Chronologie de l'affaire
Tribunal judiciaire de Dunkerque 31 mars 2020
Cour d'appel de Douai 08 septembre 2022

Cour d'appel de Douai, CHAMBRE 8 SECTION 3, 8 septembre 2022, 22/00767

Mots clés Demande tendant à la suspension de la procédure de saisie immobilière, l'annulation ou la péremption ou tendant à la vente amiable · surendettement · vente · saisie · crédit · logement · SCI

Synthèse

Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro affaire : 22/00767
Dispositif : Irrecevabilité
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Dunkerque, 31 mars 2020

Chronologie de l'affaire

Tribunal judiciaire de Dunkerque 31 mars 2020
Cour d'appel de Douai 08 septembre 2022

Texte

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 08/09/2022

N° de MINUTE : 22/715

N° RG 22/00767 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UDON

Jugement (N° 21/00012) rendu le 21 janvier 2022 par le juge de l'exécution de Dunkerque

APPELANTS

Monsieur [G] [F]

né le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 7] - de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [S] [V]

née le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 6] - de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentés par Me Guillaume Guilluy, avocat au barreau de Dunkerque

INTIMÉES

Sa Crédit Logement Sa au capital de 1259850270 €, immatriculée au rcs de Paris

sous le numéro b302 493 275 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Sci Webuild 01 Sci immatriculée au rcs de Lille Métropole sous le numéro 909 181 638, représentée par son gérant Monsieur [N] [X]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentées par Me Yann Leupe, avocat au barreau de Dunkerque

DÉBATS à l'audience publique du 30 juin 2022 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre

Véronique Dellelis, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 08 septembre 2022 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 28 juin 2022

EXPOSE DU LITIGE

Par offre du 15 juillet 2015 acceptée le 28 juillet 2015, le Crédit du Nord a consenti à M. [G] [F] et à Mme [S] [V] un prêt immobilier d'un montant de 180 300 euros remboursable en 240 mensualités au taux d'intérêt annuel fixe de 2,40 %, en vue de financer l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation situé [Adresse 2].

En garantie de ce prêt, le Crédit Logement s'est porté caution solidaire des emprunteurs.

A la suite de la défaillance de M. [G] [F] et de Mme [S] [V], le Crédit Logement a versé diverses sommes au Crédit du Nord.

Le 6 novembre 2019, la commission de surendettement des particuliers du Nord a arrêté un plan conventionnel de redressement, visant notamment le remboursement de la dette de 165 980,54 euros de M. [G] [F] et de Mme [S] [V] à l'égard du Crédit Logement en 172 mensualités de 1 141,44 euros au taux de 2,40 %.

Par jugement du 31 mars 2020, le tribunal judiciaire de Dunkerque a condamné solidairement M. [G] [F] et Mme [S] [V] à payer au Crédit Logement la somme de 165 742,90 euros, avec intérêts au taux légal, outre la somme de 249,36 euros au titre des intérêts échus, et ce avec capitalisation des intérêts.

Par acte en date du 19 mars 2021, le Crédit Logement, agissant en vertu du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Dunkerque le 31 mars 2020, a fait signifier à M. [G] [F] et à Mme [S] [V] un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur l'immeuble ci-dessus désigné.

Ce commandement a été publié à la conservation des hypothèques de Dunkerque sous les références volume 2021 S n°13 le 17 juin 2021.

Par acte en date du 12 juillet 2021, le Crédit Logement a fait assigner M. [G] [F] et Mme [S] [V] devant le tribunal judiciaire de Dunkerque à l'audience d'orientation.

Par jugement réputé contradictoire du 1er octobre 2021, le juge de l'exécution a :

- constaté que les conditions prévues par les articles L.311-2, L.311-4 et L.311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies ;

- retenu la créance de la SA Crédit Logement pour la somme totale de 171 233,24 euros arrêtée au 13 janvier 2021, outre les intérêts à compter de cette date ;

- autorisé le créancier saisissant, la SA Crédit Logement à poursuivre la vente aux enchères publiques de l'immeuble saisi ;

- ordonné la vente aux enchères de l'immeuble saisi sur la mise à prix de 60 000

euros ;

- dit que l'adjudication aura lieu conformément aux modalités prévues par le cahier des conditions de la vente à l'audience du 21 janvier 2022 à 9 heures 30;

- renvoyé l'affaire à cette date sans nouvelle convocation.

