Attendu, selon l'arrêt attaqué
(Grenoble, 1er avril 2014), que MM. X... et trente autres salariés, agents de sécurité du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives ont saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen
:
Attendu que l'employeur fait grief à
l'arrêt de dire que les 4 h 30 de « pause » litigieuses constituaient une période de travail effectif et de déclarer en conséquence bien fondée en son principe la demande de rappel de salaire pour cette période, sans tenir compte d'un horaire d'équivalence, alors, selon le moyen :
1°/ que le temps consacré aux pauses est considéré comme du temps de travail effectif lorsque le salarié est à la disposition de son employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que la période de pause, qui s'analyse comme un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail ou à proximité, n'est pas incompatible avec des interventions éventuelles et exceptionnelles demandées durant cette période au salarié en cas de nécessité, notamment pour des motifs de sécurité, ces interventions constituant alors du temps de travail effectif ; que la cour d'appel s'est bornée à relever que durant les périodes de pause les salariés devaient rester dans des locaux déterminés par l'employeur afin d'être en mesure d'intervenir en cas de nécessité ce qui avait été le cas, pour l'un des salariés demandeurs, à sept reprises au cours de l'année 2010 ; qu'en ne s'expliquant pas, comme elle y était invitée, sur le fait que les salariés n'étaient, durant ces périodes, pas soumis aux directives de l'employeur excepté dans le cas d'une éventuelle intervention rendue nécessaire par la survenance d'un incident exceptionnel, lesdites interventions n'obéissant alors pas au régime des pauses et donnant lieu au contraire, en vertu de l'accord d'entreprise en date du 10 novembre 1999, au versement d'un plein salaire, la cour d'appel n'a pas caractérisé, pour les temps de pause et de restauration proprement dits, la réunion de tous les critères de l'article
L. 3121-1 du code du travail et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de ce texte, ensemble l'article
L. 3121-2, alinéa 2, du même code ;
2°/ que le CEA avait fait valoir, sans être contredit, que les salariés étaient conduits à effectuer 76 postes en moyenne au cours de l'année ; qu'en déclarant que les interventions, au cours périodes de pause litigieuses, n'étaient pas exceptionnelles mais au contraire suffisamment fréquentes pour considérer que les salariés demeuraient en permanence à la disposition de leur employeur y compris pendant les pauses et qu'ils ne pouvaient vaquer à des occupations personnelles, cependant que le salarié qu'elle avait pris pour exemple n'avait eu à intervenir que moins d'une fois sur dix périodes de pause, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles
L. 3121-1 et
L. 3121-2, alinéa 2, du code du travail ;
3°/ que constitue un travail effectif au sens des articles
L. 3121-1 et
L. 3121-5 du code du travail, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que constitue au contraire une astreinte la période pendant laquelle le salarié peut vaquer à des occupations personnelles sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur mais a l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; qu'il était constant en l'espèce que durant les 4 h 30 de pause litigieuses, les salariés des formations locales de sécurité étaient hébergés dans des « bases-vie » entièrement aménagées, comprenant notamment cuisine, dortoirs et salle de détente, où ils n'étaient pas soumis aux directives de l'employeur excepté lorsqu'ils devaient intervenir en cas d'incident exceptionnel ; qu'en se fondant, pour dire que ces périodes constituaient un temps de travail effectif, sur le fait que les salariés devaient être en mesure d'intervenir en cas de nécessité, ce qui est le propre de l'astreinte, et sur le fait que l'un des salariés demandeurs a été conduit à intervenir à sept reprises (soit moins d'une fois sur dix) au cours de l'année 2010, sans caractériser autrement en quoi les sujétions imposées aux salariés durant ces périodes les auraient empêchés de vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a statué par des motifs généraux et inopérants, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
Mais attendu
que constitue un travail effectif le temps pendant lequel le salarié est tenu de rester sur le lieu de travail dans des locaux déterminés imposés par l'employeur, peu important les conditions d'occupation de tels locaux, afin de répondre à toute nécessité d'intervention sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ;
