Cour administrative d'appel de Paris, 2ème Chambre, 29 juin 2005, 03PA03681

Synthèse

  • Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
  • Numéro d'affaire :
    03PA03681
  • Type de recours : Plein contentieux
  • Lien Légifrance :https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/CETATEXT000007447669
  • Rapporteur : M. Jean ALFONSI
  • Rapporteur public :
    M. MAGNARD
  • Président : M. le Prés FARAGO
  • Avocat(s) : BELOUIS
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Texte intégral

Vu I°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 septembre 2003 sous le n° 03PA03693, présentée pour la S.A. PERONNET, dont le siège est 219 avenue du Général de Gaulle 94170 Le Perreux-sur-Marne, par Me Belouis , avocat ; la S.A. PERONNET demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement en date du 2 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1991, 1992 et 1993 mis en recouvrement le 29 décembre 1997 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1991 par avis de mise en recouvrement émis le 14 décembre 1995 ; 2°) de prononcer la décharge demandée ; 3°) de lui allouer la somme de 3 049 euros ( 20 000 F) HT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; Vu II°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 septembre 2003 sous le n° 03PA03681, présentée pour la SA PERONNET par Me Belouis, avocat ; la SA PERONNET demande à la cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 2 juillet 2003 ; ……………………………………………………………………………………………………… Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code

général des impôts et le livre des procédures fiscales ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ; Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2005 : - le rapport de M. Alfonsi, rapporteur, - et les conclusions de M. Magnard, commissaire du gouvernement,

Considérant qu'