Ce jugement a été signifié à M. [G] [F] et à Mme [S] [V] le 13 octobre 2021, et est devenu définitif faute d'appel.

Par jugement du 21 janvier 2022, le juge de l'exécution a :

- adjugé l'immeuble saisi, moyennant le prix principal de 145 000 euros, outre les charges et frais de vente taxés à la somme de 5 114,85 euros, à Maître Yann Leupe, avocat au barreau de Dunkerque, qui a déclaré pour adjudicataire, la SCI Webuild 01 ;

- rappelé qu'en application de l'article L.322-13 du code des procédures civiles d'exécution, le jugement d'adjudication constitue un titre d'expulsion à l'encontre du débiteur saisi et de tout occupant de son chef n'ayant aucun droit opposable à l'adjudicataire.

Par déclaration d'appel adressée par la voie électronique le 15 février 2022, M. [G] [F] et Mme [S] [V] ont relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- rejeté leur demande de suspension de la procédure de saisie immobilière du fait de la procédure de surendettement en cours et de report de l'audience d'adjudication ;

- rejeté leur demande d'annulation de la vente aux enchères du bien saisi fixée le 21 janvier 2022;

- rejeté leur demande de condamnation de la société Crédit Logement à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

- adjugé l'immeuble situé [Adresse 2] moyennant le prix principal de 145 000 euros outre les charges et frais de vente taxés à la somme de 5 114,85 euros à Maître [O] [Z] qui a déclaré pour adjudicataire la SCI Webuild 01.

Aux termes de leurs conclusions du 10 mars 2022, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré dans les termes de leur acte d'appel et en conséquence de :

- constater l'existence d'une procédure de surendettement à leur bénéfice ;

- suspendre la procédure de saisie immobilière durant l'exécution du plan de surendettement ;

- annuler la vente aux enchères publiques du bien saisi le 21 janvier 2022 et l'adjudication de l'immeuble situé [Adresse 2] à la SCI Webuild 01 ;

- condamner la société Crédit Logement à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Crédit Logement aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ils soutiennent que leur appel est recevable au regard des dispositions de l'article R. 322-60 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution, la demande de suspension de la procédure de la procédure de saisie qu'ils avaient formulée devant le premier juge s'analysant en une contestation au sens des dispositions de ce texte.

Ils font valoir sur le fondement de l'article L. 722-2 du code de la consommation, que la décision de recevabilité de la procédure de surendettement est antérieure au jugement d'orientation et que la suspension de la procédure de saisie immobilière était donc automatique par l'effet de la loi, même lorsque l'existence de la procédure de surendettement est révélée postérieurement au jugement d'orientation, de sorte que la vente aux enchères ne pouvait avoir lieu le 21 janvier 2022. Ils ajoutent que le Crédit Logement était parfaitement informé de l'existence du plan de surendettement établi par la commission puisqu'il l'a approuvé et qu'il a volontairement occulté l'existence de la procédure de surendettement pour tenter de faire vendre le bien. Ils précisent qu'ils n'ont pas comparu à l'audience d'orientation, 'se pensant protégés par la procédure de surendettement en cours.'

Aux termes de leurs conclusions du 19 avril 2022, le Crédit Logement et la société Webuild 01 demandent à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner les époux [F] à payer à chacun d'eux la somme de

2 000 euros, outre les dépens d'appel.

Sur la suspension de la procédure, ils soutiennent que :

- en application de l'article R.322-28 du code des procédures civiles d'exécution, la vente forcée n'aurait pu reportée qu'à la demande de la commission de surendettement, ce que cette dernière n'aurait pas manqué de faire si le plan de surendettement était toujours d'actualité ;

- les époux [F] ne sont pas fondés à solliciter ce qu'ils appellent une 'suspension' et qui est en réalité un report de l'audience d'adjudication.

Sur la nullité du jugement d'adjudication, ils font valoir que :

- le jugement d'orientation a purgé les vices de la procédure, sauf démonstration d'une fraude du créancier et ainsi les débiteurs ne sont plus recevables, en application de l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, à formuler après l'audience d'orientation de nouveaux moyens de fait ou de droit, tendant à contester les poursuites, sauf s'ils portent sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci ;

- le jugement d'orientation, valablement signifié aux débiteurs, qui n'a pas fait l'objet d'un appel a autorité de la chose jugée et prive les époux [F] de la possibilité de contester l'adjudication, en raison de l'existence préalable d'une procédure de surendettement ;

- en tout état de cause, l'infraction au droit du surendettement n'est pas démontrée et la fraude est inexistante : en effet, le plan conventionnel de règlement n'ayant pas été respecté par les appelants, le Crédit Logement a, en application de l'article R. 732-2 du code de la consommation, mis les débiteurs eu demeure de régulariser la situation, ce qu'ils n'ont jamais fait de sorte que cela a entraîné la caducité du plan de surendettement.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 28 juin 2022. Le même jour, postérieurement à la clôture, M. [F] et Mme [V] ont transmis de nouvelles conclusions.