Et attendu qu'ayant constaté que, pendant les 4 h 30 consacrées tant au repas du soir qu'au repos, les salariés des formations locales de sécurité étaient tenus de demeurer dans des locaux spécialement aménagés sur le site, appelés base-vie, au-dessus du PC sécurité, qu'ils devaient être en mesure de répondre dans les trois minutes à toute alarme diffusée par les hauts-parleurs pour exécuter des missions diverses allant du secourisme à la protection des installations nucléaires contre des intrusions ou la lutte contre un incendie ; que la nature particulière des risques générés par les activités nucléaires du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives impliquait une intervention immédiate et efficace de ces agents, tant pendant le temps des repas que celui du repos ; qu'ayant ainsi fait ressortir que les salariés concernés ne pouvaient pas vaquer à des occupations personnelles, la cour d'appel, qui n'avait pas à se livrer à une recherche que ses constatations rendait inopérante, a exactement décidé que cette période constituait un temps de travail effectif qui devait être rémunéré comme tel ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen
:
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée
sur ce moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS
:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives aux dépens ;
Vu l'article
700 du code de procédure civile, condamne le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives à payer aux défendeurs la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze septembre deux mille seize
MOYENS ANNEXES
au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les 4h30 de pause constituaient une période de travail effectif et d'AVOIR, en conséquence, déclaré bien fondée en son principe la demande de rappel de salaire pour cette période sans tenir compte d'un horaire d'équivalence ;
AUX MOTIFS QUE « Vu les pièces et les écrits déposés et soutenus à l'audience par les parties auxquels il est renvoyé pour l'exposé du détail de leur argumentation, que l'accord, de fin de conflit relatif au régime de travail des salariés affectés dans les formations locales de sécurité. du 10 novembre 1999, rappelle que : - ces salariés effectuent sept vacations ou postes d'une amplitude de 24 heures 30 comprenant 4 heures 30 de pause, sur un cycle de quatre semaines, - qu'ils « bénéficient d'un temps de repos de nuit de quatre heures pris sur site, dans des locaux spécialement aménagés à cet effet, et d'une pause d'une demi-heure consacrée au repas du soir » ; que « ces temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif » ; que l'article 2.2 de l'accord dispose que « la rémunération du temps de présence au titre des 4 heures 30 de pause et de repos est portée forfaitairement à 65 points sans que cela se cumule avec le paiement d'heures supplémentaires du fait d'une intervention éventuelle » ; que les appelants sollicitent la requalification de cette période de 4 heures 30 en temps de travail ; que l'article
L 3121-1 du code du travail dispose que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que l'article L.3121.2 précise que le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L.3121.1 sont réunis ; que durant les 4 heures 30 consacrées tant au repas du soir qu'au repos, les salariés des formations locales de sécurité sont tenus de demeurer dans des locaux spécialement aménagés sur le site, appelés base-vie, au-dessus du PC sécurité ; qu'ils doivent être en mesure de répondre dans les trois minutes à toute alarme diffusée par les hauts-parleurs dont est équipée la base-vie, pour exécuter des missions diverses allant du secourisme, à la protection des installations nucléaires contre des intrusions ou la lutte contre un incendie ; qu'ils reçoivent un entraînement spécifique à cet effet ; que la nature particulière des risques générés par les activités nucléaires du CEA implique une intervention immédiate et efficace de ces agents, tant pendant le temps des repas que celui du repos ; qu'il résulte de l'analyse des rapports d'intervention communiqués par les appelants, à laquelle a procédé l'employeur (son annexe n° 41), que durant l'année 2010, M. Y..., partie à l'instance, a dû interrompre à sept reprises son repas ou son repos les 18 janvier, 12 février, 6 avril, 9 avril, 26 mai, 29 juin et 21 juillet ; que ce constat établit que des interventions durant le temps de pause ne sont pas exceptionnelles mais sont suffisamment fréquentes pour