Cour d'appel de Poitiers, 1ère Chambre, 24 janvier 2023, 22/00701

Mots clés Demande en paiement de l'indemnité d'assurance dans une assurance de dommages · société · contrat · garantie · perte d'exploitation · dommages · préjudice · provision · exclusion · interdiction · exploitation · assuré · pertes · indemnisation

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro affaire : 22/00701
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Président : M. Thierry MONGE

Texte

ARRET N°29

N° RG 22/00701 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GP32

S.A. ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL - IARD

C/

S.A.R.L. SONA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 24 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/00701 - N° Portalis DBV5-V-B7G-GP32

Décision déférée à la Cour : jugement du 22 février 2022 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHE SUR YON.

APPELANTE :

S.A. ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL - IARD

[Adresse 2]

[Localité 3]

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Serge PAULUS, avocat au barreau de STRASBOURG, substitué par Me Guillaume BERTON, avocat au barreau de STARSBOURG

INTIMEE :

S.A.R.L. SONA

[Adresse 1]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Marion LE LAIN de la SCP DROUINEAU-BACLE-LE LAIN-BARROUX-VERGER, avocat au barreau de POITIERS et pour avocat plaidant Me Guillaume AKSIL, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 07 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,

ARRÊT :

- Contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ :

La SARL Sona exploite un restaurant traditionnel sous l'enseigne 'Les Reflets' à [Localité 4].

Elle avait souscrit le 18 novembre 2019 auprès de la société d'Assurances du Crédit Mutuel Iard (les ACM Iard) un contrat d'assurance multirisque professionnelle intitulé 'Acajou Signature'.

Faisant valoir que son activité était gravement affectée par les mesures décidées par les autorités publiques en raison de la pandémie de covid 19, elle a procédé à une déclaration de sinistre le 16 mars 2020 en sollicitant la mobilisation de la garantie 'pertes d'exploitation' de la police auprès de son assureur, qui lui a opposé un refus de garantie aux motifs d'une part, que les mesures restrictives prises par l'administration au titre du confinement ne caractérisaient pas une interdiction d'accès au sens du contrat, et d'autre part que celui-ci stipulait une clause d'exclusion relative aux dommages causés par les micro-organismes qui s'appliquait aux effets de l'épidémie de ce coronavirus.

Elle a régularisé le 30 mars 2021 une seconde déclaration de sinistre au titre de la deuxième crise sanitaire, en essuyant également un refus de prise en charge de la part de l'assureur.

Autorisée à agir à jour fixe, la société Sona a fait assigner la société ACM Iard pour le 22 juin 2021 devant le tribunal de commerce de La-Roche-sur-Yon par acte du 18 juin 2021 afin de voir juger qu'elle bénéficiait de la garantie 'pertes d'exploitation' inhérente à la fermeture de son établissement imposée par les mesures administratives décidées par l'arrêté du 14 mars 2020 modifié le 15 mars 2020, et par le décret du 29 octobre 2020 ; pour s'entendre déclarer inopposable la clause d'exclusion invoquée par l'assureur du chef des micro-organismes, et pour voir condamner la compagnie à l'indemniser au titre de sa perte d'exploitation sur la période du 15 mars au 2 juin 2020 et sur la période du 29 octobre 2020 au 31 mars 2021 ; et au cas où le tribunal ordonnerait une expertise, de lui allouer alors une provision ad litem de 10.000 euros ainsi qu'une somme provisionnelle de 65.472,62 euros à valoir sur son indemnisation.

La compagnie ACM Iard a soutenu être fondée à dénier sa garantie, parce qu'il n'y avait pas eu d'arrêt d'activité au sens du contrat et subsidiairement parce que la clause d'exclusion des dommages causés par des micro-organismes s'appliquait, et elle a très subsidiairement prôné en cas d'expertise une mission différente de celle sollicitée par la demanderesse.

L'affaire a en définitive été débattue devant la juridiction consulaire à l'audience du 28 septembre 2021.

