attendu qu'en statuant ainsi

, alors que la décision désignant sur requête un mandataire de justice à l'effet de poursuivre les instances en cours lorsque les organes de la procédure ont cessé leurs fonctions ne peut être attaquée, s'agissant d'une personne intéressée, que par le recours en rétractation institué par l'article 496 du code de procédure civile qui relève de la compétence exclusive du juge qui a désigné ce mandataire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS

, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ; Condamne la caisse de crédit agricole mutuel de Toulouse 31 aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille onze

MOYENS ANNEXES

au présent arrêt Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour Mme X..., ès qualités PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit régulière l'action en tierce opposition engagée par la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN à l'encontre de Maître X..., ès qualités de mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES, d'AVOIR déclaré nul et de nul effet le jugement rendu le 18 mars 2003 par le Tribunal de commerce de MILLAU désignant Maître X... en cette qualité et d'AVOIR en conséquence constaté que Maître X... ne démontrait pas en quelles qualités elle avait fait assigner la CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN devant le Tribunal de commerce de MILLAU, et déclaré irrecevable son action exercée pour le compte de la société CLEVER TECHNOLOGIES ; AUX MOTIFS QUE la désignation par le Tribunal en vertu de l'article 90 d'un mandataire ad hoc relève de la juridiction gracieuse, qui rend alors un jugement sur requête ; que si en droit commun, le moyen d'obtenir la désignation d'un mandataire ad hoc s'effectue par ordonnance sur requête, le législateur a spécifiquement voulu qu'en matière commerciale, dans les cas prévus à l'article 90 du 1er décret du 27 décembre 1985, ce soit le Tribunal devant lequel s'est déroulée la procédure de redressement judiciaire qui le désigne ; que ceci a un sens qui serait perdu si ce jugement était rabaissé au rang d'ordonnance en acceptant qu'il soit contesté dans les termes de l'alinéa 2 de l'article 496 du Code de procédure civile ; que la jurisprudence ne saurait contrer la volonté clairement exprimée du législateur ; que ce type de jugement est attaquable, mais dans la mesure où celui qui entend critiquer une telle décision, celui qui est intéressé et qui n'a pas été partie à la procédure, ne lui est alors offerte que la voie de la tierce opposition en application des articles 582 et suivants du Code de procédure civile ; qu'invoquer l'article 496 alinéa 2 du Code de procédure civile par rapport à une ordonnance rendue pour dire que tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance relève de la loi ; mais qu'agir par voie de référé rétractation pour attaquer un jugement même rendu sur requête relève de l'aberration parce qu'un jugement n'est pas attaquable par voie de référé, et qui plus est par un tiers vis-à-vis d'un jugement sur requête ; que la tierce opposition s'avère recevable ; que Maître X... a demandé à être désignée en qualité de mandataire ad hoc ; qu'elle ne produit pas sa requête et ne démontre en rien que sa désignation s'avérait indispensable ; qu'à la seule lecture du jugement, il s'avère que la requérante a réclamé un blanc seing pour agir, sans viser de mission précise ; qu'aucune indication n'apparaît avoir été fournie au Tribunal sur l'achèvement de la mission de vérification des créances ni sur l'achèvement de la mission d'administrateur, que ne pouvait avoir encore Maître X... au regard de la mise en oeuvre du plan ; que rien ne permet de dire qu'au jour du dépôt de la requête, le prix de cession avait été payé ; que pour être désigné mandataire ad hoc, encore aurait-il fallu justifier à la juridiction saisie de la mission qui s'imposait, la définir et obtenir avec autant de précision possible du Tribunal l'étendue de la mission confiée ; que la mission d'un administrateur ad hoc n'est pas celle d'un administrateur provisoire ; que dès lors, Maître X... ne pouvait être désignée en qualité de mandataire ad hoc ; que la sanction de ce constat est la nullité du jugement du 18 mars 2003 ; ALORS QUE la décision désignant sur requête un mandataire ad hoc à l'effet de poursuivre les instances en cours lorsque les organes de la procédure ont cessé leurs fonctions ne peut être contestée par la voie d'une tierce opposition, seule une demande de rétractation en référé étant recevable ; qu'en déclarant cependant recevable la tierce opposition formée par la CCAM à l'encontre de la décision rendue sur requête en date du 18 mars 2003 ayant désigné Maître X... en qualité de mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES, quand cette décision ne pouvait faire l'objet que d'un référé-rétractation, à l'exclusion de toute autre voie de recours, la Cour d'appel a violé l'article 496 du Code de procédure civile, ensemble l'article 90 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 applicable à l'espèce. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que Maître X... ne démontre pas en quelles qualités elle a fait assigner la CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN devant le Tribunal de commerce de MILLAU et d'AVOIR en conséquence déclaré irrecevable son action exercée pour le compte de la société CLEVER TECHNOLOGIES ; AUX MOTIFS QUE dépourvue de sa qualité de mandataire ad hoc, Maître X... ne démontre pas qu'elle aurait pour autant conservé sa qualité de commissaire à l'exécution du plan ; que Maître X... pour les deux sociétés CLEVER a saisi le Tribunal de commerce de MILLAU contre la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE à laquelle elle reproche un soutien abusif « ès qualités de mandataire liquidateur des SA CLEVER TECHNOLOGIES et SA CLEVER ON LINE désignée en cette qualité suivant deux jugements du Tribunal de commerce de MILLAU du 3 février 2004 » ; que ceci est totalement inexact, d'abord parce que le jugement du Tribunal du 3 février 2004 ne concerne que la société CLEVER ON LINE et que par ce jugement, Maître X... n'a pas été désigné en qualité de mandataire liquidateur de cette société mais en qualité de commissaire à l'exécution du plan, alors qu'elle était jusque là représentant des créanciers ; que concernant la société CLEVER TECHNOLIGIES, elle était commissaire à l'exécution du plan depuis le jugement du 11 octobre 2002 après avoir été représentant des créanciers de cette société ; que jamais elle n'a été désignée mandataire liquidateur ; que la précipitation du mandataire judiciaire à introduire l'action du 29 décembre 2005 n'est pas surprenante puisque deux jours plus tard, elle se voyait privée de son action par l'entrée en vigueur de la loi nouvelle du 26 juillet 2005 ; que Maître X... parle d'une « erreur de plume » et soutient qu'en tout état de cause, elle avait le pouvoir d'agir et qu'elle a ensuite rectifié d'elle-même sa fonction dans les écritures qu'elle a produites ; qu'en réalité, après son assignation, dans ses conclusions devant le Tribunal, Maître X... s'est présentée comme commissaire à l'exécution du plan de CLEVER ON LINE et comme mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES ; qu'il vient d'être dit que la preuve de la conservation de sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de CLEVER ON LINE n'était pas rapportée, sa qualité de mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES étant, quant à elle, annulée ; que c'est sous deux qualités différentes, soit de commissaire à l'exécution du plan de la société CLEVER ON LINE et de mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES, que Maître X... a présenté, le 27 avril 2004, requête au juge-commissaire des deux sociétés pour voir désigner un expert alors qu'en l'absence de démonstration inverse, les deux sociétés CLEVER étaient dans la même situation à son égard ; que devant la Cour, la qualité du mandataire judiciaire n'est pas plus clairement définie, puisque Maître X... se présente à la fois « tant en sa qualité de liquidateur qu'en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et mandataire ad hoc de la SA CLEVER TECHNOLOGIES, ainsi qu'en sa qualité de mandataire liquidateur et commissaire à l'exécution du plan de la SA CLEVER ON LINE », ce qui signifie que c'est à la Cour de choisir ; qu'en réalité, depuis l'acte introductif d'instance du 29 décembre 2005, Maître X... ne prouve pas qu'elle avait encore l'une des quelconques qualités qu'elle revendique pour agir en justice pour le compte des deux sociétés CLEVER ; que son action s'avère irrecevable ; ALORS QU'en toute hypothèse, lorsque le jugement arrêtant un plan de cession ne lui fixe pas de durée, la mission du commissaire à l'exécution du plan dure jusqu'à la clôture de la procédure collective sans que, s'agissant d'une procédure ouverte postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1994, elle puisse excéder dix ans ; qu'en retenant que Maître X... ne démontrait pas avoir conservé sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société CLEVER TECHNOLOGIES à la date à laquelle elle avait assigné, ès qualités, la CCAM en responsabilité, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, dès