MOTIFS

Les conclusions adressées par M. [F] et Mme [V] le 28 juin 2022 postérieurement à l'ordonnance de clôture du même jour, seront déclarées irrecevables en application de l'article 802 alinéa 1er du code de procédure civile.

Sur la recevabilité de l'appel :

Selon l'article R. 322-60 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution, seul le jugement d'adjudication qui statue sur une contestation est susceptible d'appel de ce chef dans les quinze jours de sa notification.

En l'espèce, il en résulte que l'appel est irrecevable en ce qu'il porte sur le chef du jugement du 21 janvier 2022 qui a adjugé l'immeuble saisi et tend en conséquence à voir annuler l'adjudication, mais recevable en ce qu'il porte sur la demande de suspension de la procédure de saisie immobilière et la demande en découlant d'annulation de la vente aux enchères publiques du bien saisi fixée le 21 janvier 2022. En effet, ces dernières demandes saisissaient bien le juge de l'exécution d'une contestation, même s'il a omis de statuer sur ces prétentions dans le dispositif de son jugement.

Sur les demandes de suspension de la procédure de saisie et d'annulation de la vente forcée fixée le 21 janvier 2022 :

En application de l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, les contestations et demandes incidentes soulevées après l'audience d'orientation ne sont recevables que si elles portent sur des actes de la procédure de saisie immobilière postérieurs à cette audience ou si, nées de circonstances postérieures à celle-ci, elles sont de nature à interdire la poursuite de la saisie.

Selon l'article L. 722-2 du code de la consommation, la recevabilité de la demande de surendettement emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur.

L'article L. 722-3 du même code précise que ces procédures sont suspendues et interdites notamment jusqu'à l'approbation du plan conventionnel de redressement.

En l'espèce, la suspension de la procédure de saisie immobilière n'était plus de droit, en application de l'article L. 722-2, lors de l'audience d'orientation du 3 septembre 2021 puisque, conformément à l'article L. 722-3, elle avait pris fin le 6 novembre 2019, date du plan conventionnel de redressement, soit près de deux ans avant l'audience d'orientation.

M. [F] et Mme [V] auraient dû porter à la connaissance du juge de l'exécution à l'audience d'orientation le plan conventionnel du 6 novembre 2019 aux fins de contester l'exigibilité de la créance du Crédit Logement. Or, ils ne s'en sont pas prévalu à cette audience à laquelle ils n'ont pas comparu et ils n'ont pas davantage fait appel du jugement d'orientation du 1er octobre 2021 de sorte que leur demande de suspension formée devant le juge d'exécution lors de l'audience d'adjudication, et sur laquelle ce dernier a omis de statuer dans le dispositif du jugement déféré, est dès lors irrecevable en application de l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, de même que la demande subséquente tendant à voir annuler la vente aux enchères publiques du bien saisi le 21 janvier 2022

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Parties perdantes, M. [F] et Mme [V] seront condamnés aux dépens d'appel et déboutés de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de laisser à la charge du Crédit Logement et la SCI Webuild 01 les frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'exposer devant la cour.

PAR CES MOTIFS



Déclare irrecevables les conclusions de M. [G] [F] et de Mme [S] [V] du 28 juin 2022 ;

Déclare l'appel de M. [G] [F] et de Mme [S] [V] irrecevable en ce qu'il porte sur le chef du jugement du 21 janvier 2022 ayant adjugé l'immeuble saisi à la SCI Webuild 01 et recevable sur le surplus ;

Statuant sur les demandes omises par le jugement du 21 janvier 2022,

Déclare la demande de suspension de la procédure de saisie immobilière formée par M. [G] [F] et Mme [S] [V] et la demande subséquente tendant à voir annuler la vente aux enchères publiques du bien saisi le 21 janvier 2022 irrecevables ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [F] et Mme [S] [V] aux dépens d'appel.

Le greffier,Le président,

I. CapiezS. Collière