Par jugement du 22 février 2022, le tribunal de commerce de La-Roche-sur-Yon a :

* dit et jugé la société Sona fondée en son principe en sa demande d'indemnisation

* dit que la société ACM-Iard était tenue d'indemniser la SARL Sona de sa perte d'exploitation relative à l'ensemble de ses activités suite à la fermeture administrative de son établissement pour cause d'épidémie pour les périodes suivantes :

.du 17 mars 2020 au 2 juin 2020

.du 29 octobre 2020 au 28 janvier 2021

* ordonné aux frais avancés de la société Sona une expertise aux fins, notamment de déterminer le taux de marge brute à appliquer pour le calcul de la perte de marge brute subie par la société Sona conformément à l'article 17.2 des conditions générales ; évaluer le montant des dommages en prenant en compte toutes les aides financières ou exonérations dont a bénéficié l'assurée au cours des périodes garanties ; débouté la société Sona de ses demandes de provision; sursis à statuer sur les plus amples demandes des parties dans l'attente de la réalisation de l'expertise judiciaire ; et réservé les dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu, en substance,

-que le sinistre entrait bien dans le champ de l'article 17-1 du contrat invoqué par l'assurée, couvrant les pertes pécuniaires relatives à une interruption d'activité suite à une mesure d'interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires, prises à la suite d'un événement extérieur à l'activité de l'assuré et aux locaux dans lesquels il l'exerce, dès lors que l'activité de la société Sona avait été rendue impossible par l'interdiction, qui était absolue, faite au public d'accéder à ses locaux pour se restaurer en leur sein

-que les mesures d'interdiction d'accès édictée provenaient d'une autorité administrative française et avaient été prises suite à un événement extérieur à l'activité de l'assuré et aux locaux dans lesquels elle était exercée

-que la clause d'exclusion des dommages causés par un micro-organisme invoquée par la société ACM Iard était écrite en gras sur une page spéciale du contrat et très lisible

-mais qu'elle n'était pas limitée, et devait donc être réputée non écrite par application de l'article L.113-1 du code des assurances, car elle devait être interprétée, le contrat ne définissant pas les micro-organismes, terme générique recoupant différents types d'êtres vivants, et ne contenant aucune référence aux causes directes ou indirectes des dommages subis, ce qui ne permettait pas à l'assuré de comprendre l'étendue exacte de l'exclusion à laquelle elle le soumettait

-que la compagnie devait donc sa garantie

-qu'une expertise s'imposait pour déterminer le préjudice indemnisable, compte-tenu des incertitudes sur le taux de marge à appliquer

-qu'il n'y avait lieu ni à provision ad litem, ni à indemnisation provisionnelle.

La société ACM Iard a relevé appel le 15 mars 2022.

Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique

* le 15 mars 2022 par la société ACM Iard

* le 8 juillet 2022 par la SARL Sona.

La société ACM Iard demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau,

* à titre liminaire :

-de juger que la société Sona ne sollicite pas l'infirmation du jugement en ce qu'il 'déboute la société Sona de l'ensemble de ses demandes de provision formée à son encontre

- de déclarer irrecevables, comme nouvelles en appel, les demandes de la société Sona tendant à voir condamner les ACM Iard à lui verser :

.95.729,22 euros à titre provisionnel

.6.381,95 euros à titre d'indemnisation de ses frais d'expert-technique

.à titre de dommages et intérêts des intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2021

* à titre principal :

-de juger que les conditions de la garantie perte d'exploitation ne sont pas réunies

-de juger que la compagnie n'est pas tenue de garantir les prétendues pertes d'exploitation de Sona

-et de débouter celle-ci de l'ensemble de ses demandes

* à titre subsidiaire :

-de juger que la clause d'exclusion qu'elle-même invoque est valide et applicable

-de dire que la compagnie n'est pas tenue de garantir les prétendues pertes d'exploitation

de son assurée Sona

-et de débouter celle-ci de tous ses chefs de prétentions

* à titre très subsidiaire, si la cour désignait néanmoins un expert :

-de juger que la garantie n'est due que pour les périodes du 17 mars au 2 juin 2020 et du 29 octobre 2020 au 31 mars 2021

-de dire qu'elle n'a pas à indemniser la SARL Sona de ses frais d'expertise technique

-de juger que l'ensemble des subventions, primes et indemnités reçues ou à recevoir au titre des périodes de garantie doivent être prises en compte pour déterminer l'éventuel préjudice

-de fixer en conséquence la mission de l'expert, selon une formulation qu'elle propose

* à titre très infiniment subsidiaire :

-de juger que l'indemnité due par la compagnie à la SARL Sona au titre des frais d'expertise est limitée à 5% de l'indemnité due au titre des pertes d'exploitation

-de constater que l'expert judiciaire commis par le tribunal a déterminé que le préjudice subi par la SARL Sona était au maximum de 579,63 euros

-de fixer en conséquence à 28,98 euros TTC l'indemnité maximale due au titre des frais d'expertise

* en tout état de cause :

.de débouter la SARL Sona de ses demandes

.de la condamner aux dépens et à 10.000 euros d'indemnité de procédure.