à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 1991, 1992 et 1993, de la SA PERONNET , qui exerce une activité de location-gérance de fonds de commerce de décoration et d'agencement de locaux professionnels, l'administration, par deux notifications de redressement datées du 20 décembre 1994 et du 13 juillet 1995 réintégré dans ses résultats , d'une part, au titre des trois exercices vérifiés, des sommes correspondant aux abandons de créances représentatives d'avances de trésorerie consentis à la société Agenoves et à la société Pabois et, d'autre part, au titre des exercices clos en 1992 et 1993, le montant des provisions constituées par la société requérante pour risque de non recouvrement de créances détenues sur la société Merand et des produits financiers non comptabilisés ; que le service a, en outre, par sa notification du 20 décembre 1994, corrigé le montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1991 et constaté à ce titre un profit sur le trésor ; que, par sa requête enregistrée sous le n° 03PA03693, la S.A. PERONNET relève appel du jugement en date du 2 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1991, 1992 et 1993 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 1993 en conséquence de ces redressements ; que, par sa requête enregistrée sous le n° 03PA03681, la S.A. PERONNET demande à la cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement ; que ces requêtes, dirigées contre le même jugement, ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ; Sur la requête n° 03PA03693 : En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée : S'agissant de la procédure d'imposition : Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation… » ; Considérant que la notification de redressement du 20 décembre 1994 indique, pour chaque mois, les montants de taxe sur la valeur ajoutée facturés portés en comptabilité sur le journal des achats, s'élevant au total à 213 500 F et le montant de taxe sur la valeur ajoutée déduite par la société requérante pour la période correspondante sur ses déclarations CA3 de janvier à décembre 1991 s'élevant à 282 819 F ainsi que le montant de taxe à reprendre correspondant à la différence entre ces montants, soit 69 319 F ; qu'eu égard à la nature de ce chef de redressement, le vérificateur n'était, en tout état de cause, pas tenu de détailler facture par facture la taxe sur la valeur ajoutée considérée comme non déductible dans ce document, lequel comportait les éléments de fait et de droit permettant à la société contribuable de contester utilement ce chef de redressement ; qu'ainsi, ladite notification de redressement était suffisamment motivée ; S'agissant du bien fondé de l'imposition contestée : Considérant que si , pour contester le rappel de taxe sur la valeur ajoutée en litige, la S.A. PERONNET soutient qu'à la suite d'une écriture d'opérations diverses complétant le montant de taxe déductible porté en comptabilité pour 213 500 F, les montants de taxe déductible portés en comptabilité pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1991 ne seraient pas inférieurs aux montants de taxe qu'elle a déduit sur ses déclarations, elle n'apporte aucune justification de cette écriture comptable ; En ce qui concerne les compléments d'impôt sur les sociétés : S'agissant des abandons de créance : Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que l'abandon de créance accordé par une entreprise au profit d'un tiers ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ; Considérant que la S.A. PERONNET a consenti en 1991 et 1992 des avances de trésorerie rémunérées aux sociétés Agenoves et Pabois, qui exerçaient une activité d'agencement de magasins, de même nature que celle du locataire-gérant de son fonds de commerce ; qu'elle a abandonné une partie des créances représentatives de ces avances pour les montants de 1 100 000 F en 1991, 380 000 F en 1992 et 150 000 F en 1993 en ce qui concerne la société Agenoves et pour le montant de 781 078 F en 1993 en ce qui concerne la société Pabois ; que l'administration a réintégré lesdites sommes dans les résultats des exercices au cours desquels ont été consentis ces abandons de créances qu'elle a regardés comme des actes anormaux de gestion; que si elle fait valoir qu'elle avait l'intention, pour assurer sa croissance externe, de procéder à la reprise de ces deux entreprises en difficultés dans le cadre de procédures collectives de redressement judiciaire et qu'elle aurait acquis une partie de leur capital, la S.A. PERONNET, qui ne se prévaut pas de relations commerciales avec l'une ou l'autre de ces sociétés n'établit pas, en tout état de cause, que les abandons de créance en litige auraient trouvé une contrepartie dans les modalités d'acquisition de ces deux sociétés ; qu'ainsi, l'administration doit être réputée apporter la preuve que ces abandons de créances procédaient d'une gestion commerciale anormale ; que c'est par suite à bon droit que l'administration a réintégré les sommes correspondantes dans le bénéfice imposable de la société pour les trois exercices vérifiés ; S'agissant des provisions : Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant…notamment : …5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice…» ; Considérant que par un protocole d'accord conclu le 4 février 1991 en vue de la reprise de l'activité d'agencement de boulangerie exercée par la société Mérand, la S.A. PERONNET s'est engagée à soutenir cette société pour faire face à ses engagements auprès du Crédit industriel de l'Ouest ; qu'en exécution de cet engagement, la S.A. PERONNET a racheté au cours de l'exercice 1992 à cette banque , pour un montant de 1 163 327 F, une partie de la créance détenue par cette dernière sur la société Mérand et produite au passif du redressement judiciaire de ladite société; qu'elle a constitué à la clôture des exercices 1992 et 1993 des provisions s'élevant respectivement à 450 000 F et 250 000 F pour risque de non recouvrement sur le montant non réglé de cette créance ; que l'administration a réintégré ces provisions dans les résultats de la société requérante pour les exercices clos en 1992 et 1993 ; qu'elle fait valoir que la S.A. PERONNET n'avait pas de relations commerciales avec la société Mérand, que celle-ci a été mise en règlement judiciaire le 31 mars 1992 que sa dette envers le Crédit industriel de l'Ouest s'élevait à 2 326 646 F et que la créance en cause n'était assortie d'aucune autre garantie que celles précédemment détenues par la banque ; que, ce faisant, l'administration n'établit ni même n'allègue que l'opération de rachat d'une partie de créance aurait été réalisée par la société requérante à fonds perdus ou que la valeur de cette créance aurait été inférieure à son prix de rachat ; qu'ainsi, elle ne peut être regardée comme apportant la preuve que les provisions pour risque de non recouvrement de la créance rachetée, qui ont été constituées en raison de l'aggravation des difficultés financières de la société Mérand, lesquelles ont conduit à sa mise en liquidation judiciaire prononcée le 3 août 1993, procèderaient d'une gestion commerciale anormale ; que c'est par suite à tort que le service a rehaussé le bénéfice imposable de la société requérante des sommes de 450 000 F (68 602,06 euros) et 200 000 F (30 489,80 euros) au titre des exercices clos respectivement en 1992 et 1993 ; S'agissant des produits financiers non comptabilisés : Considérant que la circonstance qu'une société ne demande pas que les intérêts d'un prêt qu'elle consent soient capitalisés pour produire eux-mêmes intérêt ne saurait, par elle-même, être regardée comme révélant un acte anormal de gestion ; qu'il n'est pas contesté que les avances de trésorerie rémunérées accordées à la société Normandex ainsi qu'aux sociétés SBFM, MIRE et OFIPAL n'étaient pas assorties de l'obligation pour cette société de rémunérer au taux de l'intérêt légal le produit des intérêts dus à la SARL PERONNET ET ASSOCIES et non réglés à leur échéance par ces sociétés ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient le ministre, la société requérante n'a pas commis d'acte anormal de gestion en renonçant à percevoir les intérêts des intérêts échus afférents aux avances consenties auxdites sociétés ; que, dès lors, comme le soutient la S.A. PERONNET, ainsi qu'elle est recevable à le faire dès lors que sa réclamation portait dans son quantum sur l'intégralité des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices clos en 1992 et 1993, l'administration ne pouvait légalement réintégrer pour ce motif l'intérêt légal correspondant dans ses résultats pour lesdits exercices à concurrence respectivement des sommes de 36 423 F (5 552,65 euros) et 69 701 F (10 625,85 euros) ; S'agissant du profit sur le trésor : Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, la société requérante a déduit de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par elle pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1991 une somme supérieure de 69 913 F à la taxe qu'elle était en droit de déduire suivant sa comptabilité, sans fournir aucune justification de cet écart ; que, par suite, l'administration était en droit de rehausser le résultat de la société pour l'exercice clos en 1991 de la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la S.A. PERONNET est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a refusé de réduire ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés à concurrence des montants de 486 423 F (74 154,71 euros) au titre de l'exercice clos en 1992 et de 269 701 F (41 415,65 euros) au titre de l'exercice clos en 1993 ; Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu , en application des dispositions susvisées , de condamner l'Etat à payer à la S.A. PERONNET une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; Sur la requête n° 03PA03681 : Considérant que la cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la requête au fond formée par la S.A. PERONNET contre le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 2 juillet 2003; que , par suite, les conclusions de la requête susvisée tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet ;

DECIDE :

Article 1er : Les bases de l'impôt sur les sociétés assignées à la SA PERONNET sont réduites de 74 154,71 euros (486 423 F) au titre de l'exercice clos en 1992 et de 41 115,65 euros (269 701F) au titre de l'exercice clos en 1993. Article 2 : La SARL PERONNET est déchargée des droits et intérêts de retard correspondant à la réduction de ses bases d'imposition définie à l'article 1er. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 03PA03693 de la S.A. PERONNET est rejeté. Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 2 juillet 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt Article 5 : L'Etat (ministre de l'économie, des finances et de l'industrie) versera à la S.A. PERONNET une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Article 6 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 03PA03681 de la S.A. PERONNET. 4 PA0 2 N°03PA03681 et 03PA03693