considérer que les appelants demeurent en permanence à la disposition de leur employeur, y compris durant les pauses, afin de répondre à toute alerte, sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que la période litigieuse constitue un temps de travail effectif ; que le CEA, qui affirme que les 4 heures 30 de repos et de pause ne constituent pas un temps de travail effectif, ne peut, sans se contredire, soutenir que l'article 2.1 de l'accord précité institue un régime d'équivalence dans la mesure où la période litigieuse serait dans cette hypothèse comptabilisée comme un temps de travail ; que non seulement l'accord du 10 novembre 1999 ne fait pas référence à un régime d'équivalence mais encore ses termes contredisent expressément la thèse de l'employeur puisque l'accord prévoit que « ces temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif » ; qu'il n'a jamais été dans l'intention des signataires de l'accord d'instaurer un régime d'équivalence ; qu'en conclusion, les appelants ont fondés à réclamer un rappel de salaire à due concurrence de 4 heures 30 pour chaque poste effectivement tenu ; que le jugement entrepris doit être infirmé ; que les appelants appuient leurs demandes en paiement sur des décomptes qui constituent leur annexe n° 60 ; que le. CEA émet à l'encontre de ces décomptes les critiques suivantes - les calculs reposent sur une exécution de sept vacations par cycle de quatre semaines alors que les salariés n'ont pas toujours accompli ce nombre de vacations, - les appelants retiennent un contingent de 90 heures pour le chiffrage des heures supplémentaires alors que ce contingent est de 220 heures,- la prime d'ancienneté a été indûment prise en compte dans l'assiette de calcul des heures, supplémentaires ; que l'article VI-2 de l'accord relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail signé le 29 février 2000 fixe à 90 heures par salarié le contingent annuel d'heures supplémentaires tel qu'il est défini par le code du travail ; que le champ de cet accord est défini par son article I dans les termes suivants : « Les dispositions du présent accord, établi en application de la loi n° 1998-461 du 13 juin 1998 et la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, s'appliquent à tous les salariés du CEA. Le présent accord prend effet rétroactivement le ler février 2000. Le nombre de jours de repos au titre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail (JRTT) prévus à l'article III-2 pour une année pleine est proratisé. Les parties conviennent que les dispositions du présent accord annulent et remplacent, à compter de sa signature, celles de tout accord national ou local ou texte antérieurs qui seraient encore en vigueur, relatives à la réduction du temps de travail ou portant sur la durée de travail. Dans l'hypothèse où la mise en oeuvre du présent accord nécessiterait des modalités particulières d'application notamment en ce qui concerne le centre de la Vallée du Rhône, ou dans celle ou certains textes pourraient être maintenus en raison de leur compatibilité avec le présent accord, les parties signataires se rencontreront pour décider des suites à donner. Le régime des permanences pour motif de sécurité et celui des salariés affectés dans les formations locales de sécurité en service « 24 heures » ont fait l'objet d'accords particuliers. » que compte tenu de la spécificité du régime de travail des agents des formations locales de sécurité, cet accord n'a bien évidemment pas vocation à régir l'activité de ces agents en ce qu'il définit la durée du travail et l'organisation du temps de travail des salariés du CEA ; que le dernier alinéa de l'article précité constitue un simple rappel de cette évidence ; qu'en l'absence de dispositions sur le contingent annuel d'heures supplémentaires spécifiques aux agents des formations locales de sécurité, ce rappel n'a toutefois pas eu pour effet de priver ces salariés du bénéfice du dispositif conventionnel fixant ce contingent à 90 heures puisque l'accord du 29 février 2000 a en principe vocation à s'appliquer à tous les salariés du CEA selon le premier alinéa de l'article I ; que la prime d'ancienneté, qui ne dépend pas du travail effectivement fourni, n'a en principe pas vocation à entrer dans l'assiette de calcul des heures supplémentaires ; qu'en l'état des éléments soumis à la cour, les appelants ne rapportent pas la preuve d'un usage contraire dont le principe est expressément contesté par l'employeur, la preuve de cet usage ne pouvant résulter de déclarations qu'auraient tenues des représentants du