La société des ACM Iard fait valoir que le dommage garanti, à savoir les pertes d'exploitation résultant d'une interruption ou d'une réduction d'activité, ne peut être indemnisé que s'il est justifié d'un des événements garantis ; que ces événements sont définis à l'article 17.1 du contrat ; que la quasi totalité des sinistres ainsi couverts consistent en des dommages matériels, ici non advenus ni allégués, et que le seul événement garanti non consécutif à un dommage matériel tient à l'existence d'une mesure d'interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires.

Affirmant que cette notion est claire et précise, et non susceptible d'interprétation sous peine de la dénaturer, elle soutient que l'interdiction d'accès qui conditionne l'indemnisation des pertes d'exploitation se comprend dans son acception littérale et usuelle, d'une interdiction absolue de pénétrer dans les locaux assurés, et elle fait valoir qu'aucune des mesures prises par les autorités dans le cadre de la crise sanitaire, qu'il s'agisse de la première ou de la seconde période de confinement, n'a édicté d'interdiction absolue d'accéder à l'établissement assuré, puisque les salariés et la direction pouvaient matériellement continuer à y accéder, que les fournisseurs pouvaient continuer à livrer ; et que les consommateurs pouvaient continuer à se déplacer dans les locaux pour retirer les plats commandés dans le cadre de la vente à emporter ou 'click & collect' qui restait autorisée et requérait simplement de se munir de l'attestation réglementaire, et elle précise qu'il ressort des productions que le restaurant exploité par la société Sona a précisément pratiqué le click & collect et communiqué sur cette modalité, proposant ainsi sur son site en pleine période de crise sanitaire un menu de la Saint Valentin et un menu de Pâques. Elle ajoute que si le restaurant a fermé à un moment, il s'agissait d'un choix de gestion de son exploitant.

Elle en déduit que sa garantie n'est pas mobilisable, la condition n'étant pas remplie.

Elle ajoute que si la cour estimait par extraordinaire que cette clause, claire, doive néanmoins être interprétée, elle devrait l'être dans le sens cohérent avec l'objet de la garantie considérée, qui assure l'exploitant du restaurant contre les risques d'exploitation qui peuvent survenir dans le cadre normal de son activité, alors que le préjudice invoqué, causé par la crise sanitaire due au coronavirus, est anormal, inédit, et n'avait nullement été envisagé.

À titre subsidiaire, elle invoque la clause d'exclusion des dommages causés par des micro-organismes stipulée au contrat, en soutenant que rédigée en caractères gras, dans un chapitre spécifique intitulé en gros caractère 'ce qui n'est jamais garanti', elle est parfaitement valable.

Elle soutient que cette clause est claire, un micro-organisme étant une notion usuelle selon le sens commun avec la même acception en France, en Europe et même pour l'OMS, d'entité micro-biologique recouvrant les bactéries, les parasites et les virus, et donc le covid-19, qui est un coronavirus.

Elle soutient que la notion de dommage est elle-même très claire.

Elle conteste que cette clause d'exclusion vide la garantie de sa substance, en faisant valoir que la garantie 'pertes d'exploitation' conserve un large périmètre d'application, et qu'elle n'est donc pas privée de tout objet.

Elle considère que la clause est ainsi formelle et limitée.

Elle soutient que c'est dénaturer la clause que de l'analyser comme requérant une causalité directe entre le dommage et l'action du micro-organisme, alors que le caractère direct ou indirect de la causalité n'y est pas visé, contrairement à d'autres clauses de la police qui contiennent cette distinction, et elle affirme que le coronavirus est bien une cause nécessaire et même déterminante du dommage dont la garantie est sollicitée, puisque sans ce virus, les pertes d'exploitation alléguées n'auraient pas été subies.

À titre subsidiaire, la compagnie ACM Iard conclut au rejet des demandes de son assurée en affirmant que celle-ci n'établit pas la réalité des pertes d'exploitation dont elle réclame l'indemnisation, faute de produire des documents comptables probants, et elle considère que le tribunal, qui a fait ce constat de l'insuffisance des preuves du préjudice allégué, n'en a pas tiré les conséquences en ordonnant néanmoins une expertise-comptable alors qu'il aurait dû en inférer le rejet des demandes.

Elle observe que l'expert qui a d'ores-et-déjà déposé son rapport arrive à une évaluation du préjudice de 579,63 euros au maximum qui confirme donc en réalité l'absence de perte d'exploitation.

Elle récuse la période d'indemnisation invoquée par l'assurée, en objectant qu'il ne peut s'agir que de celle des mesures d'interdiction d'accès.

Elle maintient qu'il faut chiffrer la perte d'exploitation en prenant en compte les aides et subventions.

Elle conteste la mission donnée à l'expert par le tribunal, et en propose une différente.