lors la procédure n'avait pas été clôturée, la mission de Maître X... ne s'était pas nécessairement poursuivie, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 621-66 et L. 621-90 du Code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que Maître X... ne démontre pas en quelles qualités elle a fait assigner la CAISSE REGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE TOULOUSE ET DU MIDI TOULOUSAIN devant le Tribunal de commerce de MILLAU et d'AVOIR en conséquence déclaré irrecevable son action exercée pour le compte de la société CLEVER ON LINE ; AUX MOTIFS QUE dépourvue de sa qualité de mandataire ad hoc, Maître X... ne démontre pas qu'elle aurait pour autant conservé sa qualité de commissaire à l'exécution du plan ; que Maître X... pour les deux sociétés CLEVER a saisi le Tribunal de commerce de MILLAU contre la CAISSE DE CREDIT AGRICOLE à laquelle elle reproche un soutien abusif « ès qualités de mandataire liquidateur des SA CLEVER TECHNOLOGIES et SA CLEVER ON LINE désignée en cette qualité suivant deux jugements du Tribunal de commerce de MILLAU du 3 février 2004 » ; que ceci est totalement inexact, d'abord parce que le jugement du Tribunal du 3 février 2004 ne concerne que la société CLEVER ON LINE et que par ce jugement, Maître X... n'a pas été désigné en qualité de mandataire liquidateur de cette société mais en qualité de commissaire à l'exécution du plan, alors qu'elle était jusque là représentant des créanciers ; que concernant la société CLEVER TECHNOLIGIES, elle était commissaire à l'exécution du plan depuis le jugement du 11 octobre 2002 après avoir été représentant des créanciers de cette société ; que jamais elle n'a été désignée mandataire liquidateur ; que la précipitation du mandataire judiciaire à introduire l'action du 29 décembre 2005 n'est pas surprenante puisque deux jours plus tard, elle se voyait privée de son action par l'entrée en vigueur de la loi nouvelle du 26 juillet 2005 ; que Maître X... parle d'une « erreur de plume » et soutient qu'en tout état de cause, elle avait le pouvoir d'agir et qu'elle a ensuite rectifié d'elle-même sa fonction dans les écritures qu'elle a produites ; qu'en réalité, après son assignation, dans ses conclusions devant le Tribunal, Maître X... s'est présentée comme commissaire à l'exécution du plan de CLEVER ON LINE et comme mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES ; qu'il vient d'être dit que la preuve de la conservation de sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de CLEVER ON LINE n'était pas rapportée, sa qualité de mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES étant, quant à elle, annulée ; que c'est sous deux qualités différentes, soit de commissaire à l'exécution du plan de la société CLEVER ON LINE et de mandataire ad hoc de la société CLEVER TECHNOLOGIES, que Maître X... a présenté, le 27 avril 2004, requête au juge-commissaire des deux sociétés pour voir désigner un expert alors qu'en l'absence de démonstration inverse, les deux sociétés CLEVER étaient dans la même situation à son égard ; que devant la Cour, la qualité du mandataire judiciaire n'est pas plus clairement définie, puisque Maître X... se présente à la fois « tant en sa qualité de liquidateur qu'en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et mandataire ad hoc de la SA CLEVER TECHNOLOGIES, ainsi qu'en sa qualité de mandataire liquidateur et commissaire à l'exécution du plan de la SA CLEVER ON LINE », ce qui signifie que c'est à la Cour de choisir ; qu'en réalité, depuis l'acte introductif d'instance du 29 décembre 2005, Maître X... ne prouve pas qu'elle avait encore l'une des quelconques qualités qu'elle revendique pour agir en justice pour le compte des deux sociétés CLEVER ;que son action s'avère irrecevable ; ALORS QUE lorsque le jugement arrêtant un plan de cession ne lui fixe pas de durée, la mission du commissaire à l'exécution du plan dure jusqu'à la clôture de la procédure collective sans que, s'agissant d'une procédure ouverte postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1994, elle puisse excéder dix ans ; qu'en retenant que Maître X... ne démontrait pas avoir conservé sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société CLEVER ON LINE à la date à laquelle elle avait assigné, ès qualités, la CCAM en responsabilité, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, dès lors la procédure n'avait pas été clôturée, la mission de Maître X... ne s'était pas nécessairement poursuivie, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 621-66 et L. 621-90 du Code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005.