service du personnel à des délégués du personnel ; que les bulletins de paie versés aux débats ne confirme pas l'existence de l'usage allégué ; que les primes d'ancienneté perçues par les salariés ne seront pas prises en compte pour chiffrer les rappels de salaire ; que la cour n'étant pas en mesure d'arrêter les créances des salariés, une expertise sera ordonnée, étant précisé qu'il sera également demandé à l'expert de chiffrer les incidences financières de ce rappel sur le revenu de cessation anticipée d'activité perçu par certains agents en exécution de l'accord relatif à la fin de carrière des salariés affectés en service 24x48 dans les formations Wales de sécurité du 10 novembre 2000 »;
ALORS, TOUT D'ABORD, QUE le temps consacré aux pauses est considéré comme du temps de travail effectif lorsque le salarié est à la disposition de son employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que la période de pause, qui s'analyse comme un arrêt de travail de courte durée sur le lieu de travail ou à proximité, n'est pas incompatible avec des interventions éventuelles et exceptionnelles demandées durant cette période au salarié en cas de nécessité, notamment pour des motifs de sécurité, ces interventions constituant alors du temps de travail effectif ; que la cour d'appel s'est bornée à relever que durant les périodes de pause les salariés devaient rester dans des locaux déterminés par l'employeur afin d'être en mesure d'intervenir en cas de nécessité ce qui avait été le cas, pour l'un des salariés demandeurs, à sept reprises au cours de l'année 2010 ; qu'en ne s'expliquant pas, comme elle y était invitée (conclusions CEA pages 12 et s.), sur le fait que les salariés n'étaient, durant ces périodes, pas soumis aux directives de l'employeur excepté dans le cas d'une éventuelle intervention rendue nécessaire par la survenance d'un incident exceptionnel, lesdites interventions n'obéissant alors pas au régime des pauses et donnant lieu au contraire, en vertu de l'accord d'entreprise en date du 10 novembre 1999, au versement d'un plein salaire, la cour d'appel n'a pas caractérisé, pour les temps de pause et de restauration proprement dits, la réunion de tous les critères de l'article
L. 3121-1 du Code du travail et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de ce texte, ensemble l'article
L. 3121-2 alinéa 2 du même Code ;
ALORS, ENSUITE, QUE le CEA avait fait valoir, sans être contredit, que les salariés étaient conduits à effectuer 76 postes en moyenne au cours de l'année (ses conclusions, page 16) ; qu'en déclarant que les interventions, au cours périodes de pause litigieuses, n'étaient pas exceptionnelles mais au contraire suffisamment fréquentes pour considérer que les salariés demeuraient en permanence à la disposition de leur employeur y compris pendant les pauses et qu'ils ne pouvaient vaquer à des occupations personnelles, cependant que le salarié qu'elle avait pris pour exemple n'avait eu à intervenir que moins d'une fois sur dix périodes de pause, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles
L. 3121-1 et
L. 3121-2, alinéa 2 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE constitue un travail effectif au sens des articles
L. 3121-1 et
L. 3121-5 du Code du travail, le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que constitue au contraire une astreinte la période pendant laquelle le salarié peut vaquer à des occupations personnelles sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur mais a l'obligation d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; qu'il était constant en l'espèce que durant les 4h30 de pause litigieuses, les salariés des formations locales de sécurité étaient hébergés dans des « bases-vie » entièrement aménagées, comprenant notamment cuisine, dortoirs et salle de détente, où ils n'étaient pas soumis aux directives de l'employeur excepté lorsqu'ils devaient intervenir en cas d'incident exceptionnel ; qu'en se fondant, pour dire que ces périodes constituaient un temps de travail effectif, sur le fait que les salariés devaient être en mesure d'intervenir en cas de nécessité, ce qui est le propre de l'astreinte, et sur le fait que l'un des salariés demandeurs a été conduit à intervenir à sept reprises (soit moins d'une fois sur dix) au cours de l'année 2010, sans caractériser autrement en quoi les sujétions imposées aux salariés durant ces périodes les auraient empêchés de vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a statué par des motifs généraux et inopérants, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.
SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les 4h30 de pause litigieuses constituaient une période de travail effectif et d'AVOIR, en conséquence, déclaré bien fondée en son principe la demande de rappel de salaire pour cette période sans tenir compte d'un horaire d'équivalence ;
AUX MOTIFS QUE « Vu les pièces et les écrits déposés et soutenus à l'audience par les parties auxquels il est renvoyé pour l'exposé du détail de leur argumentation, que l'accord, de fin de conflit relatif au régime de travail des salariés affectés dans les formations locales de sécurité du 10 novembre 1999, rappelle que : - ces salariés effectuent sept vacations ou postes d'une amplitude de 24 heures 30 comprenant 4 heures 30 de pause, sur un cycle de quatre semaines, - qu'ils « bénéficient d'un temps de repos de nuit de quatre heures pris sur site, dans des locaux spécialement aménagés à cet effet, et d'une pause d'une demi-heure consacrée au repas du soir » ; que « ces temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif » ; que l'article 2.2 de l'accord dispose que « la rémunération du temps de présence au titre des 4 heures 30 de pause et de repos est portée forfaitairement à 65 points sans que cela se cumule avec le paiement d'heures supplémentaires du fait d'une intervention éventuelle » ; que les appelants sollicitent la requalification de cette période de 4 heures 30 en temps de travail ; que l'article
L 3121-1 du code du travail dispose que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que l'article L.3121.2 précise que le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L.3121.1 sont réunis ; que durant les 4 heures 30 consacrées tant au repas du soir qu'au repos, les salariés des formations locales de sécurité sont tenus de demeurer dans des locaux spécialement aménagés sur le site, appelés base-vie, au-dessus du PC sécurité ; qu'ils doivent être en mesure de répondre dans les trois minutes à toute alarme diffusée par les hauts-parleurs dont est équipée la base-vie, pour exécuter des missions diverses allant du secourisme, à la protection des installations nucléaires contre des intrusions ou la lutte contre un incendie ; qu'ils reçoivent un entraînement spécifique à cet effet ; que la nature particulière des risques générés par les activités nucléaires du CEA implique une intervention immédiate et efficace de ces agents, tant pendant le temps des repas que celui du repos ; qu'il résulte de l'analyse des rapports d'intervention communiqués par les appelants, à laquelle a procédé l'employeur (son annexe n° 41), que durant l'année 2010, M. Y..., partie à l'instance, a dû interrompre à sept reprises son repas ou son repos les 18 janvier, 12 février, 6 avril, 9 avril, 26 mai, 29 juin et 21 juillet ; que ce constat établit que des interventions durant le temps de pause ne sont pas exceptionnelles mais sont suffisamment fréquentes pour considérer que les appelants demeurent en permanence à la disposition de leur employeur, y compris durant les pauses, afin de répondre à toute alerte, sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que la période litigieuse constitue un temps de travail effectif ; que le CEA, qui affirme que les 4 heures 30 de repos et de pause ne constituent pas un temps de travail effectif, ne peut, sans se contredire, soutenir que l'article 2.1 de l'accord précité institue un régime d'équivalence dans la mesure où la période litigieuse serait dans cette hypothèse comptabilisée comme un temps de travail ; que non seulement l'accord du 10 novembre 1999 ne fait pas référence à un régime d'équivalence mais encore ses termes contredisent expressément la thèse de l'employeur puisque l'accord prévoit que « ces temps de repos et de pause n'entrent pas dans le décompte de la durée de travail effectif » ; qu'il n'a jamais été dans l'intention des signataires de l'accord d'instaurer un régime d'équivalence ; qu'en conclusion, les appelants ont fondés à réclamer un rappel de salaire à due concurrence de 4 heures 30 pour chaque poste effectivement tenu ; que le jugement entrepris doit être infirmé ; que les appelants appuient leurs demandes en paiement sur des décomptes qui constituent leur annexe n° 60 ; que le. CEA émet à l'encontre de ces décomptes les critiques suivantes - les calculs reposent sur une exécution de sept vacations par cycle de quatre semaines alors que les salariés n'ont pas toujours accompli ce nombre de vacations, - les appelants retiennent un contingent de 90 heures pour le chiffrage des heures supplémentaires alors que ce contingent est de 220 heures,- la prime d'ancienneté a été indûment prise en compte dans l'assiette de calcul des heures, supplémentaires ; que l'article VI-2 de l'accord relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail signé le 29 février 2000 fixe à 90 heures par salarié le contingent annuel d'heures supplémentaires tel qu'il est défini par le code du travail ; que le champ de cet accord est défini par son article I dans les termes suivants : « Les dispositions du présent accord, établi en application de la loi n° 1998-461 du 13 juin 1998 et la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000, s'appliquent à tous les salariés du CEA. Le présent accord prend effet rétroactivement le ler février 2000. Le nombre de jours de repos au titre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail (JRTT) prévus à l'article III-2 pour une année pleine est proratisé. Les parties conviennent que les dispositions du présent accord annulent et remplacent, à compter de sa signature, celles de tout accord national ou local ou texte antérieurs qui seraient encore en vigueur, relatives à la réduction du temps de travail ou portant sur la durée de travail. Dans l'hypothèse où la mise en oeuvre du présent accord nécessiterait des modalités particulières d'application notamment en ce qui concerne le centre de la Vallée du Rhône, ou dans celle ou certains textes pourraient être maintenus en raison de leur compatibilité avec le présent accord, les parties signataires se rencontreront pour décider des suites à donner. Le régime des permanences pour motif de sécurité et celui des salariés affectés dans les formations locales de sécurité en service « 24 heures » ont fait l'objet d'accords particuliers. » que compte tenu de la spécificité du régime de travail des agents des formations locales de sécurité, cet accord n'a bien évidemment pas vocation à régir l'activité de ces agents en ce qu'il définit la durée du travail et l'organisation du temps de travail des salariés du CEA ; que le dernier alinéa de l'article précité constitue un simple rappel de cette évidence ; qu'en l'absence de dispositions sur le contingent annuel d'heures supplémentaires spécifiques aux agents des formations locales de sécurité, ce rappel n'a toutefois pas eu pour effet de priver ces salariés du bénéfice du dispositif conventionnel fixant ce contingent à 90 heures puisque l'accord du 29 février 2000 a en principe vocation à s'appliquer à tous les salariés du CEA selon le premier alinéa de l'article I ; que la prime d'ancienneté, qui ne dépend pas du travail effectivement fourni, n'a en principe pas vocation à entrer dans l'assiette de calcul des heures supplémentaires ; qu'en l'état des éléments soumis à la cour, les appelants ne rapportent pas la preuve d'un usage contraire dont le principe est expressément contesté par l'employeur, la preuve de cet usage ne pouvant résulter de déclarations qu'auraient tenues des représentants du service du personnel à des délégués du personnel ; que les bulletins de paie versés aux débats ne confirme pas l'existence de l'usage allégué ; que les primes d'ancienneté perçues par les salariés ne seront pas prises en compte pour chiffrer les rappels de salaire ; que la cour n'étant pas en mesure d'arrêter les créances des salariés, une expertise sera ordonnée, étant précisé qu'il sera également demandé à l'expert de chiffrer les incidences financières de ce rappel sur le revenu de cessation anticipée d'activité perçu par certains agents en exécution de l'accord relatif à la fin de carrière des salariés affectés en service 24x48 dans les formations Wales de sécurité du 10 novembre 2000 »;
ALORS QUE le juge doit restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; que le fait, de la part du CEA, d'avoir soutenu à titre principal que les temps de pause ne constituaient pas une période de travail effectif, ainsi que le prévoyait l'accord d'entreprise du 10 novembre 1999, ne lui interdisait pas de soutenir également que dans l'hypothèse où cette qualification conférée par l'accord collectif serait considérée comme erronée, il faudrait alors en déduire que le système mis en place par ledit accord devrait s'analyser en un horaire d'équivalence ; que la cour d'appel s'est bornée à relever, pour écarter la qualification d'horaire d'équivalence, que telle n'était pas l'intention des signataires dans la mesure où ceux-ci avaient stipulé, dans l'accord, que les périodes de pause litigieuses ne constituaient pas une période de travail effectif ; qu'en statuant de la sorte, cependant qu'elle estimait que les périodes litigieuses constituaient au contraire une période de travail effectif ce dont elle devait tirer les conséquences au point de vue de la qualification du système effectivement mis en place par l'accord, la cour d'appel a violé par fausse interprétation l'accord collectif du 10 novembre 1999, ensemble et par refus d'application l'article
12 du Code de procédure civile.