Elle soutient que le contrat stipule que les frais d'expert-conseil de l'assuré ne sont pris en charge par l'assureur que s'il s'agit d'une expertise d'estimation du dommage à l'initiative de la compagnie, mais pas en cas d'expertise judiciaire sur réclamation de l'assuré.

La SARL Sona demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société ACM Iard à l'indemniser des préjudices subis au titre de la garantie perte d'exploitation suite aux mesures d'interdiction prises pour faire face à la propagation de l'épidémie de covid-19, en ce que la garantie 'interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires prises à la suite d'un événement extérieur à votre activité et aux locaux dans lesquels vous l'exercez' lui était due et que l'exclusion de garantie visée par l'assureur était nulle car ni formelle ni limitée et en tout état de cause inapplicable dès lors que les pertes subies n'ont pas été causées directement par le virus covid-19 ; d'infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la clause d'exclusion était rédigée en caractères très apparents conformément à l'article L.112-4 du code des assurances et en ce qu'il a jugé que les périodes d'indemnisation étaient limitées du 17 mars 2020 au 2 juin 2020 et du 29 octobre 2020 au 28 janvier 2021 alors que la garantie est de douze mois par sinistre c'est-à-dire à chaque nouvelle interdiction des accès,

et statuant à nouveau :

*de condamner la société ACM Iard à l'indemniser pour les périodes du 15 mars 2020 au 30 octobre2020 et du 30 octobre2020 au 29 octobre2021 pour un montant de 127.638,96 euros

*de condamner la société ACM Iard à l'indemniser de ses frais d'expert-technique pour un montant de 6.381,95 euros

* au cas où la cour ordonnerait une expertise judiciaire,

-de condamner alors ACM Iard à lui verser une provision de 95.729,22 euros

-et de prescrire à l'expert de chiffrer les pertes subies sur les périodes du 15 mars au 30 octobre 2020 et du 30 octobre 2020 au 29 octobre 2021, sans prendre en compte dans le calcul de l'indemnité les aides perçues au titre du fonds de solidarité ni la prime de relance mutualiste

* de condamner la société ACM Iard au paiement de dommages et intérêts consistant en l'intérêt au taux légal à compter du 30 mars 2021

* de condamner ACM Iard aux entiers dépens et à 15.000euros d'indemnité de procédure.

Elle maintient que la garantie 'pertes d'exploitation ' suite à l'interdiction des accès est bien mobilisable, en faisant valoir que les mesures prescrites par les autorités administratives pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ont interdit aux restaurants d'accueillir du public, totalement du 15 mars au 2 juin 2020 puis du 30 octobre 2020 au 8 juin 2021, et partiellement du 9 au 20 juin 2021.

En réponse à l'argumentation adverse, elle soutient que l'interdiction faite aux restaurants d'accueillir du public caractérisait bien une interdiction d'accès au sens de la clause du contrat, le fait que les clients ne soient plus autorisés à s'installer dans la salle de restaurant suffisant, et elle considère que si l'assureur voulait que la clause de garantie ne joue qu'en cas d'interdiction totale et absolue, il devait le stipuler expressément, et elle observe qu'au contraire, la garantie couvre aussi la simple 'réduction d'activité'.

Elle maintient que la clause d'exclusion des dommages causés par des micro-organismes lui est inopposable car ni formelle ni limitée, elle doit être réputée non écrite. Elle soutient, à cet égard, que la clause ne ressort pas suffisamment des autres clauses, et qu'elle est insuffisamment précise, aucune définition de ce terme n'étant donnée dans les conditions générales, et la clause ne précisant pas non plus les dommages ou le type de dommages que sont susceptibles de causer des micro-organismes, de sorte qu'au vu de la généralité de ces termes et des multiples définitions qu'ils peuvent recouvrir, l'assuré ne peut savoir ce qui est visé. Elle rappelle au visa de l'article L.113-1 du code des assurances que la nécessité d'interpréter une clause implique que celle-ci n'est donc pas claire, et que s'agissant d'une exclusion, il en résulte qu'elle est nulle.

Elle ajoute que le dommage dont elle sollicite la prise en charge n'a pas été causé par le virus lui-même, ce que l'assureur prétend en vertu d'un raccourci, mais résulte des mesures d'interdiction d'accès imposées par les autorités administratives.

Elle soutient que ses prétentions indemnitaires d'appel sont recevables même si leur montant diffère de ce qu'elle demandait en première instance, puisqu'elles tendent à la même fin.

Elle invoque en tant que de besoin l'article 566 du code de procédure civile.

Elle affirme que s'agissant d'une déclaration de sinistre, elle n'a pas à établir précisément l'étendue de son dommage, et elle justifie ainsi sa demande d'expertise.

Elle fait valoir que la garantie qui est ainsi mobilisable prévoit aux termes des conditions particulières de la police une durée maximum d'indemnisation de 12 mois.

Elle demande une nouvelle expertise en maintenant que les subventions et les aides exceptionnelles de solidarité nationale qu'elle a pu recevoir n'ont pas à être prises en compte dans le calcul de la perte d'exploitation puisqu'elles ne sont pas comptabilisées dans le chiffre d'affaires.

Elle justifie sa demande de provision en indiquant qu'elle correspond à 75% de la perte d'exploitation qu'a chiffrée son expert-conseil.

Elle soutient que la résistance de l'assureur justifie de le condamner à titre indemnitaire à lui verser un intérêt au taux légal depuis sa mise en demeure sur les sommes allouées.

L'ordonnance de clôture est en date du 3 octobre 2022.


MOTIFS DE LA DÉCISION :


* sur la recevabilité en cause d'appel de certaines demandes de la société Sona

Aux termes de l'article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement est différent.

Selon l'article 566, les parties peuvent aussi expliciter les prétentions qui étaient virtuellement contenues dans les demandes et défenses soumises au premier juge, et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.

Les demandes de la société Sona formulées pour la première fois en cause d'appel tendant à voir condamner les ACM Iard à lui verser 6.381,95 euros à titre d'indemnisation pour ses frais d'expert-technique et à bénéficier à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive des intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2021 sur les sommes qui lui seront allouées, ont le même fondement que ses demandes initiales, et poursuivent la même fin d'être indemnisée en vertu de la garantie souscrite, du préjudice résultant des mesures administratives de lutte contre la propagation du coronavirus prises en 2020 et en 2021.

Elles sont donc recevables.

La prétention de la société Sona à obtenir à titre provisionnel une somme de 95.729,22 euros à valoir sur l'indemnité d'assurance 'pertes d'exploitation' dont elle demande la fixation par voie d'expertise judiciaire est, pareillement, recevable, dès lors qu'une demande de provision peut être formée en tout état de cause ; que celle qu'elle formulait en première instance et dont elle a été déboutée par un chef de décision non visé dans sa déclaration d'appel n'était pas du même montant et portait sur une période partiellement différente; et que la nouvelle demande de provision est formée devant la cour après dépôt, et connaissance prise, du rapport d'expertise.

* sur la garantie invoquée par l'assurée

Les conditions générales de la police multirisque professionnelle 'Acajou Signature' souscrite auprès d'ACM Iard par la société Sona stipulent en leur paragraphe 17.1 au titre de la garantie 'pertes d'exploitation' :

'GARANTIE DE BASE

Nous garantissons les pertes pécuniaires que vous pouvez subir du fait de l'interruption ou de la réduction de votre activité résultant soit :

-d'un dommage matériel garanti

-d'une impossibilité ou d'une difficulté d'accès à vos locaux professionnels, et/ou d'une impossibilité ou d'une difficulté pour les exploiter consécutive à un événement accidentel ayant entraîné des dommages matériels survenant à moins de 500 mètres de vos locaux, dès lors que ceux-ci auraient été garantis par le présent contrat s'ils avaient atteint les biens assurés

-d'une mesure d'interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires, prises à la suite d'un événement extérieur à votre activité et aux locaux dans lesquels vous l'exercez

-d'une carence d'approvisionnement de vos fournisseurs...résultant de dommages matériels dans leurs locaux...'.

La SARL Sona revendique le bénéfice de la garantie perte d'exploitation au titre de la troisième circonstance, tirée d'une mesure d'interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires, prise à la suite d'un événement extérieur à l'activité de l'assuré et aux locaux dans lesquels il l'exerce.

Les arrêtés du 14 mars et du 23 mars 2020 et le décret du 29 octobre 2020 ont édicté que les restaurants, établissements qui relèvent de la catégorie 'N' au sens du règlement pris en application de l'article R.123-12 du code de la construction et de l'habitation, ne pouvaient plus accueillir du public (cf pièces de l'appelants n°13 article 1, n°14 article 8 et n°15 articles 37 et 40).

Le tribunal a retenu à bon droit qu'une telle interdiction d'accès instituée par une autorité, en l'occurrence administrative, prise à la suite d'un événement extérieur à l'activité de la société Sona et aux locaux dans lesquels elle l'exerçait -puisqu'il s'agit de la propagation d'un coronavirus- constituait l'une des quatre circonstances alternatives ouvrant droit à la mobilisation de la garantie financière 'pertes d'exploitation', dès lors qu'elle était en lien de causalité avec une interruption ou une réduction de l'activité de l'assurée de nature à lui faire subir des pertes pécuniaires.

La compagnie ACM Iard n'est pas fondée à arguer d'une dénaturation de la clause du contrat au motif que la notion même d'interdiction d'accès impliquerait nécessairement une interdiction absolue.

Une interdiction n'est absolue que pour ceux auxquels elle s'applique et non pas en soi, contrairement à ce que fait plaider l'appelante.

Ainsi, l'interdiction d'accès édictée pour les sites sensibles, classés, militaires ou autres, ne fait pas obstacle à ce qu'y accèdent les personnes qui y travaillent, de même que celles titulaires d'une autorisation ou habilitation d'y pénétrer pour venir ponctuellement ou temporairement y exécuter des prestations de services telles nettoyage, approvisionnements en alimentation ou en fluides, réparations, secours et autres.

Il appartenait à la société ACM Iard, seule rédactrice de la police d'assurance, qui est un contrat d'adhésion, d'y définir comme générale et absolue l'interdiction d'accès si elle entendait réellement conférer une telle portée à cette circonstance.

En l'absence de définition contractuelle, la notion d''interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires' est trop imprécise pour ne pas nécessiter une interprétation, par hypothèse alors insusceptible de dénaturation.

Et il est gratuit, pour l'appelante, de présenter comme la commune intention des parties au contrat d'assurance ce qui n'est que l'interprétation qu'elle en fait pour les besoins de sa cause.

Elle n'est pas davantage fondée à soutenir que les mesures gouvernementales de lutte contre la propagation du coronavirus auraient empêché l'exercice de l'activité de l'assurée mais pas l'accès à ses locaux.

L'activité de la société Sona qu'elle a déclarée au registre du commerce et des sociétés (cf pièce n°2 de l'appelante) et qu'elle pratiquait effectivement, est la restauration traditionnelle.

Un restaurant traditionnel est un établissement où l'on peut se restaurer, c'est-à-dire prendre des repas, moyennant paiement.

L'interdiction faite à la population pendant le confinement de sortir dans l'espace public sauf pour des motifs limitativement énumérés, au nombre desquels ne figurait pas celui de se restaurer en salle, avait pour effet d'interdire l'accès au restaurant exploité par la société Sona à la clientèle ou chalandise.

Ce constat n'est pas affecté par la circonstance que l'accès aux locaux dans lesquels est exploité le restaurant 'Les Reflets' restait possible, et autorisé, pour ceux qui y travaillaient et pour le dirigeant, dès lors qu'ils s'y rendaient alors au titre de la dérogation à l'interdiction tirée de l'exercice d'une activité professionnelle, ce qui est sans incidence au regard de l'objet de la garantie qui est la perte d'exploitation subie par le commerce, laquelle est caractérisée si l'activité commerciale de restauration est impossible, ce qui était le cas quand bien même le personnel et la direction de l'établissement seraient présents sur place, puisqu'il n'était pas possible d'y servir des repas.

Ce constat n'est pas davantage affecté par le fait que la société Sona, dans le but d'atténuer ses pertes d'exploitation, a résolu pendant la période où sa clientèle ne pouvait accéder à son établissement, de pratiquer -au demeurant ponctuellement, ainsi qu'il ressort des productions et des explications des parties- l'activité de vente à emporter, différente de celle de 'restauration traditionnelle' dans laquelle consistait son activité déclarée au registre du commerce et à l'assureur, et seule pratiquée avant la crise sanitaire, étant ajouté qu'ainsi qu'il ressort de ses propres explications et productions (cf sa pièce n°16, constituée de la circulaire juridique n°25-20 du 10 avril 20202 de l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie relative à la vente à emporter et aux livraisons) la vente à emporter consistait pour les commerces autorisés à la pratiquer, à préparer des repas et à les déposer dans un sac sur une table où livreur ou client, après avoir attendu à l'extérieur, venait l'y retirer pour l'emporter aussitôt, ce dont la compagnie ACM Iard ne peut pas déduire que la clientèle du restaurant traditionnel exploité par son assurée pouvait toujours y accéder.

Ainsi, les conditions de mobilisation de la garantie perte d'exploitation sont vérifiées.

Enfin, la compagnie ACM Iard n'explicite pas la portée qu'elle prête à son objection faite, au visa du principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques, qu'elle subirait une sujétion anormale si elle devait couvrir en quoi que ce soit les conséquences du covid-19 pour ses assurés, étant relevé qu'elle est le rédacteur de la police litigieuse, qu'elle apprécie la sinistralité des risques qu'elle offre de garantir, et qu'elle a encaissé les primes.

* sur l'exclusion invoquée par l'assureur

La compagnie ACM Iard oppose à son assurée la clause d'exclusion stipulée au chapitre 29 'EXCLUSIONS GÉNÉRALES' des conditions générales, selon laquelle

'Sont toujours exclus :

1. ....

...

8.les dommages causés par les insectes, rongeurs, champignons, moisissures et autres parasites, ainsi que par les micro-organismes'.

La société Sona demande que l'application de cette clause d'exclusion de garantie soit écartée aux motifs qu'elle n'apparaît pas en caractères très apparents et qu'elle nécessite d'être interprétée, ce qui implique qu'elle n'est pas formelle et limitée.

S'agissant de l'exigence posée à l'article L.112-4 du code des assurances que les clauses de la police édictant des exclusions soient mentionnées en caractères très apparents, la clause d'exclusion invoquée par ACM Iard y satisfait, dès lors que la clause est détachée des autres paragraphes, qu'elle est rédigée en caractères gras très lisibles, et dans une rubrique titrée en caractères majuscules d'une autre couleur 'EXCLUSIONS GÉNÉRALES' elle-même surmontée d'un bandeau coloré énonçant en très gros caractères 'Ce qui n'est jamais garanti', et la société Sona n'est pas fondée à soutenir, par voie d'appel incident contre le chef de décision qui en a jugé ainsi, que la police ferait un usage si intense des caractères gras que l'exclusion libellée en de tels caractères n'attirerait pas particulièrement l'attention du souscripteur, alors qu'elle ressort nettement des autres clauses et qu'elle est très apparente.

La SARL Sona n'est pas davantage fondée à objecter que la clause d'exclusion n'est pas localisée dans le chapitre traitant des garanties financières pertes d'exploitation de l'article 17-4, alors qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne l'imposait, et que la présence très apparente, dans le contrat, d'une page dédiée à 'ce qui n'est jamais garanti' indiquant les dommages qui sont 'toujours exclus' constitue une mise en exergue efficace de l'exclusion.

S'agissant du caractère formel et limité, l'article L.113-1, alinéa 1er, du code des assurances, dispose que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Il résulte de ce texte légal qu'une clause d'exclusion de garantie n'est pas formelle lorsqu'elle ne se réfère pas à des critères précis, et nécessite une interprétation (cf Cass. Civ. 1° 22.05.2001 P n°99-10849 ou 2° 01.12.2022 P n°21-19341).

Elle doit, en effet, permettre à l'assuré de comprendre sans recherche ni analyse particulières ce qu'est l'événement dont la survenance le prive d'une garantie qui était acquise par principe.

Or la SARL Sona est fondée à contester le caractère formel et limité de la clause d'exclusion au regard de la nécessité d'interpréter le terme de 'micro-organismes'.

Le contrat ne définit pas ce terme.

Il ne précise pas non plus ce que recouvre celui d''organisme' auquel il se réfère.

La documentation scientifique produite permet de tenir pour constant que les virus sont des micro-organismes, mais aussi de constater qu'à côté du virus, qui est un agent infectieux, le terme 'micro-organismes' recouvre toutes sortes d'organismes allant des champignons aux parasites en passant par les bactéries qui ne sont pas tous pathogènes ou susceptibles de le devenir.

La présence du terme 'micro-organisme' dans une clause relative à des 'dommages' et à la fin d'une liste énumérant ceux susceptibles de les avoir causés qui comprend 'les insectes, rongeurs, champignons, moisissures et autres parasites', ne contribue certainement pas à permettre à l'assuré profane de comprendre aisément la signification et la portée de cette dernière cause d'exclusion, surtout si comme le fait valoir l'intimée, l'on considère que contrairement à un dommage causé par un insecte, un rongeur ou une moisissure, qui aura la nature d'un dommage matériel dont résulte un dommage pécuniaire par perte d'exploitation, un virus -et un coronavirus- n'engendre pas quant à lui un dommage direct et n'est en lien de causalité avec une perte financière que par les mesures restrictives susceptibles d'être prises par les autorités pour lutter contre sa propagation, d'autant que le contrat d'assurance distingue ailleurs formellement les dommages immatériels consécutifs à des dommages matériels de ceux qui ne le sont pas.

La circonstance particulière de réalisation du risque privant l'assuré du bénéfice de la garantie visée dans la clause d'exclusion, tenant à l'existence de dommages causés par les micro-organismes, est ainsi tirée de notions qui ne sont pas définies avec une précision suffisante pour que l'assuré puisse connaître exactement l'étendue de la garantie dont il bénéficie.

C'est donc à bon droit que le tribunal a jugé réputée non écrite la clause d'exclusion, et qu'il l'a dite en conséquence inopposable à la SARL Sona.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu'il a dit que l'assureur devait indemniser la société Sona au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies.

* sur le préjudice indemnisable

Il est vain, pour la société ACM Iard, de continuer à soutenir subsidiairement que son assurée n'aurait pas justifié d'une perte d'exploitation, alors que la société Sona a démontré -et qu'il est constant- que le restaurant traditionnel qu'elle exploite [Adresse 5] est demeuré fermé durant la période où les arrêtés du 14 mars et du 23 mars 2020 puis le décret du 29 octobre 2020 interdisaient aux restaurants d'accueillir du public, ce qui implique nécessairement une absence, ou à tout le moins une diminution, de chiffre d'affaires.

La demanderesse produit au demeurant (sa pièce n°11) une attestation de son expert-comptable certifiant la réalité de sa perte d'exploitation, et un rapport d'expertise unilatérale retenant, de même, l'existence d'un tel préjudice (ses pièces n°31 et 32) .

Elle rapporte ainsi suffisamment la preuve du principe de son préjudice, étant ajouté que s'agissant d'un sinistre, elle n'a pas à établir précisément l'étendue de son dommage

Le tribunal a pertinemment ordonné une expertise confiée à un expert-comptable, et la mission dévolue au technicien est adaptée, étant observé qu'elle permet à la société ACM Iard de faire valoir son argumentation sur la nature du préjudice indemnisable et sur son mode d'évaluation, et le jugement sera également confirmé de ce chef.

C'est à bon droit que les premiers juges ont prescrit au technicien d'évaluer le montant des dommages en application des clauses du contrat d'assurance en prenant en compte toutes les aides financières ou exonérations dont a bénéficié l'assurée au cours des périodes garanties, et l'objection mise en avant par la société Sona que ces aides ou subventions, ou certaines d'entre elles, n'auraient pas à être prises en compte dans le calcul de la perte d'exploitation parce qu'elles ne sont pas comptabilisées dans le chiffre d'affaires ne repose sur aucune stipulation de la police d'assurance, qui ne pose pas ce critère pour apprécier la perte d'exploitation éligible à la garantie.

C'est aussi à bon droit que les juges consulaires ont retenu que la perte d'exploitation indemnisable était celle subie sur les périodes du 17 mars 2020 au 2 juin 2020 et du 29 octobre 2020 au 28 janvier 2021 puisqu'aux termes de l'article 17.1 des conditions générales, la période d'indemnisation prise en compte pour le calcul de l'indemnité est 'la période qui commence le jour du sinistre et pendant laquelle les résultats de vos activités sont affectés par celui-ci', et que le sinistre au sens du contrat est constitué par la mesure d'interdiction d'accès émanant des autorités administratives ou judiciaires,de sorte que la période à considérer est celle d'application de ces mesures, et non celle de l'éventuelle prolongation différée de leurs effets préjudiciables.

Au vu de l'incertitude subsistant sur le préjudice indemnisable, il n'y a pas davantage lieu à allocation d'une provision en cause d'appel qu'en première instance.

Il en va aussi ainsi pour la demande au titre des frais d'expertise-conseil, dont l'article 13.1 des conditions générales stipule qu'ils ne sont pris en charge par l'assureur que lorsque celui-ci a préalablement mandaté son propre expert, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, de sorte que ce chef de créance n'est pas suffisamment certain pour justifier l'allocation d'une provision.

Le jugement déféré est ainsi confirmé en toutes ses dispositions.

* sur les dépens et l'indemnité de procédure

La société ACM Iard succombe en son appel principal et en supportera donc les dépens.

Elle versera à son assurée une indemnité de procédure en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande de l'intimée en bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile ne peut être accueillie en tant qu'elle n'est pas formulée au profit de son avocat postulant.

PAR CES MOTIFS



la cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:

REJETTE la prétention de la société ACM Iard à voir déclarer irrecevables les demandes de la société Sona tendant à obtenir sa condamnation à lui verser :

.95.729,22 euros à titre provisionnel

.6.381,95 euros à titre d'indemnisation de ses frais d'expert-technique

.à titre de dommages et intérêts des intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2021

CONFIRME le jugement déféré

ajoutant :

DIT n'y avoir lieu à allocation d'une provision en cause d'appel

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres ou contraires

CONDAMNE la société des ACM Iard aux dépens d'appel

LA CONDAMNE à verser une indemnité de 4.000 euros à la SARL Sona en application de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE la demande formulée par la société